Guerre belgo-néerlandaise
Date |
– (3 ans, 2 mois et 24 jours) |
---|---|
Lieu | Belgique |
Casus belli | Révolution belge |
Issue | Victoire et indépendance belge |
Belgique Royaume de France |
Royaume uni des Pays-Bas |
Léopold Ier | Guillaume Ier |
Batailles
Campagne des Dix-Jours
Bataille de Louvain (1831)
Siège de la citadelle d'Anvers (1832)
La guerre belgo-néerlandaise est un conflit qui opposa la jeune Belgique au royaume uni des Pays-Bas entre 1831 à 1833, à la suite de la révolution belge qui mena à la déclaration d'indépendance du pays le .
Elle débute par les émeutes du à Bruxelles à la suite de la représentation de la pièce de théâtre La Muette de Portici au théâtre de la Monnaie. Malgré un armistice imposé par les grandes puissances européennes de la conférence de Londres le , les combats reprennent le lors de la tentative du roi des Pays-Bas, Guillaume Ier, de reconquérir ses territoires lors de l'épisode de la campagne des Dix-Jours. Elle se conclut par la signature de la convention de Zonhoven le qui met fin aux affrontements officiels[1].
Contexte
[modifier | modifier le code]Naissance du royaume uni des Pays-Bas
[modifier | modifier le code]Après la révolution française de 1789, les troupes révolutionnaires de la Première République envahissent, entre autres, le Benelux actuel (composé grosso modo des Pays-Bas autrichiens, de la principauté de Liège et des Provinces-Unies). Les territoires sont intégrés à ce qui devient rapidement le Premier Empire français sous Napoléon Bonaparte qui y créé des départements, notamment les neuf départements réunis qui forment les territoires de la Belgique, du Luxembourg et des Pays-Bas.
Toutefois, après de la défaite française lors de la bataille de Waterloo le , l'Empire est démembré et les puissances européennes victorieuses (Royaume-Uni et Prusse en tête) décident de créer un nouvel État sur les anciens territoires conquis par la France. Celui-ci devra être assez puissant pour contrer les éventuelles nouvelles ambitions françaises sans toutefois dépasser la puissance des états vainqueurs. Ils choisissent donc de regrouper les anciens différents territoires sous une monarchie dont le souverain sera Guillaume Ier de la maison d'Orange-Nassau.
Le , le congrès de Vienne ratifie la création du royaume uni des Pays-Bas.
Révolution et indépendance belge
[modifier | modifier le code]Cependant, le mariage entre belges, luxembourgeois et néerlandais ne se passa pas comme prévu. Les deux premiers, majoritairement catholiques, se sentirent opprimés par les « hollandais » majoritairement protestants, notamment sur le plan politique, alors qu'ils représentaient la majorité de la population. De nombreuses discordes virent le jour, révélant de profondes disparités entre les deux peuples.
Le contexte révolutionnaire est également présent à l'étranger : la Grèce vient de se révolter contre l'Empire ottoman et d'obtenir son indépendance le . Plus proche, en France les 27, 28 et 29 eurent lieu les « Trois Glorieuses », révolution qui remet au pouvoir Louis-Philippe Ier dans ce qui sera appelé la monarchie de Juillet.
En Belgique, l'étincelle qui mit le feu aux poudres eut lieu le à Bruxelles, lors de la représentation de la pièce de théâtre la Muette de Portici de Daniel-François-Esprit Auber au théâtre de la Monnaie, le jour du cinquante-neuvième anniversaire du roi Guillaume Ier. En effet, cette pièce met en scène plusieurs protagonistes lors de la révolte de la république de Naples contre le joug espagnol en 1647. La petite république gagna son indépendance face au grand royaume. Il n'en fallut pas plus pour attiser la foule et les premières émeutes dans la capitale, puis bientôt dans d'autres villes belges.
