Théorie Générale du Droit Constitutionnel
Pr. Jamal Hattabi
Séance 4
Les principes d’organisation de l’Etat moderne
Les philosophies et les théories juridiques de l’Etat ont leur importance dans
la mesure ou elle cherchent à l’expliquer et ont pu par ce biais participer à
l'appréhension de ce phénomène à travers l’étude des ses éléments constitutifs, de
ses formes et de ses fonctions. Mais pour saisir l’essence de cette institution il est
indispensable d'analyser les principes sur lesquels l’Etat s’est édifié au 18ème
siècle. Deux principes se distinguent des autres et constituent une référence de tout
Etat moderne: le principe de la séparation des pouvoirs et le principe de la
représentation politique.
§ . 1. Le principe de la séparation des pouvoirs.
Consacrée par la révolution française comme synonyme de démocratie, la
séparation des pouvoirs représente le principe essentiel d’organisation de l’Etat
moderne. En lui consacrant un article dans la déclaration des droits de l’homme et
du citoyen, les hommes de la révolution ont voulu sacraliser ce principe. C’est dans
cet esprit que l’article 16 de cette déclaration annonce que « toute société dans
laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs
déterminée, n’a point de constitution». Ainsi la séparation des pouvoirs est
interprétée comme le passage de l’arbitraire à la liberté et à l’ordre politique
rationnel.
Préconisée par J. Locke à la fin du 17ème siècle et par Montesquieu au
18ème siècle, la théorie de la séparation des pouvoirs est étroitement liée à la
philosophie des lumières. Débarrassé du pouvoir totalitaire monarchique, le peuple
tente de se préserver des vicissitudes du pouvoir. Il le divise pour mieux le contenir,
estimant que la liberté ne peut être protégée que par un agencement minutieux des
organes institutionnels, dont le principe est proclamé par l’article 16 de la
déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen.
A. La théorie de la séparation des pouvoirs.
C’est sans doute Aristote qui fut le premier à soulever la question de la
séparation des pouvoirs. Il a écrit à son époque dans son ouvrage « la politique»
que « dans tout gouvernement, il y a trois pouvoirs essentiels à chacun desquels le
sage législateur doit faire place de la manière la plus convenable.... le premier est
celui qui délibère des affaires de l’Etat (législatif), le deuxième comprend toutes les
magistratures ou pouvoirs constitués c’est à dire ceux dont l’Etat a besoin pour
agir (exécutif), le troisième embrasse les offices de juridiction ( judiciaire)».
Cette idée fut reprise par J. Locke en 1690 dans son ouvrage « Essai sur le
gouvernement civil ». Ce dernier a effectué une distinction entre trois pouvoirs «
législatif, exécutif, et fédératif».
Mais c’est sans conteste Montesquieu qui est considéré comme le père de
cette théorie. La plupart des travaux qui vont suivre focaliseront sur la description et
l’interprétation des travaux de Montesquieu et notamment « L’Esprit des lois
(1748)». Ce dernier est supposé avoir donné naissance au mythe de la séparation
des pouvoirs dans un chapitre consacré à la constitution Anglaise. Celle-ci a servi
de référence à Montesquieu dans l’étude qu’il a fait du «gouvernement moderne» et
à ce propos il est établi que Montesquieu a été inspiré par les travaux de J . Locke,
car c’est en étudiant les travaux de ce dernier sur le fonctionnement du système
britannique que Montesquieu a fait sa découverte. Dans le chapitre VI de «l’Esprit
des lois» Montesquieu écrit : «il y a dans chaque Etat trois sortes de pouvoirs: la
puissance législative, la puissance des choses qui dépendent du droit des gens et la
puissance exécutrice de celles qui dépendent du droit civil...» Avec cette phrase,
Montesquieu ouvre la voie à une théorie qui fera l’objet d’une vénération quasi
religieuse de la part des constitutionnalistes. Ils en ont fait le credo de la démocratie
libérale et même le mythe fondateur de toute démocratie moderne. Dès lors tous les
textes constitutionnels modernes se sont efforcés d’organiser cette séparation qui
changera selon la nature des régimes (une séparation stricte pour le régime
présidentiel, et une séparation souple pour le régime parlementaire).
