DORSALE REGUIBAT
Du point de vue politique, la dorsale appartient pour la plus grande part à la Mauritanie, à
l’Ouest, elle se prolonge au Sahara Occidental et, à l’Est, elle couvre une grande surface en
Algérie.
Du point de vue géologique, ainsi que fait remarquer J. SOUGY, « on ne peut plus définir la
dorsale comme l’affleurement de tout ce qui est précambrien, puisque la bordure nord du
bassin de Taoudeni qui la limite au Sud est maintenant considérée comme appartenant au
Précambrien Supérieur (Choubert, FAURE-Muret Charlot, 1968) ». SOUGY suggère qu’on
définisse la dorsale Réguibat comme la zone d’affleurement du Précambrien granitisé. Nous
verrons par la suite que la majeure partie des formations qui la composent appartient au
Précambrien D ou Précambrien C.
La Dorsale est enveloppée de séries sédimentaires d’âges variés : ces séries peuvent
appartenir au Précambrien supérieur, elles peuvent aussi dater du Paléozoïque. Dans ses
parties Ouest et Sud-Ouest, la dorsale est bordée ou recouverte par la chaîne hercynienne
des Mauritanides qui comprend des formations d’âges divers.
La Dorsale Réguibat peut donc être considérée comme formée d’unités géologiques de
métamorphisme variable qui ont subi des granitisations plus ou moins poussées au cours du
Précambrien D et du Précambrien C. l’étude de la dorsale comprendra trois parties qui
correspondent à trois zones géographiques : Occidentale, Centrale et Orientale.
I. LE PRECAMBRIEN DE LA PARTIE OCCIDENTALE DE
LA DORSALE REGUIBAT
La partie occidentale comprend le Tasiast, le Tijirit, l’Amsaga, le Tiris en Mauritanie et le
Sahara Occidentale.
Le socle Précambrien du Tasiast, du Tijirit et de l’Amsaga est désigné sous le nom de groupe
de l’Amsaga qui est divisé en deux (2) unités :
1. Un complexe migmatitique, appelé Complexe du Rag El Abiod, comprenant des
migmatites, des granites migmatitiques, des granites tardimigmatitiques et des
Pegmatites.
2. Une série métamorphique, la série de la Saouda comprenant des roches
métamorphiques d’origine para et ortho.
L’étude des principales structures a permis d’établir une succession stratigraphique
dans la série de la Saouda :
✓ Roches quartzo-feldspathiques souvent très plagioclasiques contenant de
l’hypersthène ou de l’amphibole et fréquemment, étroitement associées à
des formations métamorphiques, plus basiques pyroxéno-amphibolites et
anorthosites. Cet ensemble de roches métamorphiques, situé à la base de la
série, a reçu le nom de formation de Bou Rhzama.
✓ Au-dessus, viennent des formations leptynitiques épaisses de plusieurs
milliers de mètres, qui sont désignées comme formation de Jamra ; cette
dernière contient des intercalations des pyroxéno-amplibolites à la base et
des gneiss hyperalumineux au sommet. Ces gneiss hyperalumineux, à
sillimanite, grenat et cordiérite peuvent parfois, prendre une très grande
extension, ils sont appelés alors formations d’Aïdzidine.
✓ Au sommet on trouve des pyroxéno-amphibolites ou des amphibolites
contenant des intercalations de cipolins et quartzites ferrugineux, elle a été
nommée formation de Menerat Rogouga.
Des intrusions, en gisement discordant ou concordant s’observent au milieu des formations
précédentes : métagabbros, massifs d’anorthosites associées à des gabbros, à des
amphibolites et parfois à des serpentinites ; on y trouve aussi des granites et des pegmatites
issus du complexe migmatitique. Le métamorphisme évolue de la catazone (faciès granulite)
à la mésozone (faciès amphibolite). Les roches les moins métamorphisées correspondent au
complexe migmatitique. Le groupe de l’Amsaga a été affecté par plusieurs tectoniques, les
premières de style souple, les trois autres de type cassant, les deux dernières datent du
Paléozoïque.