Après les premiers combats et le début de la guerre, l'indépendance de la Belgique est proclamée le par le gouvernement provisoire. Après un premier plan de partage rejeté, l'indépendance du nouveau pays est reconnue par la conférence de Londres le 20 décembre de la même année.
Chronologie
[modifier | modifier le code]1830
[modifier | modifier le code]- : début de la révolution belge avec les premières émeutes à la suite de la représentation de la pièce de théâtre la Muette de Portici au théâtre de la Monnaie à Bruxelles.
- Le les volontaires liégeois menés par Charles Rogier arrivent à Bruxelles et s'emparent des armes entreposées dans l'hôtel de ville[2].
- : des combats éclatent dans les rues de Bruxelles, ce sont les « Journées de septembre », qui font 1 300 blessés et 500 morts et s'arrêtent le 27 septembre lorsque les troupes néerlandaises quittent la ville.
- Le , 78 volontaires quittent Couvin et s'unissent avec d'autres troupes venues de Binche, Fontaine-l'Évêque et de Gosselies pour attaquer les troupes néerlandaises à Vilvorde le 26. Ils les poursuivent jusqu'à Eppegem[3].
- : les militaires de la garnison d'Arlon, alors située dans le grand-duché de Luxembourg et de langue germanique, quittent la ville en direction de Neufchâteau où la troupe se débande tandis que les officiers sont arrêtés par les bourgeois.
- : un corps franc luxembourgeois est constitué[4].
- : proclamation unilatérale de l'indépendance de la Belgique par le Gouvernement provisoire de Belgique.
- : capitulation de la citadelle de Liège[5] et création du 11e régiment de ligne sur base de l'ancien régiment néerlandais du même nom.
- :
- Déclaration d'annexion du grand-duché de Luxembourg par le gouvernement provisoire[6], alors que ce territoire est une possession privée de la Maison d'Orange-Nassau et de Guillaume Ier, le roi des Pays-Bas.
- création du 1er régiment d'infanterie de l'armée belge.
- : arrêté royal de Guillaume Ier suspendant son autorité législative et exécutive en Belgique ainsi que la représentation des provinces belges aux États généraux du royaume des Pays-Bas.
- : la prise de Malines s’achève par la prise du pont de Walem, sur la Nèthe[7]
- : les troupes de volontaires belges entrent dans Anvers pour déloger les néerlandais de la citadelle d'Anvers.
- : le général néerlandais David Chassé fait bombarder la ville d'Anvers sur ordre du duc de Weimar.
- : la conférence de Londres (qui regroupe l'Autriche, la France, la Prusse, le Royaume-Uni, la Russie et les Pays-Bas) se saisit du problème belge et impose le jour même un armistice aux deux belligérants.
- : création du Congrès national dans le but de doter la Belgique d'une Constitution.
- : Siège de Venlo (1830) (nl) au nord de la province de Limbourg, lors duquel Nicolas Joseph Daine s'empare de la forteresse éponyme.
- : décret constitutionnel garantissant l'indépendance nationale.
- : l’indépendance de la Belgique est reconnue par la conférence de Londres.
1831
[modifier | modifier le code]- : la conférence proclame la neutralité et l’inviolabilité perpétuelle de la Belgique.
- : une canonnière de la marine royale néerlandaise s'échoue sur l'Escaut, près d'Anvers et est attaquée par le corps franc De Gorter. Pour éviter la prise, le capitaine du vaisseau, Jan van Speijk (nl), le sabote en le faisant exploser, causant la mort de 28 des 31 membres d'équipage ainsi que de plusieurs révolutionnaires belges. Jan Van Speijk devient ainsi l'un des héros néerlandais de la révolution belge, décoré comme chevalier de quatrième classe de l'Ordre militaire de Guillaume.
- : le Congrès national adopte la Constitution de la Belgique.
- : signature du traité des XVIII articles, qui n'entrera jamais en fonction mais qui délimite les frontières de la Belgique.
