2016PERP0019 LLLLLL PDF
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L'APPROCHE JURIDIQUE
CONTEMPORAINE DE LA GESTION DES
RESSOURCES NATURELLES MONDIALES
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L'Université n’entend ni approuver, ni désapprouver les opinions émises dans une
thèse; elles doivent être considérées comme propres à l’auteur
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« L’idéal n'est pas une chose qui se consomme mais qui s'entretient et se passe comme
un flambeau »
Jean Moulin
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Remerciements
Je tiens tout d'abord à dédier cette thèse à ma fille Hélène qui aura peut être un jour la
curiosité de la lire, à Jean dont l'esprit m'accompagne depuis 2006, à mes parents qui
m'ont accompagné tous deux et soutenu tout au long de la reprise de mes études et
particulièrement ma mère, première lectrice attentive, ainsi qu'à ma grand-mère
disparue il y a 19 ans loin de moi mais dont l'esprit reste fidèlement à mes côtés.
Je dédie d'autre part cette thèse à feu le professeur Régis Marchiaro, professeur de droit
international à L'université de Montpellier, qui m'a accueilli chaleureusement à 38 ans
comme étudiante en DU 2ème cycle. Nos échanges nombreux sur l'Amérique Centrale,
le droit international, les recettes de cuisine et le vin en 2008 restent un merveilleux
souvenir. Son soutien bienveillant à l'inscription en thèse fut sans faille.
Je tiens ensuite à remercier mon directeur de thèse, Mr Bouin Frédéric, pour m'avoir
permis de pouvoir traiter ce sujet passionnant mais difficile.
Par ailleurs, je remercie tous les professionnels, institutions et structures diverses qui
m'ont permis d'accéder à des documents d'expertise techniques diverses : INSET,
CNFPT, LRA, DREAL, GRAINE-LR, IRMA, AGROPOLIS, CRIDEAU, SFDE, FITS
pour INTERPOL...... les associations environnementales comme la LPO Hérault, la
LPO France, ainsi que Humanité et Biodiversité et leur président respectif. Je tiens
aussi à remercier ceux qui ne m'ont pas soutenu dans mes réflexions, en refusant
d'ouvrir leur réseau, ils m'ont rendu meilleure.
Enfin, je remercie le Président du jury, les membres et les rapporteurs qui se sont
associés à ce travail.
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LISTE DES ABREVIATIONS
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A
AFDI Annuaire Français de Droit International
AFTA Asean Free Trade Area
AGNU Assemblée Générale des Nations-Unies
AIEA Agence Internationale pour l’Energie Atomique
AIER Agence Internationale pour les Energies Renouvelables
AIPPI Association Internationale de la Protection de la Propriété Intellectuelle
ALECE Accord de Libre Echange en Europe Centrale
ALENA Accord de Libre Echange Nord Américain
AME Accords Multilatéraux sur l’Environnement
AMF Association des Maires de France
AMGVF Association des Maires de Grandes Villes de France
APD Aides Publiques au Développement
APA Accès au Partage des Avantages
art. Article
ASEAN Association of Southeast Asian Nations
B
BAFD Banque Africaine de Développement
BASD Banque Asiatique de Développement
BDCE Banque de Développement du Conseil de l'Europe
BDEAC Banque de Développement des Etats de l'Afrique Centrale
BEE Bureau Européen de l'Environnement
BERD Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement
BID Banque Inter Américaine de Développement
BM Banque Mondiale
BOAD Banque Ouest Africaine de Développement
Bull. Bulletin des Arrêts de la Cour de Cassation
C
CAA Cour Administrative d'Appel
CAI Commission d'Arbitrage International
Cass, soc Cour de cassation, chambre sociale
C civ Code civil
C com Code du commerce
C consom Code de la consommation
CDD-ONU Commission Economique des Nations-Unies
CDB Convention sur la Diversité Biologique
CEDH Convention Européenne des Droits de l'Homme
CEDIDELP Centre de Documentation Internationale pour le Développement, les
Libertés et la Paix
C env Code de l'environnement
CGCT Code Général des Collectivités Territoriales
CGI Code Général des Impôts
CGPPP Code Général de la Propriété des Personnes Publiques
CIJ Cour Internationale de Justice
CIPO Comité International de Protection des Oiseaux
CITES Convention sur le Commerce International d'Espèces Menacées de
Faune et de Flore
Civ Cour de cassation, chambres civiles
11
CJCE Cour de Justice des Communautés Européennes
CJUE Cour de Justice de l’Union Européenne
CMN Charte Mondiale pour la Nature des Nations-Unies
CNUM Convention des Nations-Unies sur la Mer
CNUCE Conférence Ministérielle des Nations-Unies sur le Commerce et le
Développement
CNUCD Conférence des Nations-Unies sur le Commerce et le Développement
CCNUCC Convention Cadre des Nations-Unies sur les Changements Climatiques
CDDNU Commission du Développement Durable des Nations-Unies
Cons. const. Conseil constitutionnel
CPJI Cour Permanente de Justice Internationale
CPP Code de Procédure Pénale
Crim Cour de cassation, chambre criminelle
CSNU Conseil de Sécurité des Nations-Unies
CVR Code de la Voirie Routière
F
FAO Food and Agriculture Organisation
FEM Fond pour l'Environnement Mondial
FFEM Fonds Français pour l’Environnement Mondial
FMI Fonds Monétaire International
FNUP Fonds des Nations-Unies pour la Population
FPHNDD Forum Politique de Haut Niveau sur le Développement Durable
G
GATT General Agreement on Tariffs and Trade
Gaz. Pal. Gazette du Palais
I
IACHR Inter American Commission of Human Rights
IRENA Agence Internationale pour les Energies Renouvelables
IUCN International Union Conservation of Nature
J
J.-Cl. Juris-Classeur
JCP Juris-Classeur Périodique (La Semaine juridique)
JDI Journal du Droit International
JICA Japan International Cooperation Agency
M
MEA Millenium Ecosystem Assessment
MIGA Multilateral Investment Garantee Agency
N
NAFTA North American Free Trade Agreement
NEPAD New Partership's for Africa's Development
O
OCDE Organisation de Coopération et de Développement Economique
OMC Organisation Mondiale du Commerce
12
OMD Organisation du Millénaire pour le Développement
OMI Organisation Maritime Internationale
OMM Organisation Météorologique Mondiale
OMPI Organisation Mondiale de la Protection Intellectuelle
OMS Organisation Mondiale de la Santé
ONG Organisation Non Gouvernementale
ORD Organe de Règlement des Différents
P
PAC Politique Agricole Commune
PIB Produit Intérieur Brut
PNUE Programme des Nations-Unies pour l'Environnement
préc précité
R
RGDIP Revue Générale de Droit International Public
RRJ Revue de Recherche Juridique
S
SNB Stratégie Nationale de Biodiversité
SNDD Stratégie Nationale de Développement Durable
Soc Cour de cassation, chambre sociale
T
TAI Tribunal d'Arbitrage International
TGI Tribunal de Grande Instance
T. com. Tribunal de Commerce
TAI Tribunal d'Arbitrage International
TPI Tribunal Pénal International
U
UICN Union Internationale pour la Conservation de la Nature
UNESCO United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization
W
WEF World Economic Forum
WWF World Wild Fondation
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SOMMAIRE
INTRODUCTION.................................................................................................... 21
TITRE II. L'APPROCHE LIMITÉE AU CADRE JURIDIQUE DES RESSOURCES NATURELLES........... 199
Chapitre I. Le choix dépassé d'un cadre juridique protecteur.................................. 205
Chapitre II. La portée controversée d'un cadre juridique protecteur........................ 257
TITRE I . L' APPROCHE NOUVELLE A UN AUTRE RATTACHEMENT DES RESSOURCES NATURELLES 315
Chapitre I. Le caractère prudent de rattachement des ressources naturelles .......... 321
Chapitre II. La portée nouvelle de rattachement des ressources naturelles............. 379
TITRE II: L'APPROCHE PRUDENTE A UN AUTRE RATTACHEMENT DES RESSOURCES NATURELLES 433
Chapitre I. Le caractère prudent lié à une gestion transversale de transition ......... 437
Chapitre II. Le caractère prudent lié à une gestion transversale endémique .......... 485
CONCLUSION......................................................................................................... 535
BIBLIOGRAPHIE................................................................................................... 547
INDEX....................................................................................................................... 573
TABLE DES MATIERES........................................................................................ 579
RESUME................................................................................................................... 589
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18
« Sème un acte, tu récolteras une habitude
sème une habitude, tu récolteras un caractère
sème un caractère, tu récolteras une destinée. »
Dalaï-Lama1
1 LOY David , Notes pour une révolution Bouddhiste, éditions Kunchab, 2010, page 74
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20
INTRODUCTION
21
22
A l'heure où la société civile contemporaine s'interroge sur la fonte des pôles, essayant
de comprendre le phénomène du réchauffement climatique, les tribus autochtones
lancent au travers de leur chef des cris d'alerte2 sur une nature outragée, brisée,
martyrisée3 mais pas encore libérée4. Comment entrevoir aujourd'hui la gestion des
ressources naturelles mondiales? Sous l'angle d'un mythe5 ou d'une réalité dépassée?
2 DUTILLEUX Jean-Pierre, Raoni : Mémoires d'un chef indien, éditions du Rocher, 2010, page 45
3 4ème festival de la Gacilly, Exposition des photographies de l'AFP, Madrid, 30 Septembre 2007
4 Hommage au discours du 25 août 1944 de Charles de Gaulle sur la libération de Paris
5 KOKOLO Willy, L'Union européenne dans les négociations environnementales, quel 'leadership' sur
la scène internationale ? Nouvelle Europe, 11 janvier 2013
6 KISS Alexandre-Charles, Le droit international peut-il assurer la protection de l'environnement, le
droit de l'environnement, colloque du CNRS, éditions CNRS, 1990, pages 23 et suivants
7 KISS Alexandre-Charles, Un défi pour le droit international, revue projet,, n°226, 1991, pages 51 et
suivantes
8 MALJEAN-DUBOIS Sandrine, Quel droit pour l'environnement? collection les fondamentaux,
éditions Hachette, 2008, page 25
9 MATIAS Daniel, Les Amérindiens et la menace sur la délimitation de la réserve des Kayapos,
Courrier international, 8 mai 2012
10 BOON VON OCHSSEE Timothy et SMEENK Tom, Guerre du gaz : la Russie sous tous les fronts, le
Monde diplomatique, 22 août 2011; AFP, Nord stream, l'autoroute du gaz entre Russie et Europe, Le
Monde, 8 novembre 2011
11 PRIEUR Michel, La protection de l'environnement, dans Mohammed BEDJAOUI, Droit
International, bilans et perspectives, tome 2, Éditions A.Pedone, 1991, page 1085
12 KISS Alexandre-Charles et BEURIER Jean-Pierre, Droit international de l'environnement, 4e édition,
Pedone, 2010, page 25
23
la gestion des ressources naturelles mondiales. Depuis la crise mondiale de 2008, et
vingt ans après la Conférence de Rio13, la Conférence des Nations-Unies sur le
Développement Durable14 a posé la question relative à l'économie verte dans le cadre du
développement durable, de l'élimination de la pauvreté et le cadre institutionnel du
développement durable. Elle énonce donc un nouveau mode de gestion des ressources
naturelles mondiales, plus sécuritaire sur le plan juridique et compétitif sur le plan
économique.
Or, tendre vers une nouvelle vision environnementale du territoire, basée sur ce que
certains experts mondiaux nomment la “reconquête de la souveraineté
environnementale15”, reste un défi juridique nouveau.
Or, les institutions internationales disposent de mesures bien plus efficaces que des
décisions de COP, à caractère non contraignant, dans le domaine environnemental. Les
décisions du Conseil de Sécurité reposent sur le principe de la majorité qualifiée. Celles
du Fond Monétaire International reposent sur une attribution de voix donnée à chaque
état en fonction de sa contribution. Celles de l'Organisation Mondiale du Commerce
reposent sur le principe du consensus, assorti d'un Mémorandum d'accord sur le
règlement des différends. La question de pouvoir assortir les accords des COP d'un
Mémorandum environnemental reste en suspend.
24
prise en compte de ces enjeux.
Ainsi, ce nouveau défi reste lié à une autre approche juridique inter-générationnelle,
différente de l'approche juridique traditionnelle, intra-générationnelle des ressources
naturelles, liée à une gestion conservatoire et valorisante. La médiatisation des
accidents environnementaux majeurs18, et plus généralement de toutes formes d'atteintes
environnementales a démontré les limites de ce type de gestion et la nécessité d'évoluer
sur une approche plus transversale des problématiques environnementales, que le droit
international de l'environnement à lui seul ne peut réguler.
La question de savoir si nous sommes prêt à basculer vers un nouveau mode de vie
reste donc à poser. Car l'absence ou l'insuffisance d'équité environnementale peut
remettre en cause à moyen terme le rôle et les responsabilités de chacun.
L'objet et la nature de ces nouveaux droits restent alors à définir, aux vues de l'évolution
scientifique et de celle de la société civile. Même si la réglementation internationale a
évolué, il reste à analyser les nouvelles typologies de risques environnementaux sous
l'angle de la sécurité juridique mondiale, qui reste dans la pratique juridique, éparse et
disparate, d'un territoire à un autre.
25
complexité des règles internationales de droit, l'ensemble des acteurs mondiaux doivent
alors concourir à promouvoir et mieux anticiper pour mieux progresser.
Il faut donc répartir autrement les rôles et les responsabilités des acteurs. Et il convient
de mieux définir juridiquement la notion de gestion, comme celle de gouvernance.
Or, force est de constater que la définition juridique de ces termes reste délicate (I) et
qu'une ambivalence des termes demeure (II).
26
I. Une définition juridique délicate
Si l'on dépasse la simple référence idéologique 20, ou les simples constats actuels 21, la
notion de gouvernance n'est pas juridique mais politique. Selon Pierre Calame « Le
premier objectif de la gouvernance est d’apprendre à vivre ensemble et à gérer
pacifiquement la maison commune; d’y assurer les conditions de la survie, de la paix,
de l'épanouissement et de l'équilibre entre l'humanité et la biosphère22 ».
Utilisé dans l'ancien français24, dés le XIIIème siècle puis abandonné après la révolution
française, la gouvernance s'est apparentée aux notions de «gouvernement» et de
«gouvernante25 ». Récupéré par la langue anglaise dés le XIV ème, le terme s'est
transformé en «governance» et est apparu dans les langues portugaises, espagnoles,
italiennes à la même période. La notion a réapparu en France au début du XX ème siècle,
et s'est assimilée à l'entreprise et non plus à la politique.
27
responsable27 ».
Vingt siècles après Platon, Bertrand Net Moquay retient que la Commission
Européenne définit la gouvernance «comme un art de gouverner, mais avec deux
préoccupations supplémentaires; d'une part, bien marquer la distinction avec le
gouvernement en tant qu'institution, d'autre part, ... promouvoir un nouveau mode de
gestion des affaires publiques28 ». Cette notion contemporaine repose ainsi sur «une
structure contractuelle et complémentaire au marché qui se coordonne et se règle
comme une structure politique29 ». D'autres préfèrent la voir comme «la coordination
efficace quand pouvoir, ressources et information sont vastement distribués entre
plusieurs mains30 ».
Des questions demeurent, tant sur la nature juridique actuelle de cette notion que sur les
objectifs de ses dirigeants, pilotes «experts dans l'art de gouverner», à la base,
gestionnaires financiers, dont les fins répondraient plus à «l'efficacité et l'efficience»
qu'aux respect des valeurs sociétales.
Son champ d'application précise que c'est «l’ensemble des processus et institutions,
aussi bien formels qu’informels, qui englobe des normes et des valeurs, des
comportements et des modalités organisatrices, autour desquels les citoyens, les
organisations et les mouvements sociaux ainsi que les différents groupes d’intérêts
articulent leurs intérêts, défendent leurs différences et exercent leurs droits et
obligations en matière d’accès et d’utilisation des ressources naturelles33 ».
Sur le plan mondial, elle est devenue «la somme des organisations, des outils
politiques, des mécanismes financiers, des lois, des procédures et des normes qui
régulent les processus de protection environnementale mondiale34 ».
27 IT Governance Institute Rapport, 1998, consulté sur le site http:// www.itgi.org le 20 mars 2013
28 NET MOQUAY Bertrand, La gouvernance locale, un retour à la proximité, économie rurale, n° 280,
mars-avril 2004, pages 77
29 Cf note n°28 pages 77 à 95
30 PETERS Guy et SAVOIE John Donald, La gouvernance au XXIe siècle: revitaliser la fonction
publique collection sur la gouvernance et la gestion publique, Québec, Presses de l'Université
Laval et Centre canadien de gestion, 2001
31 BARON Catherine, La gouvernance, débats autour d'un concept polysémique, revue Droit et Société,
n°54, juin 2003, page 51
32 FONTAINE Guillaume, Verde y negro: ecologismo y conflictos por petróleo en el Ecuador ;
FONTAINE Guillaume, VAN VLIET Roger. PASQUIS Juan, políticas ambientales y gobernabilidad
en América Latina, Quito FLACSO-IDDRI-CIRAD, versions française et espagnole, 2007, pages
223 à 254
33 OJEDA Lizette, Gobernabilidad en la Conservación de los Recursos Naturales, éditions Ecouf,
universidad de la Florida, versions française et espagnole, 2005, page 95
34 NAJAM Adil, PAPA Mihaela, and TAIYAB Nadaa, Global Environmental Governance, A Reform
Agenda, IISD, versions française et anglaise, 2006, 100 pages
28
C'est donc à travers cette notion, non juridique de nature, que repose aujourd'hui, sur un
plan mondial et local, la gestion des ressources naturelles. Or, ces deux dernières
notions sont établies en droit.
29
2. Une notion juridique de gestion et de ressources établie
Relatif à la notion juridique de gestion, cette dernière est établie dans le droit romain,
longtemps utilisée dans le langage juridique appartenant au Barreau35 ou au Palais36
pour désigner «l'administration des affaires d'autrui», et provient du latin « gestio ».
Elle a été rattachée d'abord à la notion d'administration 37, devenant ainsi «l'action et la
manière de gérer, administrer de diriger38 ». Généralisé en secteur public39, la notion
juridique de gestion des ressources naturelles en droit international de l'environnement
est restée polysémique et s'est greffée d'adjectifs techniques non juridiques.
Cette adjectif choisi devait favoriser une diminution des pertes d'exploitation des
ressources naturelles et viser à optimiser les actions pour atteindre une gestion
équilibrée. Retenue par certains États, comme la France, elle a été alors définie en droit
interne comme une «gestion qui implique à l'échelle d'une unité hydrographique
cohérente, d'une part une concertation et une organisation de l'ensemble des acteurs
ainsi qu'une coordination des actes d'aménagement et de gestion (politiques
sectorielles, programmation,...), d'autre part de favoriser une synergie entre le bon
fonctionnement des écosystèmes aquatiques et la satisfaction des usages43».
30
particulier, pour le développement de la production d'électricité d'origine renouvelable
ainsi que la répartition de cette ressource ;La promotion d'une utilisation efficace,
économe et durable de la ressource …. ; Le rétablissement de la continuité
écologique ...46 ». Ce type de gestion permet « en priorité de satisfaire les exigences de
la santé, de la salubrité publique, de la sécurité civile....... Elle doit également
permettre de satisfaire ou concilier, lors des différents usages, activités ou travaux, les
exigences :De la vie biologique du milieu récepteur, …....... ; De la conservation et du
libre écoulement …. ».
Or, les conflits liés à une gestion d'exploitation optimale des ressources naturelles
mondiales ont crée des limites. Se pose alors la question de déterminer s'il serait
possible d'adopter une notion intermédiaire, une autre forme de gestion «raisonnée», en
opposition à gestion «maximale».
Elle serait transversale. Ce faisant, la gestion raisonnée repose avant tout sur la
définition de territoire environnemental, en prenant en compte des données nouvelles,
géomorphologiques et anthropiques des systèmes permettant de répertorier les
réservoirs naturels présents à sauvegarder. Le champ d'application de ce type de gestion
reposerait sur les notions juridiques de pater familias, et de mandat, en posant un cadre
réglementaire nouveau basé sur le prélèvement « utile, indispensable et nécessaire » des
ressources naturelles. Elle concourait ainsi à la proposition d'élargir leur qualification
juridique en reconnaissant juridiquement le caractère fragile et rare pour certaines
ressources naturelles mondiales.
31
référence à la «diversité et à la sagesse des cultures», qui a conduit à l'adoption d'une
«Déclaration Universelle d'Interdépendance» et conclut à la renaissance de «l'esprit
pionnier» de la Charte des Nations Unies de 1948. L'Appel du 21 janvier 2014 fait
référence au sommet de la COP21 de décembre 2015 et se prononce en faveur de
« ..l'élaboration d’un Pacte des peuples est une tâche à laquelle il faut s'atteler de toute
urgence en vue de le soumettre à l’adoption des États participants au prochain Sommet
Paris-Climat 2015, qui devrait fournir l'occasion à la communauté internationale de
prendre un virage capital et décisif. L' Appel lancé par le Collegium International est
adressé au Secrétaire général des Nations unies en vue d'être soumis à la considération
du prochain Sommet G20 ainsi qu'au Président de la République française, hôte de la
Conférence planétaire Paris-Climat 201549 ».
Selon ces auteurs, la notion juridique de ressources naturelles est donc établie et s'est
complexifiée sur le plan international. Devenue un «facteur comprenant l'espace, les
matières premières et l'énergie55 », la notion juridique de ressources naturelles découle
d'une conception occidentale de la Nature, née au Moyen-âge. La doctrine scolastique
reposait en effet, sur l'idée que la Nature a été crée par Dieu, à des fins de servir
l'Homme. Cette dernière transparaissait dans l'ensemble des traités et ouvrages
encyclopédiques occidentaux entre le Moyen-âge et le XIX ème siècle, qui ont fait
ressortir le caractère utilitaire des ressources naturelles56.
Or la notion même de ressources naturelles recèle un intérêt juridique certain car elle
laisse apparaître une transversalité des enjeux. Aussi, les deux auteurs définissent-ils
les ressources naturelles comme « un ensemble d’éléments bio-physiques, entrant dans
un processus de production artisanale ou industriel, non cultivées ou élevés par
l'homme57 ». Cette définition contemporaine englobe ainsi les ressources naturelles
49 Collegium International, Appel du 21 janvier 2014, http://www.collegium-international. Org/ index.
php/fr/presentation/textes-fondateurs/vers-une-gouvernance-mondiale consulté le 20 mars 2013 et le
30 octobre 2015
50 GHIOTTI Stéphane, Définition des ressources naturelles, dictionnaire des notions, Paris, 2012, pages
1025 à 1026, repris dans GHIOTTI Stéphane, La directive cadre sur l'eau (DCE) et les pays
méditerranéens de l'union européenne, une simple question de ressources en eau ?, Pôle sud, n°35,
2011, pages 21-42
51 SABOUREUX DE LA BONNETERIE Charles-François, Les agronomes latins Caton, Columelle,
Palladius , Varron, éditions Paris, 1864, page 521
52 CLAVEL LEVEQUE Monique, Espaces intégrés et ressources naturelles dans l'empire romain,
éditions Hermann, 2004
53 CORRY John, Upon the natural and commercial ressources of the contry, London, tome IX, édition
Edinburgh review, 2006
54 Cf note 40
55 SILEM Ahmed, ALBERTINI Jean Marie, Lexique d'économie, 12ème édition, 2012
56 DE CRESCENZI Pietro, Liber ruralum commodorum, 1304-1309, éditions Nicolas Cousteau, 1533
57 BERNARDI Philippe, BOISSEUIL Didier, La gestion des ressources naturelles, consultable sur le
site http://www.medievalesrrevues.org, n°53, 2008, consulté le 8 avril 2013
32
minières, agraires, hydrauliques, forestières, animalières et maritimes. Cette approche
anthropologique retient un mode d'exploitation raisonné, au sens de prélèvement
sélectif et ordonné, en opposition avec la mise en culture intensive. Elle permettrait
donc de répertorier les ressources naturelles et les rattacher à un caractère limité en
utilisant les notions de réserves et de gisement.
Cette approche permettrait ensuite de distinguer les ressources naturelles entre elles :
les ressources naturelles utiles et nécessaires et les autres. Maurice Godelier précise à ce
stade que «une réalité naturelle devient une ressource naturelle pour l'homme par l'effet
combiné de deux conditions : qu'elle puisse directement ou indirectement satisfaire un
besoin humain et que l'homme dispose de moyens techniques de la séparation du reste
de la nature et la faire servir à ses fins58 ».
Ainsi, cette approche conduit-elle à une approche juridique contemporaine des modes
d'appropriation des ressources naturelles mondiales et par voie de conséquence à définir
la notion de territoire environnemental, comme «une portion de l'espace sur lequel une
société déterminée revendique et garantit à tout ou à une partie de ses membres, des
droits stables d'accès, de contrôle et d'usage portant sur tout ou partie des ressources
naturelles qui s'y trouvent et qu'elle est désireuse et capable d'exploiter59 ».
L’étymologie juridique des notions reste ainsi fragile, générateur d'une certaine
ambivalence juridique.
58 GODELIER Maurice, L'idéel et le matériel sur le rôle des techniques dans le processus de
conditionnement des ressources naturelles, éditions Fayard, Paris, 1998, page 112
59 BOURIN Monique, ZADORA-RIO Elisabeth, Analyse de l'espace, éditions Schmitt, Paris, 2002,
pages 493 à 510
33
B. L'ambivalence juridique présente des notions
34
Le troisième angle juxtapose les notions de «bonne» et «mauvaise» gouvernance en
s'adressant à tous les domaines64 juridiques. La notion de «bonne gouvernance
environnementale» renverrait à la notion d'intérêt général. Ceci induirait par voie de
conséquence, pour la gestion des ressources naturelles mondiales, des notions
complémentaires comme celle de résilience et de régulation économique de l'utilisation
des ressources naturelles à des fins d'équité environnementale.
35
gouvernance sous un double aspect de proportionnalité et de subsidiarité. Dans le Livre
blanc sur la gouvernance européenne72, deux logiques, deux visions s'affrontent: une
vision traditionnelle dans un premier volet, où la commission se présente comme
gardienne des traités ;et une vision nouvelle dans un second volet, où est approfondie la
méthode communautaire par les principes de proportionnalité et de subsidiarité. Ici, les
programmes d’actions sont le reflet d'une gouvernance environnementale de
«management», où se combinent droit négocié et droit imposé. On négocie ainsi la
norme environnementale par échelle de gouvernance.
Aussi, serait-il nécessaire de revenir au lien Homme-Nature qui joue, selon Jean Pierre
Beurier, un rôle «essentiel 73» en droit international de l'environnement. Ce dernier
suggère un autre mode de gestion qui s'y rattacherait, la réglementation internationale
environnementale étant tributaire de ce lien. Or, ces perceptions juridiques,
déterminantes dans la construction du droit international de l'environnement, restent
ambivalentes, d'un État à un autre.
Marcelo Dias Varella analyse ces perceptions74 sur quatre groupes d'états, représentatifs
de la vision occidentale de la nature, qui sont les états nordiques, les états anglo-saxons,
la France, le Brésil. L'auteur indique ainsi une dualité «entre la société humaine et la
nature, dans une hiérarchie sujet humain maître et objet nature, protégé à un degré qui
varie entre les quatre groupes d'états.. ». L'auteur énonce alors que selon lui, « la
protection de l'environnement a un sens, dans la mesure où l'environnement est l'autre
et non le soi ».
Aussi précise-t-il que l'environnement est perçu dans les états nordiques comme une
valeur en soi où la protection de la nature est axée vers la Nature et non vers l'Homme.
Cette état de conscience se transpose en droit interne, où la gestion des ressources
naturelles est régie par le principe qu'un lien indivisible unie l'Homme à son
environnement. L'auteur énonce qu'une partie de la construction du droit international
s'est ainsi basée sur des normes environnementales proposées par les états nordiques.
L'auteur précise que les normes régionales proposées par les états, ont été transposées
en droit international de l'environnement, en raison de leur influence plus ou moins
grande.
A ce titre, il cite pour exemple le principe de précaution, principe émanant des états
nordiques. Le mode de gouvernance et la gestion qui s'y rattachent dépendent donc de
ce lien indivisible.
Pourtant, l'auteur reste pragmatique en précisant que malgré ce lien indivisible, les états
nordiques restent divergents sur leur mode de gestion. L'exemple de l'opposition de la
Norvège à la gestion proposée pour dépolluer la Mer du Nord des effluents pétroliers,
est retenu.
72 UE, Livre blanc sur la gouvernance européenne, 25 juillet 2001
73 BEURIER Jean-Pierre, Le droit de la biodiviersité, Revue juridique de l'environnement, volume 21,
n°1, pages 5-28, 1996
74 VARELLA DIAS Marcelo, L'expression des différences de perception de la nature et de
l'environnement dans la construction du droit international de l'environnement Revue Européenne de
Droit de l'Environnement, page 251 à 274, 3-2006
36
L'auteur élargit le domaine de gestion des ressources naturelles à la vision politique et
historique des états. Aussi, oppose-t-il la vision d'une gestion environnementale
nordique à celle de la France, où selon lui, le rapport Homme-Nature reste lié à une
approche humaniste basée sur la domination. L'auteur prend pour symbole de cette
domination, les jardins à la française, où la maîtrise de la nature s'oppose à la vision
anglo-saxonne, caricaturée au travers de ses jardins à l'anglaise, sauvages.
Ici, l'auteur précise le choix d'une gestion utilitaire de l'environnement en droit français,
et de droits réels absolus. Cette vision, selon l'auteur, tend à bifurquer doucement depuis
trente ans vers une vision plus nordique. Le mouvement s'est accéléré depuis les
Grenelles de l'environnement en 2009. La France reste unique dans son mode de
gestion environnementale, axée soit sur les droits de l'Homme, « porteurs d'une vision
anthropocentrique» soit sur le droit de l’environnement pur. Le premier type de gestion
se retrouve à travers la jurisprudence européenne relative à la protection de
l'environnement au titre de l'article 8 de la DEDH. Le second se retrouve dans la
codification récente de la réglementation environnementale.
L'auteur précise à cet égard que depuis les accords de Bretton Woods 76, la notion de
gouvernance s'est assimilée en une notion d’administration publique, faisant appel aux
notions d’état de droit, de responsabilité et de transparence. La notion de gouvernance
est alors un «outil idéologique pour une politique de l’état minimum..... pour analyser
la mise en œuvre des grands programmes publics dans un contexte marqué par une
implication forte des intérêts locaux et des organisations privées». La notion de
gouvernance actuelle se rattache donc à « un processus continu de coopération et
d’accommodement entre des intérêts divers et conflictuels ».
37
un nouvel étage à la démocratie, qui permettra au plus grand nombre d'entrer dans la
complexité78».
38
2. Une ambivalence juridique des notions de gestion et de ressources
Le premier angle est juridique. La notion juridique de gestion est établie en droit
romano-germanique et se rattache à celle de gestion d'autrui, quasi-contrat où un gérant
d'affaires accomplirait un acte dans l'intérêt ou pour le compte d'un tiers, le maître de
l'affaire, faisant naître des obligations réciproques à la charge du gérant. S'agissant du
droit anglo-saxon, il convient alors de déterminer si ce rattachement peut être retenu
dans le cadre de la gestion des ressources naturelles mondiales.
Le deuxième angle est économique. La notion juridique de gestion dans le droit anglo-
saxon se rapproche de celle du «management concept». Il convient alors de savoir si on
élargit la notion juridique de gestion des ressources naturelles mondiales à celle de
management.
Cela résiderait aussi, selon lui, dans le fait que les ressources naturelles devaient être
conservées pour être utilisées de façon rationnelle. A ce titre, il mettait d'abord l'accent
sur le fait que la conservation des ressources naturelles devait s'appuyer certes sur un
avis écologique mais au delà, car «l'écologie n'est que l'étude des habitats ». Par
ailleurs, il faisait une différence entre la conservation de la préservation des ressources
naturelles en citant Théodore Roosevelt 85: «Conserver, c'est utiliser sagement » et
indiquait donc que la conservation n'était que « l'étude rationnelle et à long terme de la
mise en valeur et de l'utilisation des ressources naturelles ». Il préconisait alors de
79 CAA Lyon,, SARL Gymo contre Etat, 7 février 2012, n°10LY00389
80 CE, Assemblée, Institution Notre-Dame du Kreiske contre le sous-préfet de Morlais, 29 janvier 1954
n°07134
81 Cass, soc, Société Agrostar contre Mr X, 16 février 2012, n°10-18.162
82 CAA Bordeaux, Chambre 1, CCI de Dordogne contre Mr A et la Société A Aéroport, 2 février 2012
n°10BX01026
83 UNESCO/CORPSA/4.A Conférence sur l'organisation de la recherche et la formation du personnel en
Afrique en ce qui concerne l'étude, la conservation et l'utilisation des ressources naturelles, rapport du
31 janvier 1964, WS/0264.17-NS
84 Cf note 83 page 2
85 ROOSEVELT Théodore, White House Conference on the Conservation of Natural ressources, 13 mai
1908
39
limiter les exploitations abusives de ces dernières qui, au delà d'un certain seuil,
épuisaient alors les ressources naturelles86. Enfin, il avançait l'idée selon laquelle
l'Homme mettrait en péril la Nature plus qu'il ne la respecterait et que la conservation
resterait un outil de sélection visant à limiter les détériorations progressives faites aux
habitats.
On peut donc retenir que la gestion des ressources naturelles ne visant que leur
conservation et leur valorisation reste un outil juridique de gestion classique,
correspondant à la vision utilisatrice de l'époque, des ressources naturelles.
Car cette gestion s'est orientée sur une exploration et exploitation optimales des
ressources naturelles mondiales. Dans cette perspective, tout discours reposant sur les
risques encourus liés à la surexploitation des ressources naturelles pouvait être
considéré comme contradictoire, même si on énonçait en même temps le caractère non
renouvelable des dites ressources.
Or, les dangers liés à ce mode de gestion reposent essentiellement sur les rapports
modifiés entre l'Homme et la Nature. Si l'histoire des institutions a démontré que
l'Homme est conscient de sa place dans la Nature 88, l'avènement de l'ère industrielle a
modifié les paramètres et posé l'Homme comme le maître de l'univers. La détérioration
environnementale a donc permis un repositionnement et un renforcement en droit
interne et en droit international des régimes de responsabilités environnementales.
86 Cf note 83 page 5
87 Cf note 40
88 BERLIET Ernelle, Géographie historique et urbanisation en Birmanie et ses pays voisins, des origines
à la fin du XIIIe siècle, thèse soutenue le 7 décembre 2004, Université Lumières, Lyon 2, page 10
40
responsables.
La notion de justice environnementale, reposant sur les notions d'équité au sens large,
apparaît. A ce titre, l'exemple Amazonien pose ainsi les problématiques d'iniquité
environnementale. Arnaud Blin, historien spécialiste des conflits, part du principe selon
lequel les notions de « territoire des peuples ou encore celle de territoire de vie issus de
la tradition indigène » servent « à remettre en cause la propriété privée, ainsi que
l'injustice sociale». Il indique aussi que «Le concept émergeant de responsabilité de
protéger fait suite au «droit d'ingérence et a jusqu'à présent été utilisé pour tenter de
protéger les populations mises en danger par les guerres civiles».
Il conclut en indiquant que ce droit « peut être également étendu aux populations
menacés par la prédation économique et à la protection de l'environnement89 ».
89 BLIN Arnaud, Collectif, 100 propositions du Forum Social Mondial, Charles Léopold Mayer
Publishing, 2006, page 20
41
II. Une qualification juridique disparate
S'agissant du système onusien, certains auteurs n'hésitent pas à dire que «les
régulations actuelles ne sont pas à la hauteur des interdépendances90 ». Les
propositions de réforme du système onusien portent principalement sur des réformes
juridiques et structurelles. Il ressort de ces propositions et suggestions, une impossible
gestion homogène des ressources naturelles mondiales, en raison de la différence
endémique, historique et culturelle de chaque territoire.
L’ État, nouvel instrument juridique national ou régional93, serait alors garant d'une
régulation environnementale94. Il ne s'agit donc pas d'innover en suggérant un nouveau
modèle juridique de gestion, encore faut-il le rendre pragmatique, adaptable et
modulable à chaque territoire.
42
Si la mondialisation a tissé de nouveaux liens juridiques, l'évolution des questions liées
à la gestion des ressources naturelles mondiales laissent entrevoir que le processus de
changement s'amorce d'abord sur le plan local et transfigure ensuite sur le plan mondial.
L'effet d'entonnoir classique s'inverse donc. Partir de la gestion des ressources
naturelles locales vers une gestion des ressources naturelles mondiales pourrait être
alors être une stratégie juridique envisageable.
Or, les mouvements de migrations, les pandémies, les crises climatiques, énergétiques,
causes ou conséquences des crises politiques et sociales mondiales, démontreraient un
fait juridique incontestable : les notions de territoire environnemental, de migrants
environnementaux et de pandémies environnementales n'existent pas.
43
2. Un contexte juridique européen déséquilibré
S'agissant de la gestion des ressources naturelles en Europe, force est de constater une
hétérogénéité pouvant être, selon Thierry Chopin95, une opportunité visant à analyser les
déséquilibres juridiques actuels. L'auteur prône ainsi un nouveau type de gestion
environnementale. Il dresse à ce titre une analyse juridique soignée des déséquilibres
actuels, en énonçant la complexité et l'éclatement du pouvoir exécutif européen. Il
critique la lenteur de la diplomatie européenne, ses incertitudes qui auraient, au fil de la
crise, accentué ainsi le sentiment d'insécurité économique au sein des états membres de
l'Union.
Le défi européen repose donc sur une autre vision environnementale des territoires qui
constituent l'Europe contemporaine. Et on revient ainsi à la suggestion d'établir une
gestion des ressources naturelles sur un territoire environnemental donné. S'agissant des
ressources naturelles agraires, la Politique Agricole Commune (PAC) a conduit à une
politique globale et de quotas, dénaturant les territoires locaux.
Les désordres environnementaux liés aux problématiques de pollution des sols et sous-
sols, comme des ressources naturelles en eau, sont le socle d'un revirement actuel des
mentalités, mais ont profondément divisé et par conséquent conduit à une défiance vis à
vis des gestionnaires. L'esprit pionnier de l'Europe et plus largement de l'ONU pourrait
donc servir de nouveau socle pour repenser un autre mode de gestion des ressources
naturelles. Cette autre vision doit faire appel à une autre approche de la gouvernance
environnementale, plus participative, au service de l'Humanité.
44
B. La disparité liée aux incertitudes techniques et scientifiques
L'analyse de la gestion des ressources naturelles doit prendre en compte les incertitudes
techniques et scientifiques portant tant sur l'évolution de la Biodiversité mondiale que
sur celle du contexte juridique international.
Le droit international de l'environnement et les droits internes ont cherché à établir une
sécurité juridique globale. Or, les phénomènes de dégradation observés, ne sont pas tous
causés par le fait de l'Homme, car ils restent soumis aux cycles de vie propres des
milieux endémiques. Même si les principes fondamentaux en droit international de
l'environnement ont été établis et reconnus par la jurisprudence internationale 97, le
principe de précaution n'a pas suffisamment encadré les pratiques d'exploration et
d'exploitation optimale des ressources naturelles mondiales et l'expertise technique et
scientifique reste parfois trop générale. Pourtant, les avancées dans les domaines des
nanosciences ont permis de mieux comprendre et donc mieux appréhender les
phénomènes cycliques.
Cette évolution peut alors tendre à un réajustement du mode actuel de gestion des
ressources naturelles mondiales. Corollairement, l'évolution démographique mondiale
est elle-même génératrice d'insécurités juridiques nouvelles. Une autre approche de la
protection d'espaces internationaux sensibles soulève alors des interrogations juridiques,
notamment sur la qualification juridique des sols et sous-sols. A ce titre, le cas de la
Toundra reste préoccupant.
Cette formation végétale circumpolaire98, formant un cercle autour du pôle Nord de plus
de huit millions de km², soit moins de dix pour-cents des terres émergées, et parmi l'un
des quatorze grands «biomes99 » terrestres pour son écosystème unique au monde, reste
un espace insuffisamment protégé. Région subarctique, gérée en partie par le
Danemark, pour la partie du Groenland, et la Russie, pour la partie Nord de la Sibérie,
la Toundra fait l'objet d'une gestion absolue de ses sous-sols, riches en gaz naturel et en
pétrole.
Ce mode de gestion choisi par des états nordiques, propice au développement
économique, est générateur de risques comme de violation des droits d'accessibilité à
parcelles pour les populations autochtones locales. Requalifier juridiquement cet espace
de patrimoine commun de l'Humanité permettrait peut-être de mieux encadrer les
pratiques actuelles à risques et de permettre d'allier développement économique et
protection de cet écosystème unique au monde100.
45
divergentes. Car le Brésil est un État métissé brassé par des cultures indigènes et
occidentales. Six groupes de pensées, reposant sur des mouvements conservateurs et
progressistes, équilibrent les visions divergentes actuelles. La gestion des ressources
naturelles locales reste ainsi controversée, car elle est à la fois destructrice de la forêt et
protectrice. Le paradoxe porte notamment sur le fait que la destruction reste perçue
comme un signe de développement économique et d'évolution sociale, tout en
conservant les droits autochtones. Marcelo Dias Varella énonce à ce titre, qu'il «est
difficile de parler de vision prédominante de la société brésilienne à propos de la nature
amazonienne101 ».
Ces incertitudes scientifiques et techniques sèment ainsi un trouble sur les qualifications
juridiques de certaines ressources naturelles. Il en est ainsi de la qualification juridique
des hydrocarbures non conventionnels comme les sables bitumineux, le gaz de couche
ou l'huile de schiste, le gaz de schiste, à grande profondeur, l'ensemble des gisements
offshore de ressources naturelles comme le pétrole, le gaz ou les nodules
polymétalliques. L'exploitation des ressources naturelles minières terrestres et lunaires
appartient au cadre du droit international, mais il convient de reconnaître que la
question juridique et diplomatique reste sensible car s'entremêlent les notions de droits
réels comme le droit de propriété, droits des États et aussi la notion d'équité et de
sécurité juridique.
Ce trouble se pose aussi sur les nouvelles ressources naturelles présentes dans des
espaces extra atmosphériques. Ici la question demeure sur le fait de savoir si la
qualification juridique du sol et sous-sol du système solaire et de ses planètes, serait
soumise aux mêmes règles que celles des codes miniers internationaux, de celle de la
Haute mer ou de la Stratosphère?
Si l'on prend le cas des sous sols terrestres et marins, les règles régissant l'exploitation
des sous-sols sont soumises au droit minier de chaque état. Or au cours du XX ème siècle,
le droit minier mondial a revêtu deux aspects juridiques distincts. Soit c'est un droit
rattaché au droit de propriété comme c'est le cas du droit américain où le propriétaire
de la surface est propriétaire du tréfonds. Le tréfonds devient donc l'accessoire du
premier. Ce fut aussi le cas du droit prussien de 1865 où la mine appartenait à celui qui
la découvrait. Soit c'est un droit rattaché au domaine public comme c'est le cas actuel du
Droit arabe, et notamment jordanien et qatari, où les gisements sont la propriété de
l'État et font partie de son domaine.
C'est aussi le cas du droit français actuel où le sous-sol est considéré comme « res
nullius », à qui l'État en attribue l'usage et en fixe les conditions d'exploitation. Or si
l'on s'en réfère au droit minier français, ce dernier, certes modifié102 ne serait vraiment
réformé. Et la notion de «mine» repose uniquement sur la nature du matériau, extrait à
ciel ouvert ou en sous-sol. Entrent dans cette définition juridique, tous types de
combustibles, métaux, et ressources minérales et chimiques. Le reste est rattaché à la
catégorie des carrières.
46
La problématique juridique autour de la gestion des abysses complète cette incertitude.
Définies comme une fosse océanique très profonde, elles ne revêtent pas de statut
juridique international précis. Ramené au contexte français, l'exploitation des grands
fonds marins au delà des limites des juridictions nationales est soumis à réglementation
spécifique103 avec permis d'exploitation et d'exploration délivrés par décret en Conseil
d’État après avis du Conseil Général des Mines. Or, il existe une réciprocité limitée
entre pays pour ces demandes depuis la Convention des Nations-Unies sur le Droit de la
Mer104. Cette convention fait suite à la Conférence de Genève sur le Droit de la Mer de
1958105 qui avait adopté quatre conventions portant sur la mer territoriale et la zone
contiguë, la haute mer, le plateau continental, la pêche et la conservation des ressources
biologiques.
La Convention de Montego Bay a rajouté quatre nouvelles zones maritimes à savoir les
eaux «archipélagiques», la Zone Économique Exclusive communément appelée
«ZEE», les détroits navigables, le fond des mers. Elle fixe donc pour la première fois
les règles de libre communication et circulation entre les pays, et pose le principe
«d'utilisation pacifique» des mers, «d'exploitation équitable et efficace» des ressources
et de «préservation du milieu marin». Or vingt pays signataires, dont les États-Unis,
l'Iran, la Corée du Nord et les Émirats Arabes Unis, ne l'ont toujours pas ratifié. La
question relative à une autre approche de la gestion reposant sur l'exploitation équitable
et efficace des ressources halieutiques est posée notamment en matière de pêche et de
quotas, mais également en matière de dégazage en mer et plus généralement sur
l'efficacité absente d'outils réglementaires internationaux efficaces.
Si l'on va plus loin et que l'on suit l'avancée technologique, se pose aussi la
problématique juridique liée aux questions d'appartenance des nouvelles formes de
ressources en énergie. Les nanotechnologies pourraient, selon les chercheurs, accomplir
le saut technologique attendu dans le domaine de l'énergie en matière d'efficacité
énergétique, de transport et de stockage électrique et, peut-être, être une solution à la
pénurie des « terres rares ». L'exemple du nano-crystal pouvant, dans les panneaux
photovoltaïques notamment, se substituer aux cellules de panneaux de silicium et
accroître les rendements solaires, pose des problématiques juridiques réglementaires sur
son mode de gestion et celle des déchets produits issus de sa production.
47
2. Des incertitudes liées au contexte juridique international
Si des révolutionnaires français s'accordèrent à dire qu' «Entre le fort et le faible, entre
le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c’est la liberté qui opprime, c’est la
loi qui affranchit106 », il convient de préciser que «La liberté n’est possible que dans un
pays où le droit l’emporte sur les passions 107 » et qu' «Il y a trois actes de
gouvernement : éclairer, soutenir, combattre. Éclairer les aveugles, soutenir les faibles,
combattre les ennemis108 ».
Aller vers une autre gestion des ressources naturelles mondiales, en réaffirmant le droit
à l'information, le principe de participation du grand public et des acteurs économiques
et sociaux aux prises de mesures environnementales, revient à déterminer l'effet direct109
mais contradictoire110 d'une règle de droit, au sens de la convention d' Aarhus111. Cette
difficulté évoque une nouvelle piste d'application dégagée par la Cour de justice des
Communautés Européennes, selon laquelle les juridictions nationales doivent se servir
des stipulations internationales dénuées d'effet direct comme d'outils d'interprétation
des dispositions nationales.
48
demande a doublée115. Ainsi, la question de la gestion des ressources naturelles
mondiale est-elle directement liée au mode de gouvernance environnementale. Le
XXIème siècle ouvre une autre perspective de gestion, orientée sur une approche plus
qualitative au détriment de la gestion actuelle devenue «un sujet de préoccupation et de
négociation central, ne bénéficiant pas d’un support institutionnel à la mesure de son
importance116 ».
Or la Nature, en tant que système endémique, ne connaît que sa propre loi des systèmes.
Elle ne reconnaît donc pas celle des hommes et les déséquilibres liés à une gestion
désuète des ressources naturelles mondiales restent du fait de l'Homme.
Si «L'homme est un loup pour l'homme117 », «L’expérience n'est une lumière qui
n'éclaire que soi-même118 » et «Ce qui fait l'homme, c'est sa grande faculté
d'adaptation119 ».
L'émergence d'une autre gestion rationnelle, raisonnée des ressources mettrait en avant
la nécessité de penser, non en terme quantitatif des ressources mais en terme qualitatif.
Cette vision rejoindrait les modes de pensées autochtones, américains120, latino-
américains121, africains122 et australiens123.
49
politiques internationales de l'environnement et le droit comme le fondement et
l'instrument efficace de ces politiques126 ».
L'article 8 de la Convention met en avant une gestion in situ, ayant pour finalité « la
conservation des écosystèmes et des habitats naturels et le maintien de la reconstitution
de populations viables d'espèces dans leur milieu naturel et dans le cas des espèces
domestiques et cultivés dans le milieu où se sont développés leurs caractères
distinctifs ».
L'article 2 s'appuie sur une gestion ex situ en précisant que «la conservation d'éléments
consécutifs de la diversité biologique se fait en dehors de leur milieu naturel».
La CDB est donc un outil évolutif majeur dans le mode de gestion des ressources
naturelles mondiales. Mais depuis son adoption et sa ratification, force est de constater
que la transcription en droit interne, pour les états membres a été lente. L’Europe n'a
lancé la Stratégie Européenne pour la Biodiversité qu'en 2001, suivie par la France en
2004 avec l'adoption de la Stratégie Nationale pour la Biodiversité. Même si l'année
2011 a été marquée par l'adoption de la SNB 2010-2020, le rapport national de la CDB
reste pessimiste car peu contraignant.
126 PAQUES Michel, FAURE Michaël, La protection de l'environnement au cœur du système juridique
international et du droit interne. Bruxelles, éditions Bruylant, 2003, page 58
127 DE SADELEER Nicolas, BOM Charles.Hubert, Droit international et communautaire de la
biodiversité, Paris, éditions Dalloz, 2004, 780 pages
50
des ressources naturelles mondiales et la protection des milieux est devenue un enjeu de
sécurité juridique globale, lié à la situation économique et politique des états.
Cette nouvelle gestion passe à la fois par une meilleure connaissance endémique et un
autre regard sur la notion de partage des ressources naturelles mondiales128. Elle doit
être mieux adaptée aux risques potentiels et à venir liés à l'exploitation et l'exploration,
sur le plan endémique, social et sanitaire129. Des outils restent encore à définir ou à
requalifier, axés sur un management de la connaissance universelle et le partage des
informations au service de l'Humanité.
128 SA SAINTETE LE XIV ème DALAI LAMA, La lumière du Dharma, n°4800, éditions Pocket, 1995
pages 8 et suivantes
129 Article L.110-1 et suivants du code de l'environnement français
51
52
53
54
PARTIE I.
UNE APPROCHE JURIDIQUE INTRA-GENERATIONNELLE
TRADITIONNELLEMENT LIEE A UNE GESTION
CONSERVATOIRE ET VALORISANTE DES RESSOURCES
NATURELLES
55
56
La prise de conscience internationale, tel que nous la concevons au XXI ème siècle, des
pressions exercées sur les milieux anthropiques a débuté véritablement au XIX ème siècle,
sous l'ère industrielle. La protection juridique des milieux endémiques restait alors
consacrée à la sauvegarde des milieux naturels dans leur pureté originelle. La notion
moderne de risque environnemental n'existait pas encore, le phénomène de pollution
était récent et l'on ne pouvait en mesurer l'ampleur et les conséquences.
Les premières organisations nationales et internationales134 ont ainsi dans leur ensemble
reposé sur une gestion conservatoire des ressources naturelles, à finalité économique.
La Grande Bretagne fut un des premiers états à ouvrir la voie, par la création de
sociétés nationales que l'on ne nommait pas encore organisations 135, suivi par les États
Unis136, l'Allemagne137 et la France138.
130 Article 38 alinéa 1 statuts de la Cour Internationale de Justice , fondés sur les statuts originaires de la
Cour Permanente de Justice Internationale instituée le 13 décembre 1920
131 Convention sur la conservation de diverses espèces sauvages en Afrique utiles à l'Homme ou
inoffensives, ratifiée en 1900 à Londres par les puissances coloniales mais jamais entrée en vigueur
132 Convention internationale du 19 mars 1902, oiseaux utiles à l'agriculture, Décret du 12 décembre
1905, JO du 19 décembre 1905, RTSN vol 51 page 221,DIE-AM 902.22, RS/1 vol 4, page 1615
133 Convention de Berlin du 30 juin 1885 en vigueur le 7 juin 1886 sur la réglementation de la pêche
dans le Rhin
134 Acte de Berne du 19 novembre 1913 pour la fondation d'une commission consultative pour la
protection internationale de la Nature. Acte à l'origine de la création de l'UICN
135 Création de Association for the protection of British Birds en 1870, Royal Society for the protection
of Birds en 1899, Royal Society for Nature Conservation en 1912
136 Création de la Sierra Club en 1892, Audubon Society en 1905
137 Création de Bund fur vogelschutz en 1899
138 Création de la Ligue Protectrice des Oiseaux en 1912
139 Loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques, JORF du 4 janvier 1914 page 129
57
pour la protection des oiseaux140 et congrès internationaux non gouvernementaux pour
la protection de la Nature141, ont proposé la création d'une commission consultative pour
une protection internationale de la Nature. Le contexte de la première guerre mondiale
n'a pas permis l'aboutissement de cette dernière.
Fondateur d'une vision qualitative à long terme de la gestion des systèmes et des
milieux endémiques, ce scientifique a été un des premiers à démontrer qu'une plus
grande diversité d'habitat naturel pouvait conduire à une plus grande richesse en termes
de biodiversité et qu'un habitat naturel perturbé pouvait abriter une biodiversité
restreinte et sélective. Père des «lois fondamentales de biocénose», définies comme des
« lois d'inter-corrélations existantes », il a qualifié « d'être animé » la biocénose, et
« d'être inanimé », le biotope. Le concept, tel que connu aujourd'hui, « d'écosystème »,
fut établi en 1935 par Arthur George Tansley145. Ce dernier a englobé les notions
d'August Thienemann en établissant qu'un écosystème est un « système interactif qui
peut s'établir entre la biocénose à savoir l'ensemble des êtres vivants et le biotope qui
n'est que le milieu de vie de ces derniers ».
Ces notions, non juridiques, furent pourtant intégrées et codifiées dans le droit
international de l'environnement146. Cette science de la Nature fut à la base de la
création de l'UIPN147, inactive pendant la seconde guerre mondiale, qui est devenue
l'actuelle UICN148. Les outils juridiques novateurs, précédemment évoqués, pour
appliquer ce mode de gestion, furent les aires protégées 149, et les parcs nationaux150.
58
Sanctuaires juridiques dédiés à l'interdiction de la chasse des espèces sauvages151,
inscrits sur la liste des réserves internationales de biosphère152, et intégrés au patrimoine
mondial de l'UNESCO153, ces outils ont pourtant tardé en Europe. La Suède a
indirectement ouvert la voie en créant cinq parcs sur les territoires de la Laponie. La
Suisse en 1914, l'Espagne en 1918, ont poursuivi le mouvement. Le continent africain,
sous domination européenne, a crée le parc national du Virunga en 1925 au Congo. La
France n'a attendu que 1960154 pour créer son premier parc dans le Massif de la
Vanoise155.
L'approche des ressources naturelles, dans son mode conservatoire et protecteur s'est
ensuite intéressée aux diverses atteintes portées à l'environnement. Les premières
réflexions ont porté sur les litiges et les modes de réparation en matière de pollution156.
L'engagement de l'Europe en 1968157 et de l'Afrique158 auprès des Nations-Unies sont
récents en la matière, car ils restent liés au contexte géopolitique de la période. L'ONU
a poussé la société internationale à s'engager vers une conférence mondiale de
l'environnement159.
Une synergie entre les données scientifiques et les préoccupations juridiques s'est alors
amorcé dés 1970. La première étude portant sur les risques environnementaux induits
par la croissance économique et démographique, retranscrit dans un rapport dénommé
«The limits to growth162 » a proposé pour la première fois une prospective à 2100, en se
fondant sur cinq tendances majeures, à savoir sur l'industrialisation accélérée, la
croissance de population rapide, la malnutrition largement répandue, l'épuisement des
ressources non renouvelables, l'environnement détérioré.
Plus connu sous le titre « Rapport Meadows 163 », sa publication n'obtint pas l'unanimité
et lui fut reproché, l'idée d'une croissance zéro. Cet argument, auquel répondront les
auteurs, a donné naissance à la notion de croissance « responsable, soutenable », dans
sa version contemporaine actuelle. Visionnaire, ce rapport, réactualisé récemment 164, a
151 Interdiction de chasser les ours noirs, grizzlis, coyotes, loups, élans, cerfs, bisons, wapitis
152 Inscription sur la liste des réserves nationales le 26 octobre 1976
153 Inscription sur la liste des réserves nationales le 8 septembre 1978
154 Loi n°60-708 du 22 juillet 1960 relative à la création des parcs nationaux, JORF du 23 juillet 1960
155 Décret n° 63-651 du 6 juillet 1963 relatif à la création du Parc de la Vanoise
156 Convention de Londres du 12 mai 1954, modifiée par la convention MARPOL du 2 novembre1973
157 Résolution CE 68(4) du 8 mars 1968 relative à la pollution de l'air, résolution CE 68 (3) du 6 mai
1968 portant création de la charte européenne de l'eau
158 Convention d'Alger sur la conservation de la nature et des ressources naturelles, 15 septembre 1968
159 Résolution AGNU 2398 (XXIII) du 3 décembre 1968, relatif à la convocation d'une conférence
mondiale de l'environnement à Stockholm pour 1972
160 Convention de Bonn du 9 juin 1969, convention de Bruxelles, 29 novembre 1969
161 Accord de Copenhague du 16 septembre 1971, convention de Bruxelles du 18 décembre 1971,
convention de Londres du 1er juin 1972
162 Rapport Meadows, Halte à la croissance, publié le 3 mars 1972, réédition, éditions Rue de l'échiquier
2012
163 Cf note n°162
164 Pré cité n°162
59
contribué à nourrir les réflexions lors de la conférence de Stockholm165, et celles qui
s'en suivirent.
Et dans un Titre II, que l'approche intra-générationnelle reste une approche limitée au
cadre juridique des ressources naturelles mondiales, en énonçant le choix dépassé d'un
cadre juridique protecteur dans le Chapitre I, et analysant la portée controversée d'un
cadre juridique protecteur dans le Chapitre II.
60
TITRE I.