Pour Montesquieu la liberté est le droit de faire ce que les lois permettent. Or
ces lois ne sont pas hors de portée des hommes. Elles sont au contraire, l’expression
de leurs rapports. Leur défense s’impose donc comme une nécessité face au pouvoir
de l’Etat qui cherche sans cesse de s’arroger le monopole de leur production. Cela
montre qu’il y a une menace sur la liberté. Si l’Etat est despotique, il va user
immodérément de la loi pour renforcer son emprise sur la société. Pour se prémunir
contre ce fléau, l’idée du gouvernement modéré apparaît comme la meilleure
solution. Montesquieu défini le gouvernement modéré comme étant celui où on
n’abuse pas du pouvoir c’est à dire le gouvernement où le pouvoir arrête le pouvoir.
La liberté résultera de cet équilibre qui consiste à limiter le pouvoir en le divisant.
Pour étayer sa thèse Montesquieu donne comme exemple le gouvernement de
l’Angleterre. Selon Montesquieu, il existe trois pouvoirs dans ce pays: un pouvoir
législatif qui fait la loi, un pouvoir exécutif qui la rend applicable et un pouvoir
judiciaire qui l’applique. Ces trois pouvoirs ne doivent pas être détenu par la même
personne et ne doivent pas non plus s’ignorer. L’objectif de Montesquieu n’est pas
la séparation de ces trois pouvoirs mais la combinaison entre trois puissances qui les
composent à savoir: le monarque, la noblesse et le peuple. Pour lui l’équilibre
constitutionnel du pouvoir et la garantie des libertés publiques reposent sur un
équilibre entre trois pouvoirs.
Alors que le souci majeur de Montesquieu était l’articulation des pouvoirs et
non pas leur stricte séparation, une partie de la doctrine en a fait un modèle
imaginaire. D’après ce modèle les trois pouvoirs recensés par Montesquieu doivent
être rigoureusement séparés et s’ignorer dans l’exercice de leurs fonctions. D’après
ce modèle la séparation des pouvoirs est incarnée par la spécialisation technique de
chaque organe. Celui qui fait la loi ne doit pas l’exécuter ni l’appliquer et celui qui
l’exécute ne doit pas la faire et vis versa.
Cette conception de la séparation des pouvoirs n’a pas résisté à l’épreuve du
temps, si bien qu’aujourd’hui de nombreux juristes admettent que la séparation des
pouvoirs est une fiction. C’est le cas du professeur Maurice Duverger qui reconnaît
que «la distinction traditionnelle du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif n’a
plus de signification». Il est vrai que partout dans les régimes parlementaires, ces
deux pouvoirs sont placés sous la même autorité: le chef de la majorité (qui est le
chef du pouvoir législatif) est en même temps le chef de l’exécutif. Actuellement on
constate que la séparation des pouvoirs nous ramène à l’organisation des rapports
entre la majorité et l’opposition.
B . Les applications du principe
Depuis longtemps, la théorie de la séparation des pouvoirs n’exprime plus la
réalité politique. Toutefois pour des raisons pédagogiques on ne peut se passer de
cet outil précieux pour la classification et la typologie des Etats modernes. Par
exemple on oppose souvent les démocraties où l’on applique le principe de la
séparation des pouvoirs aux dictatures où les différents pouvoirs sont détenus par
une seule et même personne (physique ou morale).
Si le principe de la séparation des pouvoirs a fait l’objet d’une vénération
quasi religieuse de la part des démocraties occidentales, il a fait l’objet d’un rejet
catégorique de la part des régimes autoritaires. Cela a été le cas des régimes fasciste
de l’entre deux guerres et des régimes socialistes d’inspiration lénino-marxiste.
Jusqu’en 1990 tous les pays de l’ancien bloc soviétique rejetaient la séparation des
pouvoirs. Ils expliquaient leur attitude par le rôle idéologique que peut jouer le
pouvoir. C’est un instrument d’incitation et de transformation qui permettra - au
main des communistes - de réaliser les réformes nécessaires et de veiller sur leur
application. Il était donc pour eux hors de question de le diviser et encore moins de
le partager.
Dans les régimes libéraux la séparation des pouvoirs est une condition vitale
pour l’établissement de tout Etat moderne et démocratique. S’inspirant des
principes de la philosophie des lumières, ces régimes considèrent que le pouvoir est
redoutable et estiment que pour le rendre moins nuisible, il faut en diviser
l’exercice.
