- INTERVIEW -

Rencontre avec Christy ChungChristy Chung, photo de Thomas Podvin

A l'occasion de la cinqui�me �dition du festival du film asiatique de Deauville en mars 2003, nous avons eu la chance de rencontrer l'actrice et mannequin Christy Chung. Elle a r�cemment jou� dans des productions pan asiatiques et internationales telles que Jan Dara, Samsara et Highbinders.

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Introduction
La rencontre a eu lieu au Normandie de Deauville, l'h�tel le plus hupp� de la r�gion. Christy nous attendait d�j� dans le hall d'entr�e. Elle �tait v�tue d'un petit haut kaki et d'un b�ret fran�ais, simple mais toujours aussi glamour.

Christy Chung, une interlocutrice tr�s chaleureuse. Ici dans le hall du Normandie.Christy Chung est n�e � Montr�al de parents vietnamiens. Le fran�ais et le vietnamien sont donc ses langues maternelles (voir le portrait). Le contact s'est �tabli instantan�ment. Rieuse, disponible, m�me pas blas�e par les interviews, elle s'est exprim�e sans retenue, d'une fa�on expansive et tr�s chaleureusement.
Nous lui avons donc touch� deux mots sur sa carri�re d'une d�cade dans le cin�ma de HK, ses r�les aupr�s de Stephen Chow et Andy Lau, sa vision de la culture chinoise dans le cin�ma et ses projets d'avenir.

Interview

HKCinemagic : Pouvez vous nous r�sumer votre parcours de Montr�al, Canada � Hongkong ?
Christy Chung : C'est une longue histoire. C'est un parcours qui me surprend d'ailleurs. Moi �tant canadienne, �a n'a jamais �t� dans mes intentions. Je viens d'une famille qui est tr�s conservatrice. Il fallait �tudier � l'Universit�, et avoir un travail d'avocat ou de docteur. Et c'est le destin qui m'a apport� cette opportunit�. C'�tait lors d'un concours de beaut� (rire).

Comme Maggie Cheung…
Oui, exactement ! Et je crois qu'� Hong Kong, c'est vraiment le m�dium, le moyen le plus populaire pour les aspirantes au m�tier d'actrice.

Et � cette �poque vous ma�trisiez d�j� la langue ?
Christy � Deauvile, photo de Thomas PodvinNon, aucun mot de cantonais. Je ne comprenais pas, je pouvais pas lire et les seuls com�diens que je connaissais �taient Andy Lau et Maggie Cheung. En gagnant le concours de beaut� Miss Chinoise Internationale, �a m'a ouvert les portes. Je ne savais pas qu'en gagnant ce concours je pouvais devenir actrice. J'ai eu automatiquement un contrat avec TVB.
[NDRL : cha�ne de t�l�vision locale].
Je suis retourn�e � Montr�al et un jour TVB m'a appel� et ils ont dit : "�coute Christy, tu veux revenir � HK et faire une carri�re de com�dienne ?" Et j'ai r�pondu "- oui je peux. Ok, d'accord !"
A ce moment l�, j'avais un dilemme car on m'avait offert un poste pour faire la m�t�o � Radio Canada � Montr�al. Il y avait un choix � faire : �tre actrice � HK ou pr�senter la m�t�o ! Et j'ai tout de suite pris mes valises et je suis aller � HK.

Vous appreniez le texte phon�tiquement alors pour vous en sortir ?
Ola la la… J'�tais la seule qui devait travailler plus que les autres dans tous les films. On re�oit le texte en chinois et il fallait que je le transcrive phon�tiquement, d'abord en anglais et ensuite en cantonais. C'est une �cole qui m'a vraiment beaucoup aid�e parce que durant ces dix derni�res ann�es, �a m'a permis d'exercer mon cerveau : jouer en trois dimensions parce qu'il fallait que je comprenne ce que l'autre disait, que j'apprenne mes dialogues et que je prenne mes marques de fa�on naturelle.

Devenir actrice � HK, �a veut dire quoi ? Ca veut dire signer un contrat avec une bo�te de production qui vous oblige � faire un certain nombre de films ou �a se joue au coup par coup ?
Je ne sais pas si vous connaissez TVB, mais tout le monde qui sort de TVB, Andy Lau, Chow Yun Fat et Tony Leung, tous ces gens qui rejoignent le cin�ma ensuite, commencent par-l� et font des s�ries t�l�.