Au Sahara Occidentale on retrouve, plus ou moins, les différents termes du groupe de
l’Amsaga qui ont été nommés : série d’Auhaifrit comprenant au sommet la série de Bulautad,
à la base la série d’Auserd et faciès de l’Adrar qui correspond à un Précambrien «
ultrainférieur ».
Dans le Tiris on retrouve les formations cristallophylliennes du groupe de l’Amsaga, elles ont
été désignées sous le nom de série du Tiris dont les caractères particuliers sont, d’une part,
d’être faiblement migmatisée et d’être pourvue, d’autre part, de nombreux bancs épais de
quartzite à magnétite, nommés formation d’Aouj. Une tectonique polyphasée a été mise en
évidence dans la série du Tiris. Enfin cette région montre une série particulière, la série
d’Idjill, qui est formée d’un lambeau allochtone épizonal qui repose avec un contact anormal
sur la série du Tiris. Les quartzites à hématite qui sont le faciès le plus caractéristique de la
série d’Idjill ont donné naissance au gisement de fer de Ford Gouraud (Fdérik).
II.LE PRECAMBRIEN DE LA PARTIE CENTRALE DE LA
DORSALE REGUIBAT
Le centre de la dorsale comprend les régions suivantes : el Ouassat, Zemmour blanc et
Ghallaman. Le caractère le plus marquant du Précambrien de cette zone est l’absence totale
de Quartzites ferrugineux, si abondants dans sa partie occidentale. L’ensemble des
formations a été regroupé dans la série du Ghallaman qui comporte des leptynites
abondantes, des gneiss à biotite, à muscovite, à grenat, des amphibolites, des cipolins, des
Quartzites.
Ces roches, le plus souvent à grains fins, montrent un métamorphisme décroissant vers l’Est.
Cette série est disposée en plusieurs bandes allongées de direction N-S ou NNW-SSE. Ces
associations de roches sont granitisées par les granites orientés du Ghallaman, de nature
calco-alcaline.
LA SERIE DU GHALLAMAN
Les formations cristallophylliennes de la série du Ghallaman ont subi un métamorphisme
régional d’intensité variable suivi d’une granitisation plus ou moins forte qui a pu donner
naissance à de véritables migmatites. Contrairement à ce que J. BARRERE a tenté dans
l’Amsaga, G. Rocci, en raison de l’absence de photos aériennes, de la platitude du relief et
aussi de l’énorme surface qu’il a été amené à étudier, n’a pu établir une succession
stratigraphique et débrouiller la tectonique de la série. De ce fait, il n’est pas impossible que
sous le terme de série de Ghallaman soient groupés des ensembles chronologiquement
différents. En ce qui concerne leur nature, on peut approximativement considérer que ces
formations tendent vers les pôles ferromagnésiens et calcareux et le métamorphisme, plus
intense à l’Ouest qu’à l’Est, varie de la catazone à l’épizone.
Des plissements intenses ont affecté la série, ils sont de type isoclinal. Les bancs sont
redressés à la verticale et, dans la plupart des cas, les pendages sont supérieurs à 80°. Ils
sont quelquefois plus faibles, 60° à 70° dans l’Ouassat méridional et, très
exceptionnellement, ils n’atteignent que 45°.
G. Rocci s’est attaché à distinguer des entités géographiquement bien individualisées qu’il a
appelées groupes. Il en a distingué cinq (5). Ce sont :
• Le groupe de l’Ouassat,
• Le groupe de Temmimichate Tsabya,
• Le groupe de Sebkhat Ghallaman, • Le groupe des Sebkhat Oudian Kharroub,
• Le groupe du Karet.
A. LE GROUPE DE L’OUASSAT
Il s’étend de la frontière du Rio de Oro jusqu’au méridien 10°30’W et couvre une superficie
de 4200km2 environ. Il est formé de :
• Roches calco-magnésiennes (gneiss à amphibole, gneiss à pyroxène,
amphibolopyroxénites, gneiss à amphibole et pyroxène, amphiboles, cipolins) ;
• Quartzites (en général ferrugineux, le plus souvent à oligiste, parfois à magnétite).
• Leptynites à grenats.