- : prestation de serment de Léopold Ier, premier roi des Belges.
- : début de la campagne des Dix-Jours, l'invasion de la Belgique par l'armée néerlandaise, défaite avec l'aide de l'armée française.
- : les troupes néerlandaises quittent Louvain après leur défaite.
- : les dernières troupes néerlandaises quittent la Belgique à l'exception de quelques forteresses où elles laissent des garnisons, notamment à Anvers, Maastricht ou Luxembourg.
- : la Conférence adopte un protocole sur le partage de la dette ainsi qu'un projet de traité définitif en 24 articles. Celui-ci est accepté par la Belgique, mais refusé par les Pays-Bas.
- , signature du traité des XXVII articles qui reprend les 24 articles du 6 octobre plus trois autres, notamment pour préciser que l'exécution des dispositions du traité est placée sous la garantie des cinq puissances[8]. Le gouvernement néerlandais proteste par une note du 14 décembre.
1832
[modifier | modifier le code]- : remise officielle par le roi Léopold Ier des Drapeaux d'Honneur de 1830 à 99 communes pour leur participation à la Révolution belge.
- : début du siège d'Anvers lorsque l'armée française du Nord commandée par le maréchal Gérard assiège la citadelle d'Anvers où sont encore stationnées des troupes néerlandaises.
1833
[modifier | modifier le code]- : Nouvelle convention de Londres qui rétablit les pourparlers entre les deux belligérants et lors de laquelle Belgique et les Pays-Bas s'engagent par convention à prolonger indéfiniment l'armistice, à respecter le statu quo et à garantir la libre navigation sur les fleuves.
- : Début des négociations de paix entre les deux pays à Zonhoven.
- : Signature de la convention de Zonhoven qui met officiellement fin à la guerre par la reconnaissance du royaume uni des Pays-Bas de la déclaration d'indépendance de la Belgique. Les forteresses de Maastricht et de Luxembourg restent toutefois occupées par des garnisons néerlandaises.
Après 1834
[modifier | modifier le code]- : Déclaration officielle du roi Guillaume Ier disant qu'il accepte les termes du traité des XXVII articles.
- : signature du traité des XXIV articles actant de jure la reconnaissance de l'existence de la Belgique par les Pays-Bas. Basé sur le traité de 1831, il en est toutefois modifié, entre autres concernant la formation territoriale de la Belgique, qui doit rendre une partie du Grand-duché de Luxembourg à la maison d'Orange-Nassau et du Limbourg à la confédération germanique.
- : le traité de Maastricht établit officiellement la frontière entre la Belgique et les Pays-Bas.
Conséquences
[modifier | modifier le code]Militaires
[modifier | modifier le code]Plusieurs places fortes stratégiques restèrent aux mains des néerlandais qui y maintinrent une garnison. Parmi elles, la citadelle d'Anvers, la forteresse de Luxembourg et la forteresse de Maastricht[9]. Alors qu'Anvers fut reprise en 1832 grâce à l'intervention de l'armée française, Maastricht resta un bastion néerlandais isolé (puisque le Limbourg était alors entièrement belge jusqu'à la signature du traité des XXIV articles, le ), entraînant de fréquentes incursions des soldats en territoire belge et de vives discussions lors des négociations de la convention de Zonhoven qui mit fin à la guerre. Luxembourg, quant à elle, devint membre de la Confédération germanique et la forteresse de la ville devint alors une « forteresse fédérale ». À cet effet, le roi des Pays-Bas (qui était également nommé grand-duc du Luxembourg) et la Prusse en partageaient l'administration. Alors que le roi Grand-duc restait pleinement souverain, la Prusse avait le droit de nommer le gouverneur de la forteresse et la garnison était composée d'un quart de soldats néerlandais et de trois quarts de soldats prussiens.