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C'est une sorte d'�cole de formation au m�tier d'acteur…
Oui exactement. Mon cas est assez diff�rent des autres, peut �tre parce que je ne pouvais pas ma�triser la langue � ce moment l� et j'ai tout de suite commencer par le cin�ma. Mon premier film �tait The Sting 2 avec Andy Lau de Wong Jing. Andy Lau c'�tait mon idole et je me retrouve dans le film avec lui ! Je suis sa copine � l'�cran dans mon premier film ! C'�tait une exp�rience inoubliable. Apr�s celui l� c'�tait la "femme avec les cheveux blancs", The Bride With White Hair 2.

Vous avez une filmographie plut�t cons�quente. Entre 1993 et 1997 vous avez jou� dans plus de vingt films. J'imagine que pendant votre enfance vous avez �t� pas mal berc�e par la culture occidentale et am�ricaine. Quel regard port� vous sur ces films que vous avez faits par rapport � votre origine am�ricaine ?
C'est une tr�s bonne question ! J'ai �t� �duqu�e � l'am�ricaine. J'avais un comportement d'occidentale. M�me maintenant les gens � HK m'appelle "Gwei Muai", la femme occidentalis�e. En �tant rest�e en Asie dix ans, je me suis rendue compte que j'avais beaucoup de valeurs et de morales qui sont plut�t chinoises, en ce qui concerne la famille par exemple. Alors moi, je prends cela � mon avantage, je ne suis pas trop de l'Ouest et je n'ai pas un mode de pens�e typiquement chinois non plus. Je prends ce qui a de plus positif dans les deux cultures et je les m�lange. Je crois qu'� ce moment l�, ma vision des choses s'�largit.

Vous avez des origines vietnamiennes…
Cela influence aussi certainement cette vision ?

Jan DaraOui, �a aide. Au niveau de la langue aussi. J'ai fait un film en Tha�lande, Jan Dara, qui va sortir cette ann�e. J'ai donc appris le tha� qui ressemble au vietnamien. Ce qui m'a permis d'apprendre les dialogues facilement. Je suis moiti� chinoise et vietnamienne, j'ai �t� �lev�e � Montr�al au Canada et je vis pr�sentement � HK. Je trouve que c'est absolument formidable d'�tre expos�e � diff�rentes cultures. Cela m'a permis d'observer �norm�ment, j'ai travaill� aussi en Cor�e et au Japon. Je rencontre des gens et j'observe. Je trouve que c'est primordial au niveau du travail. Parce que tu dig�res ces cultures et �a te permet de t'ouvrir au march� international. Alors je peux jouer non seulement des r�les typiquement chinois, mais je peux jouer aussi une tib�taine ou une tha�landaise.

Qu'est ce que vous appeler un r�le typiquement chinois ? Comment d�finiriez-vous cette sp�cificit�, cette originalit� ?
Cela m'est arriv� une fois de faire un casting et les gens me disaient que j'avais pas l'air typiquement chinoise.

De par votre physique ou votre comportement ?
Mon physique ! Le comportement, je n'avais pas de probl�me parce qu'on peut toujours apprendre. J'ai appris la culture tha�landaise, comment saluer, etc. Mais physiquement, de quoi �a a l'air un chinois ? (Rire) D'apr�s vous j'ai l'air asiatique, mais typiquement chinoise ?

Vous avez des yeux peut �tre moins en amande…
Jan DaraLes occidentaux ont une image des chinois qui ont des dents comme �a
[NDRL : mimant des dents longues et en avant] et les yeux comme �a [NDRL : mimant des yeux pliss�s]. C'est tr�s clich�. Moi, m�me si j'ai �t� �lev�e en occident, si je suis issue d'un m�lange, je veux absolument p�n�trer dans la culture chinoise. C'est une culture tr�s ancienne, de cinq mille ans. Le march� chinois s'ouvre � moi, j'habite aussi � P�kin. N'ayant pas �t� expos�e � cette culture au Canada, maintenant, je suis tellement curieuse que j'ai soif d'apprendre et je me trouve vraiment chinoise.

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Pour vous, quels films retranscriraient bien la mentalit� typiquement chinoise ou de Hong Kong ?
A HK, c'est diff�rent. Les gens parlent tr�s forts, il y a un petit peu de vulgarit� lorsqu'on parle. Ils ont beaucoup de films de gangsters et de "gamblers"
[NDRL : sous genre du polar o� les sc�nes de jeu dans les casinos repr�sentent g�n�ralement le climax principal des films].
Je crois que tous les pays ont diff�rents concepts, styles et essences. Ca d�pend aussi du message. Ce qui est typiquement Hongkongais, c'est la vitesse je crois. Car vous savez, � HK les gens ont beaucoup de pression. C'est une ville tr�s rapide. Il y a beaucoup de gens et beaucoup de choses qui tourne autour de l'argent. Alors on est fatigu�. Lorsque les gens vont au cin�ma, ils veulent quelque chose de l�ger ou qui les fasse r�ver ou les soulage.

