« Histoire globale des techniques », sous la direction de Guillaume Carnino, Liliane Hilaire-Pérez et Jérôme Lamy, CNRS Editions, 870 p., 39 €, numérique 28 €.
TOUTES LES TECHNIQUES SOUS TOUS LES ANGLES
Longtemps, les historiens se sont levés à l’ouest. A quelques rares exceptions près, depuis l’époque d’Hérodote jusqu’à ces dernières décennies, ils n’ont vu le monde que d’un seul point de vue – celui qui avait pour centre l’Europe, l’Occident et leurs cartes mentales particulières. Ce biais dominait plus encore quand il s’agissait d’analyser le développement et l’expansion des techniques. Certes, on pouvait évidemment créditer l’Asie, l’Afrique ou le monde amérindien de découvertes et d’inventions. Mais ce n’étaient qu’artisanats et routines empiriques. « La » technique – des savants, des ingénieurs, de l’industrie moderne, de la conquête du monde et de la domination des hommes – suivait une direction unique, celle de l’occidentalisation de la planète.
Voilà, dans l’orientation des regards, une page en train de se tourner. Car une pléiade de chercheurs, à travers les continents, explorent à présent une multitude de voies nouvelles et dessinent d’autres questions. Tous insistent désormais sur les rencontres, métissages et hybridations entre machines, cultures et sociétés du monde. Ils diversifient les centres de gravité, distinguent diverses formes de techniques, de relations sociales, de contextes écologiques qui pluralisent les perspectives. Au lieu d’un récit linéaire, unifiant et uniforme, on découvre alors une infinité de cas singuliers, faits d’évolutions locales et d’interférences globales.
Une impressionnante démonstration
Avec une cinquantaine de contributeurs internationaux, et presque 900 pages sous la direction de trois éminents experts, l’Histoire globale des techniques, que publie CNRS Editions, donne une impressionnante démonstration de la richesse de ces approches récentes. Bien sûr, tout ne saurait figurer, tellement l’efflorescence est vive. Par ailleurs, comme il est inévitable, les textes ne sont pas tous au diapason. N’empêche… cette somme permet une myriade de découvertes, dont la plupart donnent à penser.
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