Mesures
[modifier | modifier le code]- La circulation fluviale sur l'Escaut et la Meuse fut coupée entre les deux pays jusqu'à la convention de Londres du et la convention de Zonhoven du 18 novembre de la même année.
- Le gouvernement de La Haye interdit toute entrée aux Pays-Bas depuis la Belgique via les routes menant à Breda et Berg-op-Zoom, dans la province limitrophe du Brabant-Septentrional[10].
- Après la campagne des Dix-Jours la Belgique interdit de sonner les cloches dans les paroisses frontalières, par crainte que cela ne soit perçu comme une nouvelle invasion néerlandaise.
- En février 1833, une disposition du gouvernement de La Haye interdit toute importation de produits belges aux Pays-Bas.
Territoriales
[modifier | modifier le code]La frontière entre les deux nouveaux pays évolua via deux traités :
- Le traité des XVIII articles , accordant à la Belgique l'actuel grand-duché de Luxembourg et l'actuel Limbourg néerlandais.
- Le traité des XXIV articles , rétrocède le Limbourg néerlandais aux Pays-Bas et créée une union personnelle entre Guillaume Ier et les territoires de langue germanique du sud-est, soit l'actuel Luxembourg, à l'exception notable du pays d'Arlon, région de langue traditionnelle luxembourgeoise mais qui fut gardé par la Belgique. La province belge de Limbourg et la province belge de Luxembourg sont alors redessinées.
Le Grand-Duché de Luxembourg
[modifier | modifier le code]Après avoir été annexé à la Belgique dès le , le Grand-duché de Luxembourg fut scindé en deux lors du traité des XXIV articles, signé le et sa partie orientale, de langues germaniques, fut rendue au grand-duc de Luxembourg, Guillaume Ier (également roi des Pays-Bas). Sa partie occidentale, de langues romanes, appelée le « quartier wallon » fut conservée par la Belgique et forme, depuis lors, la province de Luxembourg.
Scission du Limbourg
[modifier | modifier le code]Autrefois province du royaume uni des Pays-Bas, la province de Limbourg, traversée par la Meuse, fut initialement belge de la révolution de 1830 jusqu'au Traité des XXIV articles de 1839 qui contraint le jeune royaume à rendre le grand-duché de Luxembourg ainsi qu'une partie du Limbourg.
La province belge du Limbourg, telle qu'elle existe aujourd’hui fut donc créée sur le territoire occidental de la province, tandis que sa partie orientale fut léguée à la Confédération germanique sous la forme d'un nouveau duché. Celui-ci sera ensuite rétrocédé aux Pays-Bas lors de la dissolution de la confédération en 1866 et devint l'actuelle province néerlandaise de Limbourg.
Voir aussi
[modifier | modifier le code]- Chronologie de la révolution belge
- Convention de Zonhoven
- Déclaration d'indépendance de la Belgique
- Formation territoriale de la Belgique
- Liste des guerres de la Belgique
- Révolution belge
Notes et références
[modifier | modifier le code]- « La convention militaire de Zonhoven. », sur persee.fr
- « Bulletin trimestriel Le Marcheur de l'Entre-Sambre-et-Meuse, 45e année No 176,Juin 2005. », sur armfesm.be
- André Lépine, « Frasnes-lez-Couvin - Notes d’histoire. La paroisse », Cercle d'Histoire de Cerfontaine, no 363,
- « Affirmation de l'indépendance luxembourgeoise, 1815-1919. », sur cere.public.lu
- « La chute de la Citadelle de Liège en 1830. », sur 1830.be
- « Le Palais provincial luxembourgeois. », sur gouverneur-luxembourg.be
- « Biographie de Nicolas Mulledorf. », sur luxemburgensia.bnl.lu
- « Le Traité des XXVII articles du 15 novembre 1831. », sur mjp.univ-perp.fr
- « La Révolution belge a 185ans. », sur arch.be
- La convention militaire de Zonhoven, E. PANNEELS, page 2