Comme les com�dies par exemple. Vous en avez d'ailleurs tourn� quatre avec le roi de la com�die cantonaise Stephen Chow Sing-chi : Love on Delivery, puis Hail The Judge, God Of Cookery et All's Well, Ends Well 97.
Comment s'est pass� votre rencontre avec Stephen Chow ?

DVD de Hail The Judge (1994) d�dicac� par ChristyLui dans ces films c'est un comique, mais dans la vraie vie il est s�rieux ! (Rire) C'est ce que j'entends toujours. Les gens qui l'ont rencontr� disent qu'il est s�rieux. Il �coute tout ce que tu lui dis, il prend quasiment des notes. Mais avec moi, sur le plateau il �tait vraiment bien, c'�tait vraiment dr�le parce que je faisais les r�les en cantonais. J'avais un accent et j'ai encore maintenant un accent !
Mais il y avait comme une entente, une relation inexplicable entre nous. Je trouve qu'en travaillant avec Stephen j'ai vraiment appris. On a une histoire, entre nous, un petit secret l� qu'on n'a pas finit [NDRL : nous n'en saurons pas plus]. Je l'attends toujours, alors si un jour tu fais une interview, tu diras � Stephen : "Christy, elle t'attend toujours !" (Rire)

Les r�alisateurs de HK sont connus pour travailler dans l'urgence. Quelles �taient les m�thodes de travail des Stephen Chow ? Est-ce qu'il travaillait aussi au jour le jour ?
[NDRL : Christy s'agitant en tout sens et s'exclamant en cantonais pour illustrer la m�thode de Stephen Chow]. Il est tr�s s�rieux sur le plateau de tournage en fait. Il joue son r�le et ensuite consulte le r�alisateur tout le temps. Je crois qu'il est toujours entrain de penser entre les prises. Il r�fl�chit toujours � quelque chose qui sera plus dr�le, plus comique. Et parfois il te sort : "Ah ! J'ai trouv� ! Ca y est. Maintenant tu vas dire �a comme �a !". Et moi j'avais que 5 minutes pour apprendre le dialogue !

Donc il construisait parfois au fur et � mesure…
Au fur et � mesure. Si on lui parle, si on lui raconte une histoire, une blague, il va la prendre et il va la mettre dans le film.

L'an dernier � Deauville, Karen Mok nous disait qu'il �tait tr�s s�rieux et tr�s exigeant. Il demande beaucoup � tout le monde. Vous confirmez alors ?
Oui, absolument. Il le faut. A Hong Kong on n'a pas d'associations d'artistes qui prot�gent les artistes. On ne travaille pas 12 heures sur le plateau mais 24H/24 ! La premi�re ann�e que je travaillais � HK, il m'est arriv� de jouer dans deux films en m�me temps et j'ai travaill� cinq jours d'affil�e et j'ai pas dormis pendant ces cinq jours ! (Rire)

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Apr�s un break de deux ans, vous �tes revenue au cin�ma en 2000 et vous vous �tes int�ress�e � des productions pan asiatiques ou internationales (comme Jan Dara, Samsara ou Highbinders). Etait-ce une vraie volont� de votre part ou plut�t le fruit du hasard ?
Un peu des deux parce qu'� HK, on est que sept millions d'habitants. En faisant parti d'un projet qui est une coproduction entre la France et l'Allemagne ou la Tha�lande et Hong Kong on a un march� qui est beaucoup plus grand. Lorsqu'il y a une coproduction entre deux pays, le budget est plus important et on passe plus de temps sur le film et la qualit� s'en ressent.

A vos avis, ceux sont des films qui ont quelle identit� alors ? Ceux sont des films hongkongais, allemands ou autre chose ?
Sur Crouching Tiger Hidden Dragon
[NDRL : Tigre et Dragon], c'est une coproduction entre plusieurs pays. Ang Lee [NDRL : le r�alisateur taiwanais de Tigre et Dragon] travaille avec HK. Mais entre HK et Taiwan, est-ce qu'il y a une diff�rence ?