Cependant, on constate que même dans ces régimes dits libéraux, la
séparation des pouvoirs a été largement contredite par les faits. L’analyse de
certains régimes contemporains montre qu’il y a en réalité une concentration des
pouvoirs même dans les pays considérés comme modèle de démocratie moderne.
L’exemple de la grande Bretagne est, à cet égard, particulièrement probant. En
effet, le régime parlementaire bipartite concentre tous les pouvoirs entre les mains
du cabinet - c’est à dire du comité directeur du parti vainqueur des élections -.
S’agissant d’un régime considéré comme le plus libéral du monde on est forcé
d’admettre que son libéralisme tient à d’autres causes qu’à la séparation des
pouvoirs.
Cette situation est paradoxale d’autant plus que la grande Bretagne a servi de
modèle à Montesquieu. Mais l’exemple de la Grande Bretagne n’est pas isolé et on
est forcé d’admettre que le régime parlementaire ou le parlement sert de freins et de
contre pouvoir aux actions de l’exécutif est une fiction. En réalité le parlement ne
sert que d’alibi aux actions du gouvernement. Etant le chef de la majorité, le chef
de l’exécutif dispose du soutien de celle-ci qui lui permet de faire voter toutes les
lois qu’il désire. Dès lors le pouvoir législatif ne peut plus être considéré comme un
vrai contre pouvoir dans la mesure ou son caractère représentatif n’est plus
considéré comme une garantie pour les gouvernés.
L’inadaptation de la théorie de la séparation des pouvoirs tient pour une large
part à ce qu’elle a été élaborée en un temps ou les partis politiques n’existaient pas
encore, tout au moins sous leur forme moderne. Les principaux problèmes posés par
le pouvoir étaient d’ordre institutionnel. Ils concernaient les différents organes,
leurs compétences et leurs rapports. Dans ce cas, la séparation des pouvoirs pouvait
apporter un équilibre entre ces différents organes. Actuellement ce sont les partis
politiques qui animent la vie politique à laquelle les institutions ne fournissent
qu’un cadre formel. L’activité politique se résume à un jeu d’alternance au pouvoir
entre la majorité et l’opposition, chacune scrutant les agissements de l’autre dans
l’attente des prochaines élections.
L’inadaptation de la théorie de la séparation des pouvoirs dans les régimes
parlementaires trouve son explication dans le fait que les régimes parlementaires se
sont constitués avant que cette théorie n’existe. Ce qui n’est pas le cas du régime
présidentiel, qui a été construit sur la base de cette théorie. C’est pourquoi il est
souvent défini comme le régime de la séparation des pouvoirs par excellence.
Il en résulte que malgré le fait que cette notion ne correspond plus à la réalité
des régimes qu’elle est supposée structurer, elle n’en demeure pas moins un mythe
fondateur de la démocratie moderne. La classe politique continue à l’évoquer et
l’opinion publique à la vénérer en lui témoignant une révérence marquée car elle
constitue une condition indispensable pour toute organisation étatique moderne.
Elle figure dans toute les constitutions du monde et prend une bonne place dans
notre constitution puisque l’article 1 en fait un des principes fondamentaux de notre
organisation institutionnelle: « Le Maroc est une Monarchie constitutionnelle,
démocratique, parlementaire et sociale
Le Régime constitutionnel du Royaume est fondé sur la séparation, l’équilibre et la
collaboration des pouvoirs……».
§ . 2 . Le principe de la représentation politique
Dans le petit Robert la représentation est définie comme «le fait de remplacer
quelqu’un, d’agir à sa place dans l’exercice d’un droit». Cette définition a rendu
l’usage de ce terme si répandu au point qu’on le retrouve dans tous les domaines:
esthétique, scientifique ou commercial. On parle ainsi d’un représentant de
commerce, de la représentation d’une courbe démographique et de la représentation
d’un tableau de peinture.