L'APPROCHE LIMITEE AU RATTACHEMENT JURIDIQUE
DES RESSOURCES NATURELLES
« C’est une triste chose de songer que la nature parle et que le genre humain ne
l’entend pas » Victor Hugo166
« Si nous prenons la nature pour guide, nous ne nous égarerons jamais. » Cicéron167
166 HUGO Victor, Voix intérieures, citations, éditions Eugène Renduel, 1837, 320 pages, page 158
167 CICERON, Lucullus o Academia Priora, 45 avant JC, citations, éditions Aldus, Venise, 1555
61
62
La genèse du régime juridique du droit international de l'environnement trouve ses
sources dans les textes du XIXème siècle et ceux de la première partie du XX ème siècle168.
Le cœur du droit international de l'environnement repose sur l'encadrement juridique de
la protection du vivant, défini comme « toutes les formes de vie qui ne dépendent pas
de l'homme169 ». La gestion intra-générationnelle des ressources naturelles mondiales
repose sur le caractère utile des espèces et espaces indispensables à la vie des hommes.
L'évolution géopolitique contemporaine a bouleversé l'équilibre entre États en prenant
en compte les nouveaux besoins des pays émergents. Cette prise en compte a placé les
ressources naturelles au cœur d'une gestion de pression, juridique et politique
déséquilibrée.
Si les discours politiques170 énonçaient que «les États-Unis doivent soutenir les peuples
libres qui résistent à des tentatives d’asservissement par des minorités armées, ou des
pressions venues de l’extérieur... », et que «l' aide doit consister essentiellement en un
soutien économique et financier171», les conséquences de cette interaction politique et
économique ont instauré une gestion optimale d'exploration et d'exploitation des
ressources naturelles mondiales. Les tensions nées autour des ressources naturelles
mondiales reposent aujourd'hui sur des politiques d'indépendance et de reconquête de la
biodiversité locale.
Un paradigme juridique s'est alors installé entre d'une part, l'absence de codification du
caractère dynamique des milieux endémiques et leur fragilité et d'autre part, la
clarification des limites données à une gestion d'exploitation optimale des ressources
naturelles. Ce paradigme se retrouve notamment dans la reconnaissance d'un patrimoine
mondial culturel et naturel visant à protéger des espaces et espèces menacés dés 1972,
tout en affirmant la notion de souveraineté nationale et le droit des peuples à disposer
de leur ressources, pouvant permettre une gestion optimale des ressources naturelles172.
La fin des années soixante a propulsé cette même gestion des ressources naturelles au
cœur des premières problématiques liées aux notions de gaspillage, de
surconsommation et leurs limites. Ces notions, non juridiques, ont contribué au
renforcement du cadre réglementaire international, à la base d'une véritable inflation
juridique. C'est dans ce contexte que Michel Prieur explique la «vague173 » de textes
internationaux avec plus de trois-cent traités multilatéraux et de neuf-cent traités
bilatéraux.
63
La Conférence de Stockholm174 va acter, pour la première fois, sur le plan international
l’essentiel des orientations actuelles en environnement, en reconnaissant une
responsabilité de l'Homme, dés son préambule : « l'homme a une responsabilité
particulière dans la sauvegarde et la sage gestion du patrimoine constitué par la flore
et la faune sauvages et leur habitat.175..».
Elle reprend la notion juridique de patrimoine naturel d'un territoire, et met l'accent, non
plus sur de la simple conservation des espèces et espaces, mais sur leur sauvegarde.
Cette amorce juridique énonce donc un changement de cap, au profit d'une nouvelle
forme de gestion des ressources naturelles, axée sur le principe de précaution.
Malgré ce grand pas juridique, la déclaration n'ayant qu'une portée juridique limitée, on
continue de parler de «conservation179 » et de «mise en valeur d'un patrimoine180 » pour
asseoir une gestion conservatoire et valorisante des ressources naturelles.
Avec l'évolution du droit intellectuel et notamment le droit des brevets, s'est crée un
quasi monopole d'exploitation des inventions réalisées à partir d'extraction des
ressources naturelles. Les déclarations de principe entre 1992 et 2002 ont apporté leur
contribution environnementale181 mais en ciblant d'avantage un encadrement juridique
dans les domaines d'exploitation des ressources naturelles.
Pour tendre sur ce délicat équilibre entre les deux notions, ont été retenues les notions
de responsabilité juridique des États, au travers d'obligations de moyen et de résultat,
ainsi que celle d'utilisation durable de leur ressources naturelles 183. Pour autant, ce texte
demeure l'un des premiers textes juridiques à reconnaître un droit aux communautés
174 Cf note n°166
175 Préambule de la déclaration de Stockholm du 16 juin 1972
176 Principe 1 de la Déclaration sur l'Environnement du 16 juin 1972
177 Principes 2 à 7 de la Déclaration sur l'Environnement du 16 juin 1972
178 Principes 8 à 26 de la Déclaration sur l'Environnement du 16 juin 1972
179 Article 192 de la Convention de Montego Bay de 1982 , cf note n°104
180 Article 4 de la Convention de l 'UNESCO du 16 novembre1972
181 Déclaration de Rio du 3 au 14 juin1992 ; déclaration de Johannesburg du 4 septembre 2002 ; Charte
européenne des ressources en eau du 17 octobre 2001
182 Convention sur la Diversité Biologique, CDB, Conférence de Rio du 3 au 14 juin1992
183 Article 3, CDB, Conférence de Rio du 3 au 14 juin1992, cf note n°13
64
locales et autochtones, et évoque déjà la notion de « partage juste et équitable » de
l'exploitation des ressources naturelles, sans le définir juridiquement, faisant ainsi déjà
appel indirectement à la notion de pater familias.
Complété et enrichi par d'autres textes fondateurs 186, mis en œuvre dans certains traités
et conventions187, le mode de gestion intra-générationelle, traditionnelle des ressources
naturelles, au départ conservatoire puis optimal, évolue. Les notions d'exploitation
excessive et d'épuisement188 sont retenues, et on parle en matière d'exploitation des
ressources naturelles, vivantes ou pas, de « niveau optimal admissible189 ». Les
réglementations internationales relatives aux méthodes de chasse, de pêche, dans des
espaces internationaux fragiles190 sont posées.
L'an deux mille ouvre le troisième millénaire sur l'accent porté à la fragilité juridique de
la réglementation internationale contemporaine. Cette fragilité repose notamment sur la
difficulté d'applicabilité des normes internationales. L'accès et le partage des avantages
tirés de l'exploitation des ressources naturelles sont donc confrontés à des inégalités
endémiques entre les États et leur conséquence sécuritaires. Ces situations portent
notamment sur les difficultés d'accessibilité pour les populations de proximité aux
ressources naturelles locales.
65
d'habitat et d'espèces en danger192.
192 Convention sur la conservation des espèces migratrices, Bonn, 23 juin 1979, entrée en vigueur le 1er
novembre 1983 ; Accord sur la conservation des chauves souris en Europe, Londres, 4 décembre
1991 ; accord sur la conservation des phoques de la mer des wadden, Bonn, 16 octobre 1990 ; accord
sur la conservation des petits cétacés de la mer Baltique et de la mer du nord, New York, 17 mars
1992
193 Mémorandum sur l'éléphant d’Afrique de l'ouest du 22 novembre 2005, mémorandum du phoque
moine de l'atlantique oriental et de la méditerranée du 18 octobre 2007 ; mémorandum des oiseaux de
proie du 4 décembre 2008
194 Conférence de Yamoussoukro du 1er juillet 1989
195 Uruguat round du 15 décembre 1993
196 Institutionnalisation des accords de Gratt en création de l'OMC le 1 janvier 1995
197 Convention africaine sur les ressources naturelles, l'environnement et le développement, Maputo, 11
juillet 2003, entrée en vigueur le 15 novembre 2005
198 Principe 3 de la Déclaration de Stockholm du 16 juin 1972, Cf note n°166
199 Déclaration de Lahaye du 11 mars 1989
66
CHAPITRE I.
LE CARACTERE INSUFFISANT DE RATTACHEMENT AU
DROIT NATUREL
67
68
L'approche intra-générationnelle des ressources naturelles mondiales reste liée à une
période géo-politique délicate, jalonnée de deux guerres mondiales et de périodes de
paix. Elle est ainsi en concordance avec l'objectif purement utilitaire des ressources
nécessaires à la vie des hommes et donc à la vision juridique de cette période. Il ne
pouvait pas être retenu la qualification d'exploitation optimale ni intensive des
ressources naturelles. La gestion conservatoire des ressources naturelles s'est enrichie,
après guerre d'une approche valorisante avec pour même finalité d'exploiter avec
cohérente ces dernières. La gestion traditionnellement conservatoire et valorisante des
ressources naturelles mondiales était donc en adéquation avec la période et une autre
approche du droit des affaires.
Or ce n'est pas tant le mode de gestion qui aujourd'hui peut faire l'objet de remarques,
c'est la manière dont les hommes l'ont utilisé. En établissant le principe de gestion
d'exploitation et d'exploration optimale, les hommes ont par le biais de cette gestion,
fragilisé l'ensemble des écosystèmes mondiaux. Cette fragilité progressive, qui a été
longtemps minimisée, a généré un effet à ricochet, dénommé «effet papillon », et
l'accès et le partage des avantages tirés de l'exploitation optimale a alors crée des
déséquilibres régionaux et nationaux aux conséquences internationales directes.
69
outils juridiques, adaptés au droit des affaires, n'a transposé ces modes de
responsabilités sociétales à ceux des organisations internationales qu'à compter de
2010203.
« Parce que l'homme a fait peser sur lui-même une responsabilité qui le dépasse, il
convient maintenant qu'il reprenne, plus modestement sa place, au sein de celle-ci. Il ne
peut le faire qu'en changeant son regard sur l'environnement, concrètement en
modifiant sa relation juridique avec elle204 ..».
70
Section I L' insuffisance de rattachement à la notion juridique de biens communs
rares
Dans ce nouvel état d'esprit juridique, les États deviennent les gardiens de la pérennité
de leurs ressources naturelles présentes sur leur territoire et concourent à la sauvegarde
mondiale des ressources naturelles en maintenant un équilibre et un contrôle juridiques
permanents, garant d'une sécurité juridique mondiale globale, au nom de la nécessaire
préservation de l'équilibre mondial des milieux naturels.
S'agissant des ressources naturelles, le droit naturel les rattache à une catégorie de biens
insaisissables. Rejoignant ainsi la plupart des théories libérales, cette conception tente
ainsi de répondre aux nouveaux enjeux environnementaux du XXI ème siècle et des
moyens de basculer vers une gestion nouvelle. Requalifier les ressources naturelles et
plus généralement la biodiversité, au sens du droit naturel, signifie qu'on requalifie
juridiquement ces dernières.
Pour Kant, tout droit naturel doit se résumer à la notion de liberté car cette dernière est
«l'unique droit originel revenant à chaque homme en vertu de son humanité et toute vie
sociale implique donc une limitation de la liberté de chacun à la condition de son
accord avec la liberté de tous, en tant que celle-ci est possible selon une loi
universelle207 ».
Mais l'exploitation optimale des ressources naturelles place la notion d'usus et d'abusus
205 HUGLO Christian, LEPAGE Corinne, La véritable nature du droit de l'environnement, revue Esprit,
1995, page79
206 Principe 1 de la Déclaration de Stockholm du 16 juin 1972 ; article 192 de la convention de Montego
Bay du 10 décembre 1982
207 KANT Emmanuel, Extrait du manuscrit Beantwortung der Frage: Was ist Aufklärung, éditions
originales 1784, réeditions Hachette 1997, 516 pages, traduit en français, pages 481 à 494
71
au cœur d'un paradigme juridique nouveau. Une redéfinition juridique des notions
d'«usus», «fructus » et « abusus » pour les ressources naturelles mondiales reste alors
nécessaire et passe par une requalification juridique.
72
§1 Une absence relative à la notion juridique de res communes rares
Même si la révolution des États, décrite par Georges Scelles, est en marche, l'évolution
du droit international de l'environnement connaît ses limites. Au delà des fonctions
d'intérêt général de l'Humanité, assumées par les États, se dressent des difficultés
juridiques liées à la délicate imbrication entre la gestion des ressources naturelles
frontalières, le droit souverain de l’État au vu de l'intérêt général de l'Humanité, et les
intérêts particuliers des gestionnaires des ressources naturelles.
Se pose alors la problématique pour les États de définir leur propre mode de gestion des
ressources naturelles locales, si ces dernières étaient rattachées à la notion de bonum
communes. La problématique se compliquerait alors si les mêmes ressources naturelles,
alors qu'elles sont soumises à une gestion optimale, devenaient rares.
Si Jack Testard208 énonce209 que la notion de rareté des ressources naturelles est un enjeu
en soi et ne peut être retenue en géologie, Philippe Hugon a noté que la raréfaction des
ressources naturelles reste une notion relative, placée sous l'angle économique, car on
va vers l'épuisement mondial des ressources.
Or les deux experts notent une absence juridique portant tant sur la qualification
juridique des ressources naturelles comme bonum communes que de l'absence de
rattachement au caractère rare.
Si le caractère de raréfaction des ressources naturelles mondiales est établi sur le plan
économique mondial depuis le rapport de l'OMC210, la notion de res communes n'est
pas récente211 et remonte à la Grèce Antique puis au droit romain. Aristote212 a défini
dans deux textes213 la notion de bonum communes « agathon » comme un moyen
permettant à travers la cité, de faire parvenir l'Homme au bonheur.
Il a associé ainsi la notion à une certaine vision politique de la vie en société. Reprenant
Aristote, Saint Thomas d'Aquin214 a dissocié la notion de la vision politique. Sa théorie,
critiquée par les courants modernes, sera reprise au XXème siècle par Gaston Fessard215
et par Ricardo Petrella216, qui lui, associa la notion de bonum communes au droit
universel et prioritaire d'accès aux ressources naturelles.
Dans une démarche plus contemporaine, Alain Giffard établit une distinction entre la
notion de bien commun, provenant du latin bonum communes, signifiant « bien
73
accessible, mis en commun » des biens communs, notion « utilisée par les
environnementalistes dans un sens proche des « res communes » et « res nullius ». Il
cite Friedrich Hayek217, en indiquant que le bien commun serait « la facilité offerte à la
poursuite des objectifs individuels inconnus » mais que la notion de biens communs se
rattacherait, par contre, au droit romain qui distingue les personnes (personæ) des biens
(res) .
Il établit le parallèle entre les choses religieuses 218( res sacrae, religiosae, sancae),
privées (res privatae) ou à personne (res nullius) et la théorie moderne du droit depuis
le XVIIème siècle basée sur les choses publiques (res publica), communes (res
communis) et celles qui n'appartiennent à personne (res nullius). Pour lui, la notion de
«bien », en opposition à celui de «droits» se rattacherait ainsi dés le Moyen Âge à celle
d'une « chose » matérielle et à un droit de propriété privée ou publique.
Alain Lipietz219 définit au contraire les bonum communes «non pas comme des choses,
mais comme des rapports sociaux220» ou plus exactement « des choses sur lesquelles ils
portent ». Il indique qu'au contraire, les bonum communis ne seraient pas des res
nullius, mais des res communes. Qu'il faudrait ainsi associer à la notion de bonum
communes la notion de munus signifiant «don et charge» que Karl Polanyi221 a traduit
par « réciprocité ».
Il énonce enfin que, si des ressources naturelles communes s'épuisent, ce ne serait pas
faute de régulation par la société, mais parce que la notion de réciprocité n'existerait
pas. Il dénonce ainsi le caractère marchand attribué à la gestion des ressources
naturelles et indique que ce sont ces liens marchands et le partage des bénéfices de leur
gestion qui ont conduit à une certaine vision de gouvernance mondiale des ressources
naturelles.
Ainsi pourrait-on retenir vis à vis de ces deux analyses que la notion pouvait être
retenue serait celle de bonum communes, au sens de res communes. Res étant une notion
retenue dans le droit romano-germanique.
Or le paradigme actuel repose sur l'évolution continue face à l'exploitation optimale des
ressources naturelles, de la notion de Patrimoine commun de l'Humanité, reposant sur la
notion de bonum communes au sens de res communes, dont les principes fondamentaux
et ses principes annexes constitueraient la base.
74
A. L'absence de rattachement à la notion juridique de res communes
Or, les équilibres naturels ne s'établissent qu'au travers d'une délicate harmonie des
cycles de la vie. L'approche autochtone de la gestion des ressources naturelles mondiale
reste prioritairement basée sur le principe que l'Homme, être vivant, n'est qu'un « hôte
car il ne posséderait pas la Terre et ses fruits 223 », et qu'il ne doit prélever que ce dont il
a besoin.
Cette autre approche juridique contemporaine, portant sur une gestion inter-
générationnelle des ressources naturelles, génère des interrogations tant sur la
reconnaissance juridique du principe de réciprocité et de cogestion frontalière des
ressources naturelles, que sur celle d'un droit souverain environnemental.
222 BARNETT Harold et MORSE Chandler, Rareté et croissance, l'économie de la disponibilité des
ressources naturelles, éditions John Hopkins press, 1952, 308 pages
223 Citation du chef Indien SITTING BULL Tatanka Yotanka, 1834-1890, USA
75
1. Des principes fondamentaux de rattachement
D'autres états auraient opté pour un troisième système mixte triple comportant soit du
droit romano-germanique, droit musulman et droit coutumier229 , soit du droit romano-
germanique, droit coutumier et common law 230. Enfin il existerait un dernier groupe
d’États, ayant opté pour un système mixte quadruple comportant soit du droit romano-
germanique, droit musulman, common law et droit coutumier 231, soit du droit romano-
germanique, common law, droit musulman, droit juif232.
Or, une des finalités du droit international de l'environnement étant l'intérêt commun de
l'Humanité, se sont naturellement posées les questions liées aux responsabilités des
États en cas de dégradation environnementale, de dommages-intérêts. De nouveaux
acteurs, associations et organisations non gouvernementales, qui seront analysés dans le
Titre II, ont participé au développement du droit international de l'environnement. Les
questions juridiques liées au recours aux trust, aux notions de mandat et gestion
d'affaire furent ainsi soulevées et débattues.
76
La notion de gestion d'affaire et de mandat, d'origine civiliste, est ainsi reconnue par la
majorité des pays membres de l'ONU. La question de l'applicabilité de ces quasi-
contrats dans les systèmes mixtes, doubles, triples ou quadruples s'est donc posée, à
compter des années quatre-vingt. En effet, les dommages environnementaux
internationaux et les dérives commerciales, engendrées par les montages juridiques
complexes des trust, ont inversé la tendance, poussant le droit anglo-saxon à se codifier
et le droit romano-germanique à renforcer son mode de preuve.
Cette problématique touche également les États musulmans, où les ressources naturelles
minières demeurent mais se raréfient. Les lacunes juridiques en droit musulman, droit
talmudique risquent d'être résorbées par l'influence du droit anglo-saxon.
A titre d'exemple, le droit anglais distingue les contrats simples, parfois oraux, des
contrats écrits appelé contrat sous sceau. Alors que, le droit contractuel américain
n'utilise plus les contrats sous sceau mais repose sur l'échange loyal des consentements.
Quant au droit contractuel soviétique actuel, ce dernier s'inspire du droit contractuel
français. Et le droit contractuel japonais repose sur la théorie de la relation de confiance
entre les parties, antérieure à la formulation juridique du contrat.
77
L'auteur parle d'éthique des affaires et préciserait que cette dernière «n’a jamais été
autant en vogue qu’à notre époque ; elle imprègne l’air du temps comme une sorte de
mythique utopie. Née dans le dernier quart du XX ème siècle, elle subsistera au moins
pendant les premières décennies du XXIème siècle236 ».
Il détaille avec précision ce qu'il décrit comme une délinquance en « col blanc » et
précise que «l’individualisme, donc l’égoïsme, règnent en maîtres et occultent le
jugement moral237 ». L'auteur compare alors ce nouveau type de délinquance à «une
nouvelle barbarie238 » qui «s’instaure en Occident, ...et ne provient pas d’une invasion
étrangère mais de causes internes».
L'auteur rattache la gestion d'affaire à la notion de droit romain de pater familias. L'État
et les propriétaires seraient désignés gestionnaire principal des ressources naturelles,
rattachées à la notion de res communes, et se devraient se comporter comme un pater
familias. L’État jouerait le rôle de régulateur national auprès des propriétaires privés,
gestionnaires des ressources naturelles territoriales, en vérifiant notamment si ces
derniers remplissent leur mission de gestionnaire au vu du principe de réciprocité. Ce
même principe serait rattaché au principe de transmission en l'état des ressources
naturelles, au vu des cycles de vie endémiques. Dans le cas du contrat de mandat, l’État
ou le propriétaire serait le mandataire, la Nature le mandant.
Or, la nature endémique des ressources naturelles mondiales évolue au gré des cycles de
vie et même disparaître sans l'intervention de l'Homme. Si «Toutes les choses de ce
monde sont sujettes au changement et à la destruction : c’est la loi de la non-
permanence239 », tout environnement devient à la fois un lieu d'échange, unique et
commun, où les ressources naturelles sont des « biens fondamentaux non substituables»
collectifs mais évolutifs. Une gestion, limitant ou anticipant leur raréfaction, peut par
voie de conséquence être ainsi assimilée à une gestion pater familias car elle ne met pas
la communauté internationale en danger.
Cette autre approche donne alors à la société civile un droit à la sécurité internationale
par le biais d'une nouvelle gouvernance et d'un nouvel ordre mondial. Elle rejoint alors
les dispositions de l'article 28 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme
énonçant que «Toute personne a droit à ce que règne, sur le plan social et sur le plan
international, un ordre tel que les droits et libertés énoncés dans la présente
Déclaration puissent y trouver plein effet».
78
2. Des droits et devoirs fondamentaux
La première notion fondamentale, dont découle la notion de res communes rares, est
celle d'intérêt général de l'Humanité. Au nom de cet intérêt, s'applique une gestion
d'affaire communautaire, où la raréfaction des ressources naturelles devient le principe,
et l'exploitation optimale incontrôlée l'exception. De cette notion découle celles de
droits et devoirs collectifs et individuels, contribuant à gérer, faire prospérer et
transmettre un patrimoine universel, dénommé patrimoine commun de l'Humanité. Ce
dernier serait insaisissable et inaliénable, car il appartiendrait à tous.
Ici, le rattachement des ressources naturelles à la notion de res communes rares prend
tout son sens. La notion juridique contemporaine de res communes doit se différencier
de celle de res nullius, retenue par le professeur Sompong Sucharitkul240 comme «une
chose ou un bien quelconque pouvant faire l'objet de droits particuliers mais qui
peuvent être rattachés à une personne». Ce juriste américain, considère que tout
principe de droit puise ses origines dans un événement factuel, un usage ou une
coutume, devenant source de droit.
Son évolution est donc liée à ces derniers et à la pratique juridique qui s'y rattache. La
pratique et la maturité du droit international de l'environnement découlent des
conséquences liées à l'exploration et l'exploitation optimales des ressources naturelles
mondiales. Un grand nombre d'experts se sont positionnés sur l'inquiétude grandissante
de l'absence d'un statut portant sur la qualification juridique de rareté des ressources
naturelles241. Or, le droit étant une matière vivante, mouvante, un concept juridique peut
naître, vivre et tombé en désuétude. Son utilisation serait donc liée aux évolutions et
besoins des sociétés. Le professeur Sompong Sucharitkul comparerait d'ailleurs, ce
phénomène de cycle vicieux, à celui des transmigrations, que les bouddhistes appellent
communément « Samsara Vata ». Ainsi, une notion juridique peut exister de façon
commune et revêtir plusieurs aspects selon le pays, les coutumes.
240 SUCHARITKUL Sompong, Évolution continue d'une notion nouvelle : le patrimoine commun de
l'humanité, Université de Notre Dame, Illinois, USA, mars 2012, 30 pages
241 IFORE, Institut de formation de l'environnement, Géopolitique des ressources rares, conférence de
Paris des 24 et 25 mars 2009
79
l'intérêt général de l'Humanité, l'Homme ne serait pas propriétaire du patrimoine
environnemental dans lequel il vit et qu'il devrait le gérer pour le transmettre au mieux
des intérêts collectifs. Cette notion crée un devoir de mémoire environnemental inter-
générationnel, obligation morale de moyens mais aussi de résultat et renvoie à plusieurs
concepts juridiques comme le droit de transmission, la notion de pater familias, la
question de responsabilité de ce dernier, en cas de manquement à ses obligations.
La transmission des ressources naturelles peut s'amalgamer à celle d'un res communes
rare, insaisissable et inaliénable. Ce principe, que nous verrons dans le paragraphe 2,
reste délicat mais pas impossible à conjuguer avec le principe de souveraineté nationale.
Si la rhétorique juridique repose sur le fait de déterminer s'il existerait un droit ou des
droits aux générations futures, le simple constat juridique indique que cette notion
242 Cf note 40
243 Principe I de la Déclaration de Stockholm, 16 juin 1972, Cf note n°166
80
s'apparente à un devoir de mémoire environnemental pour les générations futures, et un
futur droit à jouir d'un équilibre environnemental stable et de qualité, qui va bien au
delà d'une politique de préservation classique.
Basé sur une autre gestion, inter-générationnelle, raisonnée, alliant développement et
respect des systèmes endémiques locaux et globaux, ce concept pose la question de
l'existence d'une obligation morale envers les générations futures mais également celui
de la nature des responsabilités individuelles et communes qui en découlent. Ce
paradigme juridique se retrouve en droit anglo-saxon comme dans le droit romano-
germanique.
Se pose aussi la question de déterminer comment pacifier ces notions pour les rendre
internationalement cohérentes et applicables dans tous les systèmes juridiques.
L'émergence d'un nouveau statut des ressources naturelles, relevant du concept de res
communes, et accompagné de la reconnaissance juridique de la raréfaction à la source,
pourrait s'avérer indispensable pour être à la base d'un nouveau type de gestion des
ressources naturelles. Mais ce nouveau statut aurait indéniablement pour conséquence
directe, une modification profonde de la qualification juridique traditionnelle de la
notion de propriété tel qu'érigée en droit contemporain, tous systèmes juridiques
confondus.
La transmission aux générations futures découle ainsi de la vision qu'on peut avoir de
l'appropriation qualitative et non quantitative des ressources naturelles. Se posent alors
les principes annexes de la notion de res communes rares.
81
B. Le paradigme juridique autour de la nouvelle qualification juridique
Tous les éléments présents dans la nature deviennent ressource naturelle quand
l'Homme prend conscience des moyens qu'il peut avoir s'il s'en sert comme telle.
Ainsi, le radium est-il devenu ressource naturelle le jour où on a découvert ses aspects
biologiques et chimiques. A contrario, les ressources naturelles, proprement dite,
n'existent donc pas sans être rattachées à une finalité endémique ou technologique,
déterminée.
Si la notion de maintien des grands équilibres naturels a été instaurée en 1972, la notion
de patrimoine mondial environnemental, des ressources naturelles minières et
biologiques, trouve ses fondements dans les premières conventions sur le droit de la
Mer244 et dans les traités sur l'espace, la Lune et les corps célestes245.
Dans ces textes fondateurs, les ressources naturelles seraient perçues comme un
patrimoine commun inaliénable, à la gestion partagée et à l'utilisation purement
pacifique.
En effet, même si on fait référence à ce concept, force est de constater qu'un paradigme
juridique en droit international comme en droit interne s'est instauré, tant sur une nature
juridique équivoque des ressources naturelles rares que sur la réalité de leur fonction.
244 Conférence des Nations-Unies sur l’eau, Mar del Plata, 14-25 mars 1977, Convention de Montego
Bay du 10 décembre 1982 entrée en vigueur le 16 novembre 1994, cf note n°104
245 Traité de l'espace du 27 janvier 1967, entré en vigueur le 10 octobre 1967 ; Traité sur la lune du 5
décembre 1979, entré en vigueur le 11 juillet 1984
82
1. Une nature juridique équivoque des ressources naturelles rares
La nature juridique des ressources naturelles, dans leur généralité ou perçues comme
rare reste floue.
L'originalité juridique de certains états reste établie. En droit français, par exemple, le
terme de « ressources » est présent dans le code de l'environnement plus de cent
cinquante fois246, et celui de « ressources naturelles » serait cité dans plusieurs codes
plus de cent quarante fois mais sans pour autant fournir une définition claire et précise
de la notion247.
Le premier est relatif à la reconnaissance juridique d'un nouveau statut des ressources
naturelles. En effet, il crée, en opposition au capital social et humain, pour la première
fois, une nouvelle catégorie de capital, égal aux deux premiers. Loin du concept naturel
de patrimoine commun, il donnerait ainsi un nouveau statut juridique aux ressources
naturelles, par la qualification juridique de capital.
Le second est relatif à la nature juridique même des ressources naturelles. Même si le
rattachement à la fonction d'utilité reste présent, le rapport établit et reconnaît, pour la
première fois, le caractère rare des ressources naturelles. Le rapport fait ainsi une
distinction entre les ressources naturelles, facteur de production, et les ressources
246 C env : articles R213-49-3(eau), L210-1(eau), L141-3 (ressources), L213-10 (eau), L331-15-6,
R212-3(eau), L110-1 (patrimoine commun), L333-1, L211-3 (eau), L541-14-1 (déchets), L561-3,
L420-1( ressources naturelles renouvelables), L161-1(ressources naturelles pour sols, eaux...), L214-
3-1 (eau), L218-32 (eau), L213-10-9 (eau), R334-4 (minéral), L214-2 (eau), R511-9 (ICPE), L211-7
(eau)
247 Ccom, articles R225-105, Annexe 7-4 ; Cconsom, article L112-10 ; CGI, annexe 2 article 242 A, 31,
81 A, 39, 795,1519, 1609 nonies C, 38 bis ; CGPPP, article R2124-2 ; CGCT, article LO6214-6,
R4422-31, L3332-1, L4433-15, LO6314-6, LO6414-3 ; CVR, article R173-2 ; CPP, article R48-1
248 Article L.110 C env
249 OMC, Rapport sur le commerce du monde 2010, Genève ISBN 978-92-870-3708-4, 256 pages,
page 48
83
naturelles, marchandises mobiles ou immobiles. Il reprend le terme « rare » utilisé par
les chimistes pour les gisements de minéraux précieux qu'ils nomment « terres rares »,
indique que ces dernières sont composées de 17 minéraux et se distinguent des terres
cériques, dites légères (lanthane, cérium, praséodyme, néodyme et samarium) et des
terres yttriques, dites lourdes. Il énonce ces minéraux comme suivants: Scandium,
Yttrium, Lanthane, Cérium, Praséodyme, Néodyme, Prométhium, Samarium,
Europium, Gadolinium, Terbium, Dysprosium, Holmium, Erbium, Thulium, Ytterbium,
Lutécium. Et précise que ces lieux de gisements se trouvent principalement en Chine,
Kazakhstan, Ukraine. Et que leur utilisation se retrouve dans la Haute technologie,
précisément dans l'armement pour les guidages de missiles, ou les dispositifs de visée
nocturne mais également dans le domaine de l'électronique, des énergies renouvelables.
Il définit ainsi, à titre d'exemple, l'électricité comme une ressource naturelle, au sens où
elle provient d'un combustible brut exploité, extrait, transformé, distribué et
commercialisé250. Cette chaîne d'intégration verticale où les ressources naturelles
passent entre les mains d'intermédiaires multiples lui paraît, économiquement logique
mais juridiquement problématique251.
Car la notion de rareté des ressources naturelles doit se regarder sur l'aspect quantifiable
des stocks de ressources naturelles mondiales. Et, selon le rapport, la modification des
moyens de distribution depuis la déréglementation des marchés à la fin des années
soixante dix, a conduit à la raréfaction des ressources naturelles.
Longtemps réglementés par des contrats bilatéraux à long terme, ces derniers ont été
remplacés à partir de 1982 par des contrats négociés, qui ont conduit à sur-estimer les
capacités réelles des stocks mondiaux de ressources naturelles et ainsi participer à la
volatilisation des prix252. Mais il est à noter une mauvaise application des contrats à
long terme, encore utilisés pour les combustibles aux USA et en Russie 253, accentuant
ainsi le phénomène de raréfaction des ressources naturelles. Ainsi, passés entre des états
exportateurs de ressources naturelles et des investisseurs privés, ces contrats comportent
notamment une licence d'exploration et d'extraction, un régime fiscal particulier, et
peuvent même s'accompagner de phénomène de troc, poussant ainsi à un accès quasi
illimité aux ressources naturelles sans clause particulière.
La raréfaction des ressources naturelles est donc une conséquence directe du mode de
gestion optimale, étroitement liée à la croissance démographique mondiale, mais aussi
aux phénomènes d'indépendance des états décolonisés. La libéralisation du marché des
ressources naturelles a accéléré ce phénomène. La proximité des ressources naturelles
250 Cf note n°249, page 57
251 Cf note n°249, pages 64 et 65
252 Cf note n°249, page 63
253 Cf note n°249 page 64
254 Cf note n°249 page 53
84
étant aujourd'hui plus grande, les capacités mondiales ayant été longtemps sous-
estimées, le phénomène de raréfaction devient juridiquement incontournable.
Le rapport énonce également que les modes d'extraction et d'exploitation pose ainsi une
double problématique génératrice d'instabilité juridique. La première repose sur la
volatilité de leur prix soumis à une forte pression des cours liée à la politique de la
Chine. La seconde repose sur la gestion des boues résiduaires résultant de leur
extraction. Ces boues fortement toxiques ne sont actuellement pas soumises à une
gestion de traitement dépolluant. Les dispositions environnementales chinoises restent
sur ce point vagues et non contraignantes.
Alors que les ressources naturelles sont reconnues comme indispensables à l'économie
mondiale actuelle, la caractère rare de cette dernière causée par la dépendance, reste
ainsi la cause principale des clivages actuels entre les pays émergents, où notamment
les gisements en ressources naturelles minières sont les plus importants, et les pays
développés, exportateurs pour la plupart.
255 HARDIN Garett James, 1915- 2003, écologue américain; HARDIN Garret James, The Tragedy of
the Commons, Science, vol. 162. n° 3859, 13 décembre 1968, p. 1243-1248
256 Cf note n°249 page 68
85
2. Une fonction juridique réductrice des ressources naturelles rares
La fonction juridique des ressources naturelles rares est ainsi liée à la vision
économique et la gestion qui en découle. Elle se rattache donc à la notion d'usage. On
pourrait penser que c'est de la quantité des ressources, que pourrait dépendre
l'utilisation qu'on a fait. Mais les trente dernières années ont démontré que quelque que
soit la quantité dont il dispose, l'Homme moderne tend à sur-consommer et à sous-
estimer les stocks des ressources naturelles mondiales, participant ainsi à l'épuisement
progressif des ressources naturelles non renouvelables. Face au problème de
raréfaction, la quête de nouvelles ressources s'est donc organisée.
Or, si l'on ne regarde la fonction juridique des ressources naturelles rares, qu'au sens
d'épuisables et vitales, il pourrait y avoir, en premier lieu, un aspect réducteur. Car, les
ressources naturelles dépendraient de l'usage qu'on en fait. La fonction juridique des
ressources naturelles, si l'on s'en réfère uniquement à la notion d'usage, détermine ainsi
un lien direct avec le caractère rare ou non de ces dernières.
Les ressources naturelles minières, mise à part le pétrole et le gaz, ne présentent pas,
selon certains experts, le caractère épuisable, donc rare car rien n'aurait été exploité au
delà de la croûte terrestre...Or les demandes des trente dernières années, notamment
dans le domaine des télécommunications, ont accentué le caractère rare de certaines de
ces ressources naturelles. La volatilisation des prix négociés par les bourses
technologiques et informatiques258 a crée des phénomènes de spéculation, jusqu'alors
inconnus. Les gisements de minéraux rares, précédemment évoqués, dénommés par les
chimistes « terres rares » en raison de leur propriétés électroniques et optiques uniques
sont également concernés car les modes d'extraction et d'exploitation restent liés à la
demande mondiale exponentielle. Leur utilisation intensive actuelle pose tôt ou tard la
problématique d'une stratégie internationale globale.
257 RICARDO David, Les principes de l'économie politique et de l'impôt, éditions originales John
Murray, 1817, 372 pages, chapitre I, page 5 ; MALTHUS Thomas, Essai sur le principe de population,
édition Flammarion 1992, 230 pages, pages 10
258 National Multi Commdity Exchange of India , of Dubaï , crées en 2002 et 2004
86
des ressources naturelles, la fonction juridique de ces dernières pourrait revêtir alors un
aspect durable. On peut en effet rendre durable quelque chose de rare par la technique
du recyclage. Le recyclage pourrait certes ralentir, retarder l'épuisement de la ressource
mais pas l'éviter. La fonction se rattache donc à la notion de responsabilité dans l'usage
de la ressource. On peut également utiliser indirectement les ressources naturelles rares
et échanger les produits incorporant ces ressources. Ainsi, sur cette réflexion, de
nouveaux types de contrats internationaux, portant sur du commerce virtuel des
ressources naturelles ont pu se développer. Le cas du commerce virtuel pour le secteur
de l'eau démontre l'effectivité de la fonction juridique des ressources naturelles rares.
L'exportation de produits à forte intensité d'eau dans des pays riches en réserve d'eau
douce, devient juridiquement un moyen de combattre la raréfaction des ressources
naturelles en eau douce.
C'est le cas de la Thaïlande, arrosant trop ses rizières destinées à l'exportation, ou des
pays d'Afrique comme le Kenya. Cette deuxième fonction juridique se rattache ainsi à
la notion de responsabilité dans l'usage des ressources naturelles. La fonction juridique
des ressources naturelles rattachées au caractère rare, peut revêtir en dernier lieu un
aspect novateur par le biais des nouvelles technologies en rendant commun des
ressources devenues rares.
C'est ainsi le cas de la fabrication artificielle de carbone naturel contenu dans le quartz,
notamment le diamant. Une entreprise espagnole 260 a mis au point un procédé
révolutionnaire sur la fabrication de diamants industriels à partir des cheveux humains.
Cette technique révolutionnaire pourrait mettre fin au pillage des mines de diamants en
Afrique du Sud et pourrait peut être être utilisée dans la fabrication de l'or de synthèse.
Le mode d'extraction et d'exploitation soumis à un label international pourrait être
également un moyen notamment de responsabiliser autrement les gestionnaires sur les
questions transversales comme le travail des enfants et la gestion des boues résiduaires.
Cette troisième fonction se rattache ici à la notion de dommages dans l'usage des
ressources naturelles.
Mais l'historien et juriste Arabe Ibn Khaldun 261 posait la théorie du cercle de
gouvernance perpétuel où les sociétés pouvaient croître et décroître pour mieux
259 HOEKSTRA Adil et CHAPAGUAIN Aldaya, Organisation Mondiale du Commerce, rapport sur le
commerce du monde 2010, Genève ISBN 978-92-870-3708-4, 256 pages, page 77
260 MAINGRE Priscilla, Les trésors cachés de notre corps humain, comment transformer vos cheveux
en diamants avec la société sévillane Irisgem, le Matin, 14 février 2013
261 KHALDUN Ibn, Livre des exemples, volume I, éditions Gallimard, collection Bibliothèque de la
Pléïade, n°490, 2002, 1632 pages, pages 500 et suivantes
87
renaître. L'Europe du XVIème siècle reposait sur la pensée moderne de Machiavel et le
modèle d’État moderne occidental. Le droit international de l'environnement a
révolutionné cet état d'esprit. La singularité qui touche aujourd'hui la grande mouvance
mondiale réside dans le fait qu'aujourd'hui, les États, autrefois colonisateurs, ne
disposent plus de moyens juridiques de pressions sur les pays émergents, anciennement
colonisé. Les données géopolitiques ont changé et la mondialisation a ouvert un champ
d'application nouveau au droit international de l'environnement. Sa finalité initiale s'en
est trouvée grandie.
Or, les divers schémas institutionnels actuels démontrent qu'il reste beaucoup de chemin
à parcourir car la notion d'intérêt commun de l'Humanité reste à établir.
De cette notion découlerait celle de res communes de l'Humanité, non encore qualifiée
sur le plan international. Alors que si on rattache à la notion de ressources naturelles,
celui de res communes rare, cette nouvelle perspective juridique servirait de socle, pour
transiter vers d'autres notions permettant d’asseoir une nouvelle forme de gouvernance.
88
§2 Une absence relative à la notion juridique de res communes de l'Humanité
Or, mise à part Karl Marx262 puis Karl Polanyi263, qui ont revendiqué une gestion
publique des ressources naturelles, la notion juridique contemporaine de bonum
communes ne fut pas clairement définie et ne revêt pas le caractère réglementaire ou
législatif. Oubliée, cette notion réapparue pourtant au XX ème siècle, devient peut-être au
début du XXIème siècle, un point de ralliement économique puis juridique.
Quand Kenneth Boulding, en 1966, lança un appel à l'abandon d'une économie ouverte,
basée sur des ressources naturelles « illimitées264 », il énonçait que l'Homme devait
trouver sa place dans un système écologique cyclique où chaque ressource était, par
nature, limitée. Il ne parlait pas alors de bonum communes mais de gestion collective
qu'il a défini comme la « complémentarité des actions individuelles265 ».
Repris partiellement par les auteurs du rapport Meadows 268, notamment sur la théorie de
262 MARX Karl, Contribution à la critique de l'économie politique, rééditions Gallimard, 1972, 210
pages
263 POLANYI Karl, La Grande Transformation, éditions Gallimard, Bibliothèque des sciences
humaines 1983, 420 pages
264 BOULDING Kenneth, The Consumption Concept in Economic Theory, Revue américaine
d'économie, n° 35, 2 mai 1945, 14 pages, page 14
265 BOULDING Kenneth, Income or Welfare, Revue des études économiques, n°17, 1949, 86 pages,
page 78
266 GALBRAITH Kenneth , MISHAN Ezra, Potter et Christy
267 HARDIN Garrett, The Tragedy of the Commons , Revue Science, 13 décembre 1968, volume 162
page 1243 à 1248
268 Cf note n°163
89
la raréfaction des ressources naturelles, beaucoup269 s'accordent à dire que les deux
analyses ne proposent pas une notion juridique de bonum communes, et qu'elles ne
tiennent pas compte de la capacité humaine à innover, s'adapter et maîtriser la
technologie afin de développer une utilisation raisonnée des ressources naturelles.
Réinventée par Elinor Ostrom en 2008, la notion de res communes revêt un aspect
quasi-juridique novateur. Point central de ses recherches, cette économiste américaine
demandait encore en juin 2012 une reconnaissance internationale juridique en intégrant
la notion de risque à la gouvernance actuelle.
«Il nous reste une décennie avant que le coût économique des solutions actuelles ne
devienne trop élevé. Si nous n'agissons pas, nous nous exposons à des changements
catastrophiques et peut-être irréversibles de l'écosystème. Notre premier objectif doit
être de traiter ce risque à l'échelle de la planète, plutôt que de mettre en danger le bien-
être des générations futures270 ».
Elle définissait les ressources naturelles mondiales comme des « ressources partagées
par un groupe de personnes et qui sont vulnérables aux dégradations et aux
enclosures271 ».
Elinor Ostrom fut la première à indiquer que les bonum communes sont des res
communes, ensemble des ressources naturelles mondiales et qu'il faut y inclure un
nouveau type de ressources que sont les données numériques environnementales. Elle
associe ainsi les ressources naturelles à la notion de res communes et non res nullius.
Elle pensait que leur mode de gestion devait être avant tout locale et qu'il n'existerait
alors pas un mode de gestion unique mais des modes de gestions des ressources
naturelles et que la gestion des ressources naturelles mondiale est polycentrique.
La gestion ne passerait donc pas uniquement par une gestion valorisante classique des
ressources naturelles, mais par une autre gestion, plus inter-générationnelle, anticipative
de la préservation des ressources. Cet autre mode de gestion demande une prise de
conscience globale des interactions sociales au centre des partages des ressources.
Les ressources naturelles seraient donc des res communes mondiaux menacés de
dégradation et d'appropriation, rattachées à la vieille notion des enclosures britanniques
des XIIème et XVIIème siècle. Ces ressources naturelles globales seraient ainsi l'air, les
océans, les terres, les forêts, le climat. Dans cette approche, l'aspect global de la prise de
risque planétaire ne serait pas perçue comme un phénomène catastrophe mais au
contraire comme une opportunité nouvelle pour développer de nouvelles formes de
gestion.
La principale leçon d’Elinor Ostrom est d'apprendre à cultiver les différences et les
synergies. Car elle énonçait en effet, que ceux qui vivent de la nécessité d’assurer la
269 NORDHAUS William, a question of balance,Weighing the Options on Global Warming Policies,
éditions du Congrés, USA, 248 pages, 1992, réédition 2008 Yale University Press June 24
SIMON Julian Lincoln, the ressourceful Earth, a response to global 2000, éditions Wiley Blackwell,
1971, 585 pages, réédition avec KHAN Herman, 1984, éditions Oxford , Angleterre
270 OSTROM Elinor, conférence du 12 juin 2012, La politique verte doit être impulsée de la base,
éditions les Echos,
271 HESS Charlotte, OSTROM Elinor, Inscrire les communs de la connaissance dans les priorités de
recherche, Libres Savoirs, les biens communs de la connaissance, éditions C & F éditions, 2011
90
permanence des ressources naturelles, essentielles à leur survie, vitales, détiennent les
meilleurs types de gestion car ils « ont bien plus d’imagination et de créativité que les
économistes et les théoriciens ne veulent bien l’entendre 272 ».
Mais elle indiquait aussi la nécessité d'établir une qualification juridique internationale
et transnationale pour garantir des droits et devoirs communs ainsi que des
responsabilités communes.
Or, la nature juridique des ressources naturelles, associées à la notion des res communes
et qualifiées comme tels, se fonde sur des droits empruntés aux droits de l'Homme et
reste absente de la scène internationale.
272 LE CROSNIER Hervé, Elinor Ostrom ou la réinvention des biens commun, le Monde diplomatique,
15 juin 2012
91
A. L'insuffisance de reconnaissance d'une nature juridique novatrice
Régis Marchiaro, estimait à ce titre en 1990, que le choix d'un mode de gestion
mondiale concernant des ressources naturelles en eau, mal adapté aux réalités juridiques
et sociaux économiques des États, serait générateur d'un état de «crise globale273» dés le
XXIe siècle.
Des questionnements tant sur les obligations de moyens que de résultat pèsent
aujourd'hui aussi bien sur les États que sur les acteurs privés. Cette pyramide juridique,
où s'entremêleraient droits et obligations des exportateurs comme des importateurs,
repose sur une interrogation juridique majeure.
Qualifiée de «capital naturel» par l'OMC depuis 2010274, la question actuelle s'oriente
donc sur le fait de reconnaître ou pas dans l'avenir la nature juridique de sujet de droit
aux ressources naturelles et leur caractère transmissible.
92
1. Des ressources naturelles non reconnues comme sujet de droit
Si le droit des peuples à disposer d'eux même reconnaît une souveraineté permanente
sur les richesses et ressources naturelles275, et qu'il est affirmé276 que « les peuples
peuvent, pour leurs propres fins, disposer librement de leurs richesses et ressources
naturelles, sans préjudice des obligations qui découleraient de la coopération
économique internationale, fondée sur l'avantage mutuel et le droit international », la
difficulté d'accès des populations locales aux ressources naturelles, repose aujourd'hui
sur une problématique des enjeux fonciers liés à la nature juridique des ressources
naturelles et sur généralement, la notion de sujet de droit.
Cette distinction, selon l'auteur, s’avère illusoire car les deux notions sont pour lui
contradictoires et incompatibles dans des « structures économiques, legs de la période
coloniale ». Pourtant, l'auteur insiste sur l'importance de l'adoption du principe de
souveraineté permanente par l'ensemble des pays occidentaux, au lendemain de la
seconde guerre mondiale et en pleine décolonisation.
La nature juridique des ressources naturelles est donc liée au départ à la nature même de
la souveraineté d'un État et à sa propre définition de ce qu'il nomme les ressources
naturelles.
En premier lieu, pour délimiter la nature juridique des ressources naturelles, rattachée
au concept des droits de l'homme, plusieurs distinctions sont proposées. Ainsi, une
première distinction peut reposer sur le caractère vivant ou non des ressources
naturelles.
Cette dernière l'est déjà indirectement par le biais de rapports internationaux, nationaux,
275 AGNU, résolution A/523 du 12 janvier 1952 ; AGNU, résolution A/626 du 21 décembre 1952
276 AGNU, résolution A/1514 du 14 décembre 1962 ; AGNU, résolution A/3171 du 17 décembre 1973
277 FISHER Georges, La souveraineté sur les ressources naturelles, Annuaire Français de Droit
International, volume 8, 1962, 1320 pages, page 519
278 Pré-cité page 520, note 15
279 RCADI , Recueil de l'Académie de Droit International, volume 6, 1925, pages 34 et 35
93
débats280. Une seconde distinction peut reposer sur le caractère génétique ou non des
ressources naturelles. Ici l'UICN propose depuis 2009 281, une définition juridique des
ressources naturelles génétiques, en se basant sur la Convention de Diversité
Biologique (CDB).
Enfin, une troisième distinction peut reposer sur la notion de ressources naturelles
« vitales » et « non vitales ». Mais la difficulté résiderait dans la définition même de la
nature juridique du sens vital282.
Certains juristes français 283 énoncent ainsi que «la règle de droit, en tant qu’elle régit
une situation donnée, détermine, pour les personnes qui se trouvent dans cette
situation, des prérogatives déterminées. Les droits subjectifs sont ainsi le produit de la
confrontation de la personne à la règle de droit objectif. De la sorte, les sujets de droit
se réduisent aux personnes, et tout ce qui n’est pas personne – la terre et l’eau, comme
les animaux – entre dans la catégorie des choses, lesquelles ne peuvent être qu’objets
de droit». Un sujet de droit revêt la personnalité juridique.
En droit civiliste moderne284, tout sujet de droit est donc par nature une personne
vivante, il ne peut donc être ni une chose, ni un objet. La notion de personne serait
nuancé en distinguant personne physique et morale : «la notion juridique de personne
– la personnalité juridique – dépasse de beaucoup le donné immédiat. Bien sûr, elle
correspond, au premier chef, aux êtres humains, que le juriste désigne sous
l’appellation de personnes physiques. Mais elle s’étend aussi à différents groupements,
de personnes et de biens, dénommés, par opposition aux personnes physiques 285... ». La
faune, la flore sauvage, et plus généralement l'ensemble des ressources naturelles
vivantes sont considérées aujourd'hui en droit civiliste, comme des choses, non des
êtres vivants, sujets de droits et dotés de la personnalité juridique. La complexité du
droit civiliste ne se pose pas en droit anglo-saxons. En effet, cette dichotomie juridique
n'existe pas dans le droit anglo-saxon, tout être vivant étant considéré comme un sujet
de droit.
94
l'hypothèse d'une reconnaissance juridique de la nature, et plus précisément d'un statut
de sujet de droit environnemental spécifique aux ressources naturelles. Cette vision
humaniste, basée sur la notion de droits de l'homme, permettrait ainsi un transfert
partiel du statut d'objet du droit en sujet de droit, et pourrait être une alternative au
mode de gouvernance environnementale actuel.
Il est ainsi proposé l'idée que si la nature juridique des ressources naturelles, objets de
droits négociés aujourd'hui, mute vers une nouvelle nature juridique intermédiaire, liant
droits de l'Homme et sécurité alimentaire, politique et économique, la problématique de
l'accès des populations locales aux ressources naturelles « vitales » serait résolue.
Cette approche transversale du droit permettrait ainsi un concept nouveau, liant les
concepts de libertés publiques, droits naturels fondamentaux internationaux, biens
communs, en proposant une nouvelle forme de souveraineté foncière et alimentaire et
de nouveaux droits à la propriété intellectuelle propres aux ressources naturelles. Ce
recours souhaité par les non juristes, à une restriction légale des libertés au profit d'une
sécurité juridique environnementale mondiale, réinventant ainsi la maxime de
Lacordaire, revient à proposer une véritable transposition juridique du droit de propriété
intellectuelle sur les ressources naturelles, à la notion de droit à l’exception culturelle et
alimentaire. Ce principe de restriction légale existe déjà dans le domaine des droits
civiles et politiques.
Les Principes de Syracuse, concernant les dispositions du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques qui autorisaient des restrictions ou des dérogations289, ont
indirectement appliqué les principes de Lacordaire en légiférant la restriction afin que
toute société démocratique puisse atteindre ses objectifs, dans un but légitime d'intérêt
général et parce qu'il n'existerait pas d'autre moyens pour atteindre cet objectif.
Retranscrire ces principes au niveau des ressources naturelles revient à mieux encadrer
l'accès aux ressources naturelles dans leur globalité et à redéfinir juridiquement l'accès
au partage juste et équitable des avantages, édictés par la Convention sur la Diversité
Biologique.
95
des acquis sociaux, devenus institutionnels. Rattacher les ressources naturelles à cette
notion, s'appuie certainement sur un processus international lent. Celui des droits de
l'Homme s'est étendu du XVIIIème siècle290, au XXème siècle avec un attachement au droit
positif. Contestés pour leur caractère virtuel et métaphysique 291, les droits de l'homme
sont devenus des droits individuels292 et collectifs293 consacrés au rang international294,
non ratifiés295 mais symboliquement représentatifs d'un état de fait international.
Retranscrit dans le domaine des ressources naturelles, elle permet d'établir une sécurité
juridique environnementale mondiale transversale. On serait alors loin des propos
d'Alexandre Meringhac qui écrivait, il y a plus d'un siècle, que : « Coloniser, c'est se
mettre en rapport avec des pays neufs, pour profiter des ressources de toute nature de
ces pays, les mettre en valeur dans l'intérêt national, et en même temps apporter aux
peuplades primitives qui en sont privées les avantages de la culture intellectuelle,
sociale, scientifique, morale, artistique, littéraire, commerciale et industrielle, apanage
des races supérieures296 ».
Une limite juridique demeure toutefois dans cette proposition de rattachement des
ressources naturelles à la notion de droits de l'Homme : en droit civiliste, les droits de
l'Homme ne s'appliquent qu'aux êtres humains, non aux êtres vivants, sous réserve
qu'ils soient reconnus comme tel297, et que la qualité d'être humain en vie soit établie, le
décès faisant perdre la qualification juridique de sujet de droit 298. Ensuite, les droits de
l'Homme sont rattachés à des libertés publiques, collectives.
Ce droit du Vivant trouve ainsi un fondement juridique sur la notion de res communes et
96
dans la pratique judiciaire, sur la mise en place d'un inventaire mondial de l'ensemble
des espèces vivantes, en vie. Or cet inventaire n'existe pas encore de façon globale.
97
2. Des ressources naturelles non reconnues comme sujet transmissible
Reconnaître les ressources naturelles comme sujet de droit, au titre de res communes, au
sens universales301. revient à entrer dans une certaine logique, basée sur la raison. Mais
il en découle, tout système de droit confondu, l'idée selon laquelle un sujet de droit reste
débiteur de droits et d'obligations envers autrui. Et que ce même sujet peut exercer des
droits sur une chose, matérielle ou immatérielle.
Ces droits, en droit civiliste, entrent dans la branche de droits objectifs ou subjectifs. Or
les communautés autochtones n'établissent pas de distinction entre les personnes et les
choses, elles seraient animistes. Elles ne reconnaissent pas non plus, la notion de
patrimoine, qui lui même est lié, en droit civiliste comme anglo-saxon, aux notions de
garantie et d'héritage. Alors quels droits seraient véritablement concernés ?
La notion de propriété à la terre, par exemple, n'est donc pas exclusivement liée à une
vision individuelle mais bien à une vision collective du droit de la propriété. L'auteur 304
indique à ce propos que quatre vingt dix pour-cent des territoires en Afrique, ne font pas
« l'objet de titre de propriété exclusif 305» et que « ce sont les droits d'usage, de passage,
de pâturage, de collecte, d'accès306 » qui posent aujourd'hui problème.
Or, en droit civiliste, si on hérite d'un patrimoine, la transmission concerne aussi bien
les droits que les obligations de la personne dont on hérite. Ne sont concernés que les
droits patrimoniaux, les droits extra-patrimoniaux restent insaisissables et
intransmissibles. Or, si l'on considère que les ressources naturelles peuvent être
partiellement des sujets de droit, auraient-elles pour autant le caractère transmissible ?
301 PAQUEROT Sylvie, Le statut des ressources naturelles en droit international, Éditions Bruylant,
2002, 272 pages
302 PLANCON Caroline, Enjeu des droits fonciers dans la gestion des ressources naturelles, Vertigo,
revue électronique en sciences de l'environnement, hors série 6, novembre 2009, 5 pages, page 2
303 ROCHEGUDE Alain, Gérer la complexité de la propriété comme condition d'un droit foncier
durable à inventer, Cahiers d’anthropologie du droit, LAJP, Karthala, IRD,2008, 425 pages, page 419
304 Cf note 304 page 2
305 Cf note 304 page 3
306 Cf note 304 page 4
98
de pluralité juridique culturelle internationale. L’anthropologie juridique repose sur le
constat que tous les acteurs de la gestion des ressources naturelles seraient ouverts à la
pluralité culturelle, mais qu'il n'existerait pas de réelle pluralité juridique internationale.
Or si les ressources naturelles pouvaient être reconnues comme des sujets de droits
transmissibles, on dépasserait la simple notion de propriété individuelle, commune à
tous les systèmes juridiques connus. L'objectif du troisième millénaire ne serait donc
pas de modifier l'applicabilité du droit coutumier local, connu et reconnu, mais bien de
prendre en considération cette dernière.
L' accès aux ressources naturelles vitales, doit être avant tout basé, non sur un droit de
propriété individuel aux ressources naturelles, mais sur un droit de propriété collectif
démembré. Cette nouvelle vision de la nature juridique des ressources naturelles, dont
la transmission reposerait sur la gestion raisonnée de ces dernières, reconnait ainsi les
droits démembrés du droit de propriété et leur importance collective, au détriment du
droit de propriété primaire.
Ici, il s'agirait de trouver un juste milieu entre équité et légitimité à l'accès juste et
équitable des ressources naturelles, au sens de la Convention sur la Diversité
Biologique. Et l'on revient alors à la notion d'exploitation optimale des ressources
naturelles, qui ne pourrait être retenue.
Viennent alors les questions sur la qualification juridique des ressources naturelles, si
on les fonde sur les droits de l'Homme.
99
B. L'insuffisance de rattachement à une qualification juridique humaniste
Il n'existe pas donc un mode de gestion mondiale des ressources naturelles mais bien
plusieurs modes de gestion environnementale307.
Cette autre vision de l'intérêt général pourrait alors permettre de réfléchir à une autre
qualification des ressources naturelles, ces dernières n'étant pas qualifiées de sujet de
droit public inaliénables par nature.
307 CALAME Pierre, TALMANT André, L’État au cœur , meccano de la gouvernance, Éditions Desclée
de brouwer, collection gouvernances démocratiques, 1997, 211 pages, page 197
100
1. Des ressources naturelles non qualifiées de sujet de droit public
Un des premiers à lancer l'idée que la Nature devait être considérée comme un sujet de
droit public, fut Christopher D. Stone. Cet universitaire américain309, durant l'affaire
Sierra Club contre Hickel-Morton310, fut le premier à énoncer que la Nature devait être
considérée comme un élément indispensable et qu'à ce titre, elle devait être assimilée à
un sujet de droit. Certains auteurs diront par la suite, que Christopher Stone aurait
« anthropomorphiser la nature311 » comme un sujet de droit.
Quarante ans plus tard, Victor David énoncait avec ironie : « la lente consécration de la
nature, sujet de droit, le monde est il enfin stone312 ?
Il indique que la théorie de Christopher Stone serait enfin consacrée par l'adoption
notamment des constitutions nouvelle génération en Équateur et en Bolivie. La
première constitution environnementale est la constitution équatorienne du 28
septembre 2008. Quatrième constitution depuis son indépendance, elle reconnait la
Nature, Pacha Mama, comme un sujet de droit public, doté de droits garantis par la
constitution. Sur la même lancée, six mois plus tard, est adoptée la constitution
bolivienne le 29 janvier 2009.
Concernant la constitution équatorienne, il faut tout d'abord indiquer que l' Équateur
appartient au groupe des dix sept pays les plus remarquables, par son biodiversité et ses
ressources naturelles énergétiques et minières. La constitution équatorienne s'appuie
ainsi sur un patrimoine environnemental exceptionnel. Son élaboration n'est pas due au
fruit du hasard mais à un partenariat judicieux avec des juristes environnementalistes
américains313. Ainsi, la notion de bon vivre, traduit en langage quéchua «sumak
kawsay » est pour la première fois reconnue. Si l'eau est consacrée comme «un
patrimoine national stratégique d'utilité publique, inaliénable, imprescriptible
101
insaisissable et essentiel pour la vie314 », le droit à un environnement sain est promu 315
et la promotion des énergies renouvelables est établie316.
Cette première vision des ressources naturelles, sujet de droit public, met ainsi l'accent
sur le refus d'appropriation par l’État des ressources naturelles territoriales. En les
rendant inaliénables, imprescriptibles insaisissables, la constitution crée un statut
autonome spécial aux ressources naturelles territoriales. La Bolivie parle de droit à un
environnement sain, protégé et équilibré pour les individus et communautés des
générations futures318, et crée un tribunal agro-environnemental319 tout en posant le
principe d'une responsabilité pénale environnementale objective par la reconnaissance
d'une nouvelle infraction pénale environnementale, considérant comme traître toute
personne violant le régime des ressources naturelles320.
La loi bolivienne consacre les droits de la Terre-mère 321 qu'elle définit comme une
système vivant, dynamique, sujet d'intérêt général 322. Les deux constitutions consacrent
ainsi le droit au Vivant, à la vie, à la Nature 323. Pourtant, l'auteur indique que la
constitution bolivienne reste moins protectrice que la constitution équatorienne car
l'adoption n'est pas unanime, car il n'y a pas de gestion réelle, la société civile ayant été
exclu de l'adoption, et la loi consacrant les droits de la Terre-mère reste une loi à
caractère d'urgence .
Par ailleurs, l'auteur précise que le Président de la Bolivie, Evo Morales, n'a pas un
comportement environnemental clair. L'auteur prend l'exemple d'un chantier lancé de la
future construction d'une autoroute désenclavant le pays à l'est sur quatre cent
kilomètres, risquant de sacrifier le parc national de Tipnis en territoire autochtone. Face
à l'hostilité locale, il s'est alors abstenu.
102
Ces deux textes fondateurs, représentent sur le plan international, un avancée novatrice.
Ils confèrent en effet à la finalité même du droit international de l'environnement une
dimension juridique nouvelle. L'évolution de la pensée juridique internationale prend un
élan plus marqué, même si beaucoup lui confèrent un fort accent de nationalisme
politique.
Ces deux constitutions, peuvent servir de réflexion pour tendre vers l'intérêt commun de
l'Humanité par diverses formes. Le peu de recul sur l'applicabilité de ces constitutions
ne permet pas encore de dire si cette stratégie juridique est effective et judicieuse. Mais
il en demeure pas moins novateur, même s'il reste, pour les juristes internationaux,
critiquable sur certains points.
103
2. Des ressources naturelles non qualifiées de sujet de droit inaliénable
Or les dispositions d'accès aux ressources naturelles, varient selon les pays, restrictives
ou pas. Le système d'Accès Partagé à la Ressource (APA) reste dans la pratique,
compliqué pour l'ensemble des pays, car il ne fournirait pas un cadre juridique rationnel
et serait écrasé par la bureaucratie. Ainsi, les pays ou personnes morales, demandeurs
de ressources naturelles, restent soumises à la loi de leur siège social. Un droit
contractuel spécial pour les ressources naturelles, serait peut être la solution à envisager,
notamment dans le domaine des ressources naturelles génétiques.
104
responsabilité.
Cette graduation juridique, sur le plan international, serait peut-être une alternative
permettant une sécurité juridique effective, et non potentielle, et établirait d'avantage le
renforcement du caractère juste et équitable des ressources naturelles, reconnu par la
Convention pour la diversité biologique. Rendre inaliénable certaines ressources
naturelles, par principe, permettrait ainsi une régulation fonctionnelle, éthique et sociale
des marchés internationaux. Or, il n'existe pas encore de certificat de légalité de l'accès
aux ressources naturelles entre les pays exportateurs de ressources et les pays
importateurs. Les phénomènes financiers de bulles spéculatives, remettent sans cesse,
en cause une bonne sécurité juridique mondiale. Le droit de spéculer sur les ressources
naturelles ne rentre pas en conflit avec la finalité propre du droit international de
l'environnement, visant l'intérêt commun de l'Humanité. Même si la question ne
demeure pas strictement juridique, les inquiétudes actuelles démontrent que les juristes
avisés doivent se poser la question.
105
106
Section II. L'insuffisance de rattachement à la notion juridique de biens communs
fragiles
Si les systèmes endémiques abritent une richesse des milieux naturels, les politiques
démographiques et économiques ont instauré un rapport de force en créant des
interactions déstabilisantes sur les milieux naturels. Or les systèmes endémiques,
espaces pour la plupart remarquables, constituent le patrimoine environnemental
commun d'un pays, d'une région et appartiennent au patrimoine environnemental
commun mondial. Zones privilégiées pour la faune et la flore locales, ils contribuent
ainsi au maintien d'une certaine qualité environnementale globale des milieux. Les
pressions actuelles rendent ainsi les milieux endémiques, fragiles, en terme de
durabilité, sur le plan de la gestion de préservation des espèces et espaces.
La notion de fragilité des ressources naturelles est reconnue sur un plan scientifique, et
l'a été au départ, sur le plan juridique, mais dans une vision purement anthropique. On a
reconnu le caractère fragile des espèces vivantes, dans un vision purement utilitaire324,
protectrice325, et intrinsèque326. La nécessité de rattacher les ressources naturelles à la
notion de res communes, fragiles, découle de la même démarche juridique liée au
caractère rare des ressources naturelles. La reconnaissance internationale mutuelle des
ces deux concepts peut permettre de renforcer les notions et champ d'application de
dommage écologique, de responsabilités environnementales, et faciliter l'établissement
des liens de causalité. La pratique juridique démontre aujourd'hui une absence de
reconnaissance de ce concept.
107
Des mesures d'injonction furent prises par l'OMC, afin de rendre les tanneries
conformes à la législation industrielles, d'ici 2014. Mais les neuf plus grosses tanneries
appartiennent à des membres du gouvernement et les conformités tardent. Or, l'effet
papillon réside dans le fait que les mêmes déchets industriels, de cuir, servent à nourrir
des crevettes, vouées à l'exportation vers l'Europe. Pourrait-on alors parler d'intérêt
commun de l'humanité, lorsqu'on évoque cet exemple, parmi tant d'autres. Faire des
pays émergents des sanctuaires environnementaux à ciel ouvert, pose les limites de la
responsabilité environnementale sociétale.
Quant à la fragilité de l'écosystème local, la faune et la flore locales n'existent plus, les
boues toxiques ayant polluées les sols et sous-sols terrestres et marins sur plus de 800
mètres de profondeur. Au delà de la fragilité des systèmes endémiques, se pose alors
celle de la résistance de l'Homme en milieu hautement pollué. Le moratoire lancé par
l'OMC suffit-il à infléchir ce processus ?
En effet, les sols et sous-sols donnent aux plantes des éléments nutritifs essentiels à leur
photosynthèse. Ils participent directement à l'équilibre alimentaire mondial.
Or, pour se constituer, les sols sont crées à partir d'une délicate et complexe alchimie
108
entre la lithosphère328, la biosphère329 et l'atmosphère. S'ensuivent des interactions
climatiques et chimiques uniques, qui font des sols des sols riches, arables ou non. Les
ressources naturelles sont inégalement réparties sur la planète. De par leur nature, elles
demeurent fragiles car leur fonction biologique primaire est détournée par une
exploitation optimale, intensive des cultures, appauvrissant les substrats jusqu'à les
détruire. A moyen terme, ce phénomène d'optimisation des sols crée alors une zone
désertique, impropre à la culture.
L'érosion biologique est un des premiers facteurs de l'exode local des populations.
L'érosion urbaine en est le deuxième facteur. L'absence d'une approche inter-
générationnelle, basée sur une gestion raisonnée des sols et sous-sols crée une insécurité
juridique alimentaire et sociale générales. La préservation des sols et sous-sols prend
alors un caractère d'urgence, tant juridique qu'alimentaire, quand on sait que l'Humanité
sera composée en 2050 de plus de neuf milliards d'habitants. Or cette préservation ne
peut se mettre en place que si le caractère rare et fragile des sols et sous-sols, res
communes, est reconnu sur le plan international.
328 LAROUSSE 2013, 2016 pages, zone formant une des enveloppes concentriques du globe terrestre,
d'épaisseur variable entre 70 km sous les océans à 150 km sous les continents, zone correspondant à
l'ensemble de la croûte terrestre, du manteau et fragmentée de plaques mobiles
329 LAROUSSE 2013, 2016 pages, ensemble des écosystèmes de la terre correspondant à la mince
couche, d'épaisseur 20 km, de l'atmosphère, l'hydrosphère et de la lithosphère, où la vie est présente
109
110
§1 Une notion insuffisamment rattachée à la notion de préservation
A titre d'exemple, l'année 2012 reste marquée par une forte augmentation des demandes
de règlements amiables auprès de l'OMC330. L’Organe de règlement des Différends a
ainsi reçu, selon le rapport, plus de vingt sept demandes de consultations, phase
préalable avant les règlements des différends devant l'OMC. Depuis la création de
l'OMC en 1995, il y a eu quatre cent cinquante six différends soumis à l'organisation,
dont vingt sept au cours de l'année 2012, et ces demandes proviennent du continent
latino-américain, notamment l'Argentine. Les mesures de sauvegarde, en cas
d'importations massives, entrent dans le champ d'application du règlement des diverses
plaintes.
Ce rapport parle ainsi de « flux d'échanges », de « valeur ajoutée », pour parler des
contrats liés à l'exploitation des ressources naturelles et plus généralement du business
vert. Présent successivement à la conférence ministérielle du la CNUCE 333, au sommet
du G20334, puis au sommet de Rio+20335, l'OMC démontre ainsi la puissance des enjeux
commerciaux, liés au caractère économique des ressources naturelles.
Ces derniers restent ainsi soumis à des dispositifs de prélèvements à la source, plus
restreints, et donc mieux encadrés, répondant ainsi à l'intérêt commun de l'humanité.
111
Cela a pour conséquence de créer un principe de précaution international objectif,
répondant aux divers risques reconnus et prévisibles, et servant de socle à de garde-fou
juridique, forme de résistance active, contre l'ensemble des pratiques commerciales
internationales à risques. Ce droit d'ingérence dans les relations de droit privé des
acteurs mondiaux, s'exercerait au nom de l'intérêt commun de l'Humanité.
Or, le caractère de préservation des ressources naturelles reste lui-même basé sur le
concept d'une vision utilitaire des ressources, non humanitaire, ce qui pose aujourd'hui
une problématique juridique autour de la notion d'un droit à préserver.
112
A. Le caractère juridique de préservation des ressources naturelles
113
1. Une requalification juridique nécessaire de la notion de préservation
Mais le caractère fragile de l'air qu'on respire n'est pas pour autant retenu. La
qualification juridique de la préservation de la ressource naturelle air n'est pas rattachée
à la notion de risque sanitaire et présente donc une préservation orientée sur une gestion
d'observation et de recommandations faces aux phénomènes climatiques.
La diminution de l'impact de l'empreinte humaine sur la qualité de l'air revêt ainsi une
dimension, purement sanitaire, et économique, non juridique. Or, malgré l'importance
des enjeux internationaux, les accords pris dans ce domaine, ne présentent pas
juridiquement un caractère obligatoire.
Or, seules les parties à la Convention, également devenues parties au Protocole, par
ratification, acceptation, approbation ou accession, furent tenues par les engagements
du Protocole. Les objectifs individuels, listés 345, constituant une réduction totale
114
d’émissions de gaz à effet de serre sont loin d'être atteint. La conférence de Bali 346, qui
s'ensuivit, avait pour objectif d' établir un calendrier de négociations entre les membres
afin de prendre le relais du protocole de Kyoto, arrivant à échéance en 2012. La
conclusion d’un accord, succédant au Protocole de Kyoto, devait se réaliser au plus tard
en décembre 2009.
Deux exemples permettent ainsi d'affirmer ce non rattachement au caractère fragile des
ressources naturelles.
115
économiques et politiques liés à la gestion de l'eau. Mais elle ne donne pas une véritable
définition de sa nature juridique sur le plan international et n’unifie pas davantage les
différents régimes juridiques internationaux en la matière.
116
fragile reste également non établi dans la Convention sur la Diversité Biologique360, dix
ans plus tard. Mais cette dernière pose pour la première fois, le caractère juste et
équitable des avantages découlant de l'exploitation des ressources génétiques. La
préservation revêt donc un aspect à la fois utilitaire classique, orienté sur la protection
des espèces361, des espaces362 , gérés par des organismes363, ou des aires spéciales364.
Mais également aux critères justes et équitables.
Des précisions juridiques, quant à la nature même des critère de gestion juste et
équitable, économe et optimale, furent alors posées au plan international. Ces réflexions
ont d'ailleurs infléchis sur les modes de décisions mondiaux et orientés les états vers
une autre approche de gestion des ressources naturelles. Ainsi, la déclaration finale du
G7365 a permis en 2001 d'établir pour la première fois une gestion concertée autour de la
problématique environnementale, en qualifiant juridiquement et politiquement la
préservation des ressources naturelle.
Mais cette déclaration reste juridiquement inopposable aux tiers non parties du G7. Les
questionnements, quant au renforcement des encadrements juridiques, restent donc
posées. Quant à la conférence de Johannesburg 366, adoptant des principes relatifs au rôle
du droit et au développement durable, elle a renforcé le caractère politique et judiciaire
de la préservation des ressources naturelles. Mais la pratique internationale a pu
démontrer, que même si la primauté du droit international et des pratiques
environnementales demeurent, aucun référence juridique au caractère fragile des
ressources naturelle n'a clairement encore été exposée et discutée depuis.
360 Convention Mondiale sur la Diversité Biologique du 5 juin 1992, entrée en vigueur le 29 décembre
1993
361 Directive 74/409 du 2 avril 1979 sur les oiseaux sauvages (modifiée en 2009) ; Directive 92/43 du 21
mai 1999 ; convention de RAMSAR de 1971 ; de Washington de 1973...
362 Directive n°92-43 du 21 mai 1992 dit directive Habitat ou Natura 2000
363 Résolution 76(17) et (79) 9 sur le règlement du réseau européen de réserves biogénétiques
364 Convention de Barcelone du 12 décembre 1999 sur des aires marines
365 Groupement des 7 pays industrialisés., G7et G8 du 17 juillet 2001 à Gênes, Italie
366 Conférence de Johannesburg du 18 au 20 août 2002
117
2. Une redéfinition de la fonction juridique volontaire de la préservation
Ainsi, d'une commune à une autre, d'une région à une autre, d'un État à un autre, la
fonction juridique de la préservation des ressources naturelles, sur la question des
nuisances, diffère. L'absence d'homogénéité juridique reste posée. Si l'on rattache le
caractère fragile aux ressources naturelles, res communes, la fonction juridique de
préservation de ces dernières s'oriente alors vers une fonction préventive, économe et
recyclable des ressources naturelles. Elle ne se base plus seulement sur la valorisation
des ressources naturelles supposées, mais incorpore systématiquement la notion de
valorisation des ressources naturelles potentielles, à venir, en instaurant le caractère
fragile des ressources et donc en optimisant le caractère préventif dans toutes les formes
de gestion et politiques de préservation qui en découlent.
Si l'on prend la situation minière en France, le droit minier est régi par le code minier,
qui fut dans le passé, souvent modifié367. Le droit minier français rattache la gestion des
ressources naturelles minières au domaine public : la gestion du sous-sol minier
français, appartient à l'État Français, qui pourrait en concéder l'exploitation à un tiers.
La notion de mine reposerait uniquement sur la nature juridique du matériau extrait et
de la manière dont il est extrait, à savoir l'extraction à ciel ouvert ou en sous-sol des
ressources naturelles. Le droit énoncerait ainsi une liste de combustibles, régis par le
droit minier comme le charbon, le pétrole et le gaz; les métaux comme le fer, le cuivre,
367 Loi n°77-620 du 16 juin 1977 portant réforme du code minier, JORF du 17 juin 1977; loi n°94-588
du 15 juillet 1994 portant simplification du droit minier, JORF du 16 juillet 1994; Ordonnance du 19
janvier 2011 portant codification de la partie législative du code minier
118
le plomb, l'argent, l'or, la manganèse et autres; ainsi que des ressources minérales et
chimiques comme le sel, et le soufre. Les autres produits ne figurant pas dans la liste,
appartiennent à la catégorie des carrières, à savoir les matériaux de construction
comme le sable, l'argile, le gypse, le calcaire et autres. Ils ne relèveraient pas de la
législation minière mais de celle sur les installations classées protection de
l'environnement.
119
démocratie écologique, tout en développant l’enseignement, la recherche, le
renforcement de l’évaluation des impacts écologiques, et un encadrement réel de la
technique de géothermie. Ce rapport, très critiqué, qualifie les mines, de patrimoine
commun de la Nation, au même titre que l'eau, mais n'adapte pas cette qualification aux
sols et sous-sols.
Une autre solution consiste d'intégrer le caractère fragile des ressources naturelles à un
mouvement sphérique, lié au cycle des milieux et de la vie. Certains pays, pourtant
pollueurs, ont ainsi adopté dernièrement, de nouveaux modes, accentuant la fonction
juridique de préservation des ressources naturelles sur un aspect circulaire. L'exemple
de la Chine démontre une volonté certaine en la matière, par l'adoption d' une loi
portant sur la promotion de l'économie circulaire en secteur minier371.
120
B. La portée du caractère juridique de préservation des ressources naturelles
Ainsi, le paradigme porte sur la notion de préservation des ressources naturelles et reste
lié à deux aspects.
Il est ensuite lié à un aspect jurisprudentiel, quelque peu discret sur la reconnaissance
du caractère fragile des ressources naturelles mondiales.
121
1. Une absence législative du caractère fragile des ressources naturelles
Mais l'article limite cette reconnaissance en indiquant que ces dernières ne doivent pas :
« entraîner des restrictions commerciales injustifiées. Il ne faudrait pas que les mesures
commerciales adoptées à des fins écologiques constituent un moyen de discrimination
arbitraire et injustifiable ou une restriction déguisée aux échanges internationaux. Il
convient d'éviter les mesures unilatérales visant à résoudre des problèmes
environnementaux au-delà de la juridiction du pays importateur. Les mesures prises
pour résoudre des problèmes écologiques de portée internationale devraient, dans la
mesure du possible, être fondées sur un consensus international. ….... S'il se révélait
nécessaire, pour faire appliquer des politiques environnementales, d'adopter des
mesures de politique commerciale, il convient de respecter certaines règles et certains
principes, notamment le principe de non-discrimination; le principe selon lequel la
mesure commerciale la moins restrictive que requiert la réalisation des objectifs en
question soit retenue; l'obligation de transparence dans l'emploi des mesures
commerciales ayant trait à l'environnement et l'obligation de faire dûment connaître les
réglementations nationales en vigueur; et la nécessité de tenir compte des conditions
particulières et des impératifs du développement des pays en développement dans leur
poursuite des objectifs fixés par la communauté internationale en matière
d'environnement372... ».
Or, cette grande liberté commerciale, que l'OMC a qualifié de «flux d'échanges», a
démontré deux limites: la première est relative à la pression grandissante de la demande
en ressources naturelles qui n'a cessé de croître, la seconde est relative à l'absence totale
de la reconnaissance du caractère fragile des ressources naturelles. Ces deux facteurs,
inconnus en 1999, ont infléchi toutes les données, jusqu'alors basées sur les modes de
gestion de préservation classiques choisis, à savoir la préservation des ressources
naturelles pour des finalités utilitaires. Or les enjeux ont dépassé le simple cadre
commercial, et sont devenus transversaux. La problématique actuelle internationale
tourne donc aujourd'hui, autour de l'absence de reconnaissance juridique, et donc
législative, du caractère fragile des ressources naturelles. L'insécurité juridique à cet
égard, a dépassé le simple domaine commercial, mais s'est alors transposé sur le plan
sanitaire et sociétal, en créant de nouveaux risques et responsabilités.
Ainsi, si l'on prend le cas des ressources naturelles eau, l'ONU a rendu un rapport373
alarmant sur la pression commerciale internationale croissante faite à ces ressources. Ce
rapport, présenté lors de l'ouverture du forum mondial de l'eau à Marseille 374, a dénoncé
un encadrement juridique incertain et des processus décisionnels inquiétants. Le constat
372 AGNU, A/CONF.151/26/Rev.1, du 27 et 28 septembre 1999, Action 21, article 39, session
extraordinaire portant sur le programme d'action pour le développement durable des états insulaires
en développement
373 ONU, 4e rapport portant sur la mise en valeur des ressources en eau, gérer l'eau dans des conditions
d'incertitude et de risque, 1e volume, http://wwwdr4, 12 mars 2012, 909 pages
Object2
122
international est identique, relatif aux ressources naturelles minières. Des cabinets
spécialisés375 ont énoncé une demande énergétique trop croissante, des modes de
gestion de préservation des ressources naturelles disparates et non raisonnés,
provoquant ainsi un fort risque, à très court terme, de pénurie des ressources naturelles,
notamment les terres arables et l'eau potable.
Le caractère rare et fragile est ainsi établi par ces cabinets, reconnaissant aux ressources
naturelles, un caractère indispensable à la production industrielle. La problématique
législatif autour du caractère fragile des ressources naturelles porte ainsi sur
l'insuffisance d'un encadrement juridique international commun, relatif à l'exploration,
l'exploitation et les modes d'extraction des ressources naturelles.
Pour autant, les modes d'exploration et d'extraction des ressources naturelles sur le plan
international, doivent être soumis à un référentiel international juridique commun,
reposant sur le principe de sécurité, tant sur les pratiques industrielles que sur la gestion
des déchets industriels. Or, la question actuelle porte sur l'effectivité de mise en œuvre
de ce référentiel commun et sur sa portée juridique. Car les ressources naturelles
mondiales sont au centre de nouvelles formes de conquête territoriale, que les
communautés autochtones ont été les premières à dénoncer. Vingt ans après les
premières manifestations communautaires latino-américaines indigènes 376, et douze ans
après les violences de Cochabamba377, la problématique législative autour de la
reconnaissance du caractère fragile des ressources naturelles devient internationale, non
plus locale378. Cette problématique concerne surtout l'absence du caractère fragile des
ressources naturelles dés la phase d'exploration et d'extraction de ces dernières.
L'exemple portant sur l'exploitation des ressources naturelles marines, relance aussi le
débat. Soumis à une réglementation spécifique pour chaque pays dont la France 379, il
existe une réciprocité limitée entre les pays pour ces demandes d'exploitation depuis
l'adoption de la Convention des Nations-Unies sur le Droit de la Mer (CNUDM) en
1983380. Pour rappel, la conférence de Genève sur le droit de la mer de 1958 381 a adopté
quatre conventions portant sur la mer territoriale et la zone contiguë ; la haute mer
123
(convention qui codifie les règles de droit international concernant la haute mer) ; le
plateau continental (convention qui a pour objet de délimiter et de définir les droits des
États à explorer et à exploiter les ressources naturelles du plateau continental) ; la pêche
et la conservation des ressources biologiques.
De nombreux pays émergents ont remis en cause certaines des règles adoptées à
Genève. Suite à cette conférence, une longue période de discussions apermis d'aboutir à
la signature de la Convention des Nations-Unies sur le Droit de la Mer. Entrée en
vigueur seulement douze ans plus tard, suite à de nombreux amendements, cette
convention définit les modes d'exploitation des ressources naturelles marines,
«d'équitables» et «d'efficaces » et de modes de gestion de préservation, et d'utilisation
«pacifique» des mers et des océans.
La convention a fixé les règles de libre communication et circulation entre les pays, au
travers de la création de zones économiques exclusive. Mais elle n'a pas retenu le
caractère fragile des ressources naturelles et son applicabilité reste limitée. En 2012,
vingt pays signataires, dont les États-Unis, l'Iran, la Corée du Nord et les Émirats
Arabes Unis, ne l'ont toujours pas ratifié. Même si le caractère équitable et efficace,
rattaché à la gestion de préservation des ressources naturelles marines reste posé,
l'insuffisance d'encadrement juridique liée aux pratiques offshore, démontre qu'un
paradigme juridique se pose aussi, sur l'insuffisance quant à la nature juridique et la
notion des terme d'efficacité et de caractère équitable, au vu de l'intérêt commun de
l'Humanité.
124
2. Une limite jurisprudentielle du caractère fragile des ressources naturelles
Une insuffisance juridique demeure dans le droit positif minier sur le caractère fragile
des ressources naturelles. Ce dernier se caractérise à travers le degré de vulnérabilité,
des milieux naturels marins, vis à vis des modes d'extraction et d'exploitation des
ressources naturelles minières marines. Or la notion de vulnérabilité des milieux marins
n'est pas retenue juridiquement dans le code international pour la sûreté des navires et
des installations portuaires. Cette notion n'est pas non plus définie par la jurisprudence
internationale.
Ainsi, six mois après le trentième anniversaire de la convention de Montego Bay sur les
droits de la mer, les États membres, réunis en séance 382 se sont félicités du premier arrêt
rendu par le Tribunal international du droit de la mer, dénommé tribunal de Hambourg,
portant sur la délimitation du plateau continental.
La dernière était une procédure d'urgence, portant sur l’ ARA Libertad388. Le Tribunal
s'est déclaré incompétent pour juger de la deuxième affaire 389, mais a rendu son
jugement relatif à la dernière affaire390. L'efficacité du mode de règlement des différends
par le Tribunal a été remarqué par les états membres qui s'en félicitent 391, notamment
sur le rôle «d'acteur fondamental pour promouvoir la primauté du droit dans le
382 23ème réunion des états parties de la CNUDM du 10 au 14 juin 2013, New york
383 Compte rendu de la 23ème réunions des états parties de la CNUDM du 10 au 14 juin 2013, 20
pages, page 1
384 TIDM, rapport annuel 2012, portant sur la 23ème réunion des états parties de la CNUDM du 10 au
14 juin 2013, New york, SPLOS/256, 33 pages
385 TIDM, Bangladesh c/ Myanmar, n°16, arrêt du du 14 mars 2012; Cf note n°385 pages 7 à 17
386 TIDM, Navire Louisa, Saint-Vincent-et-les Grenadines c. Royaume d’Espagne, n°17, arrêt du 25
mars 2012; Cf note n°385 pages 7 à 17
387 TIDM, Navire Virginia G, Panama c. Guinée-Bissau, n°18, ordonnance du 2 novembre 2012; Cf note
n°385 pages 7 à 17
388 TIDM, ARA Libertad, Argentine c. Ghana, n°19, ordonnance du 15 décembre 2012, Cf note n°385
pages 7 à 17
389 Cf note n° 384 page 5
390 Cf note n°389
391 Cf note n°384 pages 5 à 10
125
règlement des différends maritimes392 ».
Malgré le fait que la jurisprudence du Tribunal soit reconnue efficace et rapide, son
champ de compétence reste restreint car la Convention ne retient pas les questions liées
à la souveraineté territoriale et aux problèmes de délimitation maritime des procédures
obligatoires de règlement des différends. Le Tribunal ne peut donc pas statuer sur des
questions liées au caractère fragile des ressources naturelles que ce soit en dehors du
principe de souveraineté territoriale ou de délimitation maritime, la convention ne
reconnaissant pas encore ce dernier.
Or, selon l'OMM399 le rétablissement des concentrations d'ozone peut intervenir, pour
les zones en dehors des régions polaires, aux alentours des années 2030-2040, et le trou
dans la couche d'ozone disparaîtrait vers 2045-2060, au-dessus de l'Arctique. Ceci sous
réserve de continuer à réduire, sur le plan international, les effets de gaz à effet de serre.
Mais les activités industrielles polluantes sur le plan international demeurent et les
392 Cf note n°384 page 12
393 TIDM, Navire Virginia G, Panama c. Guinée-Bissau, n° 20, ordonnance du 24 mai 2013
394 Cf note n°384 page 6
395 Chlorofluorocarbones, CFC
396 Convention de Vienne pour la protection de la couche d'ozone du 22 mars 1985. Entrée en vigueur le
22 septembre 1988. Ratifiée par 197 Parties à ce jour (au 28 juin 2012)
397 Protocole de Montréal du 16 septembre 1987. Ratifié par 197 pays au 28 juin 2012
398 Amendements de Londres en 1990, de Copenhague en 1992, de Montréal en 1997 et de Beijing en
1999
399 OMM, 7e rapport d'évaluation de l'Organisation Mondiale de la Météorologie, 2011,
http://www.wmo.int, consulté le 8 aout 2013
126
premiers états pollueurs, comme les États Unis ou la Chine, ne répondent pas toujours
favorablement à une gestion raisonnée des litiges dans ce domaine. Ne pouvant
contraindre ces derniers à ratifier les protocoles internationaux, il n'en demeure pas
moins qu'une responsabilité sociétale se dégage mais reste sans suite, pour l'instant.
127
§2 Une notion insuffisamment rattachée à l'exercice d'un droit à préservation
Cette dernière repose tout d'abord, sur la nature de l'intérêt à agir : devrait-on avoir un
intérêt juridique à préserver ou un intérêt juridique de préserver des ressources
naturelles ?
La notion est ainsi un outil de droit efficace, établissant par nature une obligation de
moyen et de résultat. Or les modes de raisonnement juridique restent très réservés et ne
reposent que sur un droit à la préservation en aval des ressources naturelles.
128
A. Le caractère complexe d'un droit à préserver
Chaque État, partie contractante devrait donc depuis 1992, intégrer logiquement dans
son droit interne les mesures visant à conserver et utiliser durablement l'ensemble des
ressources naturelles dont il dispose.
On devrait donc dans cette même perspective retrouver dans les divers droits internes
un ensemble de mesures visant à préserver les ressources naturelles, en mettant en avant
une réglementation propice à la protection des droits et usages coutumiers propres à
chaque État et compatibles avec l'évolution des impératifs de développement
économique de chaque nation.
Car au delà du paradigme de l'utilisation durable des ressources naturelles, force est de
constater que le caractère complexe d'un droit à préserver ne doit pas reposer sur une
approche intra-générationelle, mais plutôt inter-générationnelle des ressources
naturelles mondiale, en posant les bases d'une gestion durable de préserver et à
préserver.
La problématique actuelle repose ainsi sur le fait de savoir s'il existe un droit à
préserver ou un droit de préserver les ressources naturelles mondiales. Les fondements
d'une nature juridique nouvelles et la portée de cette dernière se posent, les
inaccessibilités par les populations locales aux ressources naturelles soulevant une
dualité de complexités, liées autant à leur nature qu'à leur fonctions juridiques.
129
1. Des fondements d'une nature juridique nouvelle
Toutes les ressources naturelles non renouvelables peuvent revêtir, un jour ou l'autre, le
caractère épuisable. Les ressources naturelles renouvelables sont a contrario, vouées à
revêtir le caractère inépuisable. L'affrontement entre l'échelle du temps géologique et
celle du temps économique indique que ce n'est pas tant le nombre ou la quantité de
ressources naturelles dont on dispose aujourd'hui qui pose problème, mais plutôt l'usage
qu'on en fait. Si l'on s'en réfère à des experts400, il n'y a pas d'un point de vue
géologique, de réserves mondiales de ressources naturelles menacées, mais sous réserve
d'une consommation modérée.
Or, les modes de consommation actuels ont conduit à une demande exponentuelle,
génératrice d'une véritable dissonance entre les zones de consommation mondiales, les
zones de production mondiales, et les zones de réserves mondiales. Cette dissonance se
retrouve alors sur le plan juridique.
La complexité juridique actuelle repose donc au départ sur la nature même des
ressources naturelles car elle pose une triple inégalité à savoir une inégalité de
répartition, une inégalité d'utilisation, une inégalité de consommation.
Philippe Hugon préfère parler des « 3P à savoir les réserves naturelles prouvées, les
réserves naturelles probables et les réserves naturelles possibles401 ».
La complexité du droit à préserver les ressources naturelles repose par ailleurs sur la
délicate conciliation entre les divers modes de gestion de préservation. Et c'est autour
de la notion juridique d'exploitation optimale des ressources que repose principalement
la problématique car la Charte Mondiale de la Nature parle de «gestion économe,
optimale et continue402 » des ressources naturelles. Se pose alors la problématique
juridique autour de la nature juridique de gestion optimale, et notamment la nature
juridique du risque qui s'y rattache, au vu de l'intérêt commun de l'Humanité et du droit
aux générations futures.
130
L'exemple des modes d'exploitation et d'extraction des ressources naturelles minières
terrestres et sous-marines illustre cette difficulté.
Se pose ici aussi la problématique de l'insécurité juridique générée par la volatilité des
prix. Ces derniers restent instables. Car si la volatilité dépend de critères économiques
comme la demande, ces derniers restent indéterminables dans le futur, par leur caractère
fluctuant. Une dépendance aux ressources naturelles mondiales reste ainsi posée.
Enfin, la complexité du droit à préserver repose sur une gestion d'exploitation optimale
et l'absence du principe de réversibilité, réciprocité sur les processus d'utilisation en cas
de nuisances. La difficulté repose en effet sur l'applicabilité de ce principe, dans la
pratique juridique internationale. Elle se renforce, encore, en ce qui concerne la
problématique liée à la valeur réelle des stocks de ressources naturelles mondiales
présents et à venir, et à celle de l'évaluation juridique des nuisances environnementales
liées à l'exploitation de ces dernières.
La volatilité des prix, liée à la demande comme à l'offre, rend impossible ces
évaluations. La nature juridique du caractère complexe des ressources naturelles est
donc transversalement et intrinsèquement liée à la prise en compte des multitudes de
droits qui s'appliquent en la matière ainsi qu'aux paramètres économiques et physiques
des modes d'exploitations optimales de ces dernières. Cette transversalité juridique
nouvelle démontre ainsi l'intérêt stratégique majeur des ressources naturelles.
131
2. Une portée d'une fonction juridique novatrice
La fonction juridique du caractère complexe des ressources repose alors sur une dualité
à la fois structurelle et extra structurelle. La première repose sur une pyramide
organisationnelle classique, intra et extra étatique, commune à tous les États. Elle est
donc liée à une approche intra-générationelle des ressources naturelles, basée sur
l'utilisation optimale des ressources naturelles, dans leur vision utilitaire.
La fonction extra-structurelle repose au contraire, sur les effets et risques liés au mode
d'exploitation optimale des ressources naturelles choisi. Depuis 2000, le caractère
complexe des ressources naturelles a crée de nouveaux défis.
Ainsi, si l'on prend le cas des ressources naturelles non renouvelables, l'inexistence
actuelle d'un référentiel mondial des «stocks» disponibles a déclenché un mouvement
structurel inégal d'un État à un autre. Chaque État, producteur de ressources naturelles
non renouvelables est en effet, sans moyens financiers colossaux, dans l'incapacité
technique de préciser la nature exacte de ses stocks et leur taux d'épuisement.
Cette incertitude a donc crée une incertitude structurelle réelle, plaçant les États
producteurs de ces ressources en instabilité organisationnelle. L'exemple des États
africains comme le Niger ou l’Éthiopie dans le domaine du nickel, illustre cette
instabilité actuelle.
Pour remédier à ces difficultés liées à la nature complexe des ressources naturelles, les
états commencent à réagir.
Mais les récents débats sur les biocarburants de première génération, comme le
bioéthanol, ont permis de revoir cette prospective à la baisse. Générateur de
déboisement massif, de délocalisation des populations, la culture des biocarburants n'est
plus liée à une raison environnementale. Énergivore en eau et polluante, la culture des
biocarburants première génération connaît aujourd'hui une méfiance juridique
internationale certaine.
Aussi, l'Europe a décidé de prendre en compte que ces types de carburants contribuaient
dangereusement à la déforestation internationale, à l'appauvrissement des sols arables.
Leur production et exploitation génèrent des utilisations abusives d'eau et surtout de
pesticides, polluant ainsi l'ensemble des sols et sous-sols et les nappes phréatiques.
132
Quant aux biocarburants de deuxième génération, leur utilisation reste encore
embryonnaire au stade industriel mais les recherches actuelles s'orientent soit vers le
bio-éthanol soit vers du bio-gazole de synthèse. Les résultats d'une potentielle
production industrielle ne sont pas attendu avant 2020403.
133
B. L'identification juridique complexe des enjeux environnementaux futurs
Viennent ensuite celle portant sur la qualification juridique des victimes directes et
indirectes de ces risques. Et force est de constater que l'approche intra-générationnelle
des ressources naturelles mondiales ne repose pas sur un mode de gestion préventive,
anticipative des risques.
Or, les événements environnementaux des trente dernières années ont démontré une
insuffisance d'adaptabilité des principes de précaution et de prévention. Cette double
insuffisance portant sur deux principes fondamentaux du droit international de
l'environnement transparaît sur le plan international.
Une complexité certaine concerne autant la nature des risques nouveaux, que celle des
dommages subis et les responsabilités qui s'y rattachent.
134
1. Une problématique liée à l'identification juridique des risques
S'est donc posée d'abord une première problématique, liée à la nature juridique de tous
les risques technologiques et naturels, nouveaux, liés aux modes actuels d'extraction des
ressources naturelles, leur lien direct ou indirect avec les nouveaux dommages
environnementaux. Car les nouvelles technologies ont évolué plus vite que
l'encadrement réglementaire les concernant. Et cette rapidité a très vite démontré une
inadaptation latente de l'encadrement réglementaire actuel. Quant aux risques naturels,
ceux-ci sont passés de l'état probant à l'état réel, et ont participé à l'augmentation d'une
insécurité juridique certaine.
S'est ensuite posée une seconde problématique, liée à la portée de ces risques, et
notamment de la reconnaissance du dommage environnemental et de son évaluation
financière, notamment par le biais du droit des assurances. Des questionnements
juridiques portant sur de nouveaux modes de règlements sont apparu. Aussi, si le risque
généré est grevé d'une assurance professionnelle spécifique, propre aux exploitants et
gestionnaires des ressources naturelles, une insuffisance juridique, portant sur la
reconnaissance d'une graduation des risques, demeure.
Se pose alors une quatrième problématique, liée à la nature de l'effet « papillon » des
conséquences de la gestion des ressources naturelles. Si les activités à risques créent des
dommages environnementaux, directs, se pose la reconnaissance des dommages
135
environnementaux des ressources naturelles périphériques.
On peut citer à titre d'exemple les modes de gestion actuels pour développer les
biocarburants première génération, qui ont contribué à une déforestation internationale
massive, provoqué la pollution des eaux souterraine et de surface. Peuvent également
être rattachés au champ d'application, les ressources naturelles air, se situant localement
au dessus des zones d'extraction et d'exploitation. Dans ce cas, la nature des risques
encourus reste difficile à établir localement, notamment au vu de la quantification réelle
de pollution supposée ou avérée, émise.
La problématique est ici transversale, car l'aspect juridique déborde sur un aspect
politique et économique, non négligeables. Par voie de conséquence, viennent
s'entremêler dans cet entonnoir juridique pyramidal, toutes les problématiques futures
liées aux dommages divers, liés à l'exploitation des ressources naturelles et leur
complexité reposerait sur la nature de ces dommages et la portée de ces derniers sur un
territoire donné, mais aussi sur l'ensemble de la société contemporaine.
Ces dommages peuvent être de différentes natures mais affectent autant les habitats
naturels, s'accompagnant de la destruction lente ou progressive, de toutes les espèces
vivantes locales, que ce soit la faune ou la flore. Aujourd'hui, cette destruction concerne
aussi les populations locales.
Or les modes actuels sur lesquels reposent les régimes juridiques sont hétérogènes et
posent un grand nombre d'incertitude sur la notion même de responsabilité. Le cadre
réglementaire futur doit ainsi avoir une vision transversale des préoccupations des états.
404 EAWAG, rapport 2009, 68 pages, page 25, voir le site http://www. pseau.org/outils/biblio/document
resultat.php?o%5B%5D=3209
136
Ces derniers souhaitent renforcer les liens contractuels avec les gestionnaires,
exploitants étrangers mais ne souhaitent pas bloquer les négociations, les ressources
naturelles représentant un potentiel économique primordial, pour certaines régions du
monde.
137
2. Une problématique liée à l'identification des sujets de droits victimes
Si l'on reprend le cas indien de la ville d' Hazaribag 405, la question repose alors sur
toutes les victimes directes, êtres vivants, localement situées aux abords de la ville,
mais aussi sur toutes les victimes par ricochet, touchées par l'exportation des crevettes
alimentées par les déchets de cuir fournis par les usines de cuir de la ville. La
problématique sanitaire revêt donc un aspect international car l'identification précise de
tous les consommateurs de ces produits, qu'ils soient humains, végétaux ou animaux, à
travers la traçabilité des lots vendus, serait difficile et très longue à établir. Cet exemple
met en avant la complexité en la matière. Mais il a l'avantage d'établir l'existence d'une
pluralité de victimes, reconnues et à venir. Ici, en l'espèce, le dommage écologique
rejoint le dommage sanitaire mais n'établit pas, pour l'instant, la responsabilité de l'état
indien, ni celle de l'exploitant du site industriel. Car la notion d'installations classées
protection de l'environnement n'existe pas en droit indien, tout comme les normes Iso
pourtant internationales.
D'autre part, se pose ici la problématique de l'identification réelle des victimes directes.
Seules les victimes, sujet de droit, sont reconnues. Cela ne concerne donc que les êtres
humains. Et un être vivant non humain n'est pas reconnu comme sujet de droit, mais
comme chose.
Les enjeux liés à cette identification restent primordiaux car l'absence de prise en
compte de ces victimes risque d'alourdir à court terme le nombre de victimes, sujet de
droit.
138
de la stérilité chez l'homme, des cancers du sein chez la femme… Les effets d'une
absorption quotidienne de nombreux produits, à de faibles concentrations seraient
aujourd'hui méconnus. Les écotoxicologues cherchent à apporter des réponses à ces
questions mais la difficulté résiderait dans l'évaluation de cet effet cocktail.
139
140
Cette première réflexion a permis de mettre en évidence le caractère insuffisant de
rattachement des ressources naturelles au droit naturel, au vu des dispositions de la
Charte Mondiale de la Nature du 28 octobre 1982 et de la Convention sur la Diversité
Biologique du 5 juin 1992.
141
142
CHAPITRE II.
LE CARACTERE INADAPTE DE RATTACHEMENT AU
DROIT COMMUN
143
144
Les tensions exercées autour de la gestion des ressources naturelles, ressenties par la
société civile internationale et médiatisées sont récentes. Les premières problématiques
juridiques mêlant risques, dommages et responsabilités liés à l'exploitation et
l'extraction des ressources naturelles mondiales remontent aux affaires de pollutions et
de mise en danger d'autrui dans les années quatre vingt.
Parmi les exemples marquants nombreux, on peut citer l'affaire de L'Amoco Cadiz en
France, l'affaire du Bhopal en Inde ou encore les affaires Seveso en Italie. Les modes de
résolution judiciaires internationaux, saisis de ces types de litige, nouveaux, restaient
soumis aux juridictions internationales classiques. L'idée de créer une chambre
environnementale auprès de la Cour Internationale de Justice était de l'ordre de l'utopie.
Mais ces premiers enjeux juridiques, liant une dualité de problématiques juridiques et
sociétales, remettaient en cause de façon très relative, les moyens d'exploration,
d'exploitation et d'extraction des ressources naturelles, et plus généralement le mode de
gestion s'y rattachant.
Or, il y a eu des lanceurs d'alerte. Les populations autochtones locales, quelque soient
les continents, ont en effet évoqué au cours des trente années écoulés, cette mise en
danger, ainsi que l'absence de reconnaissance d'un droit coutumier séculaire
reconnaissant les ressources naturelles comme un patrimoine commun.
Par peur, défi, ou peut-être par pure ignorance, malgré le mouvement international de
décolonisation et les revendications juridiques, la gestion optimale des ressources
naturelles mondiales a perduré. Or, depuis la création de l'Organisation des Nations-
Unies408, le droit international de l'environnement ne rattache pas les ressources
naturelles mondiales à la notion de biens communs, res communes, mais seulement à
celle de res.
145
146
Section I. Le caractère inadapté à la notion de res stricto sensu
Les ressources naturelles mondiales revêtent plusieurs formes, qui sont à la fois
biologiques et renouvelables, comme l'air; ou biologiques et non renouvelables, comme
des espèces protégées; énergétiques et renouvelables comme le soleil, ou à l'inverse
énergétiques et non renouvelables comme le charbon ou le pétrole. La multitude des
combinaisons existantes démontre que leur nature complexe les classe à part des règles
du marché.
La France reconnaît ainsi l'eau comme une ressource naturelle, patrimoine commun de
la nation, explicitant ainsi une souveraineté nationale forte. Elle n'indique pas que c'est
un patrimoine commun de la Nation et de l'Humanité. Elle codifie l'approche intra-
générationelle des ressources naturelles dans sa vision utilitaire, protectrice et de mise
en valeur, tout en rattachant les notions de respect et d'intérêt général. Le paradigme
repose sur l'applicabilité de ce gestion.
147
§1 Un rattachement inadapté au caractère marchand
Reprenant la notion de jouissance absolue, la propriété est alors définie dans les limites
de la loi. Elle repose sur un triptyque romain de l'usus, le fructus et l'abusus. Depuis
l'adoption du code napoléonien en France, la codification internationale dans les états
de droit positif, tend vers une définition quasi-identique. Ce principe a même acquis
avec le temps, dans certains pays, un statut garanti par la constitution412.
Ainsi, relatif aux ressources naturelles foncières, les droit sur les terres arables étaient
réparties entre les fee simple, accordant une jouissance absolue perpétuelle et donc
transmissible, les life interest rattachés au sujet, et les fee tail, limités à la jouissance du
bien a minima. La réglementation actuelle, depuis 1925, met en avant le fee simple, très
similaire à la notion de propriété en droit positif.
Une chose, jus, est donc, dans les deux modes de raisonnements actuels mondiaux,
propriété de quelqu'un ou susceptible de le devenir. Si le droit romain distinguait les
choses, jus, des biens, res, la différence aujourd'hui serait quasi inexistante.
Les res nullius entrent dans la catégories des exceptions juridiques de part de leur
nature inaliénable, mais cette dernière peut se transformer en nature aliénable,
marchande, si l'on en modifie la structure. C'est le cas de l'air pur, res nullius, qui
transformé en air liquide, devient appropriable, res corporales, et présente ainsi le
caractère marchand.
148
Or, l'accélération des modes de consommation contemporains a renforcé la demande
mondiale en ressources naturelles et généralisé le statut de res corpales dés l'étape
d'exploration.
Aussi, plus les res nullius deviennent rares, plus leur intérêt économique est exponentiel
et transforme ces dernières dés leur découverte en res corporales. Ce rattachement
inapproprié énonce ainsi une nature cessible, réductrice et ambivalente, et sa portée
démontre qu'une nouvelle typologie des ressources naturelles est nécessaire mais reste
délicate.
149
A. La nature juridique du caractère marchand
Les res extra commercium se divisent eux-même en diverses catégories n'entrant pas
dans le patrimoine privé d'une personne morale ou physique. Se trouvent, parmi elles, la
notion de res communes, retenue pour qualifier les espaces naturels internationaux
comme la mer, l'océan, l'atmosphère et l'espace aérien.
Les res communes se distinguent alors des res nullius, n'appartenant à personne mais
appropriables. Aussi, le droit international de l'environnement originaire a retenu la
notion de res nullius et non la notion de res communes, extra commercium.
Or, la nature actuelle des ressources naturelles a rendu cette dernière, réductrice et
insuffisante.
Or, si l'on se réfère aujourd'hui à une définition strictement juridique, on observe que
cette dernière reste réductrice et obsolète. Les ressources naturelles mondiales ne sont
pas définies comme des res communes extra commercium. On définit une chose comme
«des biens matériels qui existent indépendamment du sujet, dont il sont un objet de
désir413».
On enferme toutes les catégories de choses dans un aspect matériel réducteur, soumis au
droit de la propriété, principal et accessoire. Or, les ressources naturelles doivent se
distinguer des autres choses de consommation courantes, de part leur nature propre. Et
l'exercice du droit de propriété doit être différent de celui applicable à toutes les choses.
Car cet exercice actuel entre en conflit avec les notions d'intérêt général de l'Humanité
et de responsabilité sociétale.
Pour autant peut-on réduire, au plan international, le droit de propriété sur les
ressources naturelles mondiales en exercant l'usus, du fructus et l'abusus au regard de
l'intérêt commun de l'Humanité?
La limite par la loi serait-elle alors légitimée, au nom de cet intérêt, par la sauvegarde
des ressources naturelles communes ? Des tentatives proposant de pallier à ce schéma
réducteur ont été posées : créer une nouvelle catégorie juridique de quasi-choses,
413 GUICHARD Sylvain et DEBARD Thibaud, Lexique des termes juridiques, 20ème édition Dalloz,
2013, 970 pages
150
érigeant ainsi un droit spécial des choses414 ; créer une catégorie de quasi-choses
communes415 sur le plan intellectuel uniquement. Ces tentatives sont certes très
pertinentes et novatrices mais ne remettent pas pour autant en cause, l'applicabilité
actuelle, en pratique, du droit de la propriété au plan national et international. Or le
XXIème siècle ne peut pas se contenter de réformettes juridiques, il doit être le siècle
sentinelle d'une autre vision, plus contemporaine, axée sur une autre approche, inter-
générationnelle des ressources naturelles mondiales, basée sur une gestion préventive et
anticipative des risques.
Dans un second temps, cet élargissement porterait sur la reconnaissance d'une réelle
personnalité juridique des choses. Une proposition émanant d'enseignants-chercheurs417
proposerait une reconnaissance juridique aux choses et êtres vivants. S'inspirant des
divers courants philosophiques, anthropologiques, cette proposition de personnification
de la biodiversité dans son ensemble, aurait ainsi rejoint les concepts autochtones et se
retrouverait déjà, en pratique dans la réglementation internationale applicable aux aires
d'espaces protégés. D'autres spécialistes proposeraient alors une vision anthropologique
très avant-gardiste, pouvant servir de base de réflexion pour modifier la nature juridique
actuelle des choses.
Aussi, Philippe Descola418 aurait tenté de démontrer qu'il n'existerait pas de différence
entre la nature et la culture car la nature serait selon lui, un pur produit social. Cet
anthropologue français, suite à son expérience en haute Amazonie, auprès des tribus
Jivaros achuar du Pérou et de Équateur, entre 1976 et 1982, rédigea une thèse 419, dans
laquelle il démontra la personnalité et donc une reconnaissance juridique indirecte de
tous les êtres vivants. Ainsi, énonçait-il que « Les hommes et la plupart des plantes, des
animaux et des météores sont des personnes (aents) dotées d'une âme (wakan) et d'une
vie autonome »420 et qu'il existerait chez les populations indiennes d'Amazonie, une
notion propre des valeurs humanistes, individualistes et collectives.
414 LOISEAU Georges, Pour un droit des choses, n°44, recueil Dalloz, 2006, page 3015
415 CHARDEAUX Marie Agnès, Les choses communes, éditions LGDJ, 2006, 487 pages, pages 140 à
280
416 KISS Alexandre-Charles, BEURIER Jean-Pierre, Le droit international de l'environnement, éditions
Perone, 4ème édition, 2010, 588 pages, page 30
417 MARGUENAUD Jean-Pierre, la personnalité juridique des animaux, recueil Dalloz 1998, page 205 ;
HERMITTE Marie Agnés, la nature sujet de droit, annales d'histoires en sciences sociales, 2001,
éditions Armand Colin, 66ème année, 350 pages, page 173 à 212
418 DESCOLA Philippe, anthropologue et ethnologue français, né en 1949, professeur au collège de
France, directeur du laboratoire d'anthropologie sociale
419 DESCOLA Philippe, thèse, La Nature domestique, symbolisme et praxis dans l'écologie des Achuar,
Paris, fondation Singer- Polignac, éditions de la maison des sciences de l'homme, 450 pages, 1986
420 Cf note 419 page 120
151
"savoir populaire421 ».
Son confrère, Bruno Latour426 est allé plus loin, en parlant de choses «hybrides », tant
dans les données que dans les conceptions intellectuelles, en proposant un « parlement
des choses », représentant tous les êtres vivants. Il a reconnu ainsi à tous les êtres
vivants le caractère de sujet de droit. Ces propositions, appuyées, reconnues dans le
monde anthropologique, ne parviendraient pourtant pas à se transposer en droit
international. Or, même si la personnification de la nature a été reconnue juridiquement
et constitutionnalisée427 depuis peu en Amérique latine, il reste encore un long chemin
pour parvenir à cette nouvelle réalité juridique, en Europe.
Introduire l'existence d'une autre vision et sa reconnaissance par l'ensemble des états,
émergents et développés, permettrait peut-être de recadrer le débat juridique et de
relancer les réaménagements possibles pour introduire une relecture des textes et des
idées. Or, même si on reconnaît le caractère réducteur donné à la notion de chose, et que
l'on tente de le limiter en dépoussiérant cette dernière, le travail serait l’œuvre d'une
nécessaire transversalité juridique. Cette transversalité serait alors indispensable pour
ouvrir la notion de chose à la perspective de nouvelles catégories de choses, mais
également pour réduire une ambivalence internationale sur cette notion, qui resterait en
l'espèce, bien perceptible.
152
2. Une ambivalence internationale perceptible
La Nature, objet de droit, est ainsi devenue, au travers de ces constitutions, un sujet de
droit à part entière. Cette transmutation, peut démontrer alors que d'une part, la réalité
juridique rejoint une volonté politique et sociétale. Et d'autre part, que l'extension des
catégories juridiques n'est pas impossible, mais cette nouveauté doit s'accompagner
d'une grande prudence et qu'une veille juridique permanente sur ces acteurs
institutionnels s'impose afin de vérifier dans le temps, si les décisions ultérieures
s'apparenteraient ou non à la même éthique constitutionnelle.
Dans ces deux constitutions, l'ensemble des ressources naturelles locales sont ainsi
frappées d'une servitude d'utilité publique, réduisant ainsi les potentielles nuisances
liées à leur extraction et leur exploitation. Un champ d'application large s'applique à
toutes les ressources naturelles et aux aires protégées430. L'ambivalence est levée sur les
ressources naturelles eau, définies par la constitution, comme un « patrimoine national
stratégique à usage public431 ». Un droit d'accès général est constitutionnalisé432.
L'ambivalence est aussi levée sur la protection des ressources naturelles et plus
largement de la Biodiversité. Les écosystèmes et le patrimoine génétique dans son
intégralité ont été proclamé d'utilité public. Et leur dégradation devient alors un
problème d'ordre public. Est garanti aussi, un droit individuel et collectif d'agir en
faveur de la protection de la nature : « toute personne pourra exiger de l'autorité
publique le respects des droits reconnus à la Pacha mama433 ». L'ambivalence sur le
préjudice environnemental est alors écartée: le préjudice indirect est reconnu et la
charge de la preuve incombe au responsable supposé d'atteinte à l'environnement 434. En
cas de doute sur la portée des dispositions légales en matière environnementale, la
153
constitution propose une interprétation protectionniste environnementale maximale435.
L'ambivalence demeure dans les autres systèmes juridiques internationaux. Ainsi, si les
ressources naturelles en eaux ont été reconnues entité juridique 436, elles ont été défini,
en droit interne français, comme une « partie du patrimoine commun de la Nation (dont
la ) protection, (la) mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans
le respect des équilibres naturels, sont d'intérêt général ».
154
B. La portée juridique du caractère marchand
Or, les ressources naturelles mondiales ne sont pas définies en droit international de
l'environnement comme des res communes extra commercium mais comme des res
commercium, sans spécificité particulière. Ce caractère marchand est donc à moyen
terme, au cœur d'un paradigme car d'une part il n'assortit pas le droit d'exploration,
d'extraction et de d'exploitation d'un devoir de vigilance suffisant, et d'autre part il crée
une contradiction entre les règles de droit international et le droit interne.
Ainsi, dans la constitution équatorienne, s'il n'existait pas de catégorie de res communes
de l'Humanité, la consécration d'une personnalité juridique, la reconnaissance du
caractère d'utilité publique et la notion de patrimoine national stratégique, ont accordé
de plein droit, aux ressources naturelles nationales un statut de res « stratégiques ».
155
1. Une typologie classique décalée des ressources naturelles
Cette instabilité dangereuse, sur le plan juridique et politique, n'a pas pour autant fait
l'objet d'un renforcement du cadre juridique international, ou d'une reconnaissance du
statut de ressources naturelles «vitales». Christopher Stone437 a comparé le statut des
ressources naturelles à celui des esclaves, asservis au maître qui les exploite.
En second lieu, le caractère marchand, rattaché aux ressources naturelles, ne fait aucune
distinction entre les ressources naturelles entre elles. Ainsi, il n'existe aucune distinction
entre les ressources naturelles « vitales », indispensables à la vie comme l'eau, les sols
et sous-sols, l'air, la biodiversité faunique et floristique, des ressources naturelles « non
vitales ». Or , le caractère marchand rattaché aux ressources naturelles «vitales», doit
pour des raisons de sécurité juridique internationale, être l'exception de la règle établie.
156
marchés spécifiques aux ressources naturelles, sous l'effigie d'un organe de régulation
mondial spécialement conçu à cet effet.
Or, force est de constater que les marchés boursiers actuels reposent sur la spéculation
des ressources naturelles minières et agricoles. Cette spéculation, à la base de la bulle
spéculative de 2008,a permis de démontrer l'absence de responsabilité rattachée à la
spéculation des ressources naturelles alimentaires. Car on pourrait peut-être retenir la
notion de mise en danger de l'Humanité.
Le début du troisième millénaire est donc marqué par une insécurité sociale et politique
qui se retrouve sur le plan juridique et reposant notamment sur une volatilité tarifaire
grandissante des ressources naturelles minières, rappelant les chocs pétroliers des
années soixante dix.
157
2. Une typologie contemporaine recherchée des ressources naturelles
Ces principes fondamentaux actuels ont pu répondre aux attentes des états, au
lendemain de la fin de la seconde guerre mondiale. La souveraineté et la protection de
l'environnement nationales et transnationales, le droit et le devoir de conserver
l'environnement et les ressources naturelles nationaux ont été établis 438, le principe de
coopération internationale en droit de l'environnement réaffirmé439. Le devoir
d'information sur les activités à risques, reconnu depuis 1982440, se retrouve aux côtés
du principe de prévention et de précaution, issus de la jurisprudence internationale 441 et
transposés442 en droit international de l'environnement.
Or, les trente dernières années ont démontré qu'il était nécessaire de revoir le
rattachement des ressources naturelles à la notion de res, et de peut-être les rattacher à
celle de res communes de l'Humanité. Qu'il s'agisse de projets environnementaux
ambitieux443 ou de simples réflexions, un questionnement juridique international
pertinent demeure notamment, sur les droits internationaux d'accès, de stockage, de
distribution mais plus généralement sur les droits et devoirs liés à la notion de propriété.
Ce dernier peut osciller de trois à cinq pour-cent, à plus de quatre vingt dix pour-cent.
L'uranium, hautement enrichi, devient donc un produit en quantité infime car son
enrichissement nécessite une quantité élevé d'uranium naturel pour l'extraction de
l'uranium 235. Or, on utilise l'uranium enrichi dans des réacteurs à neutrons rapides, par
opposition à des réacteurs à neutrons thermiques, plus lents. Ainsi, dans le domaine
militaire, on retrouve son utilisation dans tous les véhicules à propulsion nucléaire,
comme les porte-avions. Dans le domaine civil, cela concerne les centrales à production
électrique.
L'uranium naturel, en lui-même, n'est donc pas, au départ, une ressource naturelle rare.
158
Par contre, l'opération d'enrichissement de ce même uranium pour créer la fission
nucléaire crée une situation de raréfaction. La volatilité des prix reste à l'heure présente
impossible à contrôler. C'est donc au regard de la technologie nucléaire actuelle, que
l'uranium est devenue une ressource rare.
Les principaux acteurs dans le domaine énergétique sont aujourd'hui privés, et les états,
restent dans l'obligation de prendre en compte les données actuelles du marché, de la
demande et de l'offre possible pour pallier aux blocages. Il s'agit là de regarder la
situation en temps réel.
159
réacteur chinois CEFR, de quatrième génération, actuellement en service, est d'une
puissance de 20 méga gigawatts.
160
nouvelle459.
La priorité est donc d'amener l’Équateur vers une maîtrise collective raisonnée et dans
son exploitation et dans ses extractions de ressources naturelles. Toutes les formes de
propriété excessifs sont donc à présent reconnues et sanctionnées460.
161
§2 Un rattachement inadapté au caractère consommable
Tout corpus juridique repose sur une vision donnée de la société. Cette vision, concept,
joue un rôle dans la maturité du droit.
Or, cela ne peut se faire si on continue de rattacher les ressources naturelles mondiales
au caractère cessible et consommable.
Il y aurait ainsi un droit d'usage absolu implicite des ressources naturelles, qu'il serait
judicieux de comprendre et combattre.
162
A. La qualification juridique du caractère consommable
Car la répartition mondiale des ressources naturelles est inégale et se retrouve en grande
partie, dans les pays du Sud, émergents et dans l'ensemble des territoires d'Outremer.
Son usage anormal serait alors générateur d'une atteinte aux droits d'autrui. En l'espèce,
autrui s'apparente à l'Humanité. Comment alors caractériser le caractère consommable
des ressources naturelles au vu de l'intérêt commun de l'Humanité ?
Face aux enjeux actuels d'insuffisance juridique, repose la nécessité de requalifier les
aspects qualitatifs et quantitatifs du caractère consommable.
163
1. Des aspects qualitatifs incohérents
La place de la destination finale des demandes et offres des ressources naturelles devrait
se poser au regard de l'intérêt commun de l'Humanité. Or la traçabilité portant sur la
destination finale des ressources naturelles mondiales reste purement quantitative, non
qualitative. L'offre et la demande mondiales ne répondraient pas à un critère de
consommation qualitative mais purement quantitatif. Même si cette évidence
économique et sociétale est établie, le système juridique contemporain trouve ses
propres limites vis à vis du droit d'usage mondial.
Et l'impact de leur gestion revêt alors un caractère public, international et non plus local
et privé. L'approche inter-générationnelle des ressources naturelles permettrait de créer
une obligation de moyen et de résultat nouvelle. Ce nouveau statut s'appliquerait donc
au propriétaire-producteur, autant qu'au locataire-consommateur. La gestion des
ressources naturelles pourrait alors s'apparenter à celle d'un immeuble par nature, ou par
destination, assorti d'une obligation d'entretien permanent, adapté aux systèmes
juridiques en vigueur. Cette vision de la relation producteur-consommateur associé au
lien propriétaire-locataire, deviendrait alors internationale.
Porter atteinte à ce type de gestion reviendrait alors à remettre en cause, non pas une
relation entre le propriétaire et le consommateur, mais avec la société civile
contemporaine, locataire-consommateur.
Par voie de conséquence, les ressources naturelles étant des res communes
exceptionnelles de part leur nature, un droit d'ingérence sociétal indirect pourrait être
envisagé dans la gestion des ressources naturelles. Ce droit se retrouverait du stade de
l'exploration à celui de l'exploitation. Les principes de traçabilité et vigilance seraient
alors crée. Transposer cette réalité juridique, reviendrait en définitive, à qualifier la
gestion des ressources naturelles de qualitative et raisonnable : le caractère
consommable des ressources naturelles serait alors exceptionnel pour permettre de
répondre aux exigences d'une gestion qualitative orientée vers la maîtrise raisonnable
des ressources.
164
Cette nouvelle approche du droit de la propriété pousserait donc à transférer le statut de
propriétaire et de consommateur vers une vision globale et générale des ressources
naturelles. le triptyque usus-abusus -fructus, ne poserait pas de problème, au sens où ils
respecteraient tous trois, alors une gestion raisonnable des ressources naturelles. La
propriété en tant que statut individuel, ouvrirait alors le champ de la propriété éco-
responsable.
Le droit de propriété ne serait donc plus un droit exclusif, mais un droit encadré par des
impératifs d'intérêt commun de l'Humanité. Il y aurait donc entre la notion de res
nullius et celle de la propriété, un compromis juridique inédit. Cette nouvelle approche
du droit, mettant en évidence le caractère de stricte nécessité de recourir aux ressources
naturelles, permettrait alors à la fois de quantifier les demandes et les offres tout en les
responsabilisant.
165
2. Des aspects quantitatifs divergents
Or, l'absence d'un fichier mondial de l'état actuel des ressources naturelles portant sur
les disponibilités mondiales réelles pose des limites. La problématique juridique repose
donc sur une problématique technique, liée à l'aspect quantitatif et la demande mondiale
future.
Les États consommateurs seraient, quant à eux, soumis à une obligation de résultat,
basée sur un réajustement de la demande. La charge de la preuve serait alors inversée,
car il faudrait démontrer la nécessité de la demande mondiale. Cette inversion
permettrait alors d'établir une régulation de la demande permettant alors un véritable
basculement du caractère consommable, vers celui d'écolo- consommable.
Soit ils deviennent responsables en régulant par une offre raisonnée. Soit ils ne le
deviennent pas et crée une volatilité tarifaire qui concourt à court terme à une insécurité
juridique et politique. Ce comportement responsable ne peut pas se faire sans un
encadrement juridique nouveau.
Or, l'absence actuelle d'un encadrement réglementaire, portant sur l'aspect quantitatif
des échanges, ne serait pas sans rappeler les prémices du commerce international sous
Marco Polo. Mais depuis le XIVème siècle, les rapports socio-économiques ont évolué,
et les questions géopolitiques se sont entremêlées aux exigences juridiques. Cette dérive
non maîtrisée est génératrice d'insécurité juridique car elle pousse à l'utilisation
166
optimale des ressources naturelles actuelles, en limitant le droit d'accès à ces dernières
et en ne respectant pas les finalités originaires du droit international de l'environnement.
Par ailleurs, ces dérives risquent de croître avec l'apparition de nouvelles formes de
ressources naturelles, si des limites se sont pas posées.
167
B. Les enjeux juridiques du caractère consommable
Ces notions générales restent donc à l'entière discrétion des parties contractantes et
reposent donc sur une vision juridique disparate des États.
Ce statut leur permettrait alors d'être une exception juridique au caractère consommable
classique.
Ces enjeux seraient transversaux, car ils ne seraient pas seulement économiques, mais
deviendraient institutionnels et juridiques.
168
1. Des enjeux institutionnels contemporains
Mais la crise internationale, déclenchée depuis 2008, a fragilisé tous les fondements
institutionnels actuels, et a permis de relancer le discours concernant l'approche intra-
générationnelle des ressources naturelles mondiales, qui n'est plus adaptée à la réalité.
Les clivages socio-économiques et politiques ont ainsi eu un impact direct sur les
systèmes institutionnels et juridictionnels.
Or, une mutation institutionnelle vers un nouvel ordre institutionnel mondial, ne peut se
mettre en place qu'à la condition qu'on prenne conscience des effets de la crise
mondiale actuelle.
Si Franklin Roosevelt disait que « La seule chose dont nous devons avoir peur, c'est la
peur elle-même 462», comment alors, à partir des exemples latino-américains, influencer
la communauté internationale à opter pour un système institutionnel environnemental ?
Pour répondre à cette interrogation, il serait nécessaire de faire un parallèle entre les
objectifs institutionnels et les objectifs politiques et économiques actuels.
169
meilleure protection des zones terrestres et marines, la protection de la faune et la flore
locale, et l'accentuation de l'accessibilité aux ressources naturelles par la population
locale. La maîtrise des gaz à effet de serre, limitée à deux degrés permettrait de
conserver et protéger trois cent cinquante millions d'hectares supplémentaires forestier.
L'urbanisation non maîtrisée est soulevée comme un vecteur direct lié aux catastrophes
naturelles, notamment les inondations. Le rapport conclut en objectif huit par la mise en
place d'un partenariat mondial pour le développement.
Or, certains pensent que ce partenariat mondial ne peut être efficace que par la mise en
place d'une «eco-construction467 » autour des ressources naturelles, res publica. Ce
partenariat mondial formerait ainsi le socle d'une bio-gestion raisonnée, construite
autour d'une symbiose du secteur privé et public. Les enjeux institutionnels seraient
donc les piliers d'un nouveau type de gestion, bâtie autour de la reconnaissance du
caractère fragile et rare des ressources naturelles, et d'un partenariat politique nouveau
où société civile, environnement et institutions se rejoignent. Cette vision juste, et
actuelle, d'un droit d'ingérence de la société civile dans les systèmes institutionnels, doit
sans nul doute s'accompagner d'un encadrement juridique nouveau, pour ne pas aboutir
à une nouvelle forme de dictature environnementale.
On pourrait donc reconnaître à ce rapport, d'avoir eu le mérite, quatre vingt ans après le
discours de Franklin Roosevelt, de poser les vrais problématiques et d'y apporter des
solutions nouvelles plausibles. La seule question à laquelle le rapport ne peut répondre
est de déterminer le degré de volonté politique pour la mise en place de ce nouveau type
de gestion institutionnelle. Les enjeux actuels, soulevés par les tensions internationales
entre les pays occidentaux et les pays arabes, ralentissent le processus de réflexion,
mais ne l'écartent pas pour autant. L'économie mondiale, soucieuse d'un développement
durable, ne pourrait pas aller à l'encontre de ce partenariat nouveau. Les systèmes
institutionnels actuels seraient donc inéluctablement, conduit à redéfinir l'encadrement
juridique lié aux ressources naturelles, dans les années à venir.
467 SEVERINO Jean Michel et BOUYE Mathilde, Fixer les nouveaux Objectifs du millénaire, les
Nations-Unies montrent le cap pour 2030, LE MONDE, 20 juin 2013
170
2. Des enjeux sociaux-juridiques réversibles
Car si le caractère fragile et rare des ressources naturelles est reconnu, cette
reconnaissance juridique établit alors de nouvelles obligations de moyens et de
résultats, conduisant à une nouvelle forme de consommation raisonnée. Encadrer le
caractère consommable permettrait ainsi de limiter les effets en cascade, engendrés par
les modes de surconsommation actuels.
Les exemples bolivien et équatorien ont démontré que ce dépassement juridique, par la
prise en compte des enjeux sociaux-juridiques, reste possible et entre dans le champ
171
d'application d'un nouveau type de gestion raisonnée, parce qu'équilibrée et
proportionnée, capable de dépasser les clivages juridiques liés à la notion de propriété
et de surexploitation d'un bien consommable simple.
172
Section II Le rattachement inadapté au droit de propriété
Elinor Ostrom468 a rappelé que ce n'est pas tant le principe de la propriété qui est remis
en cause, mais plutôt l'interprétation extensive que les sociétés s'en seraient faites. Car il
n'existe pas un système d'appropriation mais plusieurs. Sont notamment établis des
systèmes de propriétés communautaires restant soumis à un droit coutumier
respectueux des cycles de vie endémiques.
Ce droit fixe en effet l'accès aux ressources naturelles dans le cadre d'un partage
équitable. Le droit d'usage doit donc être réalisé en harmonie des demandes et de l'offre
que la Nature peut proposer. Or, les règles de droit international sont établies sur un
droit de propriété classique, lié à la notion d'appartenance. Cette même notion
d'appartenance n’apparaît pas sur le plan collectif mais bien individuel, et remet en
cause les principes de libre accès aux ressources naturelles. Ainsi, la notion même
d'appartenance et l'interprétation extensive que la pratique en a faite, est générateur
d'insécurité juridique.
Car les ressources naturelles mondiales sont définies au prorata du besoin lié à leur
utilisation et au lieu où elles sont prélevées. Or le modèle commun aux sociétés
contemporaines a véhiculé une vision pragmatique du droit de propriété, conduisant à la
fusion des notions d'appartenance et d'appropriation.
L'appartenance et l'exploitation des ressources naturelles sont elles mêmes liées aux
notions de négoce et de distribution. Pourtant, ce qui appartient à la communauté n'est
pas pour autant, objet d'appropriation par cette dernière. Car on ne peut approprier ce
qui est nécessaire à la vie en communauté. Cette distinction entre appartenance et
appropriation n'existe que dans le droit coutumier autochtone, pas dans le droit
contemporain international.
La fusion juridique des deux notions, liées à la pratique du droit de propriété, a ainsi
crée de véritables iniquités entre les communautés locales et la société contemporaine.
Car définies comme de simples res, les ressources naturelles sont devenues, au travers
du concept d'appartenance, de purs objets d'appropriation physique, collective ou
individuelle.
Cette inadaptation des ressources naturelles à la notion d'appartenance est devenue par
468 OSTROM Elinor, Gouvernance des biens communs, pour une nouvelle approche des ressources
naturelles, Cambridge Université Press, 1990, Bruxelles, réédition De Boeck 2010, 300 pages, pages
45 et suivants
173
ignorance culturelle et éthique source d'insécurité juridique et de conflit diplomatique et
socioculturel. Corollairement, ce même constat s'est doublé d'une inadaptation des
ressources naturelles à la notion d'exploitation.
174
§1. Une inadaptation liée à la notion d'appartenance
La souveraineté permanente des États sur leurs ressources naturelles nationales a posé
le principe d'appartenance. Or, force est de constater que l'inadaptation des ressources
naturelles est liée à la notion d'appartenance, et qu'il existe alors une véritable
complexité juridique autour de cette notion.
Or, le paradigme repose sur le fait que cette notion d'appartenance crée des conflits
d'intérêts, et caractérise une complexité juridique, génératrice de problématiques liées à
la notion d'appartenance.
175
A. La complexité juridique autour de la notion d'appartenance
C'est parce que l'approche intra-générationnelle des ressources naturelles mondiales est
fondée sur une gestion traditionnelle utilitaire, que cette complexité, au départ, relevée,
est aujourd'hui, dénoncée, car source d'insécurité juridique mondiale.
176
1. Une notion juridique complexe
Pierre-Yves le Meur et Jean-Pierre Jacob indiquent 471 que si l'on s'en réfère à la notion
d'appartenance des ressources naturelles, et plus particulièrement la question de
l'appartenance et l'appropriation foncière à l'échelle planétaire, cela supposerait une
définition juridique plus précise de l'entité, objet d'appropriation. Or les acteurs sociaux
actuels appartiennent à des univers différents, créateurs de conflits de par leur
divergence d'opinion.
La question de fond posée par les deux auteurs, au travers d'exemples africains et latino
américains, revient à se demander à quelle type d'appartenance les pays demandeurs se
réfèrent. Au delà de cette question éthique, mais surtout juridique, se pose alors la
question de savoir si l'exploitation des ressources naturelles communes, en droit
international contemporain, se réfère au respect et à l'accord expresse des communautés
locales. Car pour qu'il y est contrat, il faut la rencontre des volontés et un consentement
éclairé des parties.
177
conséquence, à d'autres notions juridiques tel que la responsabilité pour faute ou
manquement au devoir de conseil, la notion de dommages et de préjudices moraux. La
responsabilité pourrait se rattacher alors à la notion de pater familias, et induire la
notion de compensation juridique générale, non pas simplement économique et
financier mais morale.
178
2. Une fonction juridique inadaptée
Si tout État, sujet de droit international, est tributaire d'un droit de propriété, la notion
même d'appartenance génère, au départ, plus de droits que de devoirs. La confusion
entre l'appropriation et l'appartenance a ainsi contribué à la naissance de nouveaux
types de dommages, environnementaux. Du fait générateur du dommage découle le
mécanisme de la responsabilité. Vis à vis de dommages environnementaux, on parle
alors de responsabilité sociale de l'entreprise.
Or, la grande complexité juridique à venir serait de déterminer avec soin, les
conséquences générales liées à la dégradation écologique. L'enjeu serait donc de scinder
les notions d'appartenance et d'appropriation en clarifiant leur fonctions respectives. Car
aujourd'hui, l'un découlerait de l'autre.
La fonction juridique d'appartenance des ressources naturelles doit donc dans les années
à venir, se dissocier de la notion d'appropriation pour d'avantage s'axer sur une
reconnaissance juridique de la mémoire collective, au titre de patrimoine commun de
474 SERRES Michel, Le mal propre, polluer pour s'approprier, Éditions le pommier, 2008, 90 pages
475 LE MEUR Pierre-Yves, Opérateurs miniers, gouvernementalité et politique des ressources à Thio,
Nouvelle Calédonie, Congrés sur les sciences dans le Pacifique, Papeete, 3 au 6 mars 2009
179
l'Humanité. Plus qu'un savoir-faire à défendre et préserver, la fonction juridique
d'appartenance des ressources naturelles se baserait alors sur un savoir-être
communautaire, garant de la qualité des prélèvements à la source et de la réciprocité du
principe d'équité du partage des bénéfices. Cette évolution, souhaitée par les
communautés locales, placerait ainsi appartenance et appropriation sur deux plans
juridiques, matériel et immatériel, complémentaires et indivisibles. La fonction
juridique d'appartenance des ressources naturelles deviendrait donc une fonction
principale, et non accessoire, à la fonction juridique d'appropriation de ces dernières. Il
n'y aurait donc plus confusion mais distinction des deux notions juridiques. Dans cette
optique, la responsabilité sociale de l'entreprise serait donc uniquement complémentaire
car elle conforterait la protection juridique déjà existante.
Mais Jean-Pierre Jacob et Pierre-Yves Le Meur 476 émettent une réserve juridique sur la
reconnaissance juridique de la mémoire collective rattachée à la notion de patrimoine
commun de l'Humanité : la question de la communauté d'appartenance dont le
patrimoine reconnu relève n'est pas tranchée. Car, il s'agit de définir si ce seraient les
communautés locales contiguës, le gouvernement ou la société internationale.
Ils citent alors l'exemple477 des tribus calédoniennes de Borendy qui considèrent que les
aires protégées restent un lieu commun, sous réserve d'échanges entre le bailleur de
fond, qui est celui qui prête l'aire protégée, et le locataire, qui dispose de ce dernier.
Cette notion d'échange fait donc référence en droit, à la notion de don, assorti d'une
créance morale. Ici, les auteurs indiquent que la logique du don, au sens de prêt,
comprend à la fois des normes et des principes immatériels tel que le « bon »
comportement mais renvoie surtout à la notion de gardiennage.
Ainsi, les communautés locales ont-elles crée, bien avant le droit positif, les notions de
pater familias et de gestion pour autrui, reconnus en droit interne par les divers
systèmes juridiques contemporains dont le droit français.
180
B. Les problématiques juridiques liées à la notion d'appartenance
181
1. Des problématiques juridiques en droit international
Cette approche libérale des droits de propriété a pourtant sans le vouloir, conduit à
l'établissement progressif et international de la notion d'appropriation et d'appartenance
absolues, dévalorisant le travail traditionnel des communautés locales au profit d'une
marchandisation accrue des ressources naturelles. Cette appropriation absolue s'est
établie au travers des mécanismes de transfert des connaissances autochtones par
l'introduction des brevets.
479 OST François, La nature hors loi, l'écologie à l'épreuve du droit, éditions la découverte poche, 2003,
pages 130 à144
480 LASLETT Peter, John Locke, Two treaties of governement, Cambridge university press, 1988,
traduit en français, 1689 pages, pages 285 à 302
182
Ainsi, les droits de propriété, issus du travail intellectuel lié à la création d'un brevet sur
des ressources naturelles, vivantes, ne suffiraient pas à créer pour autant des droits
d'appartenance et de partage des connaissances.
L'exemple des nodules polymétalliques des fonds marins illustre les problématiques
juridiques internationales liées à la notion d'appartenance des ressources naturelles
minières sous-marines mais plus généralement de toutes les ressources naturelles,
énergies fossiles. De par leur nature chimique, les nodules polymétalliques, petites
concrétions de fer et de manganèses, cuivre et de nickel, sont devenues des matières
premières minières de premier plan.
Entre l'archipel d'Hawaï et la côte ouest du Mexique sont répertoriés environ prés de
trois cent cinquante millions de tonnes de nickel et moins de trois cent millions de
tonnes de cuivre. Cette réserve minière sous-marine reste à l'heure actuelle une des plus
importantes au monde. Leur extraction reste néanmoins une problématique technique
car les nodules se trouveraient dans les fonds marins, entre quatre et six mille mètres de
profondeur. Cela reste aussi une problématique juridique de premier plan. Car se pose
actuellement le droit d'appartenance de ces fonds. L'exploitation des fonds marins du
domaine public maritime reste soumise au régime des mines des états côtiers. Celle des
grands fonds au delà des limites des juridictions nationales reste soumis à une
réglementation spécifique481.
183
La France, à titre d'exemple, applique cette réglementation pour les permis
d'exploitation et d'exploration. Ces derniers sont délivrés par décret en Conseil d’État
après avis du Conseil général des mines. Un dossier de demande est déposé,
accompagné d'une étude d'impact et d'un mémoire de travail. Il existe malgré cette
complexité juridique, une réciprocité limitée entre les pays pour ces demandes depuis
1982. Pour rappel, la conférence de Genève sur le droit de la mer de 1958 a adopté
quatre conventions portant respectivement sur la mer territoriale et la zone contiguë, la
haute mer, le plateau continental, la pêche et la conservation des ressources biologiques.
Elle fixe les règles de libre communication et circulation entre les pays, d'utilisation
pacifique des mers, et parle « d'exploitation équitable et efficace » des ressources et de
préservation du milieu marin. Or n'est pas définie la notion d'exploitation « équitable »
dans la convention. De plus, la notion d'efficacité fait directement référence à la notion
d'exploitation optimale au sens d'intensive.
482 REVUE DE PRESSE JURIDIQUE, Les Etats-Unis vers la ratification de la convention de Montego
Bay, 1er juillet 2012, http://wwwlarevuedepressejuridique.org consulté le 30 novembre 2014
184
2. Des problématiques juridiques en droit interne
D'autre part, les activités polluantes, liées à l'extraction et l'exploitation des ressources
naturelles, ont endommagé l'environnement, où évoluent les populations locales. La
négociation autour des droits d'appartenance relatifs aux ressources naturelles reste une
amorce nouvelle. En effet, la création d'aires protégées, au sein même de zones
communes internationales, a limité les stratégies exclusives, polluantes, et donc créer
des stratégies inclusives.
La pollution doit contourner l'aire protégée, ce qui techniquement reste difficile mais
juridiquement novateur. Or, la problématique juridique actuelle réside dans les contrôles
réels effectués, notamment dans les zones pauvres, où la notion d'appartenance reste
liée à la notion d'appropriation, même aux abords d'un site protégé.
Et aucun état ne peut allier la notion d'appartenance à la notion de droit de polluer car il
ne serait pas souhaitable de s'approprier un bien souillé, inexploitable. Les
communautés locales revendiquent donc un droit d'appartenance des ressources
naturelles, res communes, vierges ou non souillées.
185
communauté locale. Ce caractère nouveau devient alors un instrument d'indépendance
environnementale nouvelle génération, grevé d'une servitude bio-responsable novatrice.
C'est alors que se pose la problématique juridique de déterminer les modes d'attribution
de cette servitude et quels sont les acteurs qui la contrôlent.
186
§2 Une inadaptation liée à la notion d'exploitation
187
A. La problématique juridique autour du principe d'exploitation
Les notions et fonctions juridiques du principe d'exploitation n'ont pas évolué au même
rythme que les nouveaux défis environnementaux.
Le droit souverain sur les richesses et les ressources naturelles est affirmé sur le plan
international depuis 1952483. La permanence et l’inaliénabilité de ce droit sont un des
éléments fondamentaux du droit des peuples à disposer d'eux-même484. Ayant acquis un
statut politique, économique et socioculturel485, ce droit exclusif, réservé aux peuples486,
s'est étendu aux nations487, aux états et aux peuples de territoires occupés488.
Pour autant, si le principe d'exploitation est reconnu, la notion même d'exploitation sur
le plan juridique reste imprécise. Et l'étendue relative à la pluralité des titulaires de droit
d'exploitation dilue l'imprécision existante sur la notion juridique réelle du principe
d'exploitation.
188
naturelles, reste une activité à haut risque environnemental. Or cette activité repose sur
un vide juridique certain489. Car le statut juridique du flux de CO² reste incertain. Les
dispositions internationales et européennes en vigueur490 confondent juridiquement les
notions de flux de CO², défini comme « un flux de substances résultant de procédés de
captage de CO² » et de stockage géologique du CO², défini comme «une injection
accompagnée du stockage des flux de CO² dans les formations géologiques
souterraines ». Le stockage géologique s'applique donc, d'un point de vue technique,
non au CO² pur mais aux flux de CO² composés de « substances ». Or, le CO² pur non
stocké est dangereux. Ce gaz n'est donc pas qualifié juridiquement de déchet au vu de la
réglementation actuelle491.
Mais au vu des enjeux stratégiques miniers actuels, certains états ont décidé de
dissocier le droit de la propriété foncière du sol de celui du sous-sol qui s'y rattache.
Ainsi le Vénézuela, premier exportateur de pétrole mais grand émetteur de CO², a-t-il
dissocié le droit d'exploiter les sous-sols, détenu par les concessionnaires, de la
propriété des sous-sols eux mêmes.
Le code civil vénézuelien492 ne concède donc pas le droit de propriété aux exploitants de
gisements miniers ni aux propriétaires des gisements.
L'ensemble des sous-sols vénézueliens appartient donc à l’État vénézuelien, garant de la
protection écologique.
489 DE VIGAN Stéphanie, Stockage géologique du CO2, considérations juridiques sur l’exploitation du
sous-sol comme ressource, IIIe colloque franco espagnol sur le stockage géologique du CO², Orléans,
18 octobre 2012, 30 pages, http://www.geosciences.mines-paristech.fr/fr/equipes/hydrodynamique-et-
reactions/devigan2013
490 Directive 2009/31/CE du 23 avril 2009 relative au stockage géologique de dioxyde de carbone,
article 3
491 Directive 2008/98/CE du 19 novembre 2008 relative aux déchets, article 1 ; Règlement CE 1013-
2006 du 14 juin 2006 relatif au transfert des déchets article 1 ,paragraphe 3 h
492 Article 549 du Code civil vénézuelien de 1982
189
Les contrats d'exploitation sont dénommés « contrats de la République » et sont tous
assortis d'une double obligation de moyen et de résultat, garante de conserver l'équilibre
biologique493. Ce droit étatique du sous-sol se retrouve aussi dans les constitutions
colombiennes494, équatoriennes et boliviennes495.
190
2. Une fonction juridique délicate du principe d'exploitation
191
l'inflation tarifaire crée par la situation quasi monopolistique.
Ainsi, si l'on reprend le cas des ressources naturelles minières sous-marines, les nodules
polymétalliques représentent, par leur nature exceptionnelle, un enjeu économique et
stratégique nouveau, inexistant il y a cinquante ans. Mais cet enjeu est à la fois possible
et dangereux. Possible car il représente l'avenir dans le domaine bio-énergétique et bio-
chimique ; dangereux parce que ces petites concrétions naturelles, véritables concentrés
de matières premières rares, sont de puissants moyens de pression politiques. Or leur
statut juridique reste flou et un encadrement réglementaire relatif à leur exploitation est
nécessaire. Et le constat reste le même, quelque soient les ressources naturelles.
Si l'on prend l'exemple de l'eau, l'exploitation des ressources naturelles minérales dans
des territoires sensibles, comme en Cisjordanie, repose aujourd'hui sur une impossible
adéquation entre les droits et obligations de l'état occupant et ceux des territoires
occupés.
Même si l’État, occupant est réputé être l'administrateur des ressources naturelles506, et
qu'un transfert de propriété ne s'établit pas, la pratique a démontré un véritable droit
d'exploiter au profit de la personne morale, non détentrice du droit de la souveraineté
sur les ressources naturelles. Le stress hydraulique, généré par l'accès contrôlé à l'eau
par l'état occupant, reste générateur d'instabilité juridique, reposant sur une crise
majeure, institutionnelle, politique et diplomatique.
192
B. La portée juridique liée au principe d'exploitation
Les premières concernent le domaine des polluants modernes. Le cas des xénobiotiques
revêt le caractère de risque sanitaire international potentiel. Provenant du grec xénos qui
désigne étranger et de bios signifiant la vie, les xénobiotiques sont des « substances
chimiques étrangères aux organismes vivants507 ». Elles sont donc issues de l'activité
humaine et recouvrent l'ensemble des activités, humaines et vétérinaires. Or, leur
composition spécifique les rendant extrêmement résistantes, leur présence dans
l'environnement devient dangereuse car leur degré de pollution est incontrôlable et la
lutte reste inefficace. La caractérisation du degré de risque sanitaire international reste
difficile à établir techniquement mais des études ont démontré la présence de ces
substances toxiques dans les denrées alimentaires comme le café, le poisson ou dans les
plantes médicinales508.
La contamination en amont des produits de base se distille ensuite dans toute la chaîne
alimentaire. Elle se retrouve aussi dans les systèmes de distribution de l'eau potable. Les
impacts sur l'ensemble des organismes vivants touchés sont difficilement identifiables
mais des anomalies génétiques chez certaines espèces, comme les poissons, ou encore
des liens de causalité entre la stérilité chez certains hommes et le cancer du sein chez
les femmes, pourraient être établis. Les effets liés à l'absorption quotidienne des ces
toxines restent aussi aujourd'hui inconnus. Plus de soixante millions de substances
chimiques ont été recensé en 2013509.
Relatif au milieu aquatique, un procédé technique breveté 510 permet de détruire ces
dernières par destruction des molécules et injection d'acides minéraux dans les rejets
pollués. Ce procédé, reconnu en Europe, commence à s'exporter dans les pays
émergents.
Par contre, si le cadre technique existe, une absence juridique est constatée sur le
rattachement de ce nouveau type de risque. Le rattachement des xénobiotiques à la
catégorie des polluants modernes et d'émissions industrielles est effectif depuis 2010 511
507 Mensuel scientifique, décembre 2010, L'eau l'industrie les nuisances, pages 50 à 53, élimination des
xénobiotiques
508 Agro Paris Tech, Etude sur les contaminants des aliments, département de recherche, septembre
2013, http://www.agroparistech.fr, consulté le 20 novembre 2013
509 Toxycenter rapport, july 2013, 34 pages, http://www.cas.org traduit en francais, consulté le 30
novembre 2013
510 Procédé photochimique Loïlyse, 2010, entreprise Loira, prix éco technologie 2012, http://www
ecotechnologie.org, consulté le 10 décembre 2013
511 Directive CE n°2010/75/UE du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles, prévention et
réduction intégrées de la pollution, publiée le 17 décembre 2010, 123 pages
193
en Europe. On parle de gestion « prudente512 » et de substance et de pollution 513, mais le
champ d'application reste étroit car le cadre juridique européen ne s'applique pas aux
activités de recherche et de développement ou à l'expérimentation de nouveaux produits
et procédés514.
Autant dire qu'on reconnaît l'existence des xénobiotiques mais qu'on se limite à les
constater, pas à encadrer les activités créatrices de ces dernières. Le cadre réglementaire
reste donc complexe, confus et contradictoire entre la volonté à reconnaître l'existence
d'un risque réelle et les enjeux biotechnologiques liées à la recherche et au
développement.
194
2. Des problématiques organiques liées à l'absence de cohésion organique
Le principe d'exploitation est lié au départ au droit de souveraineté des peuples sur les
ressources naturelles et les richesses de leur territoire. L'extension des titulaires à ce
droit a crée une première insécurité juridique, précédemment décrite. Mais cette
extension a crée aussi de nouvelles problématiques, notamment liées à l'absence d'une
cohésion organisationnelle internationale.
Pour la France, une prise de conscience juridique, défensive et réactive existe. Une
dynamique s'est crée autour de la mise en place d'un Comité de pilotage et de suivi, issu
du plan national sur les résidus de médicaments dans l'eau515 .
195
Mais cette circulaire ne concerne que les rejets de villes de plus de dix mille habitants.
La Commission Européenne, au vu des risques encourus, a inscrit la liste des substances
prioritaires à l'annexe X de la Directive Cadre sur l'eau 517, incluant une vingtaine de
substances prioritaires à la liste initiale des 33 substances. L'initiative française a incité
les autres pays européens à adopter de nouvelles stratégies juridiques dans le domaine.
517 DCE 2000/60/CE du 23 octobre 2010 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le
domaine de l'eau, JO L327 du 22 décembre 2000
196
Cette seconde réflexion a permis dans ce premier titre, de poser une réflexion autour de
la Convention sur la Diversité Biologique du 5 juin 1992 et la Charte Mondiale de la
Nature du 28 octobre 1982.
Elle repose notamment sur les problématiques juridiques liée à l'approche intra-
générationnelle des ressources naturelles mondiales, les modes de gestion qui en
découlent et le rattachement des ressources naturelles à la notion traditionnelle de res.
Ainsi, au delà de la notion de res, les réflexions portent sur une autre approche, inter-
générationnelle des ressources naturelles mondiales, pour lesquelles on pourrait retenir
la notion de res communes extra commercium.
197
Ce premier titre a abordé les interrogations, et les problématiques liées à l'approche
intra-générationnelle des ressources naturelles mondiales et une gestion traditionnelle
basée sur une vision utilitaire.
Face aux nouvelles données et des problématiques contemporaines liées à une vison
dépassée des modes de gestion des ressources naturelles, une autre approche, inter-
générationnelle des ressources naturelles mondiales, est proposée car elle serait
transversale et donc mieux adaptée aux défis du nouveau millénaire.
Or, le défi juridique s'accompagne d'un défi institutionnel d'un nouvel ordre, élargi aux
nouveaux acteurs et susceptible d'établir une mutualisation juridique et scientifique des
données environnementales.
L'approche intra-générationnelle des ressources naturelles mondiales s'est basée sur une
gestion traditionnellement protectrice. Elle doit donc affronter dans les années à venir,
une mutation de son mode de fonctionnement.
198
TITRE II. L'APPROCHE LIMITEE AU CADRE JURIDIQUE
DES RESSOURCES NATURELLES
199
200
Les mécanismes juridiques internationaux contemporains se sont adaptés à l'évolution
de la société civile mondiale. Ainsi, le droit international contemporain de
l'environnement n'a pas été influencé par les systèmes juridiques reconnaissaient un
statut de sujet de droit à tous les êtres vivants, ou par ceux prônant la domination de
l'Homme sur la Nature.
On peut citer à titre d'exemple l'affaire de la truie de falaise 519 où « une sentence du juge
de Falaise condamna une truie à être mutilée à la jambe et à la tête, et successivement
pendue pour avoir déchiré au visage et au bras et tué un enfant Cette truie fut exécutée
sur la place de la ville, en habit d’homme ; l’exécution coûta dix sous et dix deniers
tournois, plus un gant neuf à l’exécuteur des hautes œuvres. Les juges s’appuyaient,
dans les procès dirigés contre des animaux, sur un texte de l’Ancien testament (Exode
21, 28) qui dispose : Si un bœuf encorne un homme ou une femme et cause sa mort, le
bœuf sera lapidé et l’on n’en mangera pas la viande. ».
Ou encore celle de la truie de Savigny520: « ... C’est assavoir que, pour la partie
demanderesse, avons cité, requis instamment en cette cause, en présence dudit
défendeur présent et non contredisant, pourquoi nous, juge, avons dit, faisons savoir à
tous que nous avons instruit et donné notre sentence définitive en la manière qui suit;
c’est assavoir que le cas est tel qu’il a été proposé par la partie demanderesse, et
duquel appert à suffisance, tant par témoins que autrement. Aussi conseil tenu avec
sages et praticiens, et aussi étant considéré en ce cas l’usage et coutume du pays de
Bourgogne, ayant Dieu devant les yeux, nous disons et prononçons pour notre sentence
définitive et à droit et à icelle notre dite sentence ; déclarons la truie de Jean Bailli,
alias (autrement dit) Valot pour raison du meurtre et homicide que la dite truie ...
devoir être pendue par les pieds du derrière à un arbre,.. ».
Cette jurisprudence concernait tous les animaux, taureaux 521, chevaux522 compris. Si des
jurisconsultes européens célèbres, comme Philippe de Beaumanoir 523, indiquaient
l'absence de discernement propre aux animaux et leur irresponsabilités, d'autres, au
518 AGNEL Émile, curiosités judiciaires et historique du moyen âge, éditions Dumoulin, 1858, gallica,
bibliothèque numérique , jugement de 1386, 50 pages, page 13 : 1266 : jugement de Fontenay aux
Roses portant sur un pourceau brûlé pour avoir dévoré un enfant ; 1394 : jugement de Roumaigne
portant sur un porc pendu pour avoir tué un enfant ; 1404 : jugement de Rouvres, portant sur trois
porcs suppliciés pour avoir tué un nouveau né ; 17 juillet 1408 : jugement du bailly de Rouen portant
sur un porc pendu à Vaudreuil, prononcé aux assises de Pont de-l’Arche tenues le 13 du même mois ;
24 décembre 1414 : jugement d'Abbeville portant sur un petit pourceau traîné et pendu par les jambes
de derrière, pour meurtre d’un enfant
519 AGNEL Émile, curiosités judiciaires et historique du moyen âge, éditions Dumoulin, 1858, gallica,
bibliothèque numérique , jugement de 1386, 50 pages, page 11
520 Cf note 519 page 9
521 AGNEL Émile, curiosités judiciaires et historique du moyen âge, éditions Dumoulin, 1858, gallica,
bibliothèque numérique , jugement de 1386, 50 pages, page 13 : 1499 : jugement du bailliage de
l’abbaye de Beaupré, ordre de Citeaux, près de Beauvais condamnant à la potence jusqu’à mort
inclusivement un taureau ayant tué un adolescent
522 AGNEL Émile, curiosités judiciaires et historique du moyen âge, éditions Dumoulin, 1858, gallica,
bibliothèque numérique , jugement de 1386, 50 pages, page 13 :1389 : jugement des échevins de
Montbar portant sur la condamnation à mort d'un cheval ayant tué un homme
523 Jurisconsulte français, 1250-1296
201
contraire, comme Josse de Damhoudère524, soutenaient que malgré cette absence et une
irresponsabilité avérée, l’animal devait être brûlé vif car il avait été l’instrument du
dommage.
René Garraud526 indiquait, il y a plus d'un siècle, que «l'homme n'est pas libre de ses
actions et la loi n’est que le principe de direction qui préside à ce mouvement. Mais,
tandis que la loi est imposée aux autres êtres, elle est proposée à l’homme : car
l’homme est libre de lui obéir ; il peut suivre la direction qui lui est tracée ou s’en
écarter. Dans son sens le plus général, la loi est donc le principe de direction, qui est
tantôt imposé, tantôt proposé aux êtres, dans leur développement527 ».
L'auteur rajoutait que «il faut du reste reconnaître, en faisant abstraction de toute
conviction philosophique personnelle, que la conception du droit, chez les peuples
modernes, repose sur deux faits de conscience et, comme le disent les philosophes, sur
deux postulats essentiels :1’existence d’une loi morale qui s’impose à l’homme comme
règle de conduite, et la liberté pour l’homme d’y conformer ses actes. Du
rapprochement de ces deux idées, naissent, en effet, la responsabilité, c’est-à-dire le
devoir, et l’inviolabilité, c’est-à-dire le droit : l’homme n’est responsable que parce
qu’il est libre, et il n’est inviolable que parce qu’il est responsable ; de sorte que, dans
l’acception la plus haute du mot, le droit serait précisément la faculté inviolable pour
l’homme de réaliser son devoir.... ».
L'auteur considérait alors que la mission du pouvoir était de « protéger l’exercice des
droits de chacun. Quand un individu agit dans les limites de son droit, il peut se trouver
en face d’autres individus qui veulent entraver l’usage légitime de sa liberté. Sans le
pouvoir, la lutte s’établirait entre les individus et le triomphe resterait au plus fort. Le
pouvoir intervient, il prend pour lui cette lutte, et, en écartant toute résistance
coupable, il assure la protection du droit.On doit donc considérer le pouvoir comme
une force collective et organisée mise au service du droit. Du jour où le pouvoir ne
protège plus le droit, il cesse d’être le pouvoir et devient la tyrannie ; tandis que, s’il
comprend sa mission, il réalise la belle pensée de Pascal : « Il faut mettre ensemble la
justice et la force, et, pour cela, faire que ce qui est juste soit fort, et que ce qui est fort
soit juste......».
Tout acte de l'Homme trouve ainsi ses limites par l'application du droit, force de loi et
par le pouvoir. Et que la contrainte, selon l'auteur, est « inséparable de l’idée de droit :
elle en est l’âme, l’élément vital... ».
202
Cette vision du devoir et de la responsabilité individuelle en découlant, résulte d'une
évolution juridique et institutionnelle. Mais elle s'est appliquée de façon trés singulière
à la protection de la Nature.
203
204
CHAPITRE I.
LE CHOIX DEPASSE D' UN CADRE JURIDIQUE
PROTECTEUR
205
206
Construire un système juridique commun, dans l'intérêt de l'Humanité, était une tâche
difficile, au lendemain de la seconde guerre mondiale.
Les sources originaires du droit international de l'environnement reposent sur un
ensemble de conventions internationales, de droit coutumier, de jurisprudence, et des
principes généraux du droit. Les États s'appuient donc depuis 1945 sur les notions
juridiques de frontières, de souveraineté absolue sur les ressources naturelles
territoriales et de droit à ne subir aucun dommage.
Les mouvements de décolonisation et la fin des protectorats ont densifié les échanges et
renversé les rapports de force. Le choix politique et économique des nouveaux états
s'est orienté sur un mode de consommation énergivore, à l'image des sociétés
occidentales d’après guerre, et a contribué à la mise en danger des milieux endémiques.
Paradoxalement, les conséquences de ce choix ont permis un renforcement de la
coopération juridictionnelle et institutionnelle inter-états avec l'émergence d'acteurs
institutionnels nouveaux les organisations internationales intergouvernementales et non
gouvernementales.
La détérioration des milieux et les menaces d'extinction des espèces étant des
phénomènes scientifiques complexes, l'étude de ces derniers est alors passé par une
nécessaire forme de coopération technique, orientée sur la surveillance et des études
des milieux et de la biodiversité. Ont été institué à ce titre, un ensemble de
réglementations environnementales spécifiques à chaque domaine d'étude. Le droit
étant une matière évolutive, cette réglementation n'a cessé de s'adapter aux nouveaux
défis environnementaux.
528 AGNU, Résolution 2995 XXVII, du 15 décembre 1972 portant sur la coopération entre les états sur
la protection de l'environnement
529 Convention d'Apia du 12 juin 1976 portant sur la protection du pacifique Sud, entrée en vigueur le 18
juin 1990; Charte mondiale de la Nature du 28 octobre 1982
530 Article 192, partie XII, convention de Montego Bay du 10 décembre 1982
531 Article 4, Convention UNESCO sur la protection du patrimoine mondial culturel et naturel, du 16
novembre 1972
532 AGNU, Résolution A/RES/37/8 du 29 octobre 1982 portant sur la coopération entre l'Organisation
des Nations Unies et le Comité consultatif juridique afro-asiatique
207
non exhaustifs. Et la détérioration des systèmes endémiques mondiaux a repoussé les
limites de la réflexion. Ainsi, ce n'est pas tant la connaissance qui fait aujourd'hui défaut
mais plutôt les moyens dont le droit international de l'environnement dispose.
«.... les connaissances dont nous disposons semblent montrer que la véritable solution
des problèmes d'environnement réside dans la gestion des ressources naturelles. Pour
être véritablement efficace, une telle gestion doit souvent être internationale et, bien
entendu, menée avec continuité533...».
208
Section I La nécessaire redéfinition d'un nouveau cadre juridique
La gestion des ressources naturelles repose donc à la fin du XXème siècle sur un socle
étatique, non régional. L'approche inter-générationnelle des ressources naturelles
mondiales, qu'on entrevoit au début du XXI ème siècle repose a contrario sur un mode de
gouvernance différent, tel un entonnoir juridique inversé, avec des modes de gestions
régionaux.
Le paradigme repose aujourd'hui sur la vision territoriale que chaque État a de sa propre
gouvernance environnementale et donc de sa gestion des ressources naturelles. Cette
complexité politique est aussi juridique car elle s'intensifie par la présence d'un
système administratif interne complexe et disparate. Les limites des modes de gestion
actuels des ressources naturelles, inadaptés aux enjeux environnementaux, sont
aujourd'hui posées.
Cette approche nouvelle a alors permis, aux côtés d'un cadre juridique international de
faire émerger un cadre juridique régional.
209
§1 Un cadre juridique international établi
210
A. La reconnaissance juridique des mécanismes institutionnels mondiaux
Les mécanismes institutionnels mondiaux du XXème siècle se sont mis en place dés 1945
et les soixante dix ans célébrés en 2015 démontrent une certaine modernité et réactivité
novatrice aux phénomènes d’après guerre.
Ces organes ont donc eu au départ un rôle fédérateur, porteur d'une volonté commune
de protéger l'environnement mondial.
Leur rôle et leur présence dans la seconde partie du XXème siècle ont participé
activement à la promotion et à la consolidation des mécanismes de coopération
internationale en matière environnementale.
Le renforcement des organismes fondateurs a donc évolué aux côtés d'une lente
progression des organismes spécialisés annexes.
211
1. Un renforcement évolutif des organismes fondateurs
A ce titre, elle peut prendre toutes mesures 537 en cas de menace contre la paix, de
rupture de la paix ou d’acte d’agression, au cas où le Conseil de sécurité ne peut agir
pour vote négatif d’un membre permanent. Les membres règlent leur différends
internationaux par des moyens pacifiques538 et disposent au sein d’une voix à
l’Assemblée. Disposant de son propre règlement intérieur et élisant un président à
chaque session, les décisions sont prises à la majorité simple, sauf celles relatives aux
recommandations sur la paix et la sécurité, les élections au conseil économique et
sociale et toutes les questions budgétaires539, prises à la majorité des deux tiers. Mais cet
organisme est à l'origine de nombreuses décisions, résolutions 540 et autres, portant sur la
protection de l'environnement. Elle reste l'organisme tributaire des convocations aux
conférences mondiales de l'environnement541.
212
internationales et le conseil dispose d'une présidence tournante des membres tous les
mois.
Or, les premières résolutions environnementales ont porté sur les dommages
environnementaux perpétrés par le gouvernement irakien d'alors 546, et la création d'une
commission spéciale portant sur les atteintes et dommages environnementaux 547. Le
Conseil s'est ainsi auto-déclaré compétent en matière d'atteinte environnementale et
destruction des ressources naturelles, susceptibles de pouvoir créer une « menace ou
une rupture de la paix »548. Il s'est aussi déclaré compétent pour mettre en application
les conventions relatives à la sauvegarde environnementale, mais cette compétence est
soumise à une clause de compétence expresse. C'est ainsi le cas des atteintes
environnementales par des armes de guerre549.
Disposant d'une chambre environnementale, les États ont de plus en plus recours aux
modes extra-judiciaires pour régler leurs différends environnementaux. Au travers
d'avis consultatifs et d'une jurisprudence foisonnante, la Cour a pu consacrer les
principes fondamentaux du droit international de l'environnement.
Malgré ce, une problématique demeure sur les moyens d'actions de la Cour sur les
traités internationaux (Partie II).
546 CSNU, Résolution 687 du 3 avril 1991 portant responsabilité du gouvernement irakien sur des
dommages environnementaux
547 CSNU, résolution 692 du 20 mai 1991 portant création d'une commission spéciale
548 Article 39 chapitre VII charte mondiale de la nature de 1982
549 Convention de Paris du 13 janvier 1993 portant interdiction de la mise au point, de la fabrication, du
stockage et de l'emploi des armes chimiques et de leur destruction; convention de Londres du 10 avril
1972 portant interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes
bactériologiques et de leur destruction
550 Paragraphe 10, chapitre 39 de l'agenda 21 de la déclaration de Rio du 14 juin 1992
213
ressources naturelles mondiales. Mais, corollairement au M.A.B, l'UNESCO est le
quatrième organisme des Nations Unies, à avoir pu élaborer des conventions
environnementales internationales d'une grande importance551.
L'Organisation pour l'Alimentation et l'Agriculture ou FAO, est depuis son origine, aux
côtés des Nations-Unies, pour lutter contre les inégalités alimentaires mondiales et
promouvoir un droit d'accès aux ressources naturelles. Son action s'est renforcée par
une contribution réelle à l'encadrement juridique international. Elle a ainsi pu
positivement influencer par ses rapports et avis un grand nombre de conventions, ou sa
participation directe à la rédaction de ses dernières 552. Mais cet organisme a permis à de
nombreux états d'établir une législation nationale ciblée, dans les domaines de la pêche,
la protection des forêts et plus généralement dans la lutte contre l'érosion des sols
agraires. L'organisme se compose d'un corpus juridique publiant régulièrement ses
recherches et stratégies juridiques, mais aussi d'experts divers.
214
Enfin, parce que toutes les questions environnementales liées aux accès aux ressources
naturelles, aux pollutions, relèvent de l'aspect de santé publique internationale. Son rôle
international et régional est prépondérant et répond à une demande de plus en plus
croissante554. Depuis 1992, l'OMS a mis en place une stratégie globale pour la santé et
l'environnement, participant activement à la lutte contre l'insalubrité publique
internationale, la qualité des eaux, mais surtout au renforcement de la santé publique
mondiale face aux défis climatiques.
554 Participation à la convention d'Helsinki du 17 mars 1992 sur la protection et l'utilisation des cours
d'eaux transfrontalièrs
215
2. Une lente progression des organismes spécialisés annexes
L'idée d'une fusion des statuts en vue de créer une organisation mondiale de
l'environnement a donc été proposée, mais pas retenue pour l'instant. L'action du PNUE
est transversale et porte à la fois sur la santé publique mondiale, l'ensemble des milieux
et écosystèmes, les mers et océans, et les catastrophes naturelles. Pour chaque domaine,
le PNUE intervient sous trois formes.
Le premier type d'action du PNUE, s'établit au stade de l'évaluation mondiale de
l'environnement, le seconde type d'action concerne la gestion de l'environnement, et le
troisième type d'action relève des mesures choisies. Pour ces trois types d'actions, le
PNUE intervient à titre d'expert. Aux côtés de ces trois types d'action, le PNUE rédige
des rapports non obligatoires, qui servent de code déontologique sur les pratiques et
conduites des gestions environnementales régionales et mondiales.
A ce titre, ces pratiques servent de base à des réflexions portant sur les utilisations
« harmonieuses » des ressources naturelles, notamment dans le cadre de l'exploration et
l'exploitation des sols et sous-sols marins. Ces guides permettent au droit international
de l'environnement d'évoluer vers un meilleur encadrement des pratiques à risques. Le
PNUE reste ainsi un expert en stratégie juridique et technique, dont les initiatives et
réflexions ont conduit à l'élaboration de protocoles556, conventions et au déclenchement
de rencontres internationales.
Le PNUE joue enfin un rôle de conseil juridique mondial, auprès des états émergents
dans les domaines législatifs, pour permettre à ces derniers de mieux appréhender
juridiquement les domaines transversaux comme l'éducation, l'information et la
formation des professionnels aux problématiques environnementales.
216
les années 2012/2013, le cycle thématique correspondait à l'étude et la protection des
forêts, Biodiversité, biotechnologies, tourisme et montagnes, les années 2014/2015 ont
porté sur les mers et océans, ressources marines, petits états insulaires en
développement, gestion des catastrophes et vulnérabilité aux catastrophes. Les années
2016/2017 porteront sur l'évaluation globale de l’application d’Action 21, du
Programme relatif à la poursuite de la mise en œuvre d’Action 21 et du Plan
d’application de Johannesburg. L'approche transversale pour chaque cycle de travail
reste présente au sens où on prend en compte les problématiques de la gestion des
ressources naturelles liés à la pauvreté, à la santé publique.
L' Agence Internationale pour l’Énergie Atomique ou AIEA, est née dans les années
cinquante563, en pleine conquête énergétique, avec pour mission d'encadrer l'exploration
et l'utilisation de l'énergie atomique à des fins pacifiques et le respect de la santé
558 Convention de Washington du 11 octobre 1947
559 Création du GIEC le 3 novembre 1988
560 Groupement d'Experts Intergouvernementaux sur l'évolution du Climat
561 Groupe d'Experts Mondiaux Spécialisés
562 Système d'Observation Climatologique Global
563 Convention de New York du 26 octobre 1956 portant création de l'AIEA
217
publique. Son rôle reste donc d'être une sentinelle face aux risques potentiels et d'y
remédier. A ce titre, elle peut donc exiger et prescrire 564, au nom du principe de
précaution, toutes mesures visant à la protection et la gestion maximales des risques
sanitaires. Dans le domaine nucléaire, elle a pu ainsi démontrer cette détermination au
travers de rédactions de normes de sûreté nucléaire à portée internationale, des plans
d'intervention des états, mais ces documents n'ont qu'une portée non obligatoire.
Les accidents nucléaires rares des trente dernières années, ont démontré l'importance de
la coopération internationale dans le domaine nucléaire, car les moyens techniques dont
l'Agence disposerait ont notamment permis une réactivité des secours et mises en
sécurité reconnues. En dépit de ces prérogatives, les états n'ont pas, jusqu'à présent, mis
en place les documents proposés par l'Agence. Les incidents nucléaires restent dans leur
ensemble, rares et les états n'ont pas souhaité au départ, être les instigateurs d'une
gestion nucléaire mondiale commune. Ce manque d'intérêt pour la gestion des risques
nucléaires a démontré une inaptitude générale lors des incidents nucléaires russes.
L' Organisation Maritime Internationale ou OMI, est née à la fin de la seconde guerre
mondiale566, à la demande de l'Assemblée générale. Sa mission originaire était de
permettre une réelle coopération mondiale dans la réglementation internationale
maritime et les pratiques internationales commerciales maritimes. Mais depuis une
trentaine d'années, l'activité de l' OMI a permis de participer au développement du droit
international de l'environnement, notamment dans les problématiques liées à la
pollution des mers et des océans. L'organisation serait donc à l'origine de l'encadrement
juridique maritime et des premières conventions internationales portant sur la pollution
des mers567. Son expertise transversale des risques liés aux pollutions marines a
contribué à l'élaboration de conventions internationales portant sur la gestion des
risques sanitaires pour l'Homme568. Le rôle de l' OMI s'est renforcé avec l'adoption d'un
code maritime international visant au transport maritime des matières dangereuses569.
Ce code, adopté par le Conseil de la sécurité maritime de l'OMI en 2002 570, est chaque
année, publié et renouvelé.
218
L' Agence Internationale pour les Énergies Renouvelables ou AIER ou IRENA, est un
organisme récent571 crée pour permettre l'élaboration mondiale de la transition
énergétique. Elle concourt notamment au recours des énergies renouvelables, non
fossiles, comme les énergies éoliennes, solaires mais également la géothermie et la
production de biomasse. Sa mission contribue ainsi au développement du droit
international de l'environnement, en permettant de promouvoir des nouveaux modes de
production énergétiques mondiaux, pour limiter les gaz à effet de serre. Mais si cette
agence a suscité des réticences très fortes des Etats producteurs de pétrole, elle peut
permettre avec l'Agence Mondiale de l’Énergie, de tendre vers une autre vision
énergétique mondiale, plus propre et durable.
571Convention de Bonn du 26 janvier 2009 portant création de l'Agence internationale pour les Énergies
Renouvelables
219
B. L'évolution juridique des rouages financiers environnementaux
La volonté initiale de chaque État fondateur des Nations-Unies étant d’œuvrer à créer
une organisation internationale aussi cohérente que possible, il a été alors élaboré un
ensemble de mécanismes financiers, corollairement à la création des organes
fondateurs.
Une volonté juridique commune d'institutions financières mondiales s'est doublée d'une
volonté juridique territoriale d'institutions financières locales.
220
1. Une volonté juridique commune d'institutions financières mondiales
La Banque Mondiale ou BM, est née pendant la seconde guerre mondiale, avant même
les Nations-Unies572. Elle a succédé à la Banque des Règlements Internationaux ou
BRI573. Si son implication environnementale fut lente, elle reste effective. Cette
implication remonte aux années quatre vingt, où elle a commencé à assortir le
financement de projets internationaux à des études d'impacts visant à sauvegarder
l'environnement. Elle s'est entouré d'un collège d'experts internationaux, indépendants,
lorsque les demandes de financement portaient sur les projets complexes. Elle a
renforcé la reconnaissance du droit international de l'environnement en refusant des
projets portant atteinte à l'environnement ou violant des conventions, traités ou accords
internationaux environnementaux.
Depuis 1990, la Banque Mondiale s'est engagée au travers d'un code de bonne pratique
environnementale, auquel elle accorde force obligatoire. Ce code énonce les bonnes
pratiques bancaires dans le domaine de la gestion des ressources naturelles mondiales,
favorise la coopération internationale bancaire dans l'investissement raisonné. Les
travaux, publications de la banque mondiale ont contribué à une reconnaissance fiscale
mondiale des problématiques liées à la protection de l'environnement, et ainsi renforcé
l'approche transversale du droit international de l'environnement. Depuis lors, la banque
mondiale pourvoit à la prise en charge financière de projets environnementaux
d'envergure, souvent soutenus par le PNUE.
Ces objectifs ont été fixé sur quinze ans. La nécessité d'établir un développement
soutenable pour assurer une pérennité environnementale mondiale, passe donc par un
choix stratégique des besoins et des projets internationaux soumis à financement. C'est
à partir de 2005 que le FMI a mis en place trois types de financement, pour répondre
aux OMD: les premiers ont concerné tous les projets liés au changement climatique, les
seconds porteraient sur les projets porteurs de moyens fiscaux visant à limiter les
pollutions locales ; les troisièmes concerneraient enfin des prêts spécifiques aux
572 Accords de Bretton Woods du 22 juillet 1944, portant naissance de la banque mondiale et du fonds
monétaire international
573 Création de la BRI le 17 mai 1930
574 AGNU, résolution A/RES/55/2 du 8 septembre 2000 portant déclaration du millénaire
221
énergies renouvelables. Le FMI, aux côtés de la BM, contribue, dans ses statuts, au
développement du droit international de l'environnement par une démarche
environnementale fiscale ciblée.
222
2. Une volonté juridique territoriale d'institutions financières locales
Son objectif est de répondre aux attentes définies par l'agenda 21, de respecter les
orientations des Accords multilatéraux sur l’Environnement, dénommés AME, auxquels
la France a souscrit, ainsi que les principes de la Charte de l’environnement de 2005.
Son action contribue à mettre en œuvre la partie internationale de la Stratégie Nationale
de Développement Durable, dénommée SNDD. Cet organisme, disposant de son propre
secrétariat, d'un comité scientifique et technique ainsi que d'un comité de pilotage,
participe ainsi à la politique de coopération entre la France et les pays émergents, zones
prioritaires, souvent localisés en Afrique et en Méditerranée. Identique dans ses
fonctionnements au FEM, il co-finance des projets environnementaux relatif à la
223
protection de la biodiversité, des mers et océans, la lutte contre le changement
climatique. Il favorise également les projets environnementaux portant sur l'érosion des
zones arables et la pollution des sols. Le Fonds est financé par les budgets français et
européens, le mécénat d'entreprise, et les institutions internationales.
224
§2 Un cadre juridique régional émergent
Et l'ensemble des organisations régionales crées pendant cette période est une des
caractéristiques définissant le système international contemporain. Or les
problématiques environnementales ont permis à ces organisations régionales d'être des
acteurs à part entière dans l'approche intra-générationnelle des ressources naturelles
mondiales.
Cette dernière ne serait désormais plus bipolaire mais multipolaire et la gestion des
ressources naturelles s'est transformée en un mode de gestion multilatéral, «à la carte»,
donnant un rôle nouveau aux États.
Une meilleure stratégie mondiale, plus raisonnée car mieux intégrée, pourrait peut-être
répondre à ces nouvelles mutations.
225
A. L'émergence progressive d'une régionalisation institutionnelle
Ce texte posait néanmoins une problématique, portant sur les règles de protection de
l'environnement, dans les importations comme les exportations. Certaines dispositions
pouvaient en effet, protéger certaines importations ou exportations portant atteinte à
l'environnement, sous condition expresse d'être indispensables à la conservation ou la
préservation de l'environnement581.
226
premières fossiles sous la joug d'une autorité indépendante européenne, ouverte aux
autres états, fut proposée par Robert Schumann, qui déclarait582 que «la paix mondiale
ne saurait être sauvegardée sans des efforts créateurs à la mesure des dangers qui la
menacent....la mise en commun des productions de charbon et d'acier changera le
destin de ces régions longtemps vouées à la fabrication des armes de guerre dont elles
ont été les plus constantes victimes». Le traité instituant la Communauté européenne du
charbon et de l'acier fut signé un an plus tard 583, assorti d'une clause de durée de vie
limitée584.
L'objectif de cette mise en commun économique des deux ressources naturelles fossiles
était de permettre l'expansion économique, le développement de l'emploi et
l'amélioration du niveau de vie585. Le marché commun s'est alors ouvert d'abord pour le
charbon, le minerai de fer et la ferraille 586 puis pour l'acier587. Le rôle de la CECA était
donc de permettre un développement des échanges internationaux en modernisant la
production d'énergie en commun.
Elle devait ainsi veiller à un approvisionnement égal et régulier par un libre accès, sans
taxes ni douanes, identique, non discriminatoire, et sans aides des états, aux ressources
naturelles, en maîtrisant les coûts de production et les conditions de travail. Ce traité a
été ainsi le précurseur des institutions actuelles. La création de la Communauté
Économique Européenne588 et de la Communauté Européenne de l’Énergie Atomique,
ou CEE et d' EURATOM 589 ont démontré que le régionalisme institutionnel européen a
été perçu par la société internationale comme un catalyseur institutionnel.
227
La Convention de Vienne sur le droit des traités592 a établit une certaine hiérarchie des
normes internationales593, justifiée par ce que les spécialistes du droit international
appellent, le «jus cogens», à savoir des principes de droits réputés universels et
supérieurs à toutes formes de droit. «Les normes qui bénéficient du jus cogens sont
censées être impératives et primer sur toute autre norme internationale, telle que le
traité.594».
228
2. Des champs d'application contemporains
L'union par un marché commun des états permettait alors une stabilité juridique et une
maîtrise sur l'exploration et l'exploitation locales des ressources naturelles territoriales.
Seraient ainsi nés par voie d'extension des traités internationaux, communautaires au
départ, des formes nouvelles de régionalisme institutionnel par le biais d'organismes
spécifiques, répondant aux aspects techniques de la régionalisation institutionnelle. Les
accords de libre échange inter-étatiques se seraient alors organisés autour du GATT.
Chaque continent a ainsi pu créer son propre marché commun et le libre échange des
ressources naturelles. L’ Afrique a ouvert la voie avec la création de l'Organisation pour
l'Union Africaine596 en 1964 transformée depuis en Union Africaine 597 , mais a organisé
le libre échange des ressources naturelles sur le principe de coopération 598. Elle est
allée plus loin en imposant une gestion particulière aux ressources naturelles 599.
L'ensemble des échanges et coopération ont conduit l'Afrique à s'organiser autour d'un
Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique ou NEPAD 600, sous la tutelle
de l'Union Africaine.
L’Asie a emboîté le pas avec la création de l'Association des Nations de l'Asie du Sud-
Est ou ASEAN, en 1967 601 . Fondée au départ par cinq états 602, l' ASEAN s'est élargie
progressivement et engagée dans une réelle protection environnementale dés les années
quatre-vingt603, en reconnaissant le droit des générations futures sur les ressources
naturelles604 et la protection des écosystèmes. La protection de la Biodiversité s'est ici
perçue dans sa globalité où aucune hiérarchie ne viendrait supplanter 605. La zone de
libre échange du sud-est asiatique, ou AFTA, est donc venue renforcer les échanges de
l'ASEAN avec les autres états mais les relations commerciales restent peu importants,
pour l'instant avec le monde.
Les États latino-américains se sont organisés autour d'un marché commun du Sud ou
MERCOSUR606 en 1991607 . Dix ans après sa création, sous l'influence de l'Argentine, le
596 Traité international d’Addis-Abeba du 25 mai 1963 portant création de l' OUA
597 Accord constitutif de l'Union Africaine du 11 mai 2000
598 Convention de Bamako du 30 janvier 1991 ; Traité de Windhoek du 17 août 1992 ; Chapitre XVI du
traité de Kampala du 5 novembre 1993
599 Article 125, traité de Kampala du 5 novembre 1993
600 New Partnership’s for Africa's Development , 23 octobre 2001
601 Traité de Bangkok du 8 août 1967 portant création de l'ASEAN
602 Philippines, Indonésie, Malaisie, Singapour, et Thaïlande
603 Traité de Kuala Lumpur du 9 juillet 1985, entré en vigueur le 30 mai 1996
604 Préambule du traité de Kuala Lumpur du 9 juillet 1985, entré en vigueur le 30 mai 1996
605 Chapitres II à IV du traité de Kuala Lumpur du 9 juillet 1985, entré en vigueur le 30 mai 1996
606 Mercado Común del Sur
607 Traité de Asunción du 26 mars 1991 portant création du Mercosur, entré en vigueur le 15 décembre
1995
229
MERCOSUR a adopté un accord portant sur la protection de l'environnement et une
gestion maximale des ressources naturelles608 , basés sur la coopération des états
membres, une meilleure harmonisation de la réglementation environnementale et
participation active des citoyens à l'analyse des problématiques environnementales609.
Les mesures tendent surtout à harmoniser l'ensemble des directives juridiques et
institutionnelles visant à prévenir, maîtriser et atténuer les effets sur l'environnement
des territoires et zones frontalières des états membres610.
Représentant plus de quatre vingt pour-cent du Produit Intérieur Brut ou PIB, total de
l'Amérique du Sud, ce marché commun est considéré comme le quatrième bloc
économique mondial, et le troisième marché international, après l'Union européenne et
l'ALÉNA. Depuis 2004611, ce marché commun s'intègre progressivement pour parvenir
à une fusion totale avec la Communauté andine612.
Les États-Unis ont adopté, pour leur part, l'Accord de Libre Échange Nord Américain,
ou ALENA613 ou NAFTA614 en 1994, créant une zone de libre-échange entre les États-
Unis, le Canada et le Mexique. La protection de l'environnement et le libre échange des
ressources naturelles y ont été réglementés615. S'agissant de l'Europe, aux côtés de la
CEE, s'est crée la zone de libre échange de l'Europe Centrale ou ALECE en 1992616. Les
dispositions de libre échanges des ressources naturelles et plus généralement de la
protection de l'environnement viseraient la conservation des ressources naturelles non
renouvelables617, mais resteraient restreintes. Les états membres peuvent appliquer leur
propre réglementation en la matière.
L'ensemble de ces marchés communs régionaux ont permis de hisser les états membres
au rang mondial par une dynamique industrielle propre, conformément aux dispositions
du GATT. Mais s'agissant des problématiques environnementales liées au principe de
libre échange, le GATT ne les a pris lui même en compte, qu'à compter des années
quatre-vingt-dix. Face aux dérives observées, les états membres ont alors décidé
d'adopter le principe d'une institution permanente spéciale, chargée de la régulation du
libre échange régional et mondial.
230
compatible avec leurs besoins et soucis respectifs à différents niveaux de
développement619..».
619 Préambule des accords de Marrakech du 15 avril 1994 portant création de l' OMC
620 Article XX, alinéa b et g, des accords de Marrakech du 15 avril 1994 portant création de l' OMC
621 International legal materials,1990, affaire des importations de thons aux USA ; International legal
matérials, 1994, affaire sur la protection des dauphins ; International legal matérials, 1996, affaire de
l'essence
231
B. L'émergence volontaire d'une indépendance institutionnelle nouvelle
Car les Etats fondateurs souhaitaient un réajustement juridique portant notamment sur
la prise en compte des fragilités des écosystèmes et une meilleure coopération
internationale environnementale entre les états parties eux-mêmes et ensuite avec les
autres états.
L'esprit juridique pionnier était donc de protéger les intérêts de l'Homme et de veiller à
la protection des écosystèmes par la mise en œuvre d'une gestion conservatoire des
ressources naturelles.
Plus tard, l'ensemble des accords de coopération ont incité les États à voir leur
développement économique sous l'angle de l'esprit de développement durable de la
convention de Rio.
232
naturelles et aussi à la protection du patrimoine environnemental génétique mondial.
Ces missions ont évolué, face aux enjeux et porteraient aujourd'hui sur le changement
climatique, la protection optimale des espaces et espèces en danger. Par voie de
conséquence, l'action menée par les organismes non gouvernementaux indépendants a
permis indéniablement à ces derniers de participer activement au développement du
droit international de l'environnement.
La première est discrète mais omniprésente auprès des gouvernements et propose une
approche d'expert environnemental international. La seconde est connue de la société
civile internationale pour ses actions médiatisées, ses injonctions judiciaires, et ses
financements de projets visant à la sauvegarde d'espaces en danger.
Mais les deux organismes ont permis au droit international de l'environnement d'
atteindre une dimension juridique transversale unique. Car ils lui ont permis d'obtenir
directement les appuis institutionnels, nécessaires à son essor.
233
2. Des modalités de création d'organismes non gouvernementaux
Le rôle environnemental des organismes non gouvernementaux fut au départ celui d'une
sentinelle internationale et d'expert environnemental indépendant.
Disposant d'un des plus vastes réseaux mondiaux d'experts environnementaux 623, et d'un
nombre croissant d'adhérents624, le statut de l'UICN auprès de l'ONU s'est transformé en
celui d'observateur officiel auprès de l’Assemblée Générale des Nations-Unies.
Siégeant en Suisse et disposant de son propre service juridique, l'apport de l' UICN a
ainsi contribué à une meilleure coopération juridique sur les législations
environnementales mondiales. Cette coopération juridique, doublée d'une expertise
scientifique reconnue, a, à ce titre, permis à l' UICN de pouvoir participer activement à
l'élaboration de multiples conventions internationales environnementales625.
A ses côtés, le Fonds Mondial pour la Nature, plus connu sous son sigle anglais
WWF626, a été crée en 1961627, par quatre scientifiques, biologistes et ornithologues
réputés628, en Suisse. Cette fondation au départ privée, avait pour mission de
« construire un avenir avec chaque peuple pour vivre en harmonie avec la nature ».
L'objectif principal étant alors de collecter toutes les données scientifiques, promouvoir
et financer des projets visant à la protection de l'environnement. A la différence de
l'UICN, il dispose d'un conseil international composé de représentants des organisations
622 Conférence internationale de Fontainebleau du 5octobre 1948, portant création de l'UICN
623 Onze milles scientifiques et spécialistes volontaires au sein de six Commissions et plus de mille
professionnels travaillant dans 45 bureaux dans le monde entier, source www.iucn.org
624 Mille deux cent organisations internationales membres, dont deux cent gouvernements et
organisations gouvernementales, huit cent organisations non gouvernementales, source www.iucn.org
625 Convention de Washington du 3 mars1973,, portant sur le commerce international des espèces de la
faune et de la flore sauvages, CITES ; Convention de Bonn du 23 juin 1979 portant sur la
conservation des espèces migratrices ; Convention internationale de Rio du 5 juin 1992 sur le
biodiversité biologique ; charte mondiale de la nature du 28 octobre 1982
626 World Wide Fondation
627 Création du WWF le 29 avril 1961
628 Sir Julian Huxley, Sir Peter Markham Scott, Guy Mountfort et Max Nicholson
234
nationales, et se distingue de l'UICN par une démarche plus pratique qu'intellectuelle,
sur des projets environnementaux ciblés. Son principal objectif s'oriente autour du
financement mondial de projets visant les domaines de la biodiversité terrestre et
marine, la conservation des espaces naturels sensibles comme les zones mondiales
humides, mais également les forêts primaires. Le WWF intervient, en partenariat
technique avec le PNUE mais également en transversalité avec l'OMS, pour ou avec le
concours des organisations régionales mondiales.
629 Convention de Ramsar du 2 février 1971 relative aux zones humides d'importance internationale,
particulièrement comme habitats des oiseaux d'eau
630 UICN, WWF & PNUE, stratégie mondiale de la conservation, des ressources vivantes au service du
développement durable, UICN, 1980
631 UICN, WWF & PNUE, stratégie mondiale de la conservation et développement durable, UICN,
1991
235
Section II La nécessaire requalification des fonctions et outils de gestion
Cette dualité des fonctions et la profusion des outils de gestion a permis d'observer des
discordantes et des inadaptations juridiques pouvant conduire à des blocages, mais aussi
à réfléchir à de nouvelles formes juridiques mieux adaptées aux enjeux contemporains.
236
§1 Une requalification liée à la disparité juridique des fonctions
Tout ordre juridique repose sur un ensemble de concepts, eux-même liés à des fonctions
établies. L'approche intra-générationnelle des ressources naturelles mondiales s'est
nourrie des valeurs juridiques traditionnelles et contemporaines des XIX et XXème
siècle.
Les règles du libre échange à travers les accords du GATT et la naissance de l'OMC ont
propulsé cette même gestion et ce mode de gouvernance au premier plan. Ce dernier est
alors devenu ainsi, en quelques années, une entité juridique aux fonctions juridiques
doubles, créatrice à la fois de normes et de régimes juridiques répondant à
l'encadrement juridique mondial.
237
A. La dualité établie de fonctions normatives environnementales
La norme a été définie par Kelsen comme « la signification d'un acte de volonté634 ».
Cette volonté est donc le socle du mode de gestion établie et de la gouvernance qui s'y
rattache.
632 Professeur à l'Université Paris-Sud XI. Centre de Théorie et Analyse du Droit (UMR 7074)
633 MILLARD Eric, Cahiers du Conseil constitutionnel n° 21, Dossier : La normativité, janvier 2007,
http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/nouveaux-cahiers-du-conseil/ca
hier-n-21/qu-est-ce-qu-une-norme-juridique.50552.html, consulté le 15 novembre 2015
634 KELSEN Hans, Théorie générale des normes, Paris, PUF, 1996, 210 pages, pages 2 et 3
238
1. Des fonctions normatives génératrices de sécurité juridique
Ainsi cette normalisation internationale était axée sur une notion de droit à conserver
des ressources naturelles locales, pas de devoir pour les générations futures. Les notions
modernes de gaspillage et de mises en danger endémiques ont bouleversé les données
normatives. Car comme précédemment indiqué, la normalisation internationale
environnementale existe mais repose sur un mode de gestion inspirée des XIX et XXème
siècle.
Le premier type de normes concerne toutes les normes fixant un degré maximal
admissible de pollution environnementale dans l'air, l'eau et le sol. Ces normes fluctuent
ainsi en fonction du milieu pollué et du territoire concerné. Elles sont élaborés par des
experts, membres des organisations internationales, et territoriales, et sont validées par
les assemblées générales et le conseil technique propres aux organisations. Elles
revêtent alors le caractère opposable.
Ces normes d'émission ciblées, sont assorties de moratoires de sécurité, évolutifs, sur la
gestion optimale en terme d'intensive des risques. Elles sont donc génératrices d'une
obligation de résultat forte et fluctuante, au vu du milieu susceptible d'être pollué et des
enjeux environnementaux qui s'y rattachent.
239
Le troisième type de normes repose sur toutes les mesures imposées aux activités
polluantes, à la phase de production. Ces normes sont donc obligatoires et assortissent
toutes les activités polluantes d'une véritable obligation de moyens mais aussi de
résultat, en imposant du matériel adapté à la gestion optimale des risques ou encore un
mémorandum technique précis. On retrouve ce type de normes dans les moyens
techniques, relatifs à la gestion maximale des risques, relatif à la pollution des sols, de
l'eau et encore de l'air.
Cette typologie de l'OCDE a depuis été complétée, notamment sur l'interprétation des
données sur l'innovation technologique636 et la gestion des risques, liée à
l'internationalisation des échanges et les opacités perceptibles637. Mais cette
normalisation internationale s'est aussi développée à travers des accords internationaux,
créateurs de normes.
L'exemple de l’initiative ETPS638 illustre cette situation. Élaborée à la fin des années
quatre vingt dix, cette initiative est issue d'une réflexion équatorienne et repose sur un
accord entre les gouvernements du Costa Rica, de Panama, de Colombie et l’Équateur,
promouvant une vision équitable du partage de la gestion des ressources, à travers
notamment une gestion transfrontalière marine unique. Cet accord inter-américain a été
renforcé par un partenariat avec des ONG environnementales, le concours de la
Fondation des Nations-Unies, du Fonds Mondial pour la Conservation, la Fondation
Gordon et Betty Moore et le Centre du Patrimoine mondial de l’UNESCO.
636 OCDE, manuel d'Oslo sur les principe directeurs proposés pour le recueil et l'interprétation des
données sur l'innovation technologique, 103 pages,http://www.oecd.org, consulté le 11 décembre
2013
637 OCDE, rapport portant plan d'action sur la réforme de la réglementation, 1997, 47 pages; OCDE,
recommandation du Conseil concernant une action efficace contre les ententes injustifiables, 25 mars
1998, C 98-35 final; OCDE, liste de référence commune APEC-OECD sur la réforme de la
réglementation, 2005, 38 pages; OCDE, principes directeurs pour la qualité et la performance de la
réglementation, 2005, 12 pages
638Eastern Tropical Pacific Seascape
639Vice-président régional et directeur du Centre de conservation de la biodiversité pour le Mexique et
l’Amérique centrale à Conservation International (CI) ; ancien ministre de l’Environnement et de
l’Énergie du Costa Rica
240
2. Des fonctions régulatrices créatrices de coopération juridique
Cette ensemble de normes a alors permis d'élaborer une gestion basée sur des échanges
de bonnes pratiques dans tous les aspects techniques, pratiques de l'applicabilité des
normes. Cela concerne les questions liées à la gestion des déchets, à la gestion optimale
des risques, comme au champ d'application des obligations de moyens et de résultat.
Ainsi, des recommandations portant proposition d'un plan d’action pour une
consommation et une production durables et pour une politique industrielle durable, ont
été adopté sur le plan européen641. D'autres plans d'action internationaux, renforçant
l'obligation d'information sur les gestions des risques environnementaux ont suivis.
On peut citer à ce titre, les espaces « écophytopic », instaurés par les gouvernements
européens, dédiés à la Protection Intégrée des Cultures (PIC) afin d’y sensibiliser les
professionnels du secteur agricole et de faire évoluer les pratiques vers une réduction de
l’utilisation des produits phytopharmaceutiques.
Les quantités de mercure présentes dans les milieux, exponentielles, ont conduit à des
négociations au sein du PNUE pendant plus de cinq ans, qui ont permis le
déclenchement d'une conférence internationale644 et l'adoption d'une convention
internationale645 portant sur l’usage et les émissions de mercure.
241
Ce texte rationalise pour la première fois, les objectifs mondiaux visant la production et
l'utilisation du mercure, sur le plan industriel. Il prend ainsi en compte la protection des
écosystèmes au vu des cycles de vie du mercure, et la maîtrise de l'exploration et
l'exploitation de ce dernier. Il participe alors à développer le droit international de
l'environnement, dans ses aspects techniques disponibles et notamment la prise en
compte de meilleures pratiques environnementales pour réduire les émissions de
mercure dans l'air, l'eau ou les sols.
242
B. La dualité incertaine de fonctions réglementaires environnementales
Les outils réglementaires ont aux côtés des outils normatifs, contribué à établir et faire
évolué le socle du mode de gestion des ressources naturelles mondiales et le mode de
gouvernance qui s'y rattache.
Hans Kelsen a défini le législateur comme « Quiconque est investi de l'autorité absolue
pour interpréter les lois écrites ou orales, celui-là est le véritable législateur, et non
celui qui le premier a écrit ou proclamé ces lois; a fortiori, quiconque est investi de
l'autorité absolue non seulement pour interpréter le droit, mais pour dire ce qu'est le
droit, celui-là est le véritable législateur646»
Au nom de ce principe, ont été alors élaboré d'autres principes dérogatoires aux
principes de libres échanges internationaux et de libertés du commerce et de l'industrie,
au nom d'un intérêt général « supérieur » environnemental et de santé publique
internationale. Ainsi, au nom de la protection de l'environnement, le principe de
régulation environnementale s'est appuyé sur quatre principes et sur le l'idée d'une autre
approche des ressources naturelles mondiales, inter-générationnelle, reposant sur un
mode de développement économique durable, respectueux des cycles de vie
endémiques.
Le premier principe est le principe de précaution, issu d'une doctrine allemande lancée à
la fin des années soixante dix sous le terme « vorsorgeprinzip », et consacré par la
Déclaration de Rio647.
Cette dernière indique que « pour protéger l'environnement, des mesures de précaution
doivent être largement appliquées par les états selon leur capacités ; En cas de risque
de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitudes scientifiques absolue ne
doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de mesures effectives
visant à prévenir la dégradation de l'environnement ».
243
instrument de régulation mondial sanitaire 650 et alimentaire651, avant d'être transposé au
plan national652.
L'ensemble des législations encadrant les activités à risques a conduit les pollueurs à
revoir leur stratégie de développement et à devenir porteurs d'initiatives vouées à
réduire l'impact de leurs activités.
650 CJCE, 23 septe mbre 2003, commission c/Danemark, aff C-192/01, rec I9693 ; TPICE 11 septembre
2002 , Pfizer Animal Heaelth SA c/conseil n° T-13/99;CJCE 7 septembre2004,aff C-127/02 point 44
651 Articles 1 et 4, directive CE du 12 mars 2001 portant transposition du protocole de Carthagène sur la
Biodiversité du 28 janvier 2000
652 Loi française n°95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de
l'environnement, article L.110-1 code de l'environnement français, publiée au Journal officiel le 3
février 1995
653 Articles 4 et 19 déclaration de Stockholm de 1972.
654 Principe 16 de la déclaration de Rio du 14 juin 1992, Cf note n°13
655Article 174-2 du Traité de Maastricht du 7 février 1992 et Acte Unique Européen du 28 février 1986
656Article 15 de la loi française n°76-663 du 19 juillet 1976 sur les ICPE, Article L.110-1-II-3° Code de
l'environnement français
657Considérant n°6 de la Convention de Lugano du 16 septembre 1988 révisée le 30 octobre 2007,
relative aux compétences judiciaires et exécution en matière civile, Recommandation C72 128 du 26
mai 1972 sur principe de pollueur- payeur, Recommandation C74 223 sur la mise en œuvre du
principe de pollueur -payeur
658 Livre Blanc de la Commission des Communautés Européennes du 9 février 2000
659 Principe 10 de la Déclaration de Rio du 14 juin 1992
660 Convention d'Aarhus du 25 juin 1998 entrée en vigueur le 6 octobre 2002, Recommandation CE 11-
31 du 28 septembre 1977 ; recommandation CE 81-19 du 25 novembre 1981, Directive CE 158 du 23
juin 1990 , remplacée par directive CE 41 du 14 février 2003.
661 CEDH , affaire Oneryildiz c/Turquie, décision du 18 juin 2002
244
2. Un champ d'application gradué
Le premier champ porte sur les interdictions globales, mettant en danger la protection
internationale des êtres humains et vivants. Le premier volet concerne les activités
nucléaires internationales. Il couvre un ensemble d'interdictions visant la protection des
espèces protégées662, des espaces à protéger663 ; et a permis de poser une graduation
progressive des interdictions, en partant du principe d'interdiction absolue 664 à celui
d'interdiction relative665 .
Cette graduation juridique des risques acceptés et refusés, est une technique juridique
devenue courante dans les conventions internationales relatives aux déchets industriels
à immerger dans les eaux marines internationales666, mais aussi dans le domaine de la
protection de la flore et la faune sauvages667.
245
Elle serait à ce jour un instrument légal permettant l'abolition des droits acquis à nuire
dans le domaine des déchets673 , des substances chimiques dangereuses674, des normes
sur la qualité de l'air675.
Sous forme de taxe générale des activités polluantes, de taxe carbone, ou à travers
toutes les normes antipollution, et les mécanismes de compensation, chaque état peut
alors choisir et élaborer sa propre fiscalité environnementale.
Le vide n'est donc pas seulement juridique mais repose sur une résistance politique mal
orientée et une vision économique durable absente. Une requalification liée à
l'insécurité juridique des outils est posée.
673 Loi française n° 75-633 du 15 juillet 1975 portant sur l’élimination des déchets, JORF du 16 juillet
1975
674 Loi française n°77-771 du 12 juillet 1977 portant sur l'utilisation des produits chimiques, JORF du
13 juillet
675 Article 3 de la loi française n°96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air dite loi LAURE ; article L.221-
1 du Code de l'environnement français
246
§2 Une requalification liée à l'insécurité juridique des outils
Or, le paradoxe repose sur le fait que la régulation propose une réduction des outils,
alors que ces derniers se sont multipliés et complexifiés, créant alors une situation de
profusion.
Cette dernière a généré indirectement une insécurité juridique de part les interactions et
les effets placebo qui en ont découlé. La technicité recherchée au travers d'outils de
gestion a ainsi ouvert une sorte de kaléidoscope juridique, autour des responsabilités
en cascade et des interprétations juridiques multiples.
Toute gestion et mode de gouvernance doivent s'orienter, selon l'OCDE676, vers des
principes de technicité, de démocratie environnementale, de subsidiarité et de stratégie
environnementale globale677.
A trop vouloir axer les outils de gestion vers un angle technique maximal, on les rend
inopérables et non propices à la prise en compte de la diversité originale internationale
des milieux.
La profusion progressive des outils institutionnels, aux côtés d'une profusion rapide des
outils techniques a démontré cette insécurité.
676 OCDE, Rapport sur la gouvernance au XXI siècle, 257 pages, 2001, http://www.oecd.org, consulté le
30 décembre 2013
677 Cf note n°677 pages 81 à 177
247
A. La profusion progressive des outils institutionnels
Mais les outils institutionnels mis en place sont devenus inadaptés à la pratique
environnementale par voie de conséquence générateurs d'insécurité juridique.
248
originaire682. Or, dés 2001, les Nations-Unies ont demandé « un PNUE revitalisé et au
mandat recentré..., qui devrait avoir essentiellement pour fonction d'analyser l'état de
l'environnement mondial, de favoriser l'élaboration de régimes juridiques
internationaux, de faire progresser l'application des normes et politiques
internationales convenues, de renforcer son rôle de coordinateur des activités du
système ...de s'employer à sensibiliser d'avantage tous les secteurs de la société...683 »
Mais le principe fondateur «un État, une voix» a établit une véritable oligarchie
composée des pays riches.
Les réformateurs plaident ainsi pour une refondation du système onusien et un nouveau
contrat social mondial687, servant de base stratégique à l'Assemblée Nationale de l'ONU.
D'autres proposent un nouveau Bretton Woods onusien688 avec un droit opposable aux
richesses publiques globales, équitables et accessibles à tous689.
Le second constat portant sur la nécessité de réformer les institutions onusiennes est
relatif aux moyens financiers. Les ressources financières en matière environnementale
restent insuffisants. Il n'existerait pas au sein du PNUE un type de financement stable et
soutenable suffisant. Le Fonds pour l'Environnement Mondial (FEM) ne finance pas
suffisamment de projets portant sur une gestion raisonnée des ressources naturelles.
249
taches et mandats diminueraient la capacité de l'organisation, l'a rendant lourde et
inefficace. Ne sont pas pris en compte suffisamment de grands principes tel que celui de
l'équité, la participation de public aux prises de décision. L'absence d'une conscience
politique mondiale bio-citoyenne ne permet pas d'appréhender les approches de la
Biodiversité de façon globale. Une gestion reposant sur une gouvernance participative
commence à émerger mais reste timide.
Ainsi, à trop vouloir bien faire, et rattraper un quelconque retard, les États se sont
enfermés dans une profusion réglementaire lourde, ne permettant pas un compréhension
juridique cohérente pour l'ensemble des acteurs. Il est aussi nécessaire de prendre en
compte les données économiques du moment, pour que ces dernières soient acceptées et
appliquées sans être à la base d'une instabilité juridique.
250
2. Des outils institutionnels générateurs d'insécurité juridique
Elles reposent, en premier lieu, sur l'application juridique difficile des pratiques
environnementales dans des zones sensibles, où la sécurité juridique reste fragile. Cette
situation n'est pas isolée et reste aujourd'hui omniprésente sur le continent africain, mais
aussi asiatique et latino-américain. Ainsi, si les pratiques environnementales, comme
vues précédemment, existent sur le plan international d'un point de vue juridique, les
appliquer en période de troubles sociaux et de fragilité institutionnel repose sur une
improbable cohérence.
Elles reposent, en second lieu, sur la difficulté juridique d'application des pratiques
environnementales dans des zones transfrontalières. Si la réglementation internationale
foisonne, les zones transfrontalières sont devenues des instruments juridiques de
pratiques environnementales.
Mais ces zones restent soumises, elles aussi à une stabilité juridique fragile, notamment
au regard des droits d'accès des populations locales aux ressources naturelles. Ainsi, les
pratiques environnementales et instruments juridiques s'y rattachant, ne répondent pas
en totalité aux principes consacrés par la déclaration de Rio. C'est aussi le cas des
zones, situées aux abords de ressources naturelles.
La fédération estime en effet qu'il n'existerait pas de gestion des ressources naturelles
non renouvelables en Guyane et qu'un débat sociétal devrait s'organiser autour de la
gestion des ressources minières et pétrolières en Guyane. Ainsi, les principes de
précaution, de prévention ne seraient pas optimalisés et par voie de conséquence les
principes de pollueur-payeur et d'information ne répondraient pas aux règles de
transparence optimale. Ce premier exemple démontre ainsi qu'en matière d'exploration
et d'exploitation des ressources naturelles fossiles, les études d'impact pourtant prévues
aux articles L.122-1 et R.122-2 du Code de l'environnement restent trop générales et ne
251
mettent pas suffisamment en avant les risques, relatif notamment aux répercussions
directes de l'activité minière sur l'équilibre des milieux endémiques, au delà de cinq ans.
Il conviendrait peut-être de réfléchir à l'opportunité de créer des études d'impact
spécifiques à l'activité minière.
Le second exemple concerne la gestion d'un espace naturel, sur le plan international.
L'exemple de la gestion du lac Titicaca met en évidence un principe de précaution a
minima, générateur d'une insécurité juridique croissante, portant notamment sur les
difficultés juridiques liées aux pratiques environnementales transfrontalières. Ce lac est
aujourd’hui devenu un gigantesque bassin d’eau polluée. Situé à presque quatre mille
mètres d’altitude, alimenté par vingt cinq rivières, ce lac situé entre les états du Pérou
et la Bolivie reste le plus grand et le plus haut lac navigable au monde. La légende
prétend qu'il serait le berceau de la civilisation Inca, où le premier Inca serait né de ses
eaux. Selon le PNUE, le lac reçoit chaque année 694, plus de cent-mille tonnes de déchets
ménagers provenant du bassin versant du lac. Cette pollution génère alors un
phénomène d'eutrophisation, à savoir une asphyxie du lac, pouvant entraîner la mort
biologique de ce dernier.
L'état bolivien s'est engagé à compter de 2014 à une véritable gestion des eaux usées et
des déchets ménagers, auprès des villes boliviennes, voisines du lac. L'état péruvien
s'est engagé quant à lui, dans le nettoyage annuel du lac et la destruction des déchets
organiques récupérés. Mais les communautés locales, et notamment les communautés
Aymaras, souhaiteraient compléter cette double gestion, d'une charte environnementale
transfrontalière, obligeant les touristes à repartir avec leurs déchets. Cette dernière reste
en attente.
Elles reposent, en troisième lieu, sur le caractère fragmentaire et opaque des pratiques
environnementales et donc à l'accélération des pratiques illégales et à l'établissement
d'une gouvernance environnementale corrompue. Si le droit international de
l'environnement « a gagné en importance...c'est surtout en raison de l'augmentation du
nombre d'instruments institutionnels contraignants et non contraignants....mais ces
accords manquent de cohérence en ce qui concerne...le principe de précaution, de
l'incertitude scientifique, l'équité entre et à l'intérieur des générations, l'économie du
cycle de vie, les responsabilités communes mais différenciées et le développement
durable695 ».
L'approche transversale de la gestion des ressources naturelles mondiales pose alors une
problématique sur la mise en place d'une gestion de l'éthique, basé sur le respect des
cycles de vie endémiques. Cette gestion reste rattachée à l'esprit fondateur présent dans
les premiers sommets internationaux.
694 PNUE, Recommandations sur la gestion des ressources naturelles du lac Titicaca, 2010, 20 pages,
http://www.unep.org/pdf/anualreport/UNEP_AR_2010_french-pdf, consulté le 30 décembre 2013
695 Cf note n°677 alinéa 50
252
B. La profusion rapide des outils techniques
La profusion rapide des outils techniques a été crée une profusion internationale
désordonnée des outils de gestion mais également diffuse des outils administratifs et
scientifiques.
Les outils techniques de gestion mis en place au sein de chaque organisme international,
ont vite démontré un certain cloisonnement. Le PNUE, chargé de coordonner l’action
des organismes des Nations-Unies en matière d’environnement et de promouvoir la
coopération internationale en matière environnementale, a pu, à travers les AME,
organiser la coordination et la coopération internationales.
Mais sur l'ensemble des AME ratifiés, plus de cinq cent ne donnent pas ou peu
d'autorité au PNUE. Leur financement échappe au PNUE, et relève du FEM. Or, cet
organisme mondial est administrativement géré par la Banque Mondiale et
juridiquement indépendant du PNUE et des AME.
L’idée de la nécessité d’une réforme plus ambitieuse s'est ainsi affirmée. Malgré une
diplomatie environnementale internationale affirmée, la profusion et l'interaction des
outils techniques de gestion, au travers de programmes, ont semé le trouble et conduit à
un système désordonné, fragmenté et souvent inefficace : les engagements pris ne sont
pas convenablement vérifiés et les états les plus pauvres sont victimes d'un système
dispersé et coûteux.
Les faiblesses résident ainsi dans l'absence de cohérence des outils techniques de
gestion, le caractère fragmentaire de l'action internationale, la multiplicité des
institutions et l'absence des moyens pour les états situés en zone sensible.
Le mode de gestion choisi est pour la plupart des état une gestion déléguée. Or,
l'exemple de la gestion déléguée des ressources en eau douce démontre cette difficulté.
253
Or cette proposition sur le plan international est toujours en cours de construction car
certains États y voient une violation à leur souveraineté permanente sur leur ressources
naturelles, au sens de la résolution A/3171 du 17 décembre 1973 alors que d'autres y
voient une véritable organisation capable de réguler les politiques environnementales
nationales et œuvrer ainsi à une plus grande sécurité juridique environnementale.
L'idée première était de créer un outil institutionnel efficace, appliquant les décisions
juridiques contraignantes issues des protocoles d'accord. Car seule la Commission du
Développement Durable des Nations-Unies assure cette tâche et ne revêt pas le
caractère d'instance internationale.
Mais une réflexion portant sur une organisation internationale intermédiaire pourrait
alors être proposée (Partie II).
254
2. Une profusion internationale diffuse des outils administratifs et scientifiques
Les outils techniques administratifs et scientifiques ont été victimes de leur propre
succès. Une profusion des plans cadres et d'outils de gestion administratifs locaux est
constatée à partir de 1980.
Cette profusion d'expertise juridique par domaine a ainsi conduit à une profusion
d'outils techniques, incapables de se combiner entre eux et conduisant à des situations
techniques de blocages. Les outils techniques se retrouvent parfois en conflit entre eux,
parce que le mode de gestion optimale choisi n'est pas pas forcément le même d'un
domaine d'expertise environnementale à un autre.
Les trente dernières années ont donc permis de diagnostiquer une lourdeur
administrative internationale dangereuse, génératrice de blocages. Les multiples
commissions d'experts scientifiques, présents dans les organismes internationaux et
régionaux, aurait aussi révélé une absence d'approche transversale cohérente.
255
Cette première réflexion permet dans ce chapitre de mettre en évidence les caractères
fondateurs de l'approche intra-générationnelle des ressources naturelles mondiales.
Mais elle établit également son caractère fragmentaire par des actions menées
directement liées à la profusion des outils institutionnels et techniques.
L'état actuel des systèmes endémiques suscite une réflexion sur une autre approche
pouvant amener à s'interroger sur les moyens réels des États, dans leur globalité, et sur
la réforme future des institutions multiples en la matière.
256
CHAPITRE II.
LA PORTEE CONTROVERSEE D' UN CADRE JURIDIQUE
PROTECTEUR
257
258
Les institutions onusiennes ont reconnu à compter de 2001 « qu'il n'y a de solution que
si l'on comprend que la société humaine et l'environnement sont interdépendants 697».
Or cette interdépendance n'est pas effective car deux perspectives sociétales s'affrontent
depuis la fin de la guerre froide.
La première est basée sur l'art de gouverner ou l'alternative d'une gestion reposant sur
la notion d'intérêt général, alors que la seconde concerne la lutte des intérêts ou la
gestion reposant sur un amalgame de défis. Ces deux modèles se retrouvent ainsi à des
degrés divers dans l'ensemble des états. La notion d'intérêt général reste un concept
juridique objectif , indivisible et réel dans le premier modèle et illusoire dans le second.
Or les conflits géopolitiques récurrents ont conduit à revoir l'axe des questions
publiques et indirectement, à s'interroger sur les modes de gestion des ressources
naturelles. Car l'approche intra-générationnelle des ressources naturelles mondiales a
généré des modes de gestions protecteurs, qualifiés d'opaques, non transversales. Cette
approche a crée de nouveaux droit opposables.
«En croyant dominer la nature, par une sotte vanité, l'homme a fait peser sur lui-même
une responsabilité qui le dépasse, il convient maintenant qu'il reprenne, plus
modestement, sa place au seins de celle-ci. Il ne peut le faire qu'en changeant son
regard sur l'environnement, concrètement en modifiant sa relation juridique avec
elle698».
Mais si le «nouvel ordre écologique», pour paraphraser Luc Ferry699, se met en place
après la seconde guerre mondiale, cet ordre serait, selon l'auteur, un subtil mélange de
l'attachement à un territoire donné, de critiques du capitalisme et d'un soutien à la
gestion recentrée. Selon lui, seul l’État de droit au sens de l'Etat-Nation, reste le seul
modèle capable de coordonner les volontés communautaire et régional.
Or, l'approche intra-générationnelle des ressources naturelles n'est efficace que si elle
s'intègre naturellement et inéluctablement dans les modes de gouvernances locales.
Pour coordonner les volontés locales et internationales, il est alors judicieux de revoir
les blocages institutionnels et juridiques, issus eux-même des blocages géopolitiques.
Aussi, ces blocages sont marqués par une insuffisance du principe de transparence
environnementale et l'inexistence d'un réel principe de transversalité environnementale.
259
Section I . L’insuffisance du principe de transparence environnementale
260
§1 Une insuffisance de rattachement au principe d'équité environnementale
700 Article 38 des statuts de la CIJ ; arrêt du 20 février 1969, CIJ, plateau continental de la Mer du Nord,
recueil des arrêts, avis consultatif et ordonnances, 1969 ; CIJ, arrêt du 24 février 1982, plateau
continental de la Tunise, recueil des arrêts, avis consultatif et ordonnances, 1982, §1 page 60
701 Aristote, éthique à nicomaque, livre V, chapitre X, éditions Flammarion, 11 février 2004, 560 pages,
page 162
261
A. Les fondements liés à l'insuffisance de rattachement
Elle passe donc par le choix de modes d'échanges qui sont aujourd'hui inadaptés face au
principe de libre échange mondial des biens. Or, la Charte Mondiale de la Nature
énonce que la responsabilité des États tant sur le mode de conservation des diversités
biologiques nationales que sur la gestion durable de leurs ressources biologiques.
Mais les ressources naturelles sont rattachées à la même qualification juridique de res,
que les biens de consommation courante, et revêtent alors le même caractère
consommable.
La gestion optimale au sens d'intensive est donc une atteinte à la notion d'utilisation
durable des ressources biologiques, au sens de la Charte Mondiale de la Nature. Peut-on
alors parler de respect de l'équilibre mondial des milieux endémiques en terme juridique
et plus largement ne peut-on pas se poser la question de savoir si le principe d'équité
environnementale existe.
Si le principe de l'équité est consacré en droit international 702, quand on l'applique aux
ressources naturelles, et à leur caractère fragile et rare, il convient de s'interroger sur
l'existence d'une notion juridique d'équité environnementale.
Car la nature juridique des ressources naturelles, rattachées à la notion de simples res, a
permis aux États demandeurs, au nom du principe de libre échange mondial, du partage
juste et équitable, de se munir d'infrastructures et technologies suffisantes, pour établir
une gestion optimale, au vu de la CDB mais au final intensive, d'exploration et
d'exploitation des ressources naturelles mondiales. Cette optimisation s'est alors
apparentée à un véritable pillage légalisé génétique et endémique, générateur d'une
réelle insécurité juridique.
262
vers un développement économique durable.
Or, la pratique juridique a démontré que les contrats passés avec les États sources, pour
la plupart, émergents, n'ont pas permis d'équilibrer les avantages liés à la conclusion de
ces derniers. Les avantages tirés de l'utilisation optimale des ressources naturelles, sont
obtenus sans contrepartie financière et environnementale aux États sources. Et les États
contractants sont donc soumis à une obligation de résultat mais pas de moyens,
contraignante. Ce déséquilibre contractuel, où la notion de partage «juste et équitable»
reste juridiquement floue, pousse les états sources à se demander si la notion d'équité
environnementale, dans la pratique contractuelle, ne serait pas un leurre.
La notion d'équité environnementale n'est donc pas clairement qualifiée tant qu'une
unification des régimes nationaux et indirectement du régime juridique international,
n'émerge pas.
Car l'absence de dispositions juridiques, liées à l'exigence d'une reconnaissance de la
notion de partage «juste et équitable» des avantages liés à l'utilisation des ressources
naturelles mondiales, est générateur de situations d'insécurité juridique préoccupantes
dans une grande partie des États émergents et futures dans les États développés.
263
2. Des domaines du principe d'équité environnementale sous-estimés
La notion d'équité environnementale s'applique d'abord sur les intérêts contractuels des
parties dans le principe d'accès aux ressources naturelles, et de l'utilisation et le partage
des avantages qui s'y rattachent. Or, il n'existe pas de contrat type, ni d'organe
international régulateur pouvant répondre à l'exigence d'atteindre seul ces intérêts.
L'ensemble des contrats portant sur l'accès, l'utilisation et le partage des ressources
naturelles, repose à la fois sur le droit international des contrats applicable mais surtout
sur le principe de la négociation.
Il ne serait pas explicitement stipulé dans les contrats internationaux, pour l'instant, le
principe d'intérêt commun et d'équité environnementale. Il y a donc conflits entre les
intérêts commerciaux et financiers des parties, et les intérêts locaux environnementaux.
Cette reconnaissance juridique permet alors un meilleur contrôle sur l'utilisation réelle
des ressources naturelles, et notamment l'objectivité et la subjectivité de leur finalité.
Elle rétablit alors un équilibre entre les parties. Or, cette évidence juridique n'est pas
explicitée sur le plan international.
Au, départ, cela pourrait concerner l'ensemble des contrats portant sur des ressources
naturelles génétiques. Car le caractère unique d'une empreinte biologique représente un
atout scientifique et juridique particulier. Ensuite, cela concerne tous les types de
ressources naturelles mondiales, dans leur ensemble.
Cette reconnaissance permet aussi de tendre vers une sécurité juridique mondiale stable
et durable et d'affaiblir les mouvements nationalistes latents.
264
originaires, mais contrôlé à la fois par le droit international de l'environnement et la
société civile.
L'instabilité juridique dans les États émergents, pauvres laisse alors la place à la
reconnaissance mondiale des cultures environnementales et au respect du droit
coutumier, source du droit international de l'environnement.
265
B. Les problématiques liées à l'insuffisance de rattachement
Ces situations ont généré des conflits territoriaux, qui se retrouvent sur la scène
internationale, autour de l'accès au partage «juste et équitable» des ressources naturelles
mondiales et aux avantages tirés de leur exploitation.
La volatilité des prix liée à la gestion optimale des ressources naturelles alimentaires,
notamment le blé, a été à la base des conflits armés au Proche Orient et en Afrique en
2012.
266
Cet aspect permettrait ainsi d'établir la reconnaissance d'un territoire dans sa généralité,
juridique, culturelle, politique, et sociale. Or, les modes de gestion optimale, définis par
la CDB ne répondent pas à cette reconnaissance du droit coutumier local
environnemental. La volatilité des prix liés à une gestion optimale désorganisée a
conduit à une véritable cristallisation des enjeux internationaux.
Les enjeux autour des gestions des ressources naturelles transfrontalières, notamment,
des ressources naturelles alimentaires, sont ainsi au cœur d'une insécurité juridique au
départ interne et aujourd'hui mondiale. Des conflits «verts» sont alors nés autour des
problématiques environnementales. Les plus médiatisés étant pour l'instant ceux relatif
à la gouvernance mondiale de l'eau. D'autres autour des accès aux terres arables ou aux
destructions des milieux endémiques viendront.
Car les conflits verts, pouvant rapidement dégénérés en conflits armés doivent être
envisagés comme des lieux de création de futurs dommages. Leur répercussion directe
sur les modes de gestion pourraient être dans les années à venir, vecteur ou pas de
stabilité juridique durable.
Ce changement de trajectoire juridique serait nouveau car il reposerait sur une approche
transversale des conflits environnementaux. Il créerait ainsi une situation juridique
nouvelle, contradictoire avec les principes d'économie de marché des XIXème et XXème
siècles.
267
Bien plus, qu'un changement de trajectoire, l'Humanité du XXI ème siècle est confrontée
à une vision juridique nouvelle, où les problématiques environnementales sont
génératrices de conflits, reposant alors sur des problématiques juridiques internationales
et nationales.
268
2. Des discordances juridiques progressives
Cette situation crée alors une insécurité juridique générale, inquiétante. Pour y
remédier, il serait alors judicieux d'inciter tous les États à transposer de façon identique,
les prescriptions internationales et d'y agrémenter le droit coutumier local propre à leur
territoire. Cette transposition nationale serait alors opposable à tout État demandeur,
quelque soit le régime juridique auquel il se rattache. Elle serait aussi enregistrée au
sein des organisations onusiennes, dans un souci de transparence environnementale
internationale générale.
Sont ensuite constatées, par conséquence des premiers constats, les absences liées au
manque de consensus international, portant sur la coordination des principes
environnementaux de partage juste et équitable et du principe d'équité
environnementale. Il existe en effet un vide juridique international et national, par
transposition sur les notions portant sur la nature juridique des ressources naturelles, la
notion d'utilisation optimale et celle d'avantages liés à leur extraction et leur
exploitation. Ces trois notions, énoncées dans la CDB, ne sont pas clairement définies
ni précisées.
269
Sont enfin constatées des absences relatives à l'obligation de transparence des
informations relatives aux États sources. Ici, est à nouveau soulevée la problématique
juridique reposant sur la nature juridique des avantages perçus par l’État source de
l'extraction et l'exploration des ressources naturelles et à l'absence d'une obligation
d'information au grand public.
Or, pour mieux réguler un système réglementaire international, il est alors nécessaire de
reconnaître à l’État source une plus grande part à ses droits souverains, notamment sur
l'utilisation et les avantages tirés de l'extraction et l'exploration de ses ressources
naturelles. Les États sources, où l'on retrouve les gisements de ressources naturelles,
souvent émergents, ne disposent pas tous d'un cadre interne cohérent, portant sur
l'obligation de transparence et de communication, mais surtout sur les prescriptions
juridiques et réglementaires précises. Ces constats sont établis notamment en Afrique,
en Amérique latine, et en Asie. Les marchés communs locaux ont pris conscience de ces
lacunes qu'ils tendent à faire disparaître et le travail juridique est fastidieux.
270
§2 Une insuffisance de rattachement au principe de préservation
La naissance de l'ONU est née d'une même volonté, vision planétaire, d'union mondiale
pour travailler ensemble à la reconstruction d'un monde meilleur. Des conflits
nombreux, depuis plus de soixante dix ans, ont été lié partiellement à des
problématiques environnementales.
Or, même si la science et les moyens techniques ont permis d'augmenter la durée de vie,
l'Humanité doit passer de quatre à sept milliard, d'ici 2050 et les problématiques liées à
la gestion des ressources naturelles mondiales doivent générer de nouveaux droits
environnementaux, opposables.
Pour éviter de se poser la question de déterminer s'il existe un droit à « bien vivre » au
sens juridique, socioculturel et industriel, il faudrait d'abord observer les phénomènes
juridiques nouveaux qui se profilent. Et cela n'est qu'à partir de cette observation que
les États peuvent alors devenir le capitaine de leur propre destin.
Ces derniers reposent sur la notion d'intérêt commun de l'Humanité, objectif principal
du droit international de l'environnement, et pour faire face aux conséquences d'une
approche intra-générationnelle et une gestion optimale des ressources naturelles.
271
A. La genèse de nouveaux droits environnementaux opposables
La portée de cette notion est grande car elle repose sur la reconnaissance de droits
naturels fondamentaux reconnus aux citoyens dont ils pourraient se prévaloir à
l'encontre d'un pouvoir qui porterait atteinte à ces derniers.
Ces tensions reposent également sur la dégradation actuelle de la qualité de l'eau douce,
face au changement climatique planétaire et aux pollutions multiples. Ainsi, en moins
d'un siècle, les ressources naturelles en eau sont devenues un enjeu en droit
international, de premier plan. Elles représentent une puissance économique mais aussi
sociale et politique, forte. La sécurité hydrique, à la base d'une stabilité juridique
certaine, est aujourd'hui un facteur juridique stratégique dans les politiques locales et
internationales de gestion de l'eau.
Or, cette sécurité hydrique mondiale doit s'appuyer sur les mécanismes de coopérations
inter-étatiques, efficients. L'ensemble des études menées à ce sujet, ne conclut pas à une
« guerre de l'eau » mais au contraire à un partage raisonné et équitable des ressources,
sous réserve de coopération réelle et éclairée. Les exemples de coopération réussie sur
le Gange705, le Mékong706, démontrent que cette sécurité hydrique est réalisable. Mais
d'autres exemples de coopération moins réussies démontrent aussi ses limites 707. La
coopération hydrique internationale reste également délicate concernant des conflits
anciens, où les ressources naturelles en eau sont liées à une religion, une spiritualité.
L'exemple des tensions au Moyen Orient, et notamment dans le bassin d'Aral, démontre
272
l'importance de la sécurité hydrique. Se pose ici la question de la légitimité juridique du
gestionnaire, et les problématiques d'accessibilité aux ressources naturelles en eau
constitueraient une nouvelle forme de ségrégation hydrique, inédite mais dangereuse.
L'exemple des tensions en Asie centrale sont liées, non pas à la légitimité du
gestionnaire des ressources naturelles en eau, mais aux modes d'extraction, énergivores
en eau. L'observation à l'échelle planétaire des tensions hydriques fait apparaître ainsi
une instabilité juridique latente, reposant sur une insécurité hydrique globale.
Cette insécurité hydrique, à la source de conflits armés, reste préoccupante. Revoir la
gestion mondiale hydrique permettrait alors d’asseoir une sécurité hydrique certaine à
l'échelle planétaire et par voie de conséquence de renforcer une plus grande stabilité
juridique mondiale. L'émergence d'un droit opposable à l'eau est née de cette
inquiétude. Le droit d'accessibilité à l'eau a d'abord concerné les ressources naturelles
en eau708, puis s'est porté sur le droit à l'eau potable et à l'assainissement, érigé sur le
plan international comme un droit naturel709, confirmé depuis710.
Neuf pays714 possèdent plus de soixante pour-cent des réserves d’eau douce mondiales.
Le rapport indique que « Les inégalités face à l’eau tiennent à la répartition
géographique de la quantité d’eau disponible, mais aussi à la population présente sur
un territoire donné. Tandis que l'Asie concentre près de 60 % de la population
mondiale, elle ne dispose que de 30 % des ressources mondiales disponibles en eau
douce. À l’opposé, l'Amazonie, qui ne compte que 0,3 % de la population du globe,
possède 15 % de ces ressources715 ».
Le rapport indique que les réserves mondiales en eau disponibles sont suffisamment
708 CDESCNU, Résolution E/C.12/2002/11du 20 janvier 2003, relative au droit à l’eau
709 AGNU, Résolution, n° 64-292 du 28 juillet 2010
710 CNUDH, Résolution A/HRC/15/9 du 30 septembre 2010 sur le droit à l'eau potable et à
l'assainissement; AMS, Résolution WHA64.24 Eau potable, santé et assainissement du 24 mai 2011
711 Rapport de la Mission d’Information sur la Géopolitique de l’Eau, MIGE, Commission des Affaires
Etrangères, France, 8 octobre 2012, 33 pages, http://www.assemblee-nationale.fr/13/rap-info/i4070
.asp , consulté le 2 janvier 2014
712 Création de la Mission d'Information sur la Géopolitique de l'Eau le 5 octobre 2010
713 Cf note n°711 page 6
714 Brésil, Canada, Chine, Colombie, États-Unis, Inde, Indonésie, Pérou, Russie
715 Cf note n°711 page 7
273
abondantes pour répondre aux demandes multiples de sept milliards d'individus, mais
que cette moyenne est exprimée par ratio du mètre cube par habitant. Or, le ratio diffère
de un à dix-mille, qu'on se trouve dans la bande de Gaza, pauvre en eau douce, où le
ration est de cinquante-neuf mètres cubes par habitant et par an, où en l'Islande, riche en
eau douce, où le ratio fleure cinq-cent-trente-huit mille mètres cubes par habitant et par
an.
Les tensions hydriques concernent d’abord les milieux ruraux, comme l'Afrique,
déficitaire en infrastructures hydrauliques. Tout comme les États hydrauliquement
riches comme le Brésil qui n’approvisionne que trente-cinq pour-cent de la population
rurale. A l'inverse de pays asiatiques comme Singapour qui approvisionne la totalité de
son territoire, même aride. Les tensions hydriques sont donc liées à l'adaptabilité
juridique et technique des États. Elles sont ensuite liées à l'adaptabilité agraire et
industrielle des états. L'agriculture irriguée représente plus de quatre-vingt-dix pour-
cent des prélèvements d'eau douce dans certains états émergents. Selon le rapport, plus
de la moitié de la population mondiale n'a pas accès à l'eau potable.
De plus, les tensions hydriques sont liées au gaspillage causé par les fuites diverses. Ce
dernier participe activement à la raréfaction hydrique mondiale: «..[...] Des villes
comme Montréal ou New York accusent des taux de fuite supérieurs à 50 %. La ville de
Mexico compte 22 millions d’habitants et a donc de grands besoins en eau, qui est
pompée sur une distance de 3 500 mètres. Tous les efforts réalisés par la ville ne
permettent l’arrivée que de la moitié de l’eau pompée : les fuites s’élèvent là aussi à 50
%. Cela a pour conséquences des coupures d’eau régulières, une eau de qualité
douteuse et des périphéries mal desservies717 ».
Enfin, les tensions hydriques sont liées au principe d'égalité d'accessibilité à l'eau, aux
pollutions diverses et ler conséquences communes. Le rapport reprend les données de
l'OMS selon lesquelles des fleuves hautement pollués restent une zone de coopération
délicate. Ainsi le fleuve du Gange reçoit un million de litres par minute, d'eaux usées
non traitées, alors qu'il est constaté qu'un gramme d'excréments peut contenir dix
millions de virus, un million de bactérie. A ce rythme, l'insécurité hydrique tuera plus
que des conflits armés. Aussi, le rapport propose la réorganisation de la gouvernance
mondiale en matière de gestion des ressources naturelles en eau, en plusieurs étapes.
274
des fleuves à travers les digues et des barrages.
La seconde consiste à examiner les usages mondiaux des ressources naturelles en eau et
à poser le socle d'une approche inter-générationnelle, plus sécuritaire. Ce réexamen
passe par une étude locale adaptée des modes de gestion agraires, le développement de
l'eau virtuelle, une tarification nouvelle, mais surtout la reconnaissance des savoirs-faire
locaux, uniques. Ce réexamen passe aussi par la mise en place d'un corpus juridique
reposant sur la reconnaissance au droit à l'eau et à l'assainissement, le renforcement du
droit international des eaux transfrontalières originaire718 et existant719, à travers le
renforcement de la doctrine et de la jurisprudence internationales, mettant en exergue
les principes d’information, de coopération et d’usage partagé, en application du droit
international de l’environnement720.
La dernière étape du rapport propose une redéfinition juridique des acteurs du droit de
l'eau et à l'eau. Cette dernière passe par une meilleure gouvernance des systèmes
onusiens, notamment un meilleur contrôle des agences internationales de l'eau, mais
aussi une réorganisation des institutions régionales comme le Conseil Mondial de l'Eau
(CME), l'Office International de l'Eau (OIE). Elle passe enfin par une centralisation
mondiale et transparente des financements multiples.
Le rapport conclut pour la création d'une Agence Mondiale de l'Eau, sous tutelle de
l'Organisation Mondiale de l'Eau et propose vingt orientations pour une meilleure
gouvernance mondiale des ressources naturelles en eau, une aide publique mondiale au
développement durable et l'émergence de « l'hydro-diplomatie ».
Il cite à titre d'exemple le Chili où le corpus originaire 721 portant sur la gestion optimale
et intégrée des ressources naturelles en eau ne respecte pas toujours le principe d'équité.
Les réformes juridiques récentes722 ont permis de limiter les monopoles et de
promouvoir la protection des écosystèmes. Un récent projet de loi français 723 porte
d'ailleurs sur le droit opposable à l'eau potable.
Le second droit opposable est relatif aux ressources naturelles agraires. La Commission
Internationale des Juristes724 a lancé un projet relatif au droit à la terre, le 8 septembre
1993. L’objectif était de faire un état des lieux international du droit foncier, des divers
régimes fonciers et agraires au vu des droits civils, politiques, économiques, sociaux et
culturels. Il en est ressorti que la sécurité agraire restait la condition minimale pour les
populations rurales d’accéder par la suite à d'autres droits, fondamentaux reconnus sur
le plan international. Or, l'état des lieux juridique du droit foncier international a permis
à la commission d'établir l'émergence sensible puis marquée du droit opposable aux
718 Traité de Washington du 11 janvier 1909 portant sur la gestion transfrontalière des eaux américano-
canadiennes ; Traité de Washingon du 29 septembre 1864 portant sur les limites internationales des
fleuves ; Accord d'Albufeira du 30 novembre 1998
719 Convention d’Helsinki du 17 mars 1992; Convention de New York du 21 mai 1997 sur le droit relatif
aux utilisations des cours d’eau internationaux à des fins autres que la navigation
720 CIJ, arrêt du 25 septembre 1997, affaire Gabcíkovo-Nagymaros, recueil de la CIJ de 1997, 50 pages,
page 25 ; Arrêt du 20 avril 2010, affaire usine de pâte à papier, recueil 2010, 59 pages, page 14
721 Loi constitutionnelle chilienne du 30 septembre 1981 portant sur la gestion de l'eau
722 Loi organique chilienne du 25 septembre 2005 portant réforme de la loi constitutionnelle du 30
septembre 1981
723 Projet de loi français du 18 septembre 2013 du député Jean Galvany sur le droit opposable à l'eau
potable
724 PLANT Roger, Le droit à la terre considéré sous l’angle des droits de l’homme et du développement,
4 septembre 1994, fiche 10,1994, Revue de la Commission Internationale des Juristes, 2 pages
275
ressources naturelles agraires, essentielles à la survie des populations locales, rurales et
urbaines.
Ainsi, la commission notait qu'en 1979, la Colombie enregistrait des records
d’expropriation des terres des populations rurales, souvent autochtones, au profit de
groupes étrangers ou de propriétaires fonciers locaux puissants, et des violations
graduelles des droits de l’Homme en milieu rural. Relatif au continent asiatique, la
Commission indiquait, dés 1981, pour le cas de la Malaisie, l'urgence de créer un
tribunal agraire indépendant, aux procédures simples et rapides. Cette urgence était
légitimée par le faits que les objectifs posés par la réforme, basée sur un droit de
jouissance, de sécurité et de viabilité agraire, garanti aux plus démunis, avaient été
détournés.
La commission émettait une conclusion similaire en 1982, pour l'Inde, en dénonçant des
régimes fonciers féodaux, la corruption locale, en insistant sur le rétablissement du
caractère commun des ressources naturelles agraires et en créant un droit d'usage
opposable aux populations rurales les plus démunis. Le constat de la commission en
1990, relatif à l'état des lieux agraire en Afrique, Asie et en Amérique Latine, démontre
l'absence de vulgarisation du droit coutumier local, le manque de réactivité des juristes
locaux à appréhender la complexité des procédures juridiques, les réformes législatives
agraires et à assurer aux populations locales une représentation juridique.
Vingt plus tard, les thématiques ont évolué et lient les notions fondamentales rattachées
au droit foncier à celles rattachées au droit d'usage foncier. Les problématiques
internationales concernent la privatisation des terres, la fonction sociale du droit foncier
et notamment la discrimination liée au droit d'usage des sols et sous-sols. Ainsi, ce
constat a permis d'indiquer que pour pallier à cette discrimination, deux principes
avaient été retenus, à savoir le principe de restitution et celui de l'indemnisation.
S'agissant du principe de restitution des terres, ce dernier s'est appliqué dans les anciens
pays de l'ancienne URSS. S'agissant du principe de l'indemnisation, ce dernier s'est par
contre, appliqué avec complexité en Afrique du Sud. A partir de ces deux constats, la
Commission Internationale des Juristes note que depuis 2010, des difficultés juridiques
majeures portent sur la nature juridique des droits fondant les procédures de règlement
équitable des revendications, mais également sur l'absence d'une reconnaissance forte
des droits coutumiers agraires et la reconnaissance du droit de propriété aux femmes.
La Commission Internationale des Juristes conclut en proposant de recentrer la question
foncière au cœur des droits de l'homme, de l'élargir à toutes les populations, mais aussi
créer un droit international des peuples à la sécurité de jouissance de la terre. Les
ressources naturelles agraires sont au cœur d'un nouveau type d’impérialisme vert,
alimenté par le caractère abusif du droit d'usage. Selon Mwesiga Baregu 725 , le transfert
des compétences de gestion des forêts au niveau local, est perçu dans les pays
émergents, comme un outil de bonne gouvernance. Par contre, sous couvert de bonne
gouvernance, ce même transfert a permis à des tiers étrangers, entreprises ou états,
d'explorer et d'exploiter les ressources naturelles agraires dans une tranche maximale,
substituant des terres arables pour les populations rurales. Le droit d'usage est alors
constitutif d'abus et source d'instabilité alimentaire et sociale.
L'auteur énonce qu'une grande partie de l'Afrique est menacée par les projets
d’agrocarburants, notamment la Tanzanie, le Mali, le Sénégal et le Soudan. L’ Éthiopie
réserve ainsi, presque quatre millions d’hectares de terres à louer, alors que la famine
725 Professeur à l'Université St Augustine en Tanzanie
276
reste omniprésente. Les firmes, notamment saoudiennes, louent cinq-cents dollars
l'acre, soit plus quatre-mille mètres carrés. Derrière ces firmes se trouve le Cheikh
Mohammed Al Amoudi, homme d'affaire saoudien naturalisé éthiopien, comptant parmi
les cinquante fortunes du monde726. D'autres États comme la Chine, le Qatar ou l'Inde
font de même. Les entreprises étrangères européennes achètent des terres arables pour
la culture du Biodiesel, à travers la plantation d'immenses champs de jatropha curcas727
et d'arbres, à transformer en crédits carbone.
À Madagascar, un projet de transfert avorté, de terres arables à l’entreprise sud-
coréenne Daewoo a suscité des mouvements de révolte728.
Le troisième droit opposable est relatif aux ressources naturelles en air. La mise en
œuvre de la Convention cadre des Nations-Unies sur le changement climatique 729 a
permis à l'ensemble des États occidentaux et émergents, de prendre en considération les
ressources naturelles en air, et de tenter de maîtriser ou de limiter leurs émissions de gaz
à effet de serre. Cette démarche s'est accélérée avec l'élaboration du Protocole de
Kyoto730, créant le mécanisme de développement « propre » ou à faible niveau
d’émissions de carbone, par l'intermédiaire de crédits carbone générant des
« réductions d’émissions additionnelles 731» à titre de compensation aux manquements
de réduction d’émissions. Cette démarche était incitative pour promouvoir un
développement durable global. Or, elle a contribué à une forte spéculation financière et
bénéficié aux États riches, qui se sont achetés légalement une bonne conduite. Elle n'a
pas établi un développement « propre » mais désordonné et non sécuritaire.
D'autres droits opposables peuvent être énoncés et découlent des trois premiers : droit
opposable à vivre dans un atmosphère sain, droit opposable à consommer une
alimentation saine. Des organismes non gouvernementaux réactivent des concepts
juridiques connus, comme celui des coopératives environnementales.
277
pauvreté et l'espérance populaires. Les instances politiques locales, profanes, restent
ainsi des victimes idéales.
733 Rapport de la Commission Internationale des Juristes, 2010, sur la situation de Sonbhadra, 10 pages,
page 7
734 Rapport de la Commission Internationale des Juristes, 2013, fiche 12/13 du 4 décembre 2013 sur la
fondation équatorienne Pachamama
278
2. Des droits environnementaux opposables connexes
Force de loi entre les parties, le cœur même des contrats, repose avant tout sur une
négociation, que les puristes nomment « négotium », qui permet d'aboutir ensuite à un
accord. Ce dernier consensuel, oral, ou bien solennel, écrit, peut alors porter sur les
moyens pris par les parties pour la préservation des espèces vivantes décrites.
Or, les pratiques contractuelles internationales se sont fondées sur une histoire juridique
propre à chaque État. On retrouve ainsi la pratique consensuelle en Extrême et Proche
Orient, où la relation de confiance entre les parties, protégeant le faible, est reconnue
par la jurisprudence735. On la retrouve aussi en droit anglo-saxon, où l'existence d'une
contrepartie réelle et loyale, sans influence abusive, de fraude, et conforme à l'ordre
public est requise et refuse les contrats unilatéraux736.
735 DAVID René et JAUFFRET SPINOZI Camille, Les grands systèmes de droit contemporains, Paris,
éditions Dalloz, collection Précis , novembre 2002, 553 pages, pages 403 et 434
736 FROMONT Michel, Grands systèmes de droit étrangers, éditions Dalloz, collection mémentos, 2009,
256 pages, page 140
737 DUTOIT Bernard , Le droit russe, Paris, éditions Dalloz, collection connaissance du droit, mai 2008,
130 pages, 52 pages
738 Cf note n°735 pages 209 à 211; Cf note n°736 page 210
739 Convention de Washington pour la protection de la flore, la faune et des beautés panoramiques
naturelles des pays de l’Amérique du 12 octobre 1940 ; convention d'Alger pour la conservation de la
nature et des ressources du 15 septembre 1968 ; Convention de Maputo sur les ressources naturelles,
l'environnement et le développement du 11 juillet 2003 ; convention de Berne relative à la
conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe du 19 septembre 1979 ; convention
d'Apia sur la protection de la nature dans le pacifique sud du 12 juin 1976 ; accord de Kuala
Lumpur , ASEAN sur la conservation de la nature et des ressources naturelles du 9 juillet 1985 ;
convention de Bruxelles, Benelux, portant sur la conservation de la nature et de protection des
paysages du 8 juin 1982 ;
279
comportant ou non un certain nombre d'aléas permanents, sur lesquels reposent les
futurs droits opposables. Vis à vis de ces nouvelles perspectives, ces derniers sont alors
perçus comme des droits préventifs, résistants et nouveaux. Pour enrayer ce
phénomène, l'adoption d'une position commune est nécessaire.
Si l'on prend le cas européen, un rapport du Conseil de l'Europe 740 propose des
protections ponctuelles, non générales, adaptées aux typologies d'espèces à préserver.
280
B. La portée de nouveaux droits environnementaux opposables
Or, même si ce principe est reconnu, il reste fragile et conforte timidement la notion de
responsabilité environnementale.
La notion de dommage écologique, énoncé il y a plus de quarante ans 742, était définie à
l'origine comme une « atteinte à l'ensemble des éléments d'un système ». Or, dans le
droit international de l'environnement, la qualification juridique des ressources
naturelles et plus généralement de la Nature, est rattachée à la notion de res. La
jurisprudence internationale et notamment française743, a reconnu la réparation des
atteintes portées à l'environnement.
L'obligation générale de réparation est donc posée mais reste en pratique fragile, car la
notion de réparation est subordonnée à celle de dommage (partie II). Aussi, le droit
international de l'environnement a reconnu la responsabilité environnementale par le
biais du principe 13 de la déclaration de Rio du 3 juin 1992, énonçant que «les états
doivent élaborer une législation nationale concernant la responsabilité de la pollution
et d'autres dommages à l’environnement et l'indemnisation de leurs victimes». Pour
anticiper la procédure de la réparation, et éviter le dommage, le principe de précaution a
été introduit.
742 DESPAX Michel, La pollution des eaux et ses problèmes juridiques, librairies techniques, 1968, n°
43 ; DESPAX Michel, La défense juridique de l’environnement, réflexions à propos de quelques
décisions concernant la pollution de l’eau et de l’atmosphère, JCP 1970, I, 2359.
743 TI Dax, 12 septembre 2006, Sepanso c/ M. Cousseau ; TGI Bastia, 4 juillet 1985 ; TGI Draguignan,
3 mars 2003, n° 00/002296 ; TGI Digne-les-Bains, 26 février 2004, n° 163/04 ; TGI Périgueux, 4
octobre 2005, n° 04/02226 ; TGI Marmande, 25 janvier 2007, n° 05/001848
CA Rennes, 28 juin 1991, n° 96091 ;CA Rennes, 5 juillet 1996, n° 95/01694 ; CA Rennes, 30 avril
1997 ; CA Rennes, 27 mars 1998, n° 97/00224 ;CA Rennes, 26 octobre 2006, n° 06/00757 ; CA
Rennes, 23 mars 2006, n° 05/01913 ; CA Rennes, 18 avril 2006, n° 05/01063 ; CA Rennes, 18 avril
2006, n° 05/01063 ; CA Pau, 4 décembre 2003, n° 03/00399 ; CA Pau, 1er mars 2007, n° 06/00750 ;
CA Pau, 17 mars 2005, n° 00/400632 ; CA Bordeaux, 15 février 2005, n° 04/00578 ; CA Bordeaux,
13 janvier 2006, n° 04/00047 ; CA Aix-en-Provence, 21 mars 2005, n° 534/M/2005 ; CA Aix-en-
Provence, 13 mars 2006, n° 428/M/2006 ; CA Aix-en-Provence 25 juillet 2006
Cass. soc., 26 avril 2007, n° 05/45624 ; Cass. soc., 2 mai 2000, n° 98/40755 ; Cass. crim., 8 juillet
1975, D. 1975, inf. rap., p. 193; Cass. crim., 15 janvier 1997, n° 96/82264, Bull. crim., n° 11 ; Cass.
crim., 20 février 2001, n° 00/82655, inédit ; Cass. crim., 25 octobre 2005, Bull. crim., n° 322 ; Cass.
2e civ., 28 novembre 1962, Bull. civ. n° 756, D. 1963, p. 77 ; Cass. 2e civ., 5 octobre 2006, Bull.
civ. II, n° 255 ; Cass. 2e civ., 16 novembre 2006, n° 05-1962, note M. Boutonnet ; Cass. 1re civ., 2
mai 2001, D. 2001, jur. p. 1973, note J.-P. Gridel
T. Pol. Guingamp, 5 janvier 2006, n°06/00005 ; T corr. Brest, 4 novembre 1988, n° 2463/88 ; T. corr.
Rennes, 26 juin 1992, n° 210992 ; T. Corr. Rennes, 26 juin 1992, n°210992 ;T corr. Blois, 27 mars
1996, n° 97/9295 ; T. corr. Libourne, 29 mai 2001, n° 00/010957 ; T. corr. Bordeaux, 22 septembre
2003, n°01/66111 ; T. corr. Bordeaux, 4 octobre 2004, n° 03/33169 ; T. corr. Brest, 8 mars 2005,
n° 04/008977, n° 04/000779 et n° 04/007517 ; T. corr. Brest, 3 mai 2005, n° 03/007603 ; T. corr.
Mont-de-Marsan, 1er juillet 2005, n° 04/006554 ; T. corr. Brest, 3 janvier 2006 n° 05/003930; T. corr.
Dax, 11 mai 2006, n° 06/001157 ; T. corr, Brest, 5 avril 2006, n° 05/008078
281
précaution744. Si la Directive européenne n'entre en vigueur que le 1er juin 2015, en
remplacement de la Directive 96/82/CE dite « Seveso 2 », force est de lui reconnaître un
effort certain pour renforcer le dit principe. En effet, la directive renforce l'inspection
générale sur l'ensemble des installations classées en Europe, et prend mieux en compte
la participation du public. Cette nouvelle disposition permet alors une meilleure
classification des produits chimiques et accroît le caractère dangereux des produits
chimiques. Les préjudices écologiques devenant de plus en plus fréquents, les états se
sont interrogés sur la pertinence d'une définition commune de la notion de préjudice
écologique. Car les états énoncent à la fois les notions de dommage et de préjudice. Or
la notion de préjudice écologique n'est pas clairement définie sur le plan juridique.
Cette conscience environnementale commune s'est faite au fur et à mesure des
survenances d'accidents environnementaux.
Le droit international a retenu une notion liée à la gestion traditionnelle basée sur la
prévention et la réparation objective. La jurisprudence environnementale internationale
a retenu d'avantage la notion de dommage que de préjudice écologique. Suite aux
polémiques internationales sur l'exploration des gaz de schiste, ou le dégazage en mer,
au lendemain de l'affaire européenne de l'Erika, plusieurs propositions juridiques ont
émergés, notamment, un rapport ministériel français récent745, qui ouvre une nouvelle
voie.
Ce préjudice doit résulter d'une atteinte anormale à l'environnement et ainsi faire l'objet
d'un mode de réparation spécifique746, comme la saisine directe d'une Haute Autorité
Environnementale et des délais de prescription adaptés. Le rapport pointe les
incohérences du droit commun vis à vis du préjudice écologique747, et souhaite une
réforme de l'expertise judiciaire et scientifique, trop lente et coûteuse. Le rapport
indique aussi la nécessité d'articuler les divers modes de police au vu des
réglementations européennes.
744 Directive 2012/18/UE du 4 juillet 2012 dite directive Seveso 3, relative aux accidents majeurs
impliquant des substances dangereuses, publiée le 24 juillet 2012 au JO de l’Union européenne.
745 JEGOUZO Yves, La réparation du préjudice écologique, Ministère de la justice, rapport du 17
septembre 2013, 81 pages, page 13 à 15, http://www.justice.gouv.fr/art_pix/1_rapport
_prejudice_ecologique_20130914.pdf, consulté le 4 janvier 2014
746 Cf note n°746 page 17
747 Cf note n°746 page 30
748 Cf note n°746 page 46
749 Cf note n°746 page 54
282
Il ressort de ce rapport plusieurs remarques démontrant le caractère fragile de la notion
de préjudice écologique: la première étant la grande complexité de la procédure, la
seconde restant sur les conditions d'évaluation et de réparation de ce préjudice restant
imprécises, la troisième portant sur la complexité de montage pour les demandes de
réparation du préjudice moral des associations de défense de l'environnement, la
quatrième sur l'adéquation de ce nouveau régime avec le dispositif actuel de
responsabilité environnementale.
Le projet d’article 1386-19 du code civil, voté par le Sénat le 19 janvier 2016 a proposé
de retenir la rédaction suivante : « Toute personne qui cause un dommage grave et
durable à l’environnement est tenue de le réparer ». L’Assemblée nationale a adopté le
15 mars 2016, l’amendement inscrivant le préjudice écologique dans le Code civil en
reprenant les termes de la jurisprudence Ericka.
L'adoption par le Sénat le 10 mai 2016 de l'article 2 bis du projet de loi sur la
biodiversité, inscrivant la réparation du préjudice écologique dans le code civil, reste
fragile car des difficultés demeurent sur les amputations concernant notamment les
néonicotinoïdes et les restrictions portant sur les actions en réparation du préjudice,
ouvertes non à toute personne ayant qualité et intérêt à agir mais seulement aux
établissements publics, aux fondations reconnues d'utilité publique et aux associations
environnementales. Or, cette restriction vient en contradiction avec l'article 2 de la
Charte de l'environnement énonçant que « Toute personne a le devoir de prendre part à
la préservation et à l'amélioration de l'environnement.» .
283
2. Un principe timide de responsabilité environnementale
Les États européens se sont dotés d'un régime de responsabilité environnementale, suite
à la transposition de la directive européenne portant sur un cadre commun de
responsabilité en cas d’atteinte à l’environnement758 . mais cette transposition759 ne s'est
pas accompagnée pour autant d'une spécificité et d'une codification du préjudice
écologique.
284
Les nouvelles dispositions législatives françaises762 depuis lors ont défini la notion de
dommage environnemental, de « détériorations directes ou indirectes mesurables de
l’environnement 763». Mais le régime retenu est un régime commun de la responsabilité,
assorti d'exclusions. Des juristes ont alors proposé764 comme précédemment évoqué, la
création d'un préjudice écologique pur, visant directement à réparer les préjudices subis
par l’environnement. Car le mécanisme de la responsabilité environnementale dans le
droit romano-germanique, se met en place lorsqu'il y a trois éléments: un dommage
résultant de l’infraction environnementale, une victime et un lien de causalité. La
responsabilité repose alors sur le mécanisme de la réparation civile ou administrative.
Si certains États, comme la France, ont élaboré une typologie sophistiquée des
responsabilités civiles765 ou administratives766, le principe même de la réparation, n'était
pas systématique à l'origine. Mais la répercussion internationale des atteintes
environnementales a renforcé ce principe jusqu'à l'établir par défaut, même pour des
activités polluantes légales.
Cette notion a été retenue par la jurisprudence française 768 lors de l'affaire de l'Erika, et
confirmée depuis769 , mais pas sur le plan législatif où les discussions restent tendues.
D'autres états, comme les États-Unis se sont penchés sur la question législative de la
réparation du préjudice écologique. Ce concept reste encore fragile sur le plan
juridique. Le principe de la réparation consacré depuis soixante dix ans par la
jurisprudence internationale770 , s'est concrétisé à travers la création de fonds
d'indemnisation propres aux États.
On citera à titre d'exemple le fond hollandais contre la pollution de l'air, le fond français
762 Décret n° 2013-188 du 4 mars 2013 portant publication du protocole sur les registres des rejets et
transferts de polluants se rapportant à la convention de 1998 sur l'accès à l'information, la
participation du public à la prise de décision et l'accès à la justice dans le domaine de l'environnement
(ensemble quatre annexes), signé à Kiev le 21 mai 2003, JORF n°0055 du 6 mars 2013 page 4033
763 Article L.161-1, I du Code de l’environnement français
764 NEYRET Laurent, Atteinte au vivant et responsabilité civile, LGJD, 2006, 728 pages
765 La France distingue cinq types de responsabilité civile : la responsabilité pour faute pour les
dommages liés à l'amiante (article 1382 et 1383 c.civil ), la responsabilité sans faute en matière de
pollution (article 1384 al 1), la responsabilité objective d'origine législative comme l'article L.142-2
du Code de l'aviation , la responsabilité du fait défectueux en matière de santé publique (article 1386-
1 c.civil), la responsabilité en cas de troubles du voisinage
766 Responsabilité pour et sans faute de l'administration française depuis le régime de la loi du 28
pluviôse an VIII
767 DIDIER Anouchka , la reconnaissance tacite constatée du dommage écologique pur par le droit
international via le cadre pratique de sa réparation », Le dommage écologique pur en droit
international , eCahiers, numéro 18, 29 avril 2013, consulté le 19 janvier 2014. URL :
http://iheid.revues.org/674 ; DOI : 10.4000/iheid.674
768 CA Paris, 30 mars 2010, Clemente et a. c/ Conseil Général de la Vendée et a, n° 08/02278
769 Cass. Crim, 25 septembre 2012 ; CA Montpellier, 7 mai 2013 ; Cass.Crim, 22 mars 2016 n°1648
770 Sentence arbitrale, 11 mars 1941, Fonderie du Trail, États-Unis contre Canada, R.S.A., tome III,
pages1907 et suivantes
285
de prévention des risques naturels771. Le mécanisme de la responsabilité civile pour les
dommages dus à la pollution par les hydrocarbures a été mis en place suite à l'accident
du Torrey Canyon772, et a mis en évidence l’absence d'une réglementation internationale
posant le principe de responsabilité et de réparation en matière d'hydrocarbure. Sous
l'égide de l’Organisation Maritime Internationale, a été élaboré un régime
d’indemnisation des victimes de la pollution par les hydrocarbures773.
Depuis leur création, les FIPOL ont été saisi de presque cent-cinquante sinistres
internationaux. Les demandes d’indemnisation ont fait l’objet d’accords de règlement à
l’amiable. D'autres états ont préféré légiférer dans le domaine. Ainsi, aux États-Unis,
suite à l'incident pétrolier de l’Exxon Valdez774, le Congrès américain a adopté la loi
CERCLA775, surnommée « superfund » prévoyant l'ouverture d'une action en
réparation des sols souillés par le gouvernement, sur le fondement d’une responsabilité
objective, rétroactive et solidaire776.
Le Japon777 a posé depuis plus de quarante ans, le principe de prise en charge par l'état
des victimes d'une pollution dans des zones à grands risques et pour maladies
spécifiques. La France a opté pour plusieurs mécanismes, comme celui de
compensation, de la remise en état778, de l'injonction779, de l'atteinte directe780, mais
aussi en faisant appel au mécanisme des assurances781.
286
Section II. L'insuffisance du principe de transversalité environnementale
287
§1 Une insuffisance liée à une transversalité fragile et timide
Cette efficacité doit s'appuyer sur l'amélioration des régimes de responsabilité, à travers
notamment les mécanismes du principe de transparence et le renforcement de la
responsabilité environnementale objective et subjective.
Elle passe également par la mise en place du mécanisme d'égalité juridique des acteurs
dans leur droits et devoirs.
288
A. Le constat d'un principe de transversalité environnementale fragile
La plupart des États et leurs acteurs aspirent actuellement à une meilleure gouvernance
environnementale. Or cette dernière ne peut passer qu'à travers une autre approche de la
gestion des ressources naturelles mondiales.
La certitude juridique actuelle réside dans l'appréhension de cette volonté. Une disparité
juridique des modes de gestion des ressources naturelles et une complexité juridique
des modes de gestion des ressources naturelles sont constatés.
Selon les experts européens785, l’Islande est le seul pays européen, disposant de
ressources naturelles hydrographiques et thermiques importantes. Sa situation
géologique unique, avec une remontée de roches chaudes provenant du manteau
inférieur et la présence de sept systèmes volcaniques en activité, a permis de produire
ainsi plus de quatre-vingt pour-cent de la production d’énergie primaire totale, à partir
de la géothermie. Or, avec moins de cinq cent mille habitants, l'offre géothermique
dépasse les besoins locaux. Et la situation insulaire de l’État rend l'exportation difficile.
289
Europe, met en danger la structure géologique de l’État. En effet, les potentialités
énergétiques, basés sur des critères de faisabilité technique de l'exploitation, de coût
financier et environnemental, ont été surestimés. Or, l'absence de gouvernance
européenne, liée à une gestion contrôlée sur le territoire islandais, des forages multiples,
a permis l'augmentation de la teneur de sulfure d’hydrogène dans l'atmosphère.
Cette absence se double d'une absence réglementaire relative à la gestion des déchets
liés à l'exploitation d’aluminium. Enfin, la surexploitation géothermique s'est exportée
comme en témoignent les derniers contrats décrochés en Éthiopie, qui font de l'Afrique
la plus grande centrale géothermique du continent, entre 2018 et 2021. Ces derniers ne
sont ainsi pas assortis de moratoire relatif à la gestion des risques géothermiques.
Cet exemple démontre qu'au sein d'une même institution, la gestion des ressources
naturelles déterminées, n'est pas transversale mais au cas par cas, par état, à l'instar des
autres, et devient ainsi vite disparate, créant alors un phénomène domino, ou effet
papillon, sur l'ensemble des autres états.
290
2. Une complexité juridique des modes de gestion des ressources naturelles
L'absence juridique relative à une position juridique commune des États, quant à
l'avenir de leurs propres ressources naturelles ne permet pas non plus de rendre cette
gestion moins complexe. La vision n'est en effet que vénale, les ressources naturelles
n'étant perçues que comme de simples res. Elle se double ensuite d'une complexité
administrative, marquée par un dédale institutionnel complexifiant la complétude
administrative internationale des demandes préalables.
La gestion complexe des ressources naturelles est aussi liée à une problématique des
dynamiques des écosystèmes. Ces dynamiques pouvant être un savant mélange de
données juridiques, scientifiques et socio-économiques, au sein d'un même territoire.
Par voie de conséquence, la gestion complexe des ressources naturelles accentue le
facteur d'instabilité juridique car elle reflète la difficile coalition entre les intérêts
économiques liées à l'exploitation optimale des ressources naturelles, les divers moyens
technologiques et juridiques déployés, et les tensions qui en découlent.
Enfin, l'approche juridique de la dynamique des ressources naturelles peut s'appuyer sur
l'analyse de pratiques scientifiques. Car ces dernières identifient les influences
environnementales et leurs impacts sur les réserves de ressources naturelles mondiales.
La gestion complexe des ressources naturelles est ainsi indissociable des choix établis à
un moment donné.
Mais une différence reste à être soulignée : l'approche scientifique établit une véritable
inter-action naturelle des écosystèmes. L'approche juridique ne prend pas en compte ces
dernières, ou du moins, ne les codifie pas et ne les anticipe pas suffisamment. Cette
situation est alors génératrice d'un effet de cloisonnement juridique international, tant
291
sur la notion des risques, les problématiques liées à l'extinction des espèces, que sur
l'écologie juridique elle-même, complexifiée volontairement.
Cette complexification du paysage juridique mondial ne permet pas de poser les jalons
d'une gestion raisonnée des ressources naturelles. En effet, la connaissance des
processus endémiques et divers mécanismes écosystémiques et sa prise en compte reste
indispensable et doit rentrer dans le champ d'application de la gestion des ressources
naturelles. Le rapprochement inter-disciplinaire mondial est alors déficient car il
entrerait lui-même en conflit avec des facteurs géopolitiques et sociaux conséquents.
292
B. Le constat d'un principe de transversalité environnementale timide
L' approche inter-générationnelle reste pour l'instant une aspiration rentrant dans le
souhait d'une meilleure ou à une autre forme de gouvernance mais cette dernière reste
dans la pratique fragile et timide.
Une absence d'adaptation juridique des gestions des ressources naturelles et une
saturation juridique des modes de gestion des ressources naturelles sont constatés.
Le droit coutumier autochtone repose sur une gestion collective des ressources
naturelles, où l'Homme n'est qu'un locataire de la Nature. Si les peuples autochtones
représentent pour les Nations-Unies, moins de quatre cent millions de personnes,
répartis sur les cinq continents, force est de constater que l'approche intra-
générationnelle de la gestion des ressources naturelles, dans la pratique, les a totalement
exclu du processus décisionnel environnemental.
786 AGNU, Résolution 1994/45 du 26 août 1994 portant projet de Déclaration des droits des peuples
autochtones
787 Convention de l' O.I.T n°169 du 5 septembre 1991 relative aux peuples indigènes et tribaux ; AGNU,
résolution 54/248 du 23 décembre 1993 relatif à la décennie 1994-2004 consacrée aux peuples
autochtones
788 Conférence de Rio de Janeiro des 13 et 15 juin 1992, Cf note n°13
789 AGNU, Résolution 59/174 du 20 décembre 2004 relatif à la décennie 2005-2015 consacrée aux
peuples autochtones
293
décisions environnementales extérieures assorti d'un droit de veto. Nonobstant, une
déclaration récente des Nations-Unies790 a reconnu la nature juridique du droit
coutumier autochtone et a établi la notion juridique de peuple distinct791.
L'Homme, être vivant parmi la Nature ne doit pas aller à l'encontre de cette dernière.
L'exploiter abusivement revient à la détruire, et donc à mettre en péril la vie même de
tous les écosystèmes et êtres vivants.
Cette volonté n’apparaît pas non plus de façon intelligible dans le domaine de la
propriété intellectuelle, concernant tous les contrats relatifs à la manipulation génétique
des ressources naturelles, et tous ceux relatifs à l'exploitation et l'extraction des
ressources naturelles fossiles.
Cette timidité crée des nuances juridiques subtiles mais délicates à établir en cas de
survenance de dommages environnementaux. Elle ne peut donc pas permettre de poser
clairement les droits autochtones et ainsi participer activement au principe de
transversalité environnemental. Le clivage juridique réside donc et avec l'émergence
des conflits verts, il ne peut que croître.
790 AGNU, Résolution 61/295 du 13 septembre 2007, relatif à la déclaration sur le droits des peuples
autochtones
791 Source http:// www.un.org, consulté le 4 avril 2014
792 PRIEUR Michel, La non-régression, condition du développement durable, CAIRN, n°3, 2013
294
2. Une saturation juridique des modes de gestion des ressources naturelles
« La baleine blanche disparaît, l'homme s'en fout ! L'ours blanc disparaît, l'homme s'en
fout ! L'homme disparaît, l'homme s'en fout793 ! »
Le principe de transversalité passe aussi par une gestion cohérente des ressources
naturelles. Cette cohérence repose ainsi par une position commune des États. Car la
pratique juridique démontre que cette cohérence environnementale n'est pas toujours
effective.
L'exemple européen illustre ces clivages : d'un côté, la Commission européenne794
n'aborde que l'économie verte et le cadre institutionnel du développement durable. Et de
l'autre, une position plus tranchée du Parlement européen par l'adoption d'une
résolution795 portant sur l'élaboration d'une position commune de l'Union dans la
perspective de la conférence des Nations Unies sur le développement durable (Rio+20).
Pour Philippe Billet796, « cette position prémonitoire anticipait la régression que l'on a
pu enregistrer à l'occasion de la seconde intersession préparatoire à la Conférence des
Nations Unies sur le développement durable qui s'est tenue à New-York les 15 et 16
décembre 2011 (www.uncsd2012.org). Au-delà de la « vitrine officielle », il en ressort
une tendance pour le moins régressive : absence d'engagements juridiques, volonté de
certains États d'éviter que le prochain sommet conduise à un quelconque résultat et
orientation en faveur du green-washing, avec la connotation négative que l'on en
connaît, sous le prétexte de verdissement de l'économie. Il est peu probable qu'il soit
possible de redresser la barre à quelques mois d'un sommet aux ambitions qui
apparaissent mesurées, pour ne pas dire limitées, sauf à compter sur une forte
mobilisation des ONG et des représentants des populations intéressées797».
Or, ne pas prendre en compte les données scientifiques actuelles revient à prendre un
risque incalculable des possibilités mais aussi des improbabilités futures. Le paradigme
actuel repose sur le fait que d'un côté, le droit international de l'environnement donne
une position dominante au droit de l'environnement, en l'érigeant, selon Michel Prieur,
comme un nouveau droit de l'Homme ; et de l'autre, une incompréhension volontariste
demeure, axée sur la gestion optimale des ressources naturelles mondiales.
Cette optimisation accrue de l'exploitation et l'exploration des ressources naturelles peut
mettre en danger la position internationale du droit de l'environnement, en faisant
reculer les avancées de ces quarante dernières années.
295
demande simplement que «le principe de non-régression soit reconnu dans le contexte
de la protection de l'environnement et des droits fondamentaux ».
296
§2 Une insuffisance liée à une transversalité opaque
Les modes de gouvernances locales restent en effet inadaptés et les modes insuffisants.
297
A . Les modes de gestions locales inadaptés
Ces instruments, matérialisés à travers le mécanismes des impôts indirects tels les taxes,
n'ont pas pour autant intégré systématiquement les problématiques économiques liés
aux émissions d'activités polluantes, dans le sens inverse.
Mais très peu d'instruments économiques récompensent les états non pollueurs. De plus,
les états émergents, pollués par les pratiques industrielles étrangères, n'ont pas toujours
les moyens humains et juridiques de mettre en exergue leur droit à vivre dans un
environnement sain et à sanctionner ainsi les acteurs extérieurs pollueurs.
298
environnementale juridique marquée par un blocage institutionnel ne permet pas
toujours de promouvoir des politiques de développement local, cohérentes et réellement
adaptées aux territoires.
Pour Michel Prieur, «le droit de l’environnement serait alors confronté à deux grandes
évolutions: son internationalisation et sa constitutionnalisation 800 ». L'auteur indique la
complexité juridique qui en découle pour élaborer des politiques de développement
local adaptées. Ces contradictions concernent l'applicabilité de conventions
internationales dans les politiques locales et les difficultés juridictionnelles. Ces
contradictions peuvent alors conduire à réformer le droit interne. A ce titre, l'auteur cite
le protocole de Madrid du 21 janvier 2008, relatif à la gestion intégrée des zones
côtières, en invoquant la modification des droits internes des états membres pour
introduire la notion de gestion intégrée des zones côtières, au sens des dispositions du
chapitre 17 de l’agenda 21 de Rio.
Cette influence est alors indirecte ou diffuse. Il indique également que cette diffusion
pourrait se réaliser à travers des textes juridiquement non obligatoires, appliqués
spontanément et par anticipation, ou encore par le biais de certains conférences
internationales. « En droit communautaire de l’environnement , c’est même une
obligation résultant de la jurisprudence de la CJCE en ce qui concerne les directives
non encore transposées 802».
800 PRIEUR Michel, Rapport général sur l’influence des conventions internationales sur le droit interne
de l’environnement, 2012, AHJUCAF, 403 pages, pages 269 à 281, page 270
801 Cf note n°800 pages 269 à 281, page 272
802 Cf note n°800 pages 269 à 281, page 273
803 Convention de New York du 21 mai 1997 sur le droit relatif à l’utilisation des cours d’eau
internationaux à des fins autres que la navigation
804 Convention du Conseil de l’Europe, ST n°172, 4 novembre 1998, portant sur la protection de
l’environnement par le droit pénal
299
supériorité des traités sur les lois..........l’effet direct ne concerne pas la question de
savoir si les particuliers ont des droits, il ne concerne que la clarté et la précision de
l’obligation juridique énoncée, que celle-ci soit à la charge de l’ État ou affecte ou non
les particuliers.... ». Il énonce alors une contradiction805 portant sur le principe
d'irrecevabilité, au vu des dispositions de la CIJ qui a reconnu la naissance de droits
rattachés à un traité international, au profit des particuliers806. Ces contradictions
peuvent conduire à la mise en œuvre de la responsabilité interne 807 et internationale de
l'état, mais aussi celle du juge808 ou encore du législateur809. L'interprétation
juridictionnelle est reconnue810.
Le débat juridique, entamé depuis plus trente ans, a évolué mais la codification
internationale s'édulcore à peine des notions autochtones, issues du droit naturel.
Faire des ressources naturelles des « res communes extra commercium» reste donc une
vision autochtone, qui devient très contemporaine. Car au delà de cette vision, repose
l'intérêt de conjuguer développement économique et sécurité environnementale
mondiale.
805 Tribunal correctionnel Paris, 16 janvier 2008, Erika; Cour constitutionnelle de Colombie, décision du
23 janvier 2008 portant sur la déclaration d’inconstitutionnalité de la loi sur les forêts
806 CPJI, affaire Dantzig, 1928
807 Conseil d'Etat, Ass. 8 février 2007, Gardedieu, Rec. T. p. 746
808 CJCE 19 novembre 1991, aff. C-6/90 et C-9/90 Francovich
809 CJCE, 5 mars 1996, aff. C-46/93 et C-48/93 Brasserie du pêcheur et Factortame
810 CJCE, 30 septembre 2003, aff C-224/01 Kobler ; CE, 29 juin 1990, GISTI, rec. p. 171 ; Cour de
cass. 1° civ, 19 décembre 1995, banque africaine de développement, Bull. crim, 2004, n° 37
811 Principe 4 de la Déclaration de Rio de Janeiro du 13 juin 1992, cf note n°13
300
2. Un caractère inadapté des usages des ressources naturelles locales
Mais cette absence juridique ne permet pas pour autant de limiter totalement un droit
abusif d'usage des ressources naturelles mondiales. Elle le réduit. Si la réglementation
internationale en faveur de la protection des espèces menacées, des espaces
remarquables atrophiés, reste très riche, force est de constater que le droit international
de l'environnement propose peu une véritable approche visionnaire des ressources
naturelles mondiales.
Il s'édulcore en effet d'une réaffirmation de la souveraineté nationale des États sur leurs
ressources nationales, mais ne pose pas sur le plan institutionnel la problématique
juridique liée au droit d'usage intensif de ces dernières. Et l'émergence de nouveaux
droits opposables a généré une incertitude juridique, quant au coût financier qu'ils
engendreraient, pour l’État ou la société civile, mais surtout à l'absence de devoirs et
d'obligations qui en incomberaient.
Or, créer de nouveaux droits, sans les assortir de devoirs, ne crée pas une responsabilité
juridique citoyenne et sociétale réelle. La nécessité de requalifier la notion juridique
d'usage est posée et celle de qualifier juridiquement les notions d'abus d'usage
environnemental peut compléter la première.
Les exemples actuels français relatifs au droit opposable à l'énergie avec depuis les 1er
janvier 2013 et 2014, l'instauration d'un tarif solidaire du gaz et de l’électricité
démontrent qu'on tend à confondre ou à amalgamer droits fondamentaux, droits
environnementaux opposables et assistanat social.
Les exemples liés aux usages intensifs de l'eau, des ressources naturelles génétiques
comme des ressources naturelles fossiles, sur tous les territoires, posent également les
problématiques d'usage « raisonnable » et d'atteinte à l'identité géo-morphologique
comme génétique territoriale.
Ainsi, ce caractère inadapté des usages des ressources naturelles risque fort d'être, dans
les années à venir, vecteur d'insécurité juridique majeure, dans les États émergents, eux-
même fragilisés par la structure institutionnelle et sociale interne. Cette prise de risque
juridique à effet de cascade, peut être atténuée en allant vers un volontarisme juridique
global, à travers la coopération internationale, la diffusion transversale de l'information,
et un parallélisme international, quant aux droits et devoirs de chaque État. Ce
volontarisme déjà exprimé, au travers notamment de conventions internationales 812
reste pourtant insuffisant dans la pratique juridique.
812 Article 2 de la Convention de Bled du 16 octobre 1998 sur la protection des Alpes, entrée en vigueur
le 20 septembre 2002
301
B. Les modes de gestions locales insuffisants
L'auteur indique qu'il ne serait « pas possible de garantir les droits humains et le
développement économique, lorsqu'un environnement dégradé menace l'eau potable, la
santé, l'alimentation et le logement et donc la vie proprement dite ».
Elle précise ainsi une insuffisance juridique liée aux modes de gestion utilisés et aux
acteurs territoriaux.
Car ce n'est pas tant les règles environnementales qui sont complexes, mais bien
l'interprétation qu'on en fait. Entre les jeux de pouvoirs inter-Etats, les positions
302
dominantes des grands groupes, l'absence de formation professionnelle des personnels
locaux et la pauvreté présente dans les états émergents, l'ensemble de ce mélange
d'axiomes juridiques, économiques et sociaux, concourt directement à l'impossibilité de
tendre vers une approche commune mondiale de gestion des ressources naturelles.
L'auteur indique ainsi que l'absence d'un cadre normatif adapté ne permet pas une
gouvernance environnementale cohérente et ainsi une approche juridique de la gestion
des ressources naturelles mondiales, adaptée aux évolutions géopolitiques et juridiques.
L'approche de la protection environnementale mondiale doit être au centre des cadres
juridiques contemporains. Il est même « un aspect vital des lois et doctrines régissant
les droits humains contemporains ». Or, la plupart des constitutions actuelles
mondiales, incluent le droit à un environnement équilibré, tout en ne définissant pas
clairement ce dernier. Il en est de même de l'ensemble des conventions et des traités
internationaux relatifs aux droits de l'Homme, qui énoncent cette même notion.
Sept ans avant l'incident de Fukushima, le Japon propose donc la voie du «milieu», au
sens d'une gestion moderne, raisonnée de l'environnement.
Bakari Kante817, quant à lui, indique que le PNUE concourt à fusionner les diverses
visions juridiques mondiales, par le biais de ses programmes divers. Il précise que les
pauvres et riches ont au moins « un destin commun ...ils vivent sur la même planète et
303
leur survie dépend des mêmes ressources naturelles818... »mais ils vivraient dans deux
mondes différents. L'auteur se félicite de la présence des magistrats internationaux lors
du sommet de Johannesburg819 et l'importance accordée à la primauté du droit
international de l'environnement.
Or, le constat dix ans plus tard, reste mitigé car cette alliance mondiale tant souhaitée,
est insuffisante et manque de réactivité. Et cette insuffisance est aussi liée aux acteurs
territoriaux.
818 KANTE Bakary, Une seule planète des mondes différents, 32 pages, page 22, 8 septembre 2008,
http://www.ourplanet.com
819 Conférence de Johannesbourg, Sommet de la Terre, 4 septembre 2002,
820 CA-PNUE, Résolution 22/17IIA, portant sur le suivi du colloque mondial des juges
304
2. Une insuffisance juridique liée aux acteurs territoriaux
La première problématique est liée au détachement des acteurs territoriaux envers leur
fonction. En effet, l'absence de synergie entre les divers agents territoriaux et les
institutions locales, peut être vecteur de blocage, ne permettant pas une gouvernance
environnementale efficiente. Il n'y a pas de véritable bio-collectivité, au sens d'une
administration transversale où chacun concourait à l'intérêt général.
Atitre d'exemple, si l'on prend la gestion des ressources naturelles eau, le cas français
illustre cette situation: les dispositions légales depuis 2009822cite les collectivités locales
comme «des acteurs essentiels de l’environnement et du développement durable» ayant
des rôles «complémentaires, tant stratégiques qu’opérationnels». Mais paradoxalement,
la gestion de l'eau passe par une gestion déléguée à des grands groupes. Le prix de l'eau
au m3 a presque triplé en dix ans823.
821 Cas de la France, avec les lois n° 2000-1208 portant sur la Solidarité et le Renouvellement Urbain
(SRU) du 13 décembre 2000, JORF du 14 décembre 2000 ; loi n°2005-157 du 23 février 2005 portant
sur le Développement du Territoire Rural (DTR), JORF du 24 février 2005 ; réaffirmé par loi n° 2010-
788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, JORF du 13 juillet 2010 ;
loi n°2010-1563 du 16 décembre 2010 portant sur la réforme territoriale, JORF du 17 décembre 2010
822 Article 5, loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle
de l'environnement, JORF du 4 août 2009
823 MADOUI Laurence, Des factures d'eau confuses et injustes selon l'institut national de la
consommation, La Gazette des Communes, 21 mars 2012
305
Aussi, la dernière problématique reste judiciaire, car selon Christopher Weeramantry824,
« la justice manque parfois de vision825 ». Il énonce que « la sagesse africaine
traditionnelle nous apprend que la communauté humaine se compose de trois
groupes:ceux qui ont vécu avant nous, ceux qui vivent actuellement, et ceux qui
naîtront un jour ; Pourtant lorsqu'il est question d'environnement, nous avons tendance
à porter des œillères. Nous ne tenons pas compte des traditions qui nous viennent du
passé . Nous ne pensons pas à ceux qui se trouveront lésés dans l'avenir. Nous nous
concentrons sur le présent. Le droit moderne manque de vision à long terme. Pourtant,
n'est-il pas le mieux placé pour prendre les mesures correctrices nécessaires ?».
L'auteur énonce alors que le pouvoir judiciaire mondial a « un rôle précieux à jouer en
intégrant la sagesse ancienne au discours juridique moderne ». En intégrant le principe
de tutelle, le contrat de mandat environnemental, l'Homme reprend en main sa destinée
et peut alors se comporter non comme propriétaire des lieux mais comme gardien de
l'environnement. L'auteur met en avant la réappropriation des contrats de mandat en
leur transposant sur le plan des générations futures. Il évoque ainsi les problématiques
juridiques liés aux actions éventuelles pour les générations futures et propose de
réfléchir à l'idée de représenter juridiquement les générations à venir, pour pouvoir faire
évoluer le principe de précaution au travers de ce concept.
Il dénonce alors la trop grande individualisation des droits privés, comme le droit de la
propriété privée, au détriment des droits collectifs et indique que la loi « ne sert pas
seulement à maintenir la paix, elle doit aussi favoriser une coopération active pour le
bénéfice de la communauté ».
Cette position juridique conduit ainsi à ce l'auteur, magistrat en fonction, dénomme une
« vision à court terme ».
Il conclut à une évolution du droit international de l'environnement basé sur une
coopération et non une simple coexistence juridique internationale : « ..les juges
doivent être sensibilisés aux problèmes et conscients de leur responsabilité et ils
doivent disposer des outils conceptuels et procéduraux leur permettant d'accomplir
leur énorme tâche».
306
Cette deuxième réflexion a permis de réfléchir les limites actuelles de l'approche intra-
générationnelle des ressources naturelles mondiales et les modes de gouvernance qui s'y
rattachent.
307
Ce second titre a permis d'aborder les problématiques liées à la vision traditionnelle de
la gestion des ressources naturelles, par le droit international de l'environnement.
Ces problématiques juridiques qui en découlent sont la conséquence de blocages
institutionnels et de comportements économiques à risque.
308
309
310
PARTIE II
UNE APPROCHE JURIDIQUE INTER-GENERATIONNELLE
NOUVELLEMENT ORIENTEE VERS UNE GESTION
RAISONNEE ET TRANSVERSALE DES RESSOURCES
NATURELLES MONDIALES
311
312
La coopération internationale en matière environnementale n'est pas nouvelle mais le
glissement d'une gestion classique des ressources vers une gestion transversale et inter-
générationnelle reste progressif. Comme précédemment évoqué, le droit international
de l'environnement n'a retenu que le caractère utilitaire des ressources, au sens
économique et non juridique.
Le renforcement des dispositions relatives aux espèces en danger s'est fait au départ sur
le plan régional, voir local, et s'est posé sur des données scientifiques. L'accent fut mis
sur l'idée que l'on devait passer d’une logique économique de gestion des ressources
naturelles, à une logique bio-systémique, basée sur la protection de la Biodiversité,
c’est-à-dire de la prise en compte de la diversité des écosystèmes et ces cycles. Cette
nouvelle approche remet en cause les modes de gestion des ressources naturelles
mondiales, en appuyant sur l'intérêt transversal.
Une nouvelle vision fut avancée dix ans après la Conférence de Stockholm de 1972. La
Charte Mondiale de la Nature826 fut adoptée dans cette configuration. Préfigurant la
Déclaration de Rio, ce nouvel instrument juridique, composé de vingt quatre articles,
énonçait pour la première fois les principes d'un respect de la Nature et des
écosystèmes827, ceux visant à assurer l’intégration de la conservation de la Nature dans
le développement socio-économique828 et proposait une transposition nationale de
l'ensemble de ces principes par les États co-signataires. Non opposable, la Charte
Mondiale de la Nature a influencé néanmoins la rédaction des conventions ultérieures.
Des conventions internationales de seconde génération ont tenté de traiter les problèmes
environnementaux dans une approche globale et non sectorielle à savoir dans une
perspective universelle et multi-sectorielle. La Conférence de Rio829 s'en inspira dix ans
plus tard par la signature d'une Déclaration sur l’Environnement et le
Développement830.
L'adoption d'un programme d’action dénommé «Agenda 21», comprenant plus de deux
mille cinq cent recommandations, dont la plupart n'ont d'ailleurs jamais mises en œuvre,
l'élaboration d'une Déclaration sur la gestion, la conservation et le développement
durable des forêts, de même que les trois conventions 831, ont suivi. Transposé en droit
interne, l' Agenda 21 est devenu alors un instrument de politique territoriale, multi-
dimensionnel en prenant en compte l'impact socio-économique de l'environnement.
313
internationale, a alors permis d'infléchir vers une protection juridique transversale
touchant ainsi d'autres secteurs.
Tendre vers une nouvelle forme de gouvernance nécessite de s'appuyer sur une autre
approche juridique de la gestion des ressources naturelles mondiales. Un autre regard
juridique est donc nécessaire pour la préservation et l'utilisation durable des ressources
naturelles mondiales.
314
TITRE I
L'APPROCHE NOUVELLE A UN AUTRE RATTACHEMENT
DES RESSOURCES NATURELLES
315
316
Depuis la fin de la bipolarisation, l'ordre mondial reste soumis à des turbulences et du
désordre. Les relations internationales se sont redessinées et mettent en avant le
dialogue et la concertation. La problématique actuelle s'appuie donc, selon Carlos
Milani833, sur le fait qu'il serait possible de refonder un nouvel ordre mondial à partir de
la prise en compte de la problématique de l'environnement, en englobant les éléments
dits « abiotiques » à savoir l'eau, l'air et les sols et les éléments dits « biotiques » à
savoir les espèces végétales et animales à l'ensemble des écosystèmes et des cycles
naturels.
Un autre regard juridique est donc nécessaire pour la préservation et l'utilisation durable
des ressources naturelles mondiales. C'est au travers de ce dernier, que repose
l'approche inter-générationnelle, et le mode de gestion approprié.
La nouveauté réside ainsi dans le fait que l'on observe que le mode de gestion optimale
au sens d'intensive des ressources naturelles a généré en quelques décennies, des
inégalités économiques et politiques, socle d'une insécurité juridique future.
Ainsi, ce principe «constitue l’un des fondements de l’État de droit», garanti par la loi,
normative, intelligible et prévisible. Normative parce que « la loi non normative
affaiblit la loi nécessaire en créant un doute sur l’effet réel de ses dispositions».
Intelligible parce que «l’intelligibilité implique la lisibilité autant que la clarté et
la précision des énoncés ainsi que leur cohérence». Prévisible parce que «le principe
de sécurité juridique suppose que le droit soit prévisible et que les situations juridiques
restent relativement stables».
Or la mutabilité économique n'est pas allée dans le même sens que la mutabilité
juridique et force est de constater que le développement économique des états
occidentaux s'est inspiré depuis plus de quarante ans de la théorie de l'équilibre des
états.
Pour Bernard Guerrien838, «l'intérêt principal des équilibres –du moins pour le
833 MILANI Carlos, Démocratie et gouvernance mondiale: quelles résolutions pour le XXIe siècle,
éditions Unesco-karthala, 2003, 304 pages, pages 30 et suivantes
834Conseil d'Etat, Sécurité juridique et complexité du droit, la Documentation française, 2006
835CJCE, Bosch, 6 février 1962, 13/61, Rec. 89; CEDH, Marckx contre Belgique, 13 juin 1979, §58,
série A, n°31
836Cons.constit, Déc n° 99-421 DC du 16 décembre 1999
837CE, Ass., Société KPMG et autres, n°288460, 24 mars 2006, GAJA, 19e édition, n°111, page 875
838 Maître de conférence, Université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
317
théoricien– tient à leur caractère permanent, non fugace. Mais cela ne suffit pas à
justifier l'importance qu'il leur accorde. S'il veut être conséquent, le théoricien doit
montrer que les équilibres de ses modèles en sont des «attracteurs» – l'aboutissement
d'un processus, quel qu'en soit le point de départ. Si tel est le cas, il peut alors dire que,
comme le système atteindra forcément un de ses équilibres au bout d'un certain temps,
il est normal de s'intéresser à eux tout particulièrement839».
L'auteur indique alors que l'équilibre d'un système économique devient la base de la
stabilité du processus. Il définit cette notion d'équilibre à partir de l'origine des offres et
des demandes : « Celles-ci proviennent d'individus ou d'entités telles que les ménages,
les entreprises, les administrations, etc., unités de décision de base de l'économie.
Comment celles-ci feront-elles leurs choix – qui se traduiront par des offres et des
demandes ? Une hypothèse essentielle en théorie économique est de considérer que,
entre plusieurs possibilités, celle qui permet d'obtenir la plus grande satisfaction, ou le
plus haut revenu, ou celle qui coûte le moins cher, sera préférée aux autres, toutes
choses égales par ailleurs – c'est ce qu'on appelle parfois l'hypothèse de rationalité».
839 GUERRIEN Bernard, La théorie de l'équilibre, Universalis, 18 novembre 2012, voir le site
http://www.universalis.fr/encyclopedie/equilibre-economique/10-l-equilibre-de-nash/, consulté le 25
mars 2015
840 Mathématicien américain, Prix Nobel de mathématique en 2008
318
juridique est mis en péril car la théorie de l'équilibre, en terme d'équilibre des milieux
endémiques, n'est pas respectée car la stratégie actuelle adoptée ne prend pas en compte
les choix futurs découlant des choix présents et que l'équilibre n'est plus alors une
combinaison de décisions individuelles où chaque personne anticipe les choix des
autres.
Or, comme précédemment énoncé, le principe de sécurité juridique reste un des
fondements de l’État de droit. Pour assurer une stabilité juridique mondiale sur le plan
environnemental, il convient de renforcer les fondements même des politiques
environnementales, en changeant de regard sur les modes de gestions
environnementales.
Ce changement de regard repose alors sur une autre prise en compte des milieux
endémiques, et plus généralement de la Biodiversité, comme élément factuel et non
conceptuel, intrinsèquement entrelacé aux modes de gouvernances locales. Car la
dégradation environnementale présente depuis plus de trente ans 841 est devenue symbole
de résistance verte, actif, filmé842, scénarisé843 auprès du grand public.
Cette stratégie mondiale, renforcée cinq ans plus tard, avec la Conférence de
Johannesburg847 adoptant les principes relatifs au rôle du droit et au développement
durable, met en exergue la primauté du droit et des pratiques démocratiques
environnementales. Minimisées dans leur rôle d'additif au protocole de Kyoto, les
conférences de Bali848et de Copenhague849 ont ensuite démontré les limites d'une
volonté commune de ne pas renforcer le cadre juridique international. Car l'accord de
Copenhague est resté juridiquement non contraignant et n'a pas prolongé le protocole de
Kyoto. Il n'était assorti d'aucune dates-butoirs ni d'objectifs quantitatifs. L'échec de la
841 CARSON Rachel, a silence Spring, the New Yorker, and New York times, 16 juin, 23 juin et 30 juin
1962, éditions Wildproject, collection domaine sauvage, 2011, 378 pages
842 ARTHUS BERTRAND Yann , Home, documentaire, juin 2011
843 CAMERON James, AVATAR, film, sortie mondiale le 3 septembre 2009
844 Protocole de Kyoto du 11 décembre 1997
845 Convention-cadre des Nations Unies sur les Changements climatiques adoptée en 1994
846 Annexe B du Protocole de Kyoto du 11 décembre 1997
847 Conférence de Johannesburg du 18 au 20 août 2002
848 Conférence de Bali du 3 au 14 décembre 2007
849 Conférence de Copenhague du 7 au 18 décembre 2009
319
Conférence de Copenhague a indiqué à la fois que les objectifs négociés n'ont jamais pu
dépasser les souhaits énoncés dans le protocole de Kyoto et que les États n'étaient pas
prêts pour un accord mondial contraignant.
Mais cet échec a conduit chaque état à réfléchir à ses propres objectifs de baisse
d'émission de gaz à effet de serre à compter de 2015.
Le dernier Sommet de Rio852 n'a certes pas permis d'établir une avancée en matière
environnementale mais malgré une déception perceptible, on s'accorde à dire qu'une
stratégie mondiale reposant sur une plus grande sécurité juridique environnementale,
reste nécessaire car essentielle à la sécurité juridique internationale, dans sa globalité.
Or, si « l’idéal n’est pas une chose qui se consomme mais qui s’entretient et se passe
comme un flambeau853 », l’environnement ne doit plus être perçu comme « une chose
qui se consomme » mais doit revêtir un caractère temporel, tel que reconnu en droit
canadien854.
Cet idéal doit aussi reposer sur la sagesse autochtone, relatif au caractère épuisable,
fragile et transgénérationnel des ressources naturelles mondiales.
Le tournant entamé au XXIème siècle marque ainsi le pas vers une nouvelle orientation
juridique et économique, orientée vers un nouveau chemin : celui d'une autre approche
juridique de la gestion mondiale des ressources naturelles, plus inter-générationelle.
Cette approche conduit alors à mieux anticiper et appréhender les risques
environnementaux par notamment la mise en avant d'une gestion raisonnée au sens
d'adaptée aux milieux endémiques, d'équilibrée et proportionnelle.
320
CHAPITRE I.
LE CARACTERE NOUVEAU DE RATTACHEMENT DES
RESSOURCES NATURELLES
321
322
L'approche inter-générationelle des ressources naturelles mondiales repose sur la
jonction d'éléments scientifiques et juridiques, mais aussi sur une plus grande
considération du droit coutumier. En ce sens, elle répond aux exigences de l'article 10 c)
de la Convention sur la Diversité Biologique du 5 juin 1992. Or les données
scientifiques restent variables, d'un territoire à un autre et la disparité des ces données
pose problème. Et l'approche inter-générationnelle doit reposer sur un lien étroit entre
les acteurs civils, les collectivités et l'état. Or l'exclusion directe ou indirecte des
minorités ethniques, des acteurs associatifs et non institutionnel est explicite.
Le tournant ethnique amorcé au cours des années deux mille désigne quand même une
« première décennie des peuples autochtones864 » pour une première période de dix ans
323
allant de 1995-2005 et une « deuxième décennie des peuples autochtones865 » par
l'ONU, pour la période 2005-2015. La conférence de Durban866 a marqué le pas de cette
résistance ethnique. Réaffirmant la reconnaissance « du Vivant » comme entité
juridique et sociale pérenne, le droit coutumier autochtone permet de poser les bases
d'une autre forme de gouvernance, circulaire, basée sur la souveraineté du principe de
précaution et l'affirmation du principe de prévention. Cette dernière a alors en son
centre, l'aléa ressources naturelles et en périphérie les instruments de gestion au travers
des acteurs institutionnels et sociaux.
324
Section I. La quête juridique vers un nouveau mode de gestion
325
il dénonce alors la réglementation multilatérale lourde et les interactions juridiques
complexifiant le droit international de l'environnement. Il s'interroge alors sur la nature
réelle des valeurs actuelles de la société contemporaine, et ainsi sur la quête d'une
nouvelle approche juridique de la gestion des ressources naturelles.
Cette quête d'un nouveau mode de gestion doit alors s'orienter vers un nouveau rapport
de droit relatif aux ressources naturelles actuelles. Le juste milieu entre droit «de»
l'environnement et droit «à» l'environnement ne peut se trouver qu'en positionnant les
ressources naturelles mondiales au cœur d'un état de droit environnemental et
multidimensionnel.
Une avancée juridique vers une sécurité juridique environnementale nouvelle et une
identité juridique vers une solidarité environnementale novatrice sont au cœur de cette
quête.
326
§1 Une avancée juridique vers une sécurité environnementale nouvelle
Tous les États doivent alors consacrer le droit de l'environnement au plan supra
national, opposable autant vis à vis des individus que des pouvoirs publics eux-même.
Cela impose alors une nouvelle vision de la responsabilité des États mais aussi de la
société civile contemporaine.
327
A. La reconnaissance juridique du caractère fondamental des ressources naturelles
Se pose alors la question de savoir comment tendre vers une véritable gouvernance
mondiale de l'environnement873 . Pour converger vers ce qu'Alexandre-Charles Kiss
nommait « le droit commun de l'environnement874, » il faut dépasser le simple concept
de dommages environnemental transfrontalier et poser la questionnement sur le concept
de dommage environnemental global.
Il est alors opportun d'analyser si cette convergence passe par une rationalisation du
système international actuel, notamment par des regards juridiques croisés portant sur
les modes de gestion actuels, mais aussi par l'adoption du principe de développement
économique environnemental.
873 Conseil Economique Social et Environnemental, CESE, journée préparatoire du 30 janvier 2012 pour
la conférence mondiale de Rio +20, Paris
874 KISS Alexandre-Charles et BEURIER Jean-Pierre, Le droit international de l'environnement, 4e
édition, Pedone, 2010, page 99
328
1. Une nature juridique nouvelle reposant sur un processus itératif
Et c'est à travers ces divers modes de gouvernances actuels, que des regards croisés
peuvent alors se poser. Ces derniers répondent aux problématiques juridiques souvent
« territoriales ».
Les exemples en la matière ne manquent pas mais c'est celui qu'on peut retenir reste
celui consacré à la gestion des ressources en eau, où les modes de gouvernances
transfrontalières sont nés et sont à la base d'une sécurité juridique environnementale
cohérente. Les attentes locales ont intégré les modes de processus de gouvernance et
malgré la présence de corruption, une lutte pour le maintien des liens sociaux
économiques et des impératifs juridiques de protection des ressources naturelles se sont
organisés.
875 NADLOVU GATHSENI Sabelo Joan, Donner une voix à l’Afrique au sein de la gouvernance
globale: histoire orale, droits de l’homme et Conseil des droits de l’homme aux Nations-Unies, 2007,
30 pages, page 18
329
matière d'exploration des ressources fossiles, comme le pétrole ou le gaz de schiste.
330
sur le même pallier. Mais la démarche entreprise reste juridiquement fragile, notamment
sur le plan de la propriété intellectuelle des données, mais aussi sur celui de l'accès
sécurisé au partage des données, de leur interprétation et de leur utilisation. Une
insécurité juridique, portant notamment sur les responsabilités des utilisateurs et des
participants, reste préoccupante.
Enfin, les regards croisés se portent sur les modes de gouvernances environnementales
européennes, et force est de constater que le caractère fondamental des ressources
naturelles reste discret. L'Europe ne dispose pas d'une mais de plusieurs modes de
gouvernance environnementale. L'approche juridique de la gestion des ressources
naturelles sur le plan européen reste donc hétérogène. La politique européenne est
certes commune mais son applicabilité territoriale est différente, chaque État membre
de l'Union Européenne restant attaché à son histoire territoriale. Ces régionalismes
présents et perpétuels sont sources de conflit juridique, notamment dans le domaine de
la gestion des ressources naturelles en terre, ou dans les domaines agricoles. S'agissant
des modes de gouvernances portant sur les ressources naturelles en eau, une unification
européenne est établie, qu'il s'agisse des gouvernances transfrontalières ou inter-
étatiques. S'agissant des modes de gouvernances portant sur les ressources naturelles
fossiles, les débuts difficiles d'une gouvernance environnementale européenne sur les
ressources en charbon et en acier, stoppés au début des années quatre-vingt, tendent à
repartir à l'aube du débat européen sur la transition énergétique.
Avec son élargissement vers les portes de l'Orient par l'entrée éventuelle de la Turquie,
ou vers les extrêmes nord comme la Roumanie, l' Europe peut être perçue dans les
années à venir, non plus comme un simple continent, mais comme un territoire à
métropoles. Malgré des ressources naturelles métropolitaines pauvres, les modes de
gouvernances environnementales des États européens reposent sur la gestion des
ressources naturelles présentes dans les territoires d'Outremer. Ces derniers restent les
lieux de tensions environnementales, dans l'applicabilité dans l'espace et le temps des
gouvernances environnementales métropoles. Pour pallier à ces insécurités juridiques,
certaines réflexions ont porté sur la reconnaissance d'une approche juridique de la
gestion des ressources naturelles propre aux régions Outremer, disposant d'outils
juridiques adaptés à la gestion localisée des ressources naturelles locales. L'approche
inter-générationelle s'instaure naturellement à la demande des populations locales.
On peut citer à ce titre des exemples comme la mise en place future de contrats de
tutelle territoriale environnementale, ou encore, la reconnaissance territoriale de droits
collectifs et de coopération active outremer, ou une définition adaptée du contrat de
mandat local.
331
2. Une transposition juridique souhaitable du principe de bio-civilisation
Marie-Claude Smouts879 indique dés la fin des années quatre-vingt-dix, l’ambiguïté liée
à la gestion des ressources naturelles mondiales et au delà, celle de l'existence d'une
gouvernance mondiale environnementale. Elle énonce que «la gouvernance permet de
penser la gestion des affaires mondiales comme un processus d’interaction entre
acteurs hétérogènes, non comme une activité inter-étatique.... la régulation se fait par
le biais de la négociation, l’échange, et ne dépend pas de la capacité d’un acteur de
définir les règles du jeu880 ».
Elle précise que «Pourtant, et paradoxalement, une telle transposition comporte des
limites...la problématique de la gouvernance s’oppose à l’idée même de gouvernance
globale... ». Elle conclut en indiquant que la gouvernance « exclut par définition toute
idée d’organisation et contrôle centralisé ; elle est au contraire fondée sur la profusion
d’instances de décision. Ces limitations remettent en question l’utilité analytique du
concept. En dernière analyse, la réflexion sur la gouvernance relève du normatif – c’est
une réflexion normative sur la nécessité de construire un monde meilleur – et, en tant
que telle, traduit un choix intellectuel et idéologique. Ce choix repose sur des
considérations d’efficacité et de gestion, mais laisse de côté les phénomènes de
domination 881».
Elle rajoute alors que « la thématique du développement durable a fait admettre les
défaillances du marché et généré une opposition légitime à la domination des normes
libérales dans les organisations internationales. Elle a permis un certain renouveau
théorique pour penser l’action publique à l’échelle mondiale..».
Elle conclut en indiquant que «le retour des politiques publiques relève d’une
imbrication de plus en plus fine du public et du privé, et ce pour plusieurs raisons.
879 Directrice de recherche honoraire au Centre National de de la Recherche Scientifique, professeur à
l’Institut d’Études Politiques de Paris, membre de la délégation française à l’Assemblée générale des
Nations Unies
880 SMOUTS Marie-Claude, Du bon usage de la gouvernance en relations internationales, revue
Internationale des Sciences Sociales, Mars 1998, 2 pages , page 1
881 Cf note n° 882 page 2
882 Enseignant français en économie politique internationale à l’EHESS, IEP, ENA , université Paris X,
ancien consultant pour la Banque Mondiale, l’UE, l’UNESCO, l’OCDE, le MAE et le ministère de la
Coopération, directeur de la revue Économies et Sociétés et membre du comité de rédaction de
Mondes en développement.
883 COUSSY Jean, les politiques publiques dans la mondialisation libérale: un retour, Revue Economie
Politique, section juridique, janvier 2003, n°17
332
D’abord, la mondialisation se poursuit .... En outre, ces libéralisations sont peu
réversibles. On assiste ainsi à la mise en place d’un tissu complexe de relations entre
public et privé .... Les acteurs privés se voient investis du rôle d’exécuter les décisions
publiques censées remplir un objectif d’intérêt général. L’enchevêtrement public-privé
est aussi apparent dans la définition des biens publics mondiaux, qui peut développer
des marchés privés..».
Dix ans après ces réflexions, les difficultés d'adaptabilité des territoires outremer aux
prises de décisions métropoles ont permis de réfléchir à de nouveaux modes de contrats
de mandat territorial unique, basés sur le principe de développement économique
environnemental et de bio-civilisation. Des contrats de tutelle territorial unique ont pu
alors se mettre en place notamment dans la gestion transfrontalière des fleuves.
On voit ainsi ces nouveaux types de contrat dans les modes de gouvernances africains
et sud-américains. Mais une certaine insécurité juridique demeure car ces nouveaux
outils ne reconnaissent pas suffisamment l'Intérêt Général des populations locales et les
problèmes d''accessibilité des ressources naturelles. Le principe de développement
économique environnemental n'est pas institutionnel et reste marginalisé juridiquement
car il porterait atteinte aux intérêts économiques des multinationales. Pourtant, son
caractère transposable et opposable est à la base de la reconnaissance d'un droit d'accès
et de gestion de toutes les ressources naturelles, pour l'ensemble des minorités. Se pose
alors la délicate coalition entre l'Intérêt Général d'un territoire et les intérêts particuliers.
333
B. Le renforcement juridique des moyens de lutte contre la corruption
Or, les exemples de corruption en grand nombre, les circonstances économiques et les
changements environnementaux contemporains ont conduit à établir un climat propice à
la lutte contre la corruption.
334
1. Une sécurité juridique environnementale renforcée
Le climat propice à cet élan juridique reste toutefois inédit, et les institutions mondiales
ont pourvu à cet élan, aux côtés d'organismes commerciaux non élu, comme le Forum
mondial de l'Environnement. Ainsi, selon le rapport de la Banque Mondiale 889 relatif au
fonctionnement de la MIGA890, la corruption reste un facteur d'insécurité juridique au
sens où il met en danger le principe de durabilité environnementale, au sens de l'indice
référent891 crée lors du Forum mondial de Davos892. Des réserves juridiques sont
apparues. En effet, le champ d'application de la corruption ne se limite pas seulement
aux États fragiles, mais se retrouve aussi au sein des instances internationales. Par
884 OCDE, Convention du 27 juillet 1999 sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans
les transactions commerciales internationales, entrée en vigueur en 1999
885 Foreign Corrupt Practices Act, 95th United States Congress, december 19 1977
886 Afrique du Sud, Argentine, Brésil, Bulgarie, Colombie et Russie
887Convention des Nations-Unies contre la corruption, Mérida, Mexique, du 9 décembre 2003,
Résolution de l'Assemblée générale des Nations unies 58/4 du 31 octobre 2003, entrée en vigueur
depuis 2004 dans 170 pays
888 Convention de l'Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption, Maputo, du 11
juillet 2003
889 BM, rapport annuel du 2005, MIGA 14 pages, page 4
890 Multilateral Investment Garantee Agency
891 Indice de Durabilité Environnementale, IDE
892 35ème Forum Mondial Économique, FEM, du 26 au 30 janvier 2005, Davos, Suisse
335
ailleurs l'engagement de la Banque Mondiale, de l'OMC, du FMI et du FME restent très
critiquées893.
Car leur engagement juridique reste limité et controversé. Le FME, de par sa nature
élective, ne peut juridiquement pas entrer dans le champ d'application de la démocratie
environnementale, l'importance grandissante de cette instance mondiale correspondant à
la puissance économique mondiale des investisseurs et ne pourvoyant pas au principe
d'équité environnemental. Si la réalité économique actuelle dépasse l'ensemble des
préoccupations juridiques internationales, ces dernières doivent rester prioritaires pour
permettre d'atteindre une sécurité juridique internationale durable.
Or les visions politiques des acteurs institutionnels ne reposent pas sur les
préoccupations juridiques environnementales. L'approche inter-générationnelle de la
gestion des ressources naturelles mondiales et la gouvernance mondiale reposent donc
sur la prise en compte des spécificités territoriales Cette dernière peut permettre de
poser le caractère prioritaire du principe d'accessibilité aux ressources naturelles pour
les plus démunis à des fins d'éradication de la pauvreté.
893 LAPHAM Lewis, La montagne des vanités; Les secrets de Davos, traduit de l'anglais par Marie-José
Capelle, Éditions Maisonneuve & Larose, 2000, 120 pages ; LEMAITRE Frédéric, Forum
économique mondial : des élites en quête de sens, Le Monde, 22 janvier 2008
894 CNUDD du 17 juin 1994, entrée en vigueur le 25 décembre 1996
336
2. Une coopération internationale renforcée
D'autres troubles juridiques sont relatifs aux domaines des sanctions, en cas d'atteintes
environnementales, ou de vol environnemental. Le premier trouble concerne le champ
d'application du principe de la compensation environnementale pour atteinte à
l'environnement. Ce dernier reste ambivalent et doit au contraire se renforcer afin de ne
pas basculer vers un droit international de nuisance. Les exemples de pollution terrestre,
marine, aérienne démontrent qu'un renforcement dans ce domaine mettrait en exergue le
droit international de vivre dans un environnement sain.
Le second concerne les champs d'application des contrats relatifs aux prélèvements
d'espèces. Encadrés par la Convention sur la Diversité Biologique ne sont pas
véritablement sanctionnés les comportements « à risques » des investisseurs étrangers,
et des agents étrangers passifs, au sens de la non prise en compte de la fragilité des
milieux endémiques.
895 OCDE, recommandation du 26 novembre 2009, avec les amendements adoptées par le Conseil le 18
février 2010 afin de refléter l’inclusion de l’Annexe II, Guide de Bonnes Pratiques pour les Contrôles
Internes, la Déontologie et la Conformité, 14 pages,
896 DORMOY Daniel, La corruption et le droit international, colloque annuel du Réseau Francophone de
Droit International, Paris, OCDE, éditions Bruylant, 2010, 225 pages
897 Conférence internationale portant sur la sécurité et crimes contre l'environnement, Nimes, 9 et 10
novembre 2015, http://www.fits-forum/index.php/evenements/passes/securite-crime-environnemental
337
euros. Le trafic des espèces animales est ainsi trois plus lucratif que celui de la
drogue ».
338
§2 Une identité juridique vers une solidarité environnementale novatrice
La première vision, tiré du droit naturel, passe par la reconnaissance juridique d'une
triple préservation Homme, Nature et ressources naturelles. Il faut alors repenser les
modes de vie actuels énergivores de la société civile contemporaine dans son ensemble,
et cela reste un processus long et délicat.
La seconde vision, tiré d'un mélange de droit naturel et droit contemporain, s'oriente
d'avantage sur la mise en place en douceur d'une bio-civilisation et d'un bio-
developpement, en repensant le rôle et la position juridiques des États et leurs
collectivités, comme ceux de la société civile. Elle passe alors par la prise en compte
des nouveaux défis économiques et juridiques mondiaux face aux états émergents, et
par un nouveau rapport avec la Biodiversité. Cette seconde vision, qu'on pourrait
réaliser sur une durée moyenne de 15 ans, nécessite alors un réaménagement des
territoires au sens de territoires environnementaux.
339
A. L'émergence d'une notion juridique de territoire environnemental
Si la force de la loi et l'équité restent les piliers fondateurs des sociétés démocratiques
contemporaines, et que le prisme de la souveraineté étatique dans la gestion de ses
ressources naturelles est établi, l'émergence d'une notion de territoire environnemental
passe par de nouvelles dimensions.
Ces dimensions seraient multiples et reposent sur la suprématie du droit. Une autre
définition en droit international et en droit interne sont posées. La problématique
actuelle réside donc dans la simple prise en compte actuelle des dommages
transfrontaliers, au détriment d'une approche globale, transversale des données.
Au delà des principes déjà formulés par la Déclaration de Stockholm, comme les
principes 21, 22 portant sur le pouvoir souverain des États dans la gestion de leurs
ressources naturelles nationales en adéquation avec le respect des États voisins, une
autre définition en droit international comme en droit interne sont nécessaires car la
crise de légitimité mondiale qui touche les pouvoirs a remis en cause les modes de
gouvernances choisis.
898 US suprême court, sentence arbitrale, 11 mars 1941, Fonderie du Trail, États-Unis contre Canada,
R.S.A., tome III, pages 1907 et suivantes
340
1. Une autre définition en droit international
Cette remise en cause passe donc par une réorganisation juridique, politique et sociale
des sociétés démocratiques actuelles. Or l'approche inter-générationnelle de la gestion
des ressources naturelles mondiales et le mode de gouvernance environnemental qui s'y
rattache doivent reposer sur des fondements institutionnels globaux différents. Cela
nécessite aussi un regard nouveau sur les institutions mondiales actuelles, notamment
l'ONU.
Or se pose une triptyque. Soit l'on considère que l'ONU reste une institution unique et
il suffit juste d'améliorer la gouvernance existante sans remettre en cause les principes
fondateurs de l'organisation internationale. Soit l'on perçoit l'ONU comme une
institution incapable de pouvoir répondre aux défis actuels et une réforme reste inutile.
Soit on considère enfin que l'ONU reste certes impuissante mais peut devenir l'épicentre
de nouvelles instances de pouvoir. Dans cette option, la régulation proposée repose sur
un équilibre entre les décisions des acteurs géopolitiques comme le G8, le G20, l'OCDE
ou en encore le BRIC, et celles argumentées par la société civile.
Mais cette nouvelle architecture repose sur la reconnaissance de droits et devoirs pour
des états émergents comme la Chine et l'Inde, et sur un contrôle plus effectif des
organisations transnationales. Cette régulation passe nécessairement par un droit
international plus contraignant.
Cette nouvelle architecture passe aussi par une redéfinition juridique de l’État,
institution démocratique du pouvoir par excellence. Et cette dernière repose sur une
vision environnementale des territoires. Or si la qualification juridique des territoires
reste inchangée, l'évolution contemporaine de leur frontière peut remettre cette dernière
en question. En effet, peut-on parler de territoire environnemental mondial, continental
ou régional, urbain ou rural, ou même local comme par arrondissement ?
La réponse consiste alors à pouvoir articuler les diverses échelles de gouvernances. Les
fondations de cette approche inter-générationnelle de la gestion des ressources
naturelles mondiales et du mode de gouvernance environnemental qui s'y rattache, sont
donc territoriales et locales, permettant de poser au plus prés des citoyens des modes de
gouvernance environnementale adaptés aux besoins locaux.
L'architecture de ces dernières est alors transversale, édifiée dans un esprit critique,
libre et éclairé, privilégiant les mécanismes du bas vers le haut, et prenant en compte
avec nuance, les données fournies par les organismes régionaux internationaux, comme
le Mercosur, l'ASEAN, l'UE, l'UA, l'UNASUR....
Elle repose sur une vision solidaire, citoyenne et communautaire mondiale. Mais
également sur la reconnaissance des nouveaux modes interactifs et plus largement aux
modes de participation mondiale.
341
2. Une autre définition en droit interne
Les domaines juridiques sollicités pour permettre l'émergence d'une approche juridique
inter-générationnelle des ressources naturelles mondiales et une gouvernance
environnementale adaptée, reposent sur deux critères qui sont une magistrature
internationale environnementale et une justice environnementale internationale
omniprésente.
Aussi, selon lui, la prise de conscience ne pourrait se faire qu'au travers d'instances
indépendantes, promouvant la formation judiciaire environnementale et mettant en
avant toutes formes de règlements des différents. A l'origine de la création de l'Union
des Nations-Unies des juges arabes en 2004, Mamhoud Marie a contribué à placer cette
instance sous l'égide des Nations-Unies pour développer « une prise de conscience
environnementale » permettant l'efficience d'un droit international de l'environnement
fort, dans les pays arabes et plus largement dans tout l'occident. Il a aussi favorisé un
plus grand partenariat entre les juges et les parties sur l'échange des données.
899 PNUE, magazine pour l'environnement, L'état de droit et les objectifs pour le nouveau millénaire,
volume 15 n°3, page 10
900 Conseil de l’Union Européenne, résolution 2008/C22/01 sur la formation des juges, procureurs et
personnels de justice dans l’Union Européenne du 24 octobre 2008
901 Recommandations de la première et de la deuxième conférence de Doha sur la qualité de la justice,
des 12 et 13 octobre 2004 et des 27 et 28 avril 2008
902 Source www.enm-justice.fr , visité le 4 juin 2014
342
procureurs, et par conséquent du bon fonctionnement de la justice....que les normes et
principes internationaux en matière de formation judiciaire doivent guider la
nécessaire coopération entre les systèmes judiciaires des pays arabes et
européens...que le bon fonctionnement d’un espace judiciaire euro-arabe implique une
bonne compréhension par les juges et procureurs des systèmes juridiques et judiciaires
des États de l’Union européenne et de la Ligue arabe et des instruments nationaux et
internationaux de la coopération, ainsi qu’une confiance réciproque entre les acteurs
judiciaires; que la formation des magistrats est un moyen essentiel pour favoriser cette
compréhension, laquelle doit couvrir tous les champs d’application de la loi, qu’ils
relèvent du droit civil, du droit pénal ou de tout autre domaine juridique... »
La justice internationale se veut donc présente dans un monde globalisé. Pour autant, la
formation judiciaire environnementale reste marginalisée sur le plan international.
L'émergence d'une justice environnementale internationale forte émerge doucement,
notamment au travers de la jurisprudence internationale en la matière, mais également
grâce au développement de nouveaux outils extra-judiciaires et judiciaires. Des modes
de règlements alternatifs des différents (MARD), répandus en droit anglo-saxon restent
sur le plan environnemental, encore peu répandus.
343
la justice et autres (ENG, ENAP, Avocats, Huissiers et Notaires) répond à une meilleure
transparence financière. Aux côtés du GIP, a été lancé également le programme
« Justice sans frontières » en 2009, permettant à tout magistrat français de réaliser un
stage dans des pays extérieurs à l’Union européenne et de participer à l'évolution du
pouvoir judiciaire international. En 2012, 33 magistrats en auraient fait l'expérience.
344
B. La recherche d'une nouvelle position juridique des acteurs environnementaux
Les problématiques actuelles sont liées à l'absence de planification des projets adaptés
aux variantes environnementales. Il existe une vision internationale des acteurs
territoriaux mais la pluralité et l'opacité des acteurs et leur champ d'action restent
l'épicentre des dysfonctionnements actuels.
Elle repose aussi sur une analyse limitée des données environnementales locales, toutes
basées sur de l'ingénierie traditionnelle n'anticipant pas les changements climatiques. Et
un grand nombre de projets d'ingénierie sur le plan international repose sur des calculs
basés sur des données centenaires, ne prenant pas forcément en compte les nouveaux
changements climatiques.
Une coopération doit être renforcée dans ce domaine pour permettre l'établissement et
la reconnaissance d'une véritable gestion anticipative des risques. Car le principe de
précaution, découlant du principe 15 de la Déclaration de Stokholm ne doit pas être
utilisé pour geler des avancées indispensables au bon fonctionnement du
développement des États par le biais de la gestion des ressources naturelles mais au
contraire pour l'encourager au profit d'une meilleure sécurité juridique.
Ce décalage technique devient alors juridique car la gestion anticipative des risques
reste minimisée et ne repose pas sur des données supposées réelles du territoire mais sur
des données établies centenaires.
345
1. Une position juridique adaptée au principe de solidarité environnementale
Quand Mireille Delmas Marty énonce que nous ne serions « ni dans l’ère de l'impunité
ni dans celle de la responsabilité, mais dans une période de transition où s'affrontent
deux conceptions de la légitimité, comme deux modèles incompatibles d'ordre
mondial905 », elle oppose deux modèles, d'une part un modèle basé sur la souveraineté
nationale traditionnelle et d'autre part, un modèle basé sur la reconnaissance de droits
universels privilégiant la suprématie du droit et de la justice à la politique.
La difficulté réside alors de se rendre compte que les deux modèles aussi porteurs
soient-ils, sont vecteurs d'insécurité juridique car chacun détient une approche des
ressources naturelles impossible pour établir une sécurité juridique suffisamment
pérenne.
La crise internationale des pouvoirs a incité les États à se repositionner pour dépasser
les clivages inter-étatique et concevoir une approche inter-générationnelle de la gestion
des ressources naturelles mondiales, axée sur une vision juridique communautaire,
solidaire et harmonisée des modes de gestion environnementale. Ce principe juridique
de solidarité environnementale, reposant sur la coopération juridique réelle et effective
des états, permettrait peut-être de tendre vers une sécurité juridique environnementale
globale, universelle.
Or, l'auteur dépeint les limites et les blocages de modes de gouvernance mondiale qui
existent déjà en matière de droit pénal international. Elle cite les difficultés rencontrées
par la Cour Pénale Internationale pour faire exécuter ses mandants d'arrêt. Elle cite à ce
titre, l'impossible application du mandat d'arrêt international lancé contre le président
Al-Bashir, pourtant réélu au Soudan.
Ce mandat est le premier du genre contre un chef d’État en exercice. Il n'a pas pu
s'appliquer car l'avis favorable de l'OTAN s'est retrouvé bloqué face au refus de la
Ligue Arabe et de l'Union Africaine. Ses dernières visites en pays arabes comme en
Chine ont d'ailleurs démontré cette incapacité906.
Le temps de concevoir d'autres visions juridiques est venu. Ces dernières nécessitent
d'abord de visualiser les peuples sous l'angle de l'égalité. Définir des peuples civilisés et
barbares appartient à une autre ère. La modification des articles 38 de la CPI et 7 de la
CEDH s'impose. L'auteur parle non de communauté «internationale» mais de
communauté «inter-humaine mondiale». Cette dernière repose sur un nouveau type de
gouvernance, hybride des états de droit qu'elle dénomme «état de droit mondial».
D'autre part, cet état de droit nouveau repose sur une diversité culturelle juridique
internationale en mettant en exergue les droits fondamentaux nécessaires à la raison
d'état, et les interdits fondamentaux. Ce sont ces derniers qui restent délicats à définir
car la souffrance reste un concept universel et il convient de se demander si l'on tend
vers ce qu'elle définit de droit commun, universel « inhumain » visant tous les
infractions mettant les hommes en danger et si cela doit passer par une qualification des
905 DELMAS-MARTY Mireille, Vers une communauté de valeurs, éditions Seuil 2011, collection la
couleur des idées, page 7
906 REUTERS, L'EXPRESS, deuxième mandat d'arrêt de la CPI contre Al-Béchir pour génocide, 12
juillet 2010
346
actes inhumains et la limite de leur légitimité.
347
2. Une position juridique liée au principe d'accès et de partage des savoirs
La crise des pouvoirs actuels n'est pas le fruit du hasard mais au contraire un formidable
révélateur de l'adaptabilité des hommes à pouvoir prendre en main leur propre destinée.
Cette refondation des pouvoirs passe alors par une nouvelle vision de l’État-Providence,
fragmenté et coopératif, qui permettrait de sortir de la crise des pouvoirs en dépassant le
clivage entre les intérêts publics et privés et en redéfinissant les sujets du droit
international à travers de nouvelles bases de responsabilité.
Cette ré-institutionnalisation des pouvoirs passe alors pour tous les États par la
suprématie du droit au travers de l'émancipation et la coopération internationale de ses
acteurs, que ce soit dans la magistrature ou l'avocature. Mais aussi à travers la
juridictionnalisation du droit international et de l'équilibre des pouvoirs. Enfin à travers
la redéfinition des modèles économiques comme l'OMC. Cette «boussole» juridique
demande du temps, de l'adaptabilité et une certaine humilité qui pour l'heure, reste
timide, l'ensemble des états étant ancrés dans leur modèle de souveraineté absolue.
Mireille Delmas Marty parle alors de «croisement des savoirs» pour refonder les
pouvoirs, au sens où connaissances scientifiques et juridiques s'entremêlent pour faire
avancer la décision politique et l'amener à une gestion rationnelle, raisonnée de son
territoire. Sur le plan environnemental, cette démarche permet alors de combiner la
«démocratisation des savoirs et la mondialisation des experts » afin d'établir une
nouvelle forme de gestion des ressources naturelles territoriales basée sur de nouveaux
droits de propriété intellectuelles et d'identité culturelle territoriale unique.
Reste qu' une nuance d'envergure est toute de même émise par la juriste car cette
907 DELMAS MARTY Mireille, Vers un droit commun de l'humanité, entretien avec Philippe Petit,
édition Textuel, 2005, 141 pages
348
gouvernance environnementale internationale nécessite une « transposition des
concepts politiques de démocratie représentative et participative » inégalée et seul le
droit peut être l'outil de régulation qui ouvre la voie vers cette nouvelle forme de
partage des pouvoirs et des savoirs. Ainsi, même si les Nations-Unies ne représentent
que les gouvernements des États membres, tous ne sont pas des démocraties
représentatives et participatives et un travail de médiation sur le terrain reste à faire.
Ramené au plan environnemental, ce droit commun de l'Humanité doit donc être le fruit
réinventé de la coopération internationale dans la gestion des ressources naturelles, en
perpétuelle évolution et évaluation. Il est le produit des fêlures juridiques de l'ensemble
des états, de leurs limites et de leur peur aussi. Il s'applique même dans les États qui ne
sont pas des démocraties, au delà de la primauté du droit et de la suprématie de la loi,
car il s'apparente à une vision universelle et intemporelle des ressources naturelles.
Or, le droit « nous habille de garanties, dans ses codes comme il habille d'uniformes
dans ses lois. Le droit existe, mais il n'est qu'une contrefaçon de la justice, il règne en
maître sur les hommes, mais il bafoue l'humanité des pauvres et des démunis. Le droit
n'existe que dans la mesure où se réalisent dans les faits les principes qui le
guident908...». Pour autant, « l'homme a substitué des déclarations à portée universelle,
morale et philosophique, à des principes de droit invocables devant des juridictions
nationales et internationales ». «La loi n'a plus tous les droits car nous savons
désormais que le droit lui aussi est mortel…..et le droit refuse le changement attendu
909
».
Bien plus qu'un moyen, le droit est avant tout un idéal, une référence, un outil de
régulation au service des hommes et de l'Humanité, le prolongement « vivant des rêves
visionnaires de René Cassin et des premiers inventeurs du droit commun de l'humanité.
Une manière en somme de faire reculer l'inhumain910 ».
Or, Mireille Delmas Marty craint que le droit ne s'enferme sur lui-même par manque
d'imagination ou crainte de l'innovation et des nouveaux défis. Le droit serait selon elle,
« la quête d'une sagesse qui passe par le mystère de la juridicité, telle que chaque
culture la tisse au fil du temps et rend possible, par fragments, le miracle d'un droit
devenu langage commun, sagesse commune ».
Elle croit ainsi en un corps de magistrats activistes, militants et un corps d'avocats libres
et indépendants et déplore la nouvelle vision des responsabilités et l'inflation des procès
en droit des personnes. Car on accorde beaucoup de place à la réparation du préjudice
subi.
349
napoléonienne, mais le mot responsabilité apparu dans le dictionnaire de l'Académie
en 1798, ne figure ni dans le code civil de 1804 ni dans le code pénal de 1810... ».
Elle est au cœur des croyances et des incompréhensions, comme l'alliée de la justice et
du droit. Mais les écarts politiques au sein des gouvernances actuelles ont crée une
défiance vis à vis des institutions et du droit. L'écarter est une gageure, l'allier à la
démarche permet alors la mise en place d'une démocratie participative moderne,
réinventée parce que solidaire. Un travail de remise en confiance est donc nécessaire
pour permettre à la société civile internationale de se repositionner face aux défis que
demandent la mise en exergue d'un droit commun de l'humanité. Sans elle, rien ne serait
possible.
Pour ce faire, Mireille Delmas Marty pose la notion romaine de « Jus communes »,
pouvant se traduire « faits de coutumes locales, communes ». Si l'on adapte ce principe
au droit international de l'environnement et à la gestion des ressources naturelles, ce
dernier doit alors être appliqué imperio rationis, à savoir sous l'emprise de la raison. On
voit alors la nécessaire reconnaissance des droits coutumiers locaux, et une étude de
droit comparé inédite, pour tendre vers une approche inter-générationnelle de la gestion
des ressources naturelles mondiales, raisonnée, parce que rationnelle, équilibrée et
adaptée. Cette approche permettrait alors d'établir une vision territoriale pérenne,
venant renforcer la sécurité juridique locale.
Si chaque État, démocratique ou pas, parvient à établir une telle gestion, il façonnerait
par son expérience et ses défis locaux, le droit commun de l'Humanité et par delà même
la gouvernance environnementale mondiale. Car il ne suffit pas de bonnes intentions
pour nourrir le droit international de l'environnement et créer un droit commun de
l'humanité, il convient d'y adosser une structure technique permettant de transformer
des principes de droit naturel en droit opérationnel environnemental.
350
intemporelle, reconnus dans le droit canadien et transmissibles aux générations futures,
tel un « flambeau » qui ne s'éteint jamais.
La recherche d'un équilibre juridique mondial n'est pas un mythe inaccessible, elle est
au contraire un douloureux combat d'équilibre entre la reconnaissance du pouvoir et
celle de la suprématie de la loi. Cette suprématie doit supplanter les rivalités politiques
internes pour permettre à la société internationale du troisième millénaire de grandir
dans une sécurité juridique globale.
L'enjeu lié aux ressources naturelles est donc un enjeu juridique global et majeur qui
doit supplanter les autres enjeux car l'équilibre des pouvoirs et des données socio-
économiques dépendent de l'approche inter-générationnelle de la gestion des ressource
naturelles. Pour ce faire, une culture de l'anticipation des risques par une meilleure
formation et coopération est primordiale. Même si l'on s'accorde à dire que les efforts
restent à faire, et que l'on donne pas toujours l'effectivité juridique aux textes, la
symbolique resterait importante.
351
Section II. L'amorce juridique vers la transposition de nouveaux principes
La dialectique instaurée depuis 1945 entre la notion d’État et celle de Société est à
repenser sur les modes de consommation, de participation au pouvoir. Le socle
juridique de la démocratie mondiale se retrouvant sur une assise mouvante, il convient
de dépasser ensemble cette remise en cause des espaces élitistes, détenteurs des modes
de décisions globales, pour permettre de réinventer une forme de démocratie
environnementale mondiale au service de l'Humanité.
Cette nouvelle approche devrait permettre d'amener chaque acteur vers une gestion
raisonnée, rationnelle de ses ressources naturelles en contribuant à instaurer un pont, un
dialogue entre les données scientifiques, techniques et juridiques et les gouvernances
locales, pour mettre en place une véritable gouvernance participative.
Alors, le chemin reste devant nous, et même si « le pire ennemi de l'Homme, c'est lui
même912», l' Homme peut parvenir à dépasser son ego pour le bien-être de l'Humanité et
inventer ce nouveau type de gouvernance.
Il est capable d'apprendre de ses erreurs passées car «l'expérience est une lumière qui
n'éclaire que soi-même913» et avancer car «ce qui fait l'homme, c'est sa grande faculté
d'adaptation914» et que « l'intelligence consiste à comprendre la nature du monde
extérieur et à agir sur lui......telle est la nature de la vérité absolue, elle se manifeste
sans être vue, elle produit ses effets sans mouvements, elle accomplit ses fins sans
action915 ».
Si le XVIIIème siècle fut le siècle des lumières, gageons dés à présent que le XIXème
siècle pourrait être celui des lumières retrouvées au travers d'une nouvelle approche de
la gestion des ressources naturelles mondiales. Ce choix courageux apporterait
prospérité et perénité aux États car « La prospérité d'une nation ne consiste pas
seulement dans ses richesses matérielles mais dans la droiture de leur gouvernance916 ».
912 YUTANG Lin, La sagesse de Confucius, éditions Picquier poche, 2008, 307 pages
913 Citation de Lao Tseu
914 Citation de Socrate
915 Préc note n° 913 page 153
916 Préc note 913 page 180
352
Cette approche serait donc un défi démocratique de premier plan qu'il convient
d'analyser. Des conditions d'équité environnementale favorables et d'équilibre des
pouvoirs sont alors nécessaires.
353
§1. Une marche vers la transposition du principe d'équité environnementale
Elle fait référence à d'autres auteurs comme Lawrence Finkelstein, qui énonce que « la
gouvernance mondiale, c’est gouverner sans autorité souveraine des relations
transcendant les frontières nationales ». L'auteur précise ainsi que depuis les accords de
Bretton Woods918, la notion de gouvernance s'est assimilée en 1990 en une notion
d’administration publique, faisant appel aux notions d’État de Droit, de responsabilité et
de transparence. La gouvernance reste un «outil idéologique pour une politique de
l’état minimum..... pour analyser la mise en œuvre des grands programmes publics
dans un contexte marqué par une implication forte des intérêts locaux et des
organisations privées». La notion de gouvernance actuelle se rattache alors à « un
processus continu de coopération et d’accommodement entre des intérêts divers et
conflictuels ».
L'approche inter-générationnelle des ressources naturelles mondiales est avant tout une
approche transversale des données. Le mode de gouvernance environnemental qui s'y
rattache serait à ce titre, un levier mondial et territorial de premier plan, permettant de
renforcer une sécurité juridique internationale. Ce cadre de réflexion permet ainsi
d'indiquer que l'ensemble des conférences internationales environnementales de ces
trente dernières années se sont alors inscris dans un processus d’accommodement
structuré, visant une régulation mondiale.
917 SMOUTS Marie-Claude, les ambiguïtés de la notion de gouvernance dans le discours des relations
internationales, du bon usage de la gouvernance en relations internationales, dossier analyse et
évaluation de la gouvernance, Revue Internationale des Sciences Sociales,mai 2005, 2 pages
918 Accords de Bretton Woods du 22 juillet 1944
919 CHANTARAUD Jean-François, rapport 2010, ODIS, la Documentation Française, 270 pages
354
Au delà d'un simple rapport, l'auteur plaide pour «sortir de la dictature de
l'opinion...bâtir un nouvel étage à la démocratie, qui permettra au plus grand nombre
d'entrer dans la complexité920».
Il ne s'agit donc pas d'innover en suggérant un nouveau modèle juridique, encore faut-il
le rendre pragmatique, adaptable et modulable à chaque territoire. Il ne peut se faire
qu'en définissant au préalable les enjeux d'équité environnementale par territoire. Si la
mondialisation a tissé de nouveaux liens juridiques, les phénomènes naturels actuels
planétaires laissent entrevoir que le processus de changement s'amorce d'abord sur le
plan local et transfigure ensuite sur le plan mondial. L'effet d'entonnoir classique visant
à partir de la gouvernance mondiale vers la gouvernance territoriale, utilisé jusqu'à
présent, est aujourd'hui source de défiance et de tensions mondiales. Partir de la
gouvernance mondiale territoriale environnementale vers une gouvernance mondiale
environnementale serait alors une stratégie juridique envisageable, pour permettre de
poser l'approche inter-générationnelle.
Connaître son territoire signifie connaître les enjeux de sécurité juridique liés à la
gestion des ressources naturelles locales. Et c'est dans cette réflexion que pourrait se
mettre alors en place une marche vers un droit à la préservation des ressources
naturelles et à la préservation de l'Homme.
920 CHANTARAUD Jean-François, Renverser la dictature de l'opinion, Libération, 8 avril 2011, sources
http://www.liberation.fr/tribune/2011/04/08/renverser-la-dictature-de-l-opinion
355
A. La marche vers un droit à la préservation des ressources naturelles
Car il ne faut pas oublier que l’essence même du droit international de l’environnement
et des textes fondamentaux s’y attachant, bouscule le processus classique d’élaboration
des normes juridiques et la vision classique des modes de pensée juridique occidentale.
La prise en compte de l'intérêt environnemental dans les premières réglementations
internationales s'est progressivement faite dans le sens de la protection de
l'environnement.
Ainsi, la marche vers un droit à la préservation des ressources naturelles passe par une
nature juridique et un champ d'application nouveau à travers notamment le principe de
jus cogens.
356
1. Une nature juridique nouvelle à travers le principe du jus cogens
L’article 26 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, reprenant la Charte des
Nations-Unies énonce clairement le principe du respect des obligations générées par les
traités et autres sources du droit international. La base du droit des traités étant la règle
«Pacta sunt servanda» et la notion d’exécution de bonne foi restent le fondement du
droit international de l’environnement.
Inspiré du droit naturel, cette notion a dans un premier temps été retenue par la
Commission de Droit International, notamment pour sanctionner par la nullité la
conclusion des traités en violation de ces dernières.
Par la suite, la notion de « jus cogens » a été définie921 en droit international, comme «
une norme acceptée et reconnue par la communauté internationale des États dans son
ensemble en tant que norme à laquelle aucune dérogation n'est permise et qui ne peut
être modifiée que par une nouvelle norme du droit international général ayant le même
caractère ».
Son caractère supra international consacré s'est ensuite imposé à toutes normes
internationales : « si une nouvelle norme impérative du droit international général
survient, tout traité existant qui est en conflit avec cette norme devient nul et prend
fin922 ».
La consécration925 énonce qu’ «aucun état n’a l’obligation d’entretenir des relations
diplomatiques ou consulaires avec un autre mais il ne saurait manquer de reconnaître
les obligations impératives qu’elles comportent et qui sont maintenant codifiées dans
les conventions de Vienne de 1961 et 1963».
Les tribunaux arbitraux internationaux ont contribué à préciser la définition et les effets
de la notion de «jus cogens». Cette dernière a été alors définie comme une
921 Article 53 de la convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités, entrée en vigueur le 27
janvier 1980, Nations Unies, Recueil des Traités , vol. 1155, page 331
922 Article 54 de la convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités, entrée en vigueur le 27
janvier 1980, Nations Unies, Recueil des Traités , vol. 1155, page 331
923 CIJ, avis consultatif du 28 mai 1951, concernant les réserves à la Convention pour la prévention et la
répression du crime de génocide
924 CJI, Barcelona Traction, jugement du 5 Février 1970
925 CJI, Personnel diplomatique et consulaire à Téhéran, jugement du 15 Décembre 1979
357
« caractéristique propre à certaines normes juridiques de ne pas être susceptibles de
dérogation par voie conventionnelle926 », mais aussi comme une norme « impérative du
droit international général (…) s’imposant à toutes les parties prenantes à la
succession 927», ou encore une norme « impérative du droit international général 928».
Les juridictions européennes ont, à leur tour, consacré la notion de « jus cogens929 » en
droit international humanitaire, en établissant un principe de compétence universelle930.
358
2. Un champ de compétence juridique nouveau
En matière environnementale, ce principe est devenu une norme de jus cogens, assorti
d'une force exceptionnelle établie par la jurisprudence de la Cour Internationale de
Justice dans l’affaire Gabcikovo Nagyramos 933. Mais antérieurement à la jurisprudence
de la Cour, d’autres textes ont démontré la force contraignante du droit international de
l’environnement. A ce titre, on peut se référer aux conventions de Londres 934, de
Rome935 ; ou encore à la convention phytosanitaire de Londres936.
Pour qu’un principe devienne règle de droit positif, conventionnel, encore faut-il que ce
dernier soit repris dans un texte normatif et qu’il soit générateur d’un pouvoir
contraignant. S’il n’est mentionné que dans un préambule, ou que ses termes ne sont
pas suffisamment contraignants, il ne devient pas règle de droit mais simple inspirateur.
C’est le cas atypique du principe de précaution, présent dans la plupart des conventions
internationales mais pour la plupart, mentionné en préambule ou en des termes non
contraignants. Mais ce principe a acquis progressivement une place au sein des
juridictions internationales, notamment de l'OMC, en lui revêtant un statut de règle
coutumière internationale937. Il est devenu effectif dans le droit de la mer, par des
décisions rendues par le Tribunal International du Droit de la Mer938 (TIDM).
Ainsi, les réflexions autour d'une autre approche juridique, nouvelle, de la gestion des
ressources naturelles mondiales ont fait apparaître à leur tour, des réflexions
359
périphériques portant sur les notions d'autonomie environnementale, développée dans
les états fédérés, ou d'indépendance environnementale présente dans les états
décentralisés.
Mais au delà des clivages institutionnels apparaît alors le nécessaire recours à une
gestion différente, raisonnée parce qu'équilibrée rationnelle et adaptée des ressources
naturelles locales, pour permettre de préserver un droit à la préservation de l'Homme.
360
B. La marche vers un droit à la préservation de l'Homme
Mais pour parvenir à cet équilibre, une véritable réflexion juridique s'impose sur la mise
en place en droit interne de politiques urbaines équilibrées, raisonnées parce que
rationnellement cohérente avec leur territoire et leurs ressources naturelles.
361
1. Des fondements juridiques nouveaux
L'ensemble des projets internationaux actuels porte sur des régions isolées, où les
densités de mouvements de terrain sont fréquentes, et les problématiques d'accès aux
ressources naturelles vitales. Un récent rapport du FIDA 939 estime ainsi cette
vulnérabilité globale et dangereuse.
Il énonce que « pendant les 25 prochaines années, l'Asie perdra une plus grande
proportion d'espèces et d'écosystèmes naturels que n'importe quelle autre région du
monde. L'expérience a démontré que la manière la plus efficace de conserver la
biodiversité était d'établir des zones de protection. Cependant, il faut veiller à
promouvoir la participation des bénéficiaires de façon à ne pas marginaliser les
utilisateurs des ressources». En Afrique, le rapport pointe «la diversité de la base de
ressources naturelles» et énonce que «les principaux domaines d'intervention sont
l'arrêt et l'inversion du processus de déforestation, la lutte contre l'érosion et la gestion
des sols, la gestion de l'eau et de l'humidité du sol, l'arrêt de la dégradation des
pâturages, la régénération et la conservation des ressources marines et la conservation
de la biodiversité ».
L'émergence d'un tel droit, fondé sur la préservation de l'espèce humaine, reposerait
alors sur une approche juridique nouvelle des droits de l'homme, transversale et globale,
opposable à tous les états. Si cette reconnaissance juridique était établie, ce champ de
compétence commun peut alors s'entrevoir plus clairement au niveau régional, plus
proche des administrés, et permettrait ainsi aux modes de gouvernance actuelles de
tendre vers un développement régional différent, reposant sur une approche inter-
générationnelle de la gestion des ressources naturelles, équilibrée, raisonnée parce que
cohérente avec son territoire.
939 FIDA, La gestion de l’environnement et des ressources naturelles, rapport 2013, 25 pages
362
Le fondement de ce droit repose alors sur le principe qu'à chaque atteinte et mise en
danger des ressources naturelles, ces atteintes mettent en danger l'Homme, sur le plan
international. Ce droit à la préservation de l'Homme est alors reconnu comme un droit
environnemental territorial opposable, où chaque région disposerait d'une voie pour
émettre ses avis, recommandations ou veto, portant sur la préservation des ressources
naturelles locales.
363
2. Des domaines d'intervention novateurs
Dans son rapport sur la gouvernance environnementale mondiale, publié en 2008 940,
l’Institut International du Développement Durable proposait un programme de réforme
basé sur les notions de souveraineté environnementale mondiale et gestion
environnementale partagées.
Les divers auteurs s'interrogeaient sur les objectifs à donner et proposaient d'axer leur
plan de réforme sur cinq points à savoir : la présence d'un leadership mondial
responsable ; une gouvernance environnementale mondiale systémique; une vision
environnementale mondiale partagée; une gestion des ressources naturelles inter-
générationelle; et une coopération environnementale mondiale. L'émergence d'un droit
à la préservation de l'Homme, en tant qu'espèce vivante menacée, est ainsi clairement
posée.
Sur chaque point, les auteurs ne sont notamment interrogés sur les difficultés
d'applicabilité juridique de cette nouvelle forme de gouvernance, tant en terme de
crédibilité, que de pérennité. Les auteurs ont conclu à la création d'une «architecture
politico-économique globale d’espace environnemental », basé sur le concept
«d’espace environnemental», où la gouvernance environnementale mondiale répondrait
à une approche cognitive raisonnée, au sens rationnelle quant aux modes d'extraction
des ressources naturelles, et partagée quant aux modes d'exploitation de ces dernières.
L'Humanité est-elle prête à bifurquer vers une nouvelle vision énergétique mondiale au
nom de la sécurité juridique mondiale et donc du droit à préserver l'Homme et son
milieu ? La question reste en suspend et ne peut trouver pour l'instant réponse car les
enjeux juridiques mais aussi politiques et techniques sont de prime abord délicats. Elles
soulèvent en effet, des question de souveraineté et de responsabilité environnementale
internes mais également externes, ainsi que la nécessité d'une profonde réflexion sur les
propres modes de gestion nationales en matière énergétique.
364
§2. Une marche vers la transposition du principe d'équilibre environnemental
Emmanuelle Jouannet indiquait en 2008, en référence à Ulrich Beck 941, qu'il n'y avait
pas de « vision proprement mondialiste ou cosmopolitique du droit international mais
au contraire une inévitable multiplicité de visions particulières, nationales régionales,
individuelles, institutionnelles du droit international, dans la mesure où tous les acteurs
du jeu international sont conditionnés dans leur propre culture juridique et non par une
culture juridique cosmopolitique qui n'existe pas encore réellement comme telle942 ».
Ainsi, il n'existe pas une culture juridique mondialiste du droit international mais
plusieurs cultures juridiques territoriales, qui s'entremêlent et cohabitent. L'approche
inter-générationnelle de la gestion des ressources naturelles mondiales passe donc par
cette prise en compte.
941 BECK Ulrich, Qu'est ce que le cosmopolitisme, éditions Aubier alto, 2004, pages 17 et suivants
942 JOUANNET Emmanuelle, Les visions française et américaine du droit international, culture
juridique et droit international, droit international et diversité des cultures juridiques, journée franco
allemande, SFDI, éditions Pédone, 2008, pages 43 à 90
365
A. Le renforcement juridique pour un nouvel équilibre des pouvoirs
Mais l'auteur précise-t-il que c'est un risque supporté car en période d'instabilité, ces
visions juridiques territoriales se transforment alors en visions juridiques extrémistes et
radicales mais ces dernières ne sont pas «essentiellement négatives car elles ne créent
pas ex nihilo ces problèmes mais révèlent de façon brutale mais nécessaire, des
dilemmes et peut-être des impasses qui sont inhérents à l'existence du système
international lui-même et aux perceptions différentes que l'on a de ce système ; ce
faisant elles nous obligent à les prendre véritablement en charge».
L'équilibre environnemental des pouvoirs ne peut donc passer que par un nouveau
partage de la participation entre l'État, les collectivités et la Société civile mais
également par de nouvelles responsabilités entre ce tripartite. Cet équilibre répondrait
alors aux principes 21 et 22 de la Déclaration de Stockholm.
366
1. Une stratégie juridique nouvelle
L'esprit pionnier de cette convention réside dans le fait qu'elle établit les devoirs des
Etats parties à identifier et protéger leur propre site. En ratifiant la Convention, chaque
état s’engage donc à protéger l'ensemble des sites classés ou non classés au patrimoine
mondial, situés sur son territoire. La convention a mis en place un comité du patrimoine
mondial, constitué de représentants de 21 États parties élus par l’Assemblée Générale
des États Parties à la Convention.
367
mondial. L'exemple du projet de renforcement de la conservation et de la gestion de
Lumbini, lieu de naissance du Bouddha, au Népal, démontre une évolution des modes
de gouvernance. Lieu hautement spirituel, pour la communauté bouddhiste, ce projet est
financé par le gouvernement du Japon, qui y voit un renforcement des liens
diplomatiques avec le Népal et de la coopération internationale technique. L'UNESCO
reste le tiers exécutant direct sur la région de Katmandu, en collaboration avec les
instances administratives locales de conservation du patrimoine.
Ramenée au plan environnemental, elle peut alors proposer à chaque État de pouvoir
appartenir et participer avec les collectivités et la Société civile, à une vision juridique
internationale visant à sauvegarder « les biens d’importance universelle » pour la
diversité de la culture et de la richesse de la Nature. En effet, du cinquième au septième
considérant, il est explicitement énoncé que « les conventions, recommandations et
résolutions internationales existantes en faveur des biens culturels et naturels
démontrent l'importance que présente, pour tous les peuples du monde, la sauvegarde
de ces biens uniques et irremplaçables à quelque peuple qu'ils appartiennent..[...] que
certains bien du patrimoine culturel et naturel présentent un intérêt exceptionnel qui
nécessite leur préservation en tant qu'élément du patrimoine mondial de l'humanité
tout entière, ..[...] que devant l'ampleur et la gravité des dangers nouveaux qui les
menacent il incombe à la collectivité internationale tout entière de participer à la
protection du patrimoine culturel et naturel de valeur universelle exceptionnelle, par
l'octroi d'une assistance collective qui sans se substituer à l'action de l’État intéressé la
complétera efficacement».
Ainsi, cette vision juridique repose sur une conception de droit naturel, et fait appel à la
notion de «biens communs de l'humanité». La seule difficulté actuelle est d'élargir la
notion de bien «d'importance universelle». Reste que la convention, à travers des
programmes de planification régionaux, s'applique aux collectivités et impose aux États
parties une obligation de moyens, envers la Société civile en demandant un compte
rendu précis de leur bien inscrit.
368
beauté naturelle ».
en introduisant un quatrième alinéa portant sur :
«l'ensemble des écosystèmes, et les ressources naturelles territoriales qui auraient une
valeur universelle exceptionnelle d'intérêt commun de l'humanité pour les générations
à venir ».
369
2. Des responsabilités environnementales nouvelles
Le nouveau partage des responsabilités entre l’État, les collectivités et la Société civile
est lié au phénomène de globalisation du droit, lui-même subordonné à celui de la
mondialisation. Or, plus la société civile se mondialise, plus elle se complexifie et il est
alors indispensable d'ériger un corpus juridique international universel, cohérent et
durable. Si la liberté «des uns s'arrête là où commence celle de l'autre943», la nécessité
de redéfinir un nouveau cadre juridique à la liberté d'agir au sein des modes de
gouvernances contemporaines est alors posée.
Car les interactions entre les acteurs de la société civile se sont modifiées et ces
évolutions ont eu un impact direct sur la vision d'identité légitime des acteurs et des
territoires concernés. Les États contemporains sont ainsi pris en otage entre deux
visions, d'une part une vision traditionnelle des régulations locales et régionales héritées
des décentralisations et déconcentration, et d'autre part, une vision d'une dynamique
nouvelle liée à la réglementation internationale. L'émergence d'un nouveau lien entre
l’État, les collectivités et la société civile, passe alors inéluctablement par la définition
d'un corpus juridique international commun, se posant comme un héritage culturel,
cultuel et juridique, global, répondant au principe de responsabilisation globale de
valeurs partagées fondant la coopération internationale.
Ainsi, plus la gouvernance s'ouvre au jeu interactif des divers acteurs, moins l’État
serait interventionniste. Or aucun État ne peut être immunisé contre les abus de
gouvernance. Le paradigme repose alors sur un partage des responsabilités entre les
acteurs à cause du phénomène de globalisation du droit qui a plus amenuisé que
conforté le processus décisionnel central.
Mais l'idée de la gouvernance d’après guerre reposait principalement sur une vision
multilatérale des modes de gouvernance. L'ensemble des organes de coopération inter
gouvernementale à vocation régionale ou sectorielle, s'est greffé autour du système
onusien de l’après guerre.
943 MILL Stuart John, De la liberté, éditions du Grand Midi, 3ème édition, 2008, pages 90
370
donc ces nouvelles formes de gouvernance, au travers de cette nouvelle approche
juridique de la gestion des ressources naturelles mondiales.
Ce nouveau partage des responsabilités, où les relations entre l’État, les collectivités et
la société civile se redessinent, s'accompagne d'une plus grande responsabilisation des
marchés internationaux et des phénomènes de déréglementation. Sur le plan des
ressources naturelles, ceci n'est viable juridiquement que si la concurrence
internationale est mieux encadrée pour une meilleure maîtrise des envolées tarifaires. Il
s'agit alors de rentrer avec humilité dans une phase «d'apprentissage social», comme
l'indiquait l'OCDE en 2001944 pour éduquer la société civile internationale aux
nouveaux enjeux du XXIème siècle. L'adaptation de modes de gouvernances coopératifs
entre dans le processus d'une cohérence juridique territoriale pereine au sens où la prise
de solution localisée, est effective et participative à la prise de solution globale.
Mais pour que ces modes de gouvernance coopératifs soient reconnus et appliqués, il
est nécessaire de visualiser par territoire les capacités de coopération propres de chaque
état. Cela suppose alors, des institutions, des compétences, des connaissances, des
ressources financières propres ou extérieures, et surtout un contrôle coopératif réel.
L'objectif n'est donc pas de supposer des sociétés idéalistes utopistes mais bien de
permettre d'amorcer une nouvelle société internationale, basée sur de nouvelles formes
de gouvernance partagées, répondant au partage «juste et équitable» des besoins
régionaux et nationaux, troisième objectif de la Convention sur la Diversité Biologique
du 5 juin 1992, renforcé depuis par le Protocole de Nagoya du 29 octobre 2010.
L'exemple du projet de loi français d’août 2014 946, adoptée en première lecture le 24
mars 2015, portant sur la Biodiversité, tend vers cette vision en proposant la création
d'une «gouvernance de la biodiversité » (Titre II), surveillée par une nouvelle institution
dénommée «agence française pour la biodiversité» et mettrait en avant le principe «d'
accès aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles associées et
partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation » (Titre IV). La
LPO France s'est félicité que «la solidarité écologique puisse guider les décisions
944 OCDE, Rapport sur la gouverance mondiale, édition OCDE, 2001, page 229
945 MILL Stuart John, De la liberté, éditions du grand Midi, Zurich, 3ème édition, 2008, pages 122 à 128
946 Projet de loi français n°1847 portant sur le biodiversité enregistré à la Présidence de l’Assemblée
nationale le 26 mars 2014, http://www.assemblee-nationale.fr/dossiers, d consulté le 31 aout 2014
371
publiques, et d'autre part que les enjeux de biodiversité appellent des outils
complémentaires comme les zones prioritaires pour la biodiversité et les obligations
réelles environnementales... » et que les députés français « renforcent l'implication des
communautés autochtones et locales dans le nouveau régime d'accès et de partage des
avantages (APA) liés à l'exploitation des ressources génétiques947».
Les débats au premier trimestre 2016 portant sur la transposition en droit interne du
Protocole de Nagoya dans le projet de loi restent tendus. La notion de « Communautés
autochtones », pose des difficultés d'ordre terminologique mais surtout juridique, le
peuple Français étant «un et indivisible » (Article premier de la Constitution du 4
octobre1958). Les arguments de richesse culturelle et diversité ethnique sont avancés,
notamment pour la Guyane mais plus généralement l'ensemble des français d'Outremer,
issus de populations autochtones, comme Tahiti ou la Nouvelle Calédonie. Les tensions
d'ordre financière fragilisent également le projet de loi, la notion d'avantages pouvant
être associé à celle de contrepartie financière948.
372
B. La reconnaissance juridique du principe d'intérêt général environnemental
Aussi, dans un souci de transversalité des données, et pour permettre de pouvoir tendre
vers un développement durable réel et stable, l'approche inter-générationnelle
permettrait-elle de promouvoir un nouveau principe à caractère international, à savoir le
principe d'intérêt général environnemental. En ce sens, elle répondrait aux dispositions
du Protocole de Nagoya du 29 octobre 2010, qui précise dans son préambule :
« Reconnaissant la contribution potentielle de l’accès et du partage des avantages à la
conservation et à l’utilisation durable de la diversité biologique, à l’éradication de la
pauvreté et à un environnement durable, contribuant ainsi à la réalisation des Objectifs
du millénaire pour le développement »,
« Conscientes des liens qui existent entre l’accès aux ressources génétiques et le
partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation de ces ressources,
Reconnaissant l’importance d’assurer la sécurité juridique en ce qui concerne l’accès
aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de
leur utilisation,
Reconnaissant en outre l’importance de promouvoir l’équité et la justice dans la
négociation de conditions convenues d’un commun accord entre les fournisseurs et les
utilisateurs de ressources génétiques ».
373
1. Une émergence progressive du principe d'intérêt général environnemental
La notion d'un intérêt général environnemental est apparue tel un principe supra-
national, s'imposant aux clivages nés des conflits d'intérêt entre l'intérêt particulier et
l'intérêt général. Mais comme le caractère principal de droit international de
l'environnement reste complexe tant dans son objet, que dans ses règles, ses sources
contemporaines démontrent qu'il conviendrait de se pencher sur le particularisme
technique et évolutif du corpus normatif.
Elle considère que les organisations internationales «sont en fait des organisations
intergouvernementales» et que les ONG jouent un grand rôle. Elle cite l'exemple d'une
entreprise canadienne s'étant vue suspendre ses certifications environnementales, suite à
une plainte déposée par la communauté indienne des Cris, reposant sur le droit des
premières nations, ainsi que celui des vielles forêts. Même si elle reconnaît l'efficacité
des zones protégées, elle propose qu'on dote ses dernières de vrais possibilités, car
«elles ne doivent pas être des coquilles vides sous-administrées comme c’est encore
souvent le cas». Enfin, elle considère que la gestion des ressources naturelles forestières
est «à l’origine des velléités de conquête » et que «derrière l’idée d’une forêt qui serait
un bien public, l’enjeu est de redéfinir un équilibre entre valorisation des ressources
forestière, et reconnaissance d’un véritable pouvoir aux communautés locales sur ces
ressources. De tels compromis politiques se trouvent au cas par cas, pays par pays, et
nécessitent donc la concertation des États. L’articulation entre régimes internationaux,
politiques nationales et comportements locaux est au cœur de la définition d’une
gouvernance ».
Plus largement, et à partir de cette réflexion, peut-on alors réfléchir au fait que, comme
la gestion des ressources naturelles est à la base des grandes conquêtes de territoires,
l'intérêt général environnemental pourrait établir un équilibre entre les intérêts liés à
l'extraction et l'exploitation des ressources naturelles, et ceux des populations locales.
Cette notion nouvelle permettrait ainsi une meilleure gouvernance, axée sur une
concertation des pouvoirs et une approche systémique et coutumière des ressources
naturelles. Elle répondrait alors à un partage « juste et équitable » au sens du Protocole
de Nagoya.
949 MENEZES DE REZENDE Quenida, La protection forestière comme étalon de l'efficacité des
institutions internationales, http://www. sensemaking.com, article du 25 mars 2014
374
2. Une portée juridique évolutive du principe d'intérêt général environnemental
Robin Degron950 écrivait en 2011951 sur la réforme des collectivités françaises que
« Bien qu'elles ressortent de processus décisionnels indépendants, la loi de réforme des
collectivités territoriales (loi RCT) et les lois Grenelle participent d'un même courant
de profonde rénovation de l'administration des territoires... ». L'auteur indiquait alors
que « À la logique de regroupement institutionnel que porte la loi de réforme des
collectivités territoriales correspond en effet l'émergence d'une vision durable et
transversale du développement. La lutte contre les émissions de gaz à effet de serre,
influencées en particulier par la croissance du transport routier, et la perte de
biodiversité, corollaire de la dynamique d'étalement urbain, appellent nécessairement
une gestion de plus en plus intégrée des politiques régionales et locales
d'aménagement. De ce point de vue, la création du mandat de conseiller territorial, qui
fait le lien entre région et département, ainsi que l'affirmation croissante du fait
intercommunal semblent des points positifs... ».
L'auteur indique que cette réforme a commencé dès les années deux-mille avec
l'adoption de la loi n° 99-533 du 25 juin 1999, dite Loi d'Orientation pour
l'Aménagement Durable du Territoire (LOADDT), puis avec la loi n°2000-1208 du 13
décembre 2000, dite loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU). Ces deux
dispositions ont permis la reconnaissance du principe de développement durable,
soulevé dans le rapport Brudland en 1987, dans le bloc de légalité en refondant la
planification urbaine et le droit de l'urbanisme autour de la notion de cohérence
environnementale territoriale.
375
activités agricoles et forestières et la protection des espaces naturels et des paysages,
d'autre part, en respectant les objectifs du développement durable ».
Ces deux lois ont aussi répondu à une transposition de l'article B du Traité de
Maastricht du 29 juillet 1992, stipulant « de promouvoir un progrès économique et
social équilibré et durable », comme celle de l'article 1 du traité d'Amsterdam du 2
octobre 1997 prévoyant que « les États-membres sont déterminés à promouvoir le
progrès économique et social de leurs peuples, compte tenu du principe du
développement durable et dans le cadre de l'achèvement du marché intérieur, et du
renforcement de la cohésion et de la protection de l'environnement, et à mettre en
œuvre des politiques assurant des progrès parallèles dans l'intégration économique et
dans les autres domaines».
L'auteur continue en précisant que « Dans cet esprit, la loi SRU introduit le schéma de
cohérence territoriale (SCOT) vu comme un véritable instrument de développement
durable territorial dont les orientations restent à décliner au niveau le plus fin par les
plans locaux d'urbanisme (PLU)».
L'originalité juridique française réside dans le fait que ces principales dispositions
législatives ont permis de dépoussiérer les cadres institutionnels établis en proposant
une approche transversale des contraintes régionales de développement durable des
territoires. Elles font suite à l'adoption du Traité de Lisbonne le 1er décembre 2009
définissant le développement durable en son article 3 comme «une croissance
économique équilibrée et sur la stabilité des prix, une économie sociale de marché
hautement compétitive, qui tend au plein emploi et au progrès social, et un niveau élevé
de protection et de la qualité de l'environnement ».
L'auteur énonce ainsi que le législateur a confié aux régions, instances de gouvernance
territoriale environnementale, le soin d'élaborer les Schémas Régionaux du Climat, de
l'Air et de l’Énergie (SRCAE) pour la période 2020 à 2050 ; ainsi que des Schémas
Régionaux de Cohérence Écologique (SRCE). Il énonce aussi que la réforme des
collectivités amorcée en 2011 a permis une nouvelle approche, transversale des actions
territoriales, renforçant le principe de cohérence environnementale territoriale.
376
Ce premier chapitre conclut sur le fait que l'approche inter-générationnelle repose sur
un principe inter-générationel lié à la gestion future des espaces internationaux et les
difficultés d'interactions pouvant exister entre ces derniers.
Si ces dernières peuvent ralentir le processus, elles ne le rendent pas inopérant.
Ainsi, la portée du recours au principe inter-générationnel pose un changement de cap
politiques et juridiques.
377
378
CHAPITRE II.
LA PORTEE NOUVELLE DE RATTACHEMENT DES
RESSOURCES NATURELLES
379
380
Même si l'on dispose de plus de cinq cent dispositions, accords et traités internationaux
et régionaux couvrant des domaines aussi divers que la protection de la couche d'ozone,
la conservation des océans et des mers existent, force est de constater que leur champ
d'application reste limité, de part leur caractère pour la plupart, non obligatoire.
Pour Klaus Toepfer952, le problème est en partie lié au fait que la sensibilisation des
experts juridiques au droit de l'environnement, et ceux des pays en développement et
des anciens pays de l'Union soviétique, n'a pas du tout évolué au même rythme que
celle présente dans les pays développés.
Cette réflexion a amené l'ensemble des juges présents à adopter en 2002, les principes
de Johannesburg notamment sur le rôle du Droit dans la protection de l'environnement.
Une alliance mondiale au travers de la suprématie du Droit est alors née.
952 Secrétaire général adjoint des Nations-Unies et Directeur exécutif du PNUE, discours du 20
septembre 2002
953 Conférence des 3 et 4 février 2005 des présidents des cours suprêmes des États francophones
d’Afrique
954 Déclaration de Johannesburg adoptée le 20 août 2002
955 Conférence du Luxembourg du 26 avril 2004
956 Conférence du Caire du 31 mai 2004
381
Chaskalson957 indiquait d'ailleurs à ce propos, en 2005 que « le programme de travail
prévu signale d'une avancée cruciale dans la recherche d'un développement
respectueux des humains et de la planète pour les générations actuelles et futures et
pour toutes les choses vivantes. L’état de droit est le fondement d'une économie stable
et au final d'un monde stable 958 ».
Ces propos confortaient ainsi ceux de Kofi Annan dans son discours de départ à
l'Assemblée Générale des Nations-Unies959, qui indiquait un an plus tôt que « chaque
génération doit poursuivre les efforts inlassables qu'a déployés la précédente afin de
renforcer l’État de droit pour tous, seul moyen de garantir la liberté de tous ».
Pour y parvenir sur le plan international, le temps des engagements juridiques est venu,
accompagné des réformes juridiques qui vont de pair.
382
Section I Le temps des réformes juridiques
La pacification des relations internationales entre les états est issue d'un long processus
lié à la souveraineté étatique. Le droit international de l'environnement rentre dans ce
processus de pacification car il contribue au renforcement de la sécurité juridique
mondiale tout en participant à une autre vision de la souveraineté étatique.
Les facteurs conjoncturels et structurels d’après guerre ont ainsi permis l'émergence
progressive d'une certaine vision de la souveraineté étatique, liée à la généralisation des
états démocratiques libéraux. Cette appétence à la démocratie s'est doublée d'une
appétence à la stratégie sécuritaire.
Le choix vers une nouvelle approche de la gestion des ressources naturelles n'est pas
neutre car il préfigure un nouveau mode organisationnel, une autre gouvernance
reposant sur un gestion raisonnée, au sens de rationnelle, équilibrée et adaptée. Cette
gouvernance doit être participative, en se basant sur la concertation et le dialogue et
une responsabilité personnelle et collective.
960 Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique et la croissance verte, JORF
n°0189 du 18 août 2015 page 14263
383
§1 Des conditions propices aux réformes juridiques
Albane Geslin pense que les accidents environnementaux à répétition depuis trente ans
«résonnent comme une litanie961» et cette «insécurité environnementale» a conduit à la
problématique de réactivité des États face à ces nouveaux risques. Il est établi que les
différends environnementaux relatif à la gestion des ressources naturelles peuvent être
source de déstabilisation dans la pacification des relations internationales entre les états.
Ainsi, les différends liés à la gestion de l'eau, des terres arables, comme des ressources
minières peuvent ainsi donner naissance dans un avenir proche, à ce qu'Isabelle Stenger
nomme le temps des catastrophes962 et qui s'apparente à du terrorisme écologique, tel
que certains états comme la France le définissent963. Cette déstabilisation conduirait
alors à une insécurité juridique globale et à une fragilité des États-Nations, au profit de
petits groupes privés puissants, servant une nouvelle forme d'état assimilé à ce que
l'économiste français Alain Minc dénomme un « nouveau Moyen-Age964 ».
Ainsi, pour limiter la défaillance environnementale provoquée par certains états, malgré
le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des états, Albane Geslin se
demande si on ne pourrait pas s'interroger sur celle «d'ingérence écologique» en cas de
menace environnementale à la paix et à la sécurité internationales, pour faire intervenir
le Conseil de Sécurité des Nations-Unies, au titre du chapitre VII de la Charte des
Nations-Unies. Même si cette intervention n'est pas encore possible juridiquement, on
pourrait développer une coopération internationale environnementale transfrontalière,
capable de prendre en compte non simplement les territoires, en tant que tel, mais bel et
bien l'ensemble des territoires vus comme des espaces environnementaux globaux.
Ici, repose alors la notion d'ingérence écologique globale, qui dépasse la simple
définition juridique du territoire stricto sensu et de ses frontières. Mais si des traités
internationaux existent en matière transfrontalière, cette notion fait appel à une vision
géologique des territoires où l'Homme et la Nature sont perçus comme des forces à part
entière, régulés par une instance étatique.
Ce droit à l'antropocène, défini par le scientifique anglais Paul Josef Crutzen 965, comme
le fait que les êtres vivants sont une force géologique, est peut-être «cette nouvelle ère
dont nous sommes les héros», pour paraphraser Claude Lorius et Laurent Carpentier 966.
Mais alors se pose la problématique de la résilience collective car les états vont devoir
tendre vers une approche inter-générationnelle des ressources naturelles mondiales, et
de nouvelles formes de gouvernance environnementale.
L'émergence d'un contexte juridique international favorable et l'engagement
environnemental des acteurs politiques mondiaux sont des conditions propices
observées.
384
A. L'émergence d'un contexte juridique international favorable
La première court de la fin du XIXème siècle jusqu'en 1950 et dépeint une période riche
en traités internationaux relatif à la gestion des ressources naturelles animalières.
La seconde s'étend de 1950 à 1972, où une centaine de textes internationaux et
communautaires émergent dans tous les domaines environnementaux, animaliers,
planétaires et stellaires. Les premiers pas vers un droit nucléaire international sont
balbutiants et se posent alors les problématiques complexes liées à la gestion des
milieux et des pollutions crées par l'activité humaine.
385
2. Des urgences juridiques liées à l'insécurité environnementale
Ces certitudes trouvent alors leur source dans une nouvelle vision juridique des atteintes
environnementales et leur portée, et au delà même, une nouvelle vision de la justice
environnementale internationale.
François Falletti, aujourd'hui Procureur Général de Paris et ancien procureur auprès de
la Cour d'Appel de Lyon, écrivait-il en 2000 que « la formule de Pascal :« la justice
sans force est impuissante ; la force sans la justice est tyrannique ; il faut donc mettre
ensemble la justice et la force ; et pour cela, faire que ce qui est juste soit fort et que ce
qui est fort soit juste», n'a jamais été autant d'actualité970 ». Même s'il faut donner une
force exécutoire plus grande au droit international de l'environnement, pour permettre
une autre approche de la gestion des ressources naturelles mondiales, l'efficience de
cette force résulterait d'un processus pacifique et humaniste, né d'une prise de
conscience internationale. Car cette approche doit reposer, avant tout, sur une pensée
positive, altruiste, et non émerger d'une douleur vécue et reconnue.
Or, si l'on transpose la naissance de la Cour Pénale Internationale, issue d'une longue
« marche commencée le 28 juin 1919 avec le traité de Versailles, continuée par les
tribunaux de Nuremberg et Tokyo avant ceux de l'ex-Yougoslavie et du Rwanda 971», à
celle de cette nouvelle vision, on s'aperçoit de la similitude des avancées dans les modes
d'exécution internationaux. On ne doit donc pas attendre que les atteintes
environnementales nationales mettent les états en situation de danger et donc
d'insécurité juridique totale pour commencer à agir. On ne doit pas attendre non plus
que ces dernières soient qualifiées un jour de crimes environnementaux contre
l'Humanité au sens des crimes contre l'Humanité d’après guerre 972, de complicité de
967 DOUMBE BILLE Stéphane, Droit international et développement durable, Editions Frison Roche,
1998, 350 pages
968 Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants du 23 mai 2001; Convention de
Bâle relative à l'exportation des déchets dangereux des pays de l'OCDE vers les pays en
développement du 8 mars 1995
969 CIJ, avis consultative du 8 juillet 1996 sur la licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires.
970 BAZELAIRE Jean-Paul, CRETIN Thierry, préface de François Falletti, La justice pénale
internationale, éditions PUF, 2000, 255 pages
971 Cf note n°965
972 Défini par l'article 6c du statut du tribunal militaire international de Nuremberg annexé à l'accord de
Londres du 8 aout 1945 ; article 7,1 du statut de la CPI du 17 juillet 1998, reconnu par la
jurisprudence de la cour de cassation française : Ccass., arrêts des 26 janvier 1984 et 20 décembre
1985
386
crimes environnementaux contre l'Humanité au sens de la complicité traditionnelle 973 ou
de génocide environnemental au sens du génocide humain974, pour réfléchir à leur
portée juridique.
Ces notions, si elles sont retenues un jour par le droit international de l'environnement
et la jurisprudence, permettront certes une reconnaissance juridique novatrice mais
resteront incisives et graduées, notamment dans l'imprescriptibilité ou pas des actions
judiciaires à mener. Mais la Nature n'a pas de personnalité juridique propre et les
atteintes environnementales reconnues restent objectives.
Ainsi, ce cheminement juridique doit amener l'ensemble des États vers un glissement
progressif de leur vision environnementale nationale à une vision environnementale
globale parce que commune, répondant à un intérêt général commun de l'Humanité. Et
ce cheminement doit reposer sur la fusion entre la source féconde des multiples travaux
de réflexion menés à la fois par les communautés juridiques, scientifiques et la société
civile.
Aussi peut-on poser la notion de compétence de ratione loci des tribunaux, au sens de
territoire environnemental et non de territoire stricto sensu, et de compétence de ratione
temporis au sens des imprescriptibilités des atteintes environnementales si on leur
reconnaît la notion de crimes environnementaux contre l'Humanité.
387
B. L'engagement environnemental des acteurs politiques mondiaux
Gérard Mairet975 énonce que l'Homme considère la Nature et les ressources naturelles
comme faisant partie de son «environnement», «comme si les choses de la nature
étaient conçues aux seules fins de les servir». Il explique ainsi «l'origine de la crise
écologique de notre temps : le projet politique et technique d'asservissement d'une
nature fantasmatique vouée à satisfaire nos besoins».
Or l'auteur dénonce un État moderne qui «résulte d'un prétendu droit selon lequel nous
devons nous organiser en vue d'une lutte contre la nature et non d'une vie en harmonie
avec elle. Ainsi pensée, la nature n'est plus qu'un vaste magasin où nous puisons notre
nourriture. Quant à sa « valorisation », elle se réduit à la marchandisation capitaliste
de ses ressources ».
Ainsi l'auteur indique-t-il que pour «faire face à la crise, nous devons disqualifier les
fondements politiques et moraux de nos façons de penser et d'agir, et substituer au droit
naturel un droit biotique permettant une réforme radicale de la relation
qu'entretiennent la cité des hommes et la nature. Car en réalité, la crise n'est pas
écologique mais politique : c’est celle des fondements essentiels de la cité. Plutôt
qu'une politique des hommes sur les choses de la nature, il nous faut concevoir une
cosmopolitique de la nature».
Aussi, depuis la création du G8, à initiative de la France en 1975, suite au premier choc
pétrolier, les acteurs politiques nationaux et internationaux ont intégré petit à petit la
notion de développement durable comme facteur de gouvernance à part entière. Cette
« cosmopolitique de la nature » est en théorie constitué, et l'identification des risques
environnementaux n'est pas toujours prise en compte car les grandes questions de
sécurité environnementale restent limitées. Sans aucune personnalité juridique, ni
secrétariat permanent, le G8 n'est pas une institution internationale mais son impact
auprès du G20 et des Nations-Unies n'est pas négligeable.
Le G20 crée à la suite de la crise mondiale de 2008, est défini comme «le premier
forum de coopération économique mondial976» et sa création a pour but initial de
permettre des solutions durables à la crise financière et économique. Il a la lourde
responsabilité d'assurer une croissance mondiale pérenne, globale et équilibrée en
partenariat avec les Nations-Unies et les organisations régionales internationales
comme l'UA, le CEDEAO, l'ASEAN ou encore l'APEC.
975 MAIRET Gérard, Nature et souveraineté, philosophie politique en temps de crise écologique,
collection Bibliothèque du citoyen, 26 mars 2012
976 Définition sur site http://www.diplomatie.gouv.fr/, consulté le 17 novembre 2014
388
1. Un engagement rattaché au mode de gestion des ressources naturelles
Jusqu'à la fin des années soixante-dix, la politique internationale était orientée vers une
croissance économique classique, où le développement durable et la gestion équilibrée
des ressources naturelles n'étaient pas une priorité économique et juridique. Jean-Pierre
Angelier indiquait-il que pour les ressources naturelles fossiles, comme le gaz naturel,
la forte demande a d'abord émergé des états-producteurs, comme les États-Unis. Car les
gisements découverts entre 1915 et 1930 ont permis à une grande majorité d'usagers
d'avoir accès à ces ressources, à moindre coût.
« À quantité d'énergie égale, le gaz représente un volume mille fois supérieur à celui du
pétrole ! La demande se développe d'abord là où le gaz est produit ; et encore,
uniquement si cette demande est forte. C'est le cas aux États-Unis et au Canada qui, en
1950, produisent et consomment la quasi-totalité du gaz naturel du monde. Ailleurs,
lorsqu'on en découvre, soit on le laisse en terre, soit on le brûle en torchère 977».
Or, les deux chocs pétroliers de 1973 et 1979 ont profondément affecté l'économie
mondiale, engendrant un déséquilibre durable Les effets secondaires comme la hausse
des prix des carburants pour les usagers ont engendré un ralentissement économique
mondial, et entraîné l'ensemble des états dans un état de récession économique sans
précédent. Cette répercussion a touché toutes les ressources naturelles fossiles comme
le gaz, ou encore le charbon. La volatilité des prix a conduit à une première réflexion
sur l'utilisation des ressources naturelles fossiles, et notamment le pétrole. S'ensuivirent
celles du gaz naturel, du charbon.
Ainsi, l'augmentation de l'exploitation du gaz naturel fut liée à son faible impact
environnemental. Jean-Pierre Angelier précise que «c'est tout particulièrement le cas au
Japon et en Corée du Sud qui importent du GNL à un prix très élevé et choisissent ainsi
de produire de l'électricité propre. Sur la base de ces trois critères, des politiques
énergétiques sont adoptées qui font la part belle au gaz naturel. Sa consommation
mondiale augmente bien plus vite que la consommation de l'ensemble des énergies, sa
part passant de 18% à 24% dans la satisfaction des besoins énergétiques globaux entre
1973 et 2004 (pour l'essentiel au détriment du pétrole). Toutefois, certains facteurs
freinent encore le développement de cette énergie ».
La destruction du mur de Berlin et les nouveaux rapports internationaux ont propulsé
les acteurs politiques internationaux vers un nouveau partage des visions de croissance
977 ANGELIER Jean-Pierre, Les défis et les chances, politique internationale n°111, 2006, voir le site
http://www.politiqueinternationale.com/, consulté le le 17 novembre 2014
389
économique mondiale. Le temps des doutes politiques fondés sur une confiance aveugle
aux lois du marché et un intérêt relatif au devenir des milieux endémiques et des
ressources naturelles, a laissé sa place à un profond désir d'engagement. Non par
altruisme, ni conviction, mais par nécessité économique et politique.
Les années deux mille sont donc marquées d'une économie mondiale à bout de souffle,
où la mondialisation a généré des tensions sociaux-politiques fortes, des rivalités
ethniques autour de la gestion de valorisation et de préservation des ressources
naturelles.
390
2. Un engagement rattaché au contexte juridique environnemental mondial
Ainsi, les années soixante-dix marquent le départ des vrais premiers engagements
politiques sur le plan international. De la convention de Ramsar en 1971 978 aux accords
de Durban979, les quarante dernières années balayent quarante années d'avancée
juridique en droit international de l'environnement, tous secteurs confondus et mettent
en avant une prise de conscience politique internationale réelle. Même si ces derniers ne
revêtent pas tous la force exécutoire, force est de constater qu'ils n'en restent pas moins
acquis et qu'ils permettent la discussion et la réflexion en la matière.
Ainsi peut-on lire en 2011 dans la déclaration de Deauville du G20 980, que « la lutte
contre les changements climatiques est une priorité mondiale ….». Les États se
félicitent « de l'issue fructueuse de la conférence de Cancun, qui est l'aboutissement des
efforts de la communauté internationale sur la base de l'Accord de Copenhague....des
dispositions adoptées, notamment en matière de transparence, d'atténuation, de
financement, d'adaptation, de technologies et de lutte contre la déforestation et la
dégradation des forêts... ».
978 Convention de RAMSAR du 2 février 1971 relative aux zones humides, entrée en vigueur le 21
décembre 1975
979 Conférence internationale de Durban du 11 décembre 2011
980 Déclaration de Deauville, G20, 27 et 28 mai 2011
981 Déclaration de Cannes, G20, du 4 novembre 2011
982 Déclaration du sommet du G20, Toronto 27 juin 2010; Pittsburgh 24-25 septembre 2009; Londres, 1-
2 avril, 2009; Washington DC, 14-15 novembre 2008
983 PNUE, rapport 2013, voir le site http://www.unep.org/french/annualreport/2013/docs/UNEP
%20AR2013_ French%20WEB.pdf , consulté le 15 mai 2014
391
coûts d'adaptation, pour le continent africain et a pu estimer ces derniers à trois cent
cinquante milliards de dollars par an d'ici 2070. Le rapport 2014 du PNUE, publié avant
la conférence sur la climat de Lima 984, est allé plus loin et reste une ébauche
préliminaire des écarts existant entre les pays développés et en voie de développement
sur le plan financier, technologique et intellectuel. Ce rapport complète en effet le
cinquième rapport d'évaluation du GIEC sur l'évolution du climat qui considère au vu
des estimations de la Banque mondiale que l'adaptation au changement climatique dans
les pays en développement friserait les cent milliards de dollars par an d'ici 2050.
Ainsi, le rapport propose diverses possibilités pour financer cette transition : échanges
ou vente de quotas d'émissions entre états, mise en place de taxes environnementales,
redevance sur les câbles électriques, taxes sur les transactions financières...
984 Conférence internationale des Nations-Unies sur le Climat, Lima, 5 décembre 2014
985 Source http://www.unep.org/newscentre/ consulté le 12 décembre 2014
392
§2 Des conditions propices à de nouveaux fondements et objectifs juridiques
Ainsi, le chef d'État américain indiquait-il que «Les défis du 21e siècle exigent une
réponse coordonnée et une prise de responsabilité de toutes les nations..... » et que « Le
Sommet du G20 à Pittsburgh a marqué une transition critique de la crise à la reprise.
…..À Pittsburgh, nous avons aussi pris des mesures pour faire en sorte que, une fois
que l’économie mondiale sera relancée et en pleine croissance, nous puissions
empêcher un retour aux pratiques risquées qui ont mené à la crise en procédant à une
série de réformes de nos systèmes économiques et financiers.....Nous avons conclu un
accord pour appliquer le nouveau Cadre pour une croissance forte, durable et
équilibrée et pour réformer la réglementation et la supervision des finances –
politiques qui seront appuyées et mises en œuvre par une architecture économique
mondiale redessinée. Les dirigeants du G20 – y compris les représentants des
principaux producteurs d’énergie et les autres nations à importants subsides – se sont
engagés à éliminer progressivement les subsides aux combustibles fossiles tout en
fournissant une aide ciblée pour aider les plus pauvres.....Cet effort inédit encouragera
la conservation de l’énergie, améliorera notre sécurité énergétique et constituera une
mise de fonds face à notre engagement à réduire les émissions de gaz à effet de serre».
L'ensemble des réformes repose sur une nouvelle vision orientée sur une dualité de
fondements, à la fois éthiques et techniques. Elles reposent également sur une dualité
d'objectifs nouveaux, visant à limiter l'incertitude pour éviter la survenance des
dommages.
393
A. La dualité de fondements juridiques
Les premiers reposent sur les huit principes traditionnels de droit international de
l'environnement mais aussi sur de nouveaux principes nouveaux de droit international
de l'environnement comme le principe d'accès des ressources à tous, d'autonomie
partagée des territoires détenteur de ressources naturelles.
Il précisait que: «c'est pour cette raison que le G20 a pris en main la construction
d’une nouvelle approche à la coopération. Pour faire en sorte que nos institutions
reflètent la réalité de notre époque, nous transférerons plus de responsabilités aux
économies émergentes à l’intérieur du Fonds monétaire international et leur donnerons
plus de voix. Pour bâtir de nouveaux marchés et aider les citoyens les plus vulnérables
du monde à se sortir de la pauvreté, nous avons établi un nouveau fonds en fiducie de
la Banque Mondiale pour appuyer les investissements en sécurité alimentaire et pour
financer des sources d’énergie propre et à prix abordable. Et pour assurer que nous
tiendrons nos engagements, nous continuerons à faire le point sur nos efforts et à en
faire le principal point de convergence au prochain Sommet du G20 à Toronto... »
Il concluait alors à la poursuite des efforts « pour faire la transition entre l’opération de
sauvetage de l’économie mondiale vers la promotion d’une croissance forte, durable et
équilibrée.... Inspirés par les réalisations de Pittsburgh, reconnue comme la ville des
ponts, nous pouvons nous rassembler de nouveau pour faire avancer nos intérêts
communs envers la relance économique tout en nous mettant vraiment à la page d’une
394
économie du 21e siècle. »
Son homologue, le premier ministre japonais, Naoto Kan988, a reconnu que «pour faire
en sorte que l’économie mondiale fasse la transition vers une croissance forte,
soutenable et équilibrée, nous devons tous continuer nos efforts jusqu’à ce que la
relance soit clairement sur la bonne voie. Nous devons aussi mieux comprendre
comment les politiques adoptées par les divers pays pourraient se conjuguer pour avoir
un impact sur l’économie mondiale». Il a ainsi rejoint le chef d’État américain en
reconnaissant l’apparition de nouveaux défis et que «jamais une intervention
internationale coordonnée n’a été aussi importante que présentement.... Alors que le
monde connaît de profonds changements, les sommets du G8 et du G20 au Canada et
la rencontre des dirigeants du forum de la Coopération économique Asie-Pacifique
(APEC) en novembre au Japon offrent de belles occasions.....».
Il a également précisé alors que cet effort doit être global car « l’économie mondiale a
traversé le pire de la crise, mais nous ne pouvons relâcher notre vigilance au sujet de
la présente conjoncture économique ». Mais à la différence de son homologue
américain, il distingue les défis environnementaux des défis économiques car il
considère que «le changement climatique est un « autre défi ». La menace du
réchauffement planétaire est réelle et la communauté internationale sera mise à
l’épreuve quant à sa capacité de déployer un effort concerté en vue de l’adoption d’un
nouveau document juridique complet. Le Japon s’est fixé l’objectif très ambitieux à
moyen terme de réduire, dès 2020, ses émissions de gaz à effet de serre de 25 pour cent
par rapport au niveau de 1990. Il entend jouer un rôle de premier plan dans les
négociations internationales. Nous ferons également la promotion active de
l’innovation verte en mettant en valeur les technologies environnementales du Japon ».
Il indiqua alors que le Japon dirigerait un «effort mondial, vers une protection intégrée
de la biodiversité et l’utilisation durable des ressources biologiques.. en sa qualité de
président de la dixième Conférence des Parties à la Convention sur la diversité
biologique ». Il conclut en indiquant « qu'alors que le monde traverse des changements
sans précédents, aucun pays ne peut, à lui seul, résoudre les problèmes mondiaux
s’engageant, il s'engage à affronter les défis de l’économie mondiale et les autres
problèmes mondiaux à l’intérieur des cadres de travail que sont le G20, le G8 et
l’APEC».
Au travers de cet exemple, peut-on voir que les fondements éthiques communs sont
présent mais restent fragiles. En effet comment interpréter la volonté japonaise? Le
droit international de l'environnement est-il alors considéré comme un simple «effort»
pour répondre aux impératifs sociaux économiques plus que juridiques? Le Japon
primerait-il sur une gestion anticipative ou simplement préventive ? Car suite à la
catastrophe de Fukushima de mars 2011, on peut s'interroger sur les objectifs
environnementaux japonais futurs. Une autre interrogation repose sur le contenu du
futur «document juridique complet» qu'a abordé le premier ministre : serait-il opposable
à tous les états ?
La mouvance d'une réforme juridique internationale est réelle mais elle repose sur un
socle où se retrouvent les huit principes traditionnels de droit international de
988 KAN Naoto, premier ministre du Japon, les responsabilités du Japon: Le G20, le G8 et l'APEC,
discours d'ouverture du sommet du G20 du 14 au 16 novembre 2014, Pittsburgh, Australie
395
l'environnement aux côtés de principes nouveaux de droit international de
l'environnement. Rappelons que les premiers sont les principes d'utilisation non
dommageable du territoire, de solidarité et de coopération, de développement durable,
des responsabilités communes mais différenciées, de prévention des dommages, de
précaution, du pollueur-payeur et de participation publique.
Les seconds, déjà évoqués, démontrent une évolution juridique, et représentent l'avenir
des questionnements juridiques en droit international de l'environnement.
Qu'il s'agisse du principe d'accès des ressources à tous, issu du principe d'accès à la
ressource eau, du principe d'autonomie partagée des territoires détenteurs de ressources
naturelles ou encore du principe de gestion raisonnée des ressources naturelles, la
réforme juridique en droit international de l'environnement doit permettre aux principes
de précaution, de prévention de rejoindre un principe de préservation partagé et
anticipé. Ce dernier, anticipatif, se retrouve alors en amont de la survenance des
dommages et permet la mise en place de l'approche inter-générationnelle de la gestion
des ressources naturelles, raisonnée.
396
2. Des fondements techniques contemporains
Les avancées technologiques des cinquante dernières années ont propulsé la société
internationale dans une ère technologique et robotique inégalée. Ces avancées dans le
domaine de la gestion des ressources naturelles se sont notamment retrouvés dans les
outils de détection des matières premières, au sol, aérien et même satellitaires. Les
moyens contemporains pour détecter des zones de risques, notamment naturels, à
l'échelle planétaire sont avant tout satellitaires, civils comme militaires. Ils sont utilisés
dans le domaine climatique pour la plupart.
Outils de prévention des ouragans, typhons, ces outils de prévention ne peuvent pas
encore prévenir de mouvements terrestres ou marins, comme des tsunamis ou des
tremblements de terre. A leurs côtés, d'autres outils de prévention, terriens, viennent
corroborer les données à grande échelle et nourrir une base de données nationale et
internationale.
Mais on peut se demander si cela semble d'une part pertinent et d'autre part suffisant.
En effet, les données techniques actuelles peuvent permettre de mieux anticiper les
risques, naturels ou technologiques, si leur interprétation était plus explicitée. Or, il
semble qu'un blocage entre l'état, les collectivités territoriales et ces dernières soit
posée.
Si l'on prend le cas de la France, force est de constater cette problématique sur le plan
national. Lors du Salon des Maires 2014989, s'agissant des risques naturels, et plus
précisément des risques côtiers, il a été relevé une sous-évaluation volontaire de ces
derniers. Cette dernière provient d'une insécurité juridique liée à un imbroglio juridique
mais aussi à l'absence réelle de gestion anticipative des risques.
989 JOANNES Jean-Marc, Les risques naturels suscitent l’inquiétude, salon des maires, la Gazette des
communes, actualités juridiques, 25 novembre 2014
397
«Big data») difficile. Autrement dit, la prévention des risques côtiers se révèle
inefficace en raison d’outils de communication peu intelligibles». Ils reconnaissent
pourtant que la prise de participation du grand public est une émergence positive mais
que «l’information participative, ce n’est pas de la prévention».
Cet exemple n'est pas isolé et se retrouve dans la majorité des États européens, et plus
gravement dans les États émergents. Ainsi les outils de prévention existants en matière
de gestion anticipative des risques doivent-ils faire l'objet d'un moratoire, qu'il s'agisse
des fonds d'indemnisation aux victimes, saturés de demandes des particuliers victimes
de dommages environnementaux, comme d'instrument juridique comme les plans de
prévention de risques.
Si l'on reprend l'exemple français, pour l'année 2014, le fonds Barnier habituellement
doté de presque deux cent millions d’euros, n'a pas pu faire face aux demandes
émanant des victimes d'inondations dans le Sud de la France990. Sur les seize mille
logements à risque présents sur la commune de Nîmes, une vingtaine a été rachetée
avec ce fond Barnier. La commune estime qu'il faudrait quintupler le budget du fonds
Barnier pour faire face aux événements climatiques. En 2010, mille deux cent victimes
placées en zone noire survivantes de la tempête Xynthia ont pu obtenir des aides
exceptionnelles pour racheter les maisons sinistrées.
Il faudrait donc doter les États de moyens juridiques réels, capables d'assimiler des
données scientifiques en faits juridiques. Or, cette ingénierie juridique particulière
demande des moyens humains nouveaux reposant sur une meilleure formation juridique
à la gestion anticipative des risques et un véritable accès aux connaissances
scientifiques. Cela nécessite alors peut-être en droit interne une réforme des textes en
vigueur. Cela concerne particulièrement la gestion optimale des ressources naturelles
génétiques, au travers des brevets, comme celle des ressources naturelles fossiles.
Sur le plan technique, si l'on prend l'exemple concret des plans de prévention de
risques, ces derniers sont aujourd'hui généralisés sur le plan international mais restent
encore marginalisés. Ainsi si l'on reprend le cas de la France, le Sénat à l'automne 2014
a proposé une résolution relative à un moratoire sur la mise en œuvre des plans de
prévention des risques technologiques issus de la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003
relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des
dommages et des lois subséquentes991.
990 IRMA, revue de presse de l'Institut des Risques Majeurs n° 453 du 26 novembre au 2 décembre
2014, article Europe 1 du 2 décembre 2014, actualités juridiques, le fonds Barnier submergé par les
demandes d’indemnisation
991 BEAUFILS Marie-France, SENAT, session ordinaire du 26 novembre 2014, proposition de
résolution n°128 relative à un moratoire sur la mise en œuvre des plans de prévention des risques
technologiques issus de la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques
technologiques et naturels et à la réparation des dommages et des lois subséquentes
398
B. La dualité d'objectifs juridiques
Les objectifs juridiques recherchés répondent à une problématique double car il faudrait
d'une part limiter l'incertitude pour éviter d'autre part les dommages futurs. Cette
problématique est à la fois simple et complexe car elle renverrait à la nécessité de
renforcer sur le plan juridique les dispositions existantes en élargissant le champ
d'application de ces dernières.
Pour limiter l'incertitude, une attention particulière doit être portée aux lignes
directrices visant à prévenir les risques environnementaux pour apprendre à mieux
anticiper ces derniers. Ce regard entre dans le champ d'action d'une stratégie juridique
environnementale en amont.
Un double objectif lié à limiter l'incertitude et visant à éviter les dommages est donc
nécessaire.
Toute activité génère une part d'incertitudes qu'on ne peut pas toujours prévoir. Les
anticiper n'est pas impossible mais reste difficile sur un plan technique et juridique. Une
fois leur survenance connue, les limiter peut permettre de mieux les appréhender.
Comment alors limiter juridiquement l'incertitude ?
La première démarche consiste à porter une attention particulière sur l'ensemble des
lignes directrices visant à prévenir un ensemble de risques.
Cet exemple démontre qu'un instrument juridique, quel qu'il soit, peut permettre de
limiter l'incertitude rattachée à une pratique. Qu'il s'agisse du tourisme d'observation en
mer de la faune, perturbant le cycle des mammifères marins, ou des énergies
992 Conservatory of migratory species ; Convention sur la conservation des espèces migratrices
appartenant à la faune sauvage du 23 juin 1979, entrée en vigueur le le 1er novembre 1983
399
renouvelables, la Convention de Bonn se veut solidaire du développement économique
mais attentive et contraignante à ses limites. Elle peut être considérée comme un
instrument de gestion raisonnée au sens de gestion équilibrée des milieux avec l'activité
humaine. L'identification des incertitudes entre dans le champ d'application de la
gestion anticipative des risques qu'il convient donc d'élargir en deux catégories: les
incertitudes probables, et les incertitudes improbables. Toute la subtilité juridique
consiste ainsi à identifier l'incertitude comme un élement d'insécurité juridique qu'il
convient ensuite de qualifier de grave ou suffisant grave pour échelonner en aval, le
degré de responsabilité et de réparation. Ainsi, l'identification des incertitudes permet de
limiter en amont un dommage environnemental futur ou potentiel.
La seconde démarche est de réfléchir à une nouvelle approche juridique, reposant sur
une gestion raisonnée parce que proportionnelle, adaptée et équilibrée dans l'exploration
et l'exploitation des ressources naturelles, en renforçant les modes opératoires de leur
exploration et en encadrant d'avantage leur utilisation finale, notamment par la gestion
adaptée de la conservation et de la valorisation.
Concernant cette dernière, on revient à l'idée de développer un fichier international des
ressources naturelles plus généralement, un fond mondial des données, englobant toutes
les ressources naturelles, fossiles et génétiques, pour répondre à la demande de la
société civile. La difficulté juridique se heurte à la difficulté technique de pouvoir
connaître avec précision, les quantités existantes des ressources naturelles
internationales, actuelles et futures. Elle se heurte également à une vision diplomatique
du droit international de l'environnement et au cadre d'action des gestions
environnementales territoriales.
L'exemple peut être pris au travers d'une proposition de résolution présentée par la
France à l'occasion de la vingtième conférence climat qui s'est tenue à Paris en 2015,
suite à la conférence des parties à la convention cadre des Nations-Unies pour les
changements climatiques de Varsovie dénommée « COP19 ». Cette proposition
sénatoriale993 suggère de mettre en avant l'économie circulaire comme un nouveau
modèle de « production et de consommation », réducteur de déchets à la source et
porteur d'emploi. Le décret n°2015-1827 du 30 décembre 2015994 portant diverses
dispositions d'adaptation et de simplification dans le domaine de la prévention et de la
gestion des déchets, parle de « transition vers une économie circulaire », uniquement
pour les professionnels des secteurs liés à la gestion des déchets. Or, une remarque
peut-être apportée à cette nouvelle vision sociétale.
Cette nouvelle approche porte alors sur le principe d'une société consommatrice de ses
déchets. Ces derniers sont alors de nouveaux types de ressources, non naturelles. Son
socle juridique ne repose pas alors sur un ensemble de droits et devoirs issus de la
993 Proposition de résolution sénatoriale du 4 novembre 214, présentée en application de l'article 34-1 de
la constitution visant à réduire les déchets et valoriser les ressources de l'économie circulaire
994 Décret n°2015-1827 du 30 décembre 2015 portant diverses dispositions d'adaptation et de
simplification dans le domaine de la prévention et de la gestion des déchets, JORF n°0303 du 31
décembre 2015 page 25239 texte n° 22
400
notion de « pater familias », visant à modifier les types de consommation actuels et
ainsi réformer les modes de gouvernances environnementales actuelles mais bien sur un
renforcement de la gestion optimale des ressources naturelles par la légitimation de ses
conséquences.
Car il ne faut pas se méprendre, la valorisation des déchets permet certes de limiter le
gaspillage, et atténuer la demande primaire en ressources naturelles, mais elle ne
l'éradique pas et ne modifie pas la consommation primaire.
401
2. Un objectif visant à éviter les dommages
Pour éviter un dommage, il est nécessaire de renforcer les contraintes pouvant peser sur
les auteurs. Ces contraintes sont d'ordre juridiques et financiers, elles sont aussi d'ordre
technique.
Qu'il s'agisse de la responsabilité environnementale sur le plan pénal, civil et
administratif, ou du rapport financier pour compenser la perte des ressources naturelles,
ou l'ensemble des mesures de compensation et les études d'impacts, ces mesures
existantes, même renforcées, se retrouvent à la survenance des dommages
environnementaux.
Or, pour éviter les dommages, il est judicieux d'établir des contraintes en amont de la
survenance des dommages. La gouvernance environnementale mondiale doit donc
reposer sur une approche de gestion, raisonnée des ressources naturelles, au travers
notamment d'une gestion anticipative des risques, incluant un ensemble de contraintes
reposant sur le principe de précaution et de prévention qu'il convient alors de renforcer.
Cela passe par le renforcement des études d'impacts ou d'études environnementales
antérieures à la réalisation d'un projet visant à modifier les milieux.
Mais il ne faut se méprendre sur la volonté proposée, car il ne s'agit pas de contraintes
restrictives au sens d'une lourdeur administrative supplémentaire, mais au contraire, de
contraintes bienveillantes, au vu de la notion de « pater familias », sur le plan
international.
A titre d'exemple, on cite celles portant sur le principe de précaution dans l'exploitation
du gaz de schiste, abordant la nécessité d'une transition énergétique au delà des énergies
fossiles et nucléaires. Suite au rapport Sonik du 25 septembre 2012 997, sur les incidences
sur l’environnement des activités d’extraction de gaz de schiste et de schiste
bitumineux, les institutions européennes ont présenté une proposition de moratoire sur
les autorisations américaines d’exploration et d’exploitation de gaz de schiste sur la
base du principe de précaution, suivie d'une proposition de résolution du Parlement
995 Convention d'Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et
l'accès à la justice en matière d'environnement, adoptée le 25 juin 1998 par la Commission
Economique pour l’Europe des Nations Unies (CEE-NU), entrée en vigueur le 30 octobre 2001
996Voir le site http://www.journaldelenvironnement.net/article/l-onu-epingle-les-energies-renouvelables-
europeennes30523, Consulté le 30 décembre 2014
997 BOGUSLAW Sonik, Les incidences sur l'environnement des activités d'extraction de gaz de schiste
et de schiste bitumineux, rapport INI n° 2011/2308
402
européen998 sur l'interdiction de l'exploitation de gisements de gaz de schiste par
fracturation hydraulique. Cette proposition d'interdiction, fondée sur l'article 133 du
règlement du Parlement européen, repose sur trois considérants techniques et
scientifiques: «A. considérant que pour faire face aux défis énergétiques, certains États
membres, comme la Pologne, ont délivré des permis d'exploration de gisements de gaz
de schiste; B. considérant que la méthode d'extraction actuelle (fracturation
hydraulique) consiste à forer de façon verticale et à propulser horizontalement et à
forte pression de l'eau, du sable et des produits chimiques; C. considérant que les
conséquences environnementales et sanitaires de cette méthode s'avèrent
préoccupantes au regard notamment des effets néfastes observés aux États-Unis; ».
403
Section II Le temps des engagements juridiques
Mais cela passe alors par deux étapes à savoir d'une part la reconnaissance juridique des
nouveaux enjeux environnementaux et d'autre part, la nécessité de réformes juridiques
tendant à cette reconnaissance.
404
§1 Une reconnaissance juridique de nouveaux enjeux environnementaux
Quand Barack Obama, futur président des États-Unis, lança dans sa première campagne
électorale, son slogan politique « yes we can », transposé sur le plan environnemental,
la capacité d'agir dépendrait alors de la volonté commune des États.
Ainsi la reconnaissance des nouveaux enjeux juridiques liée à cette nouvelle approche
juridique de gestion des ressources naturelles et sa gouvernance passent par un «yes we
must ».
405
A. La transposition en droit interne des principes fondateurs
Dans la pensée positive, rien n'arrive par hasard et il faut savoir percevoir dans chaque
étape, les moyens visant à améliorer une situation donnée. En ce sens, les catastrophes
naturelles sont de véritables catalyseurs juridiques car elles permettent de s'interroger
réellement sur l'évolution du domaine des responsabilités, la gestion juridique des
risques environnementaux majeurs ou pas, mais également sur la place de l’État et des
mécanismes de réparation.
La prise de conscience réelle en droit interne repose sur la notion même de risque.
Or, cette notion et son champ d'application ne sont pas toujours synonyme de clarté
juridique. Les principes fondateurs environnementaux et leur portée doivent alors être
revus.
L'auteur dépeint les modes opératoires du dispositif juridique mis en place depuis la loi
Barnier1000 et met en lumière l'insuffisance de prise en compte des risques qu'il qualifie
« d'évidents », notamment les submersions marines ignorées du législateur. Il relève
également les limites du principe de prévention, simplement basé en pratique sur les
contraintes de police. La négligence avérée d'une gestion préventive, anticipative en
999 LE LOUARN Patrick, La tempête Xynthia, révélateur des insuffisances du droit ? la Semaine
Juridique Edition Générale n° 19, 9 Mai 2011, page 565
1000 Loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement
406
aménagement opérationnel, foncier et une insuffisance d'information et de participation
citoyenne ont conduit à ne pas aboutir à une « gouvernance des territoires du risque ».
Les enjeux postérieurs porteraient ainsi « sur l'effectivité de la première prévention et
sur la mise en œuvre des deux autres ».
Son analyse propose des réformes nécessaires mais difficiles car « la situation et
l'imbrication des enjeux est si complexe qu'il faut aussi s'intéresser aux mécanismes qui
les déclenchent, institutionnels et juridiques, concernant la gestion des territoires et la
répartition des responsabilités, qui font qu'un maximum de risques est pris par un
maximum de personnes qui n'en ont pas fait le choix aussi librement qu'on peut le
penser. Dans ce jeu, l'autorité publique, avec ses outils de droit public, est l'acteur
principal».
Il ressort de cette analyse juridique qu'une d'une part, les communes françaises ne
connaissent pas véritablement leur territoire et que d'autre part, les acteurs
institutionnels ne sont pas suffisamment aguerris à la gestion transversale des risques,
naturels et technologiques.
1001 ANZIANI Alain, Les conséquences de la tempête Xynthia, Sénat n° 647, 7 juillet 2010, page 68
1002 DIEU François, note sous CAA Bordeaux, 31 août 2006, n° 04BX 00807, Sté arboricole et fruitière
de l'Agenais : RDI 2007, page 103 ; note sous CAA Bordeaux, 4 nov. 2004, n° 02BX00258, Préfet de
la Charente-Maritime. TA Amiens, 23 avr. 2007, n° 0601149 (EMA d'un zonage du PLU) ;A contrario
CAA Nantes, 26 déc. 2003, n° 02NT00213, SCI La Petite Prise à la Faute/mer.
407
non pas l'absence d'un cadre juridique, mais plutôt, sa portée délicate dans la pratique
juridique.
La gestion transversale des risques nécessite une connaissance certaine des données à la
fois topographiques d'un milieu, écologiques et scientifiques mais également
administratives et politiques. Le cadre juridique permet de poser une protection et des
limites mais ne peut à lui seul, s'ériger comme un instrument unique. Il doit donc se
nourrir d'avantage des données extérieures et les retranscrire pour permettre
l'émergence d'une gouvernance solidaire, efficace et réactive.
408
2. Une portée juridique nouvelle
Or, il précise qu'il n'existe pas encore d'étude réellement menée sur les effets de ces
prises de prévention en matière d'aménagement urbain. Et qu'ainsi, les questions de
coopération intercommunale relatives à un plan d'aménagement global d'un ensemble
de