Le faciès type est une amphibolo-pyroxénite. Le métamorphisme correspond au faciès
amphibolite d’Eskola.
La chaine des Sfariat offre une série de coupes qui montrent :
• Une alternance de bancs d’épaisseur variable fréquemment répétés ;
• Une interstratification des quartzites ferrugineux et des leptynites, les quartzites
pouvant former des lentilles ;
• Des associations de leptynites et gneiss oeillés entre les alignements de quartzites ;
• La présence de cipolins (calcaires dolomitiques à minéraux) intercalés soit dans des
quartzites, soit dans des gneiss oeillés ou dans les leptynites et l’existence de
pyroxénites.
• Une prédominance des leptynites et des gneiss rubanés et oeillés sur les autres faciès
métamorphiques.
L’étude pétrographique permet de préciser les caractères suivants :
• Les quartzites sont généralement ferrugineux, le plus souvent à oligiste parfois à
magnétite, à grain souvent fin, plus rarement grossier, bien lités à cassure brillante. Il
existe quelques bancs assez minces de quartzites non ferrugineux. G. Rocci leur
attribue une origine sédimentaire.
• Les leptynites sont soit blanches, soit roses, les premières sont les plus typiques. Elles
contiennent ou non des grenats et peuvent prendre parfois un faciès granitique. Une
grande partie de ces leptynites parait être le produit d’une métasomatose.
• Les cipolins forment des bancs dont la puissance est en général inférieure à la
centaine de mètres, ils sont rarement purs et contiennent le plus souvent des
minéraux. Il semble qu’on puisse leur attribuer une origine sédimentaire ainsi
d’ailleurs qu’à toutes les roches calcomagnésiennes.
B. LE GROUPE DE TEMMIMICHATE TSABYA
La superficie de ce groupe est d’environ 1800km2 ; il forme une bande nord-sud à cheval
sur le méridien 10°W. Il est formé de : leptynites, gneiss à pyroxène, gneiss à amphibole.
Le faciès type est un gneiss à hyperstène. Le degré de métamorphisme est celui du faciès
amphibolite au centre de la zone, il diminue légèrement d’intensité vers les bordures. Ce
groupe est beaucoup moins compliqué que le groupe de l’Ouassat. Dans sa partie
centrale, il est formé d’une alternance régulière de leptynites semblables à celles qui ont
été décrites dans le groupe précédent, en bancs de quelques dizaines de mètres de
puissance et de gneiss à pyroxènes de couleur sombre. La migmatisation affecte la
bordure est (gneiss rubanés et oeillés), ces migmatites étant elles-mêmes flanquées et
recoupées par le granite orienté. Il existe en outre un gabbro à hyperstène et des
amphibolites. La plus grande partie des roches de cet ensemble parait avoir une origine
sédimentaire.
P. Barbey a repris les études de G. Rocci. Il a divisé le groupe de Temmimichate Tsabya en
deux séries en fonction de leur degré de métamorphisme ; les rapports mutuels de ces
séries n’ont pu être précisés.
La série catazonale superficielle est une suite d’enclaves dans les migmatites et granites.
Elle est formée d’amphibolites rubanées ou non, associées à des gneiss à biotite et
amphibole ou muscovite, à des leptynites, quartzites et cipolins. Ces amphibolites
dérivent de roches basiques d’origine ortho qui se seraient mises en place dans des
conditions très superficielles (association avec des gneiss à biotite, quartzites, cipolins).
La série catazonale profonde est homogène et indemne de toute granitisation. Elle est
constituée de formations quartzo-feldspathiques à structures rubanées très fines, avec
quelques rares ferromagnésiens, sans silicates de métamorphisme ; ce sont des
leptynites potassiques ou plagioclastiques qui dériveraient de sédiments peu évolués
d’origine granitique ou rhyolitique. Des roches basiques (gneiss à pyroxène, à pyroxène et
grenats, gneiss plagioclastiques, amphibolites), dérivant de volcanites andésitiques à
basaltiques remaniées et, pro-parte, de pyroclastites non remaniées et de coulées
basaltiques, sont associées aux leptynites. Des sédiments très évolués (quartzites et
cipolins) sont interstratifiés dans les faciès précédents. Certains quartzites pourraient
être d’anciens cherts (ou radiolarites ?). P. Barbey a en outre caractérisé un ensemble
discordant sur les précédentes séries : la série épizonale de l’Adam Talha que nous
décrivons avec les formations du Précambrien C.