Christy Chung sur sc�ne (photo de Thomas Podvin)Le public � HK a quand m�me dit que le film �tait pour les occidentaux. Ils n'ont pas �t� le voir d'ailleurs. Le film n'a pas trop bien march�. Le d�but est tr�s long, alors que dans les Wu Xia Pian habituels, �a d�marre tout de suite sur l'action. Dans Tigre et Dragon, �a d�marre sur un dialogue amoureux…
Oui, mais �a d�pend du distributeur et du producteur, s'ils veulent faire des films pour vendre � l'ext�rieur, comme aux Etats Unis. A l'international, ils veulent avoir plus d'options. Et maintenant, tourner des films que pour le public Hongkongais, moi je commence � en avoir marre. Parce que �a fait dix ans qu'on m'offre les m�me r�les. Ca fait dix ans que je fais toujours de r�les d'innocentes, de coquines et de filles mignonnes. En l'an 2000, quand je suis revenue au cin�ma, je me suis dit que je voulais faire quelque chose de diff�rent.

Est-ce pour cela que vous avez choisi des r�les un peu plus sulfureux, un peu plus tourn�s sur l'�rotisme ? C'�tait une volont� de se d�marquer de la petite fille fragile que vous avez incarn�e pendant 10 ans ?
SamsaraAbsolument ! C'�tait tr�s important. Je regarde le script et je cherche toujours la possibilit� de me donner un challenge.
Je recherche des r�les qui sont plus en profondeur, qui me permettent de me montrer � l'�cran et de montrer mes �motions.

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Sur Highbinders de Gordon Chan, quel r�le jouez-vous ?
Vous �tes la copine de Jackie Chan ?

Highbinders avec Jackie Chan (Christy est sur la moto!)(Rire). Je joue le r�le de Charlotte et je suis la femme du partenaire de Jackie, Lee Hemett. Ces deux l� sont des espions. Moi je suis une femme anglaise qui reste � la maison. Je ne suis pas suppos�e savoir que mon mari est espion. Pendant toute notre vie de couple, il essaye de me faire croire qu'il est libraire ! Jusqu'au jour o� les m�chants d�barquent � la maison et d'un coup, je prends le fusil � la Linda Hamilton
[NDRL : Sarah Connor dans Terminator] et je fais du Kung Fu ! C'�tait vraiment rigolo.

Vous avez re�u un entra�nement pour cela ?
C'�tait �crit dans mon contrat avec Jackie. J'ai dis : "�coute Jackie, je fais ce film avec toi seulement si tu m'apprends � me battre" (rire). J'ai toujours voulu faire mes cascades. Lorsque j'�tais jeune, j'�tais un gar�on manqu� et je trouve que c'est vraiment marrant de voir les femmes qui se battent !

Vous aim� l'action…
Absolument ! Michelle Yeoh et tout �a !

Ca vous plairait de faire un film en France ?
Maggie Cheung en a d�j� fait l'exp�rience…

Christy avec ses homologues fran�aises: Sandrine Dumas et Clotide Courau (photo de Thomas Podvin)J'aimerai bien. J'aimerai en avoir la chance s'il y a un r�le ou une histoire qui me picote ! J'ai re�u des scripts. Il y a beaucoup de personnes avec qui j'aimerai travailler en France. Etant donn� que le fran�ais c'est la langue avec laquelle j'ai �t� �lev�e, ce serait plus naturel pour moi de jouer en fran�ais.
[NDRL : Christy parle le fran�ais, l'anglais, le vietnamien, le cantonais et le mandarin et a d� apprendre le tha� et le tib�tain pour les besoins des films Jan Dara et Samsara].

Merci. Bon courage pour vos futurs projets et bonne continuation.
Merci, dommage qu'on n'ait pas plus de temps pour discuter !

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Propos recueillis par Laurent Henry et Thomas Podvin, � l'H�tel Normandie, Deauville, 15 mars 2003. Interview retranscrite par Thomas Podvin, mars 2003.

Remerciements:
- Un �norme MERCI � Christy Chung pour sa gentillesse et sa disponibilit�.
- Merci � l'�quipe du Festival Pan-Asia de Deauville et du Public Syst�me Cin�ma, Laurence Hartmann-Churlaud, Sophie Bataille et Emita, et merci en particulier � C�line Petit, sans qui cette interview n'aurait pas �t� possible.
- Merci � Nico pour son soutien logistique.

Photos exclusives � 2003 par Thomas Podvin pour HKCinemagic. Toute utilisation du contenu de cette page doit obligatoirement faire l'objet d'une demande aupr�s du webmaster.

 

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