En politique, le sens de la notion de la représentation n’est pas si différent,
mais l’évolution historique qu’a connue ce terme a considérablement réduit sa
signification. Ici la représentation se réduit au représentant du peuple c’est à dire
celui qui a reçu un mandat du peuple. Cette situation est nouvelle dans la mesure ou
elle reflète une nouvelle conception du pouvoir c’est à dire celle qui est apparu avec
la philosophie des lumières. En effet, on est passé d’un monde peuplé de mythe et
de symbole où la puissance des dieux et des princes ne se représentait pas et où le
pouvoir s’adorait à un monde ou le pouvoir est rationalisé. La conception ancienne
du pouvoir était basée sur le principe de la volonté divine. Le pouvoir ne
s’expliquait pas, il était le don de dieu et faisait de son détenteur un mythe. Le roi
échappait ainsi à toute idée de représentation terrestre dans la mesure où il était le
représentant de dieu.
La pratique politique a détruit cette forme de pouvoir et a remplacé la
représentation divine par une représentation terrestre. Le mythe de la représentation
subsiste mais il a changé d’origine: le détenteur du pouvoir n’est plus le
représentant de Dieu sur terre, il est le représentant du peuple duquel il détient son
mandat. Cette conception de la représentation est devenue à son tour une condition
indispensable pour toute organisation étatique moderne. Elle figure dans toute les
constitutions du monde et prend une bonne place dans notre constitution puisque
l’article 7 en fait un des principes fondamentaux de notre organisation
institutionnelle: « Les partis politiques oeuvrent à l’encadrement et à la formation
des citoyennes et des citoyens……».
A. Les fondements du principe de la représentation
La rupture épistémologique intervenue au 18ème siècle grâce à l’apport de la
philosophie des lumières a recentré l’idée de la représentation autour de nouvelles
valeurs défendues dans les théories du contrat social. Selon ces théories les
individus se trouvent à la base de la société et du pouvoir politique. L’Etat n’est
qu’une création artificielle, c’est à dire voulue par les hommes. De ce fait, la société
ne peut être que le résultat de la décision des hommes de s’associer entre eux. Cette
association constitue la toile de fond des travaux des différents auteurs qui se sont
intéressés à cette question. Hobbes (1588-1679), Pufendorf (1632-1694), Locke
(1632 -1704) Rousseau (1712 -1778) ont tous puisé, chacun à sa manière, dans la
théorie du contrat social l’argumentation nécessaire à leurs travaux.
Il en résulte que si l’Etat et la société sont des phénomènes volontaires, le
rapport entre les deux doit être réglé selon la volonté des hommes. Mais selon la
règle du nombre, cette volonté ne peut s’exprimer que par l’intermédiaire de la
représentation étant donné l’indisposition de tous les individus à s’intéresser à la
chose politique. Ces derniers délèguent à quelqu’un parmi eux le pouvoir de parler
et d’agir en leur nom. Les formes et les procédures du choix des représentants
diffèrent selon les pays et les cultures.
B. L’organisation de la représentation
Concrètement, l’organisation de la représentation soulève des problèmes à
deux niveaux:
- Le premier niveau concerne l’étendu du suffrage: les théoriciens de la
représentation se sont trouvés confrontés à la question suivante: qui a le droit de
voter et qui a le droit de se faire élire ?
Deux solutions étaient possibles:
Une élitiste qui octroie le droit de vote selon certains critères et une universaliste
qui donne le droit de vote à tous.
- Le deuxième niveau concerne le mode de suffrage. Or il est connu qu’on
peut influer sur le résultat d’une consultation électorale en fonction du
mode de scrutin choisi.
B. 1. Le suffrage restreint
Le souci permanent de la bourgeoisie était de s’assurer à tout prix le contrôle
du droit de suffrage et surtout d’en limiter les effets. C’est ainsi que l’exercice de ce
droit va faire l’objet de limitation en fonction de certains critères relatif à la fortune,
à la capacité intellectuelle et au sexe.
B .1 .1. Les limitations dues à la fortune ou à la capacité intellectuelle
Dans cette situation, la capacité électorale est tributaire de la capacité fiscale
ou de la capacité intellectuelle. Cela veut dire que pour voter il faut être imposable
c’est à dire être soumis l’impôt ou disposer d’un minimum de connaissances
exigées.
La limitation liée au cens a été pratiquée par plusieurs pays dont les plus
importants sont la France et les Etats-Unis d’Amérique. En France par exemple, le
cens correspondait à l’impôt direct exigé de tout électeur de plus de trente ans. La
charte constitutionnelle de 1814 l’avait fixé à 300 francs par an. De ce fait le corps
électoral français se trouve considérablement réduit. C’est ainsi que sur une
population de trente millions seul quatre vingt dix mille individus avaient le droit
de vote. Cette situation fut aggravée en 1820 par une loi dite du double vote. Celle-
ci accordait aux grands propriétaires le droit de voter deux fois. Cette tendance va
s’inverser à partir de 1830 avec l'avènement de la monarchie de juillet. Le cens va
connaître une baisse continue pour disparaître et céder la place au suffrage
universel.
Aux Etats-Unis d’Amérique, la situation fut plus grave dans la mesure où la
pratique du cens subsistera dans certains Etats de la fédération jusqu’à 1965. En
effet, dans certains Etats du sud, les citoyens ont été soumis à un impôt électoral de
deux dollars (Polltax) pour exercer le droit de vote. Cette restriction fut abolie en
1965 par un amendement constitutionnel et par le «Voting Right Act».
En ce qui concerne la capacité intellectuelle, les Etats-Unis vont exiger des
candidats à l'exercice du droit de vote la maîtrise de la lecture et de l’écriture. Dans
certains cas, la connaissance de constitution ainsi que son interprétation était exigée.
Cette procédure visait à exclure les noirs du corps électoral.
D’autres pays ont pratiqué le suffrage capacitaire. On peut citer à titre
d’exemple le cas du Brésil, du Guatemala, du Chili, de la Colombie et de
l’Equateur. On justifiait l’exclusion des illettrés par le fait qu’ils peuvent facilement
être manipulés du fait qu’il leur manque la formation nécessaire pour pouvoir
apprécier les idéologies et les programmes des différents candidats et partis.
B. 1. 2. Les limitations dues au sexe
Il est établi que la reconnaissance du droit de vote aux femmes n’a été
acquise que tardivement. Les femmes ont été souvent considérées comme des
citoyens de second degré. Pour justifier cette situation, on avançait l’argument que
le travail de la femme est surtout dans son foyer et que la politique est une chose
sérieuse qui ne peut être confiée qu’aux hommes. Cet anti-féminisme n’a été vaincu
qu’à la seconde moitié du 19ème siècle. C’est ainsi que le droit de vote a été
accordé aux femmes de l’Etat du Wyoming aux Etats-Unis en 1869. Et en 1893, ce
fut le tour la femme néo-zélandaise suivi de la femme australienne en 1901.
En ce qui concerne l’Europe il a fallu attendre 1913 pour les norvégiennes et
1915 pour les danoises.
La seconde guerre mondiale va donner un coup d’accélérateur à libération des
femmes. C’est ainsi que les françaises ont pu exercer pour la première fois leur droit
de vote en 1946. Le mouvement va s’intensifier après au point que - mis à part les
suisses (1970 au niveau fédéral et 1990 pour certains cantons) - toutes les femmes
européennes vont pouvoir jouir de leur droit de vote.
B .2. L’établissement du suffrage universel
Le suffrage universel signifie que le droit de vote est attribué à la totalité des
citoyens. Il assure la participation aux élections du plus grand nombre d’individus.
Toutefois cette reconnaissance de l’exercice de ce droit est soumise à certaines
conditions juridiques. Ces conditions concernent l’âge et la jouissance des droits
civiques car il n’est pas raisonnable d’accorder le droit de vote aux enfants mineurs,
aux étrangers et aux criminels.
En ce qui concerne l’âge celui-ci est généralement fixé à l’âge de la majorité
juridique. Elle est de 18 ans au Maroc.
Etant le lien juridique entre le citoyen et l’Etat, l’exercice du vote est
tributaire d’autres conditions dont la plus importante est la nationalité. Dans ce cas
seuls les nationaux peuvent jouir du droit de vote. Toutefois, il existe des
exceptions à cette règle. En effet, de nombreux pays (dont le Maroc depuis 2011)
accordent maintenant le droit de vote aux étrangers. On peut citer le cas de la
Suède, du Danemark, de la Norvège et des Pays-Bas. Depuis le traité de Maastricht,
l’union européenne accorde le droit de vote aux étrangers européens domiciliés
dans l’un des pays de l’union.
Mais pour voter, il ne suffit pas d’avoir la nationalité, il faut aussi être
titulaire de ses droits nationaux. Tous les pays prévoient des interdictions
temporaires ou permanentes aux nationaux frappés par des peines pénales graves.