III. LE PRECAMBRIEN DE LA PARTIE ORIENTALE DE
LA DORSALE REGUIBAT
Cette partie de la dorsale se situe à cheval sur la Mauritanie (Yetti et Iguidi pro parte) et
l’Algérie (Yetti, Iguidi pro parte et Eglab). Le Karet examiné précédemment en fait partie. Un
fait nouveau apparait dans cette zone c’est la présence, à côté du vieux socle Précambrien D,
de formations appartenant au Précambrien C.
Le Précambrien D ou Série de Chegga est formé de leptynites dominantes, d’amphibolites, de
gneiss à amphiboles et de gneiss à grenats ; ces roches ont été granitisées et on observe des
migmatites abondantes. La série Chegga a été désignée sous le nom de série d’Hassi el Fogra
dans une partie de la Mauritanie. Dans l’extrémité orientale de la dorsale, en Algérie, elle a
été appelée groupes de chena-chane-Erg Chech (divisés en groupes de Teggeur, de Tilemsi,
de Dra el Guerb). Les granites qui ont donné naissance à des migmatites sont syntectoniques
(granites d’Hassi el Fogra, de Chegga, de Teggeur, de Tilemsi et granodiorites de Teggeur).
Le Précambrien C est composé de formations diverses d’origine volcanique,
volcanosédimentaire et sédimentaire. Ces formations ont été regroupées en plusieurs
séries :
La série d’Aguelt Nebkha est composée essentiellement de grauwackes, elle est
faiblement métamorphisée (épizone). La série du Yetti est très comparable à la précédente,
mais avec un volcanisme rhyolitique plus développé. Ces deux séries sont considérées
comme de même âge et plus anciennes que les formations suivantes.
La série d’Aïoun abd el Malek est détritique à la base, volcanique au sommet. Les
séries d’Imourène et d’Aguelt Lekneig ont sensiblement le même faciès mais avec un
caractère plus volcanique. Elles ne sontt pas métamorphiques dans l’ensemble, mais
certaines zones peuvent toutefois être atteintes par un léger métamorphisme. La série d’El
Naam de même que la série de l’Oued Souss ont une composition voisine des précédentes. Il
en est de même de la série d’Akilet Deilel qui chevauche, à l’Ouest, la série du Yetti. Ces cinq
formations peuvent être considérées comme contemporaines.
La série du Guelb el Hadid, formée de matériaux détritiques grossies, est discordante
sur toutes les autres formations ; elle n’est ni plissée, ni métamorphique. Son âge n’est pas
connu, on sait qu’elle est antérieure aux formations de base du bassin de Taoudeni datées à
1 000 MA on peut supposer que la série du Gueb el Hadid est une molasse post-orogénique
de la chaîne birrimienne, formée de matériaux empruntés aux séries antérieures.
Les granites du Précambrien C ont une extension considérable dans les parties
centrales et orientales de la dorsale. Ils recoupent à l’emporte-pièce toutes les séries
volcano-détritiques précédentes. Les termes calco-alcalins sont plus abondants que les
termes alcalins ou hyperalcalins ; les faciès les plus étendus régionalement sont :
• D’une part les granites de Yetti souvent porphyroïdes, à biotite abondante qui sont
intrusifs dans les séries d’Aguelt Nebkha et du Yetti.
• D’autre part les granites d’Aïn ben Tili ou granites Aftout, à gros grains, à biotite peu
abondante qui sont intrusifs dans la série d’Aïoun abd el Male et les séries
contemporaines.
Signalons aussi la présence de petits massifs de syénite à aegyrine et d’un volcanisme tardif ;
en Agérie le volcanisme Eglab est postérieur à la série de l’Oued Souss mais antérieur à la
série du Guelb el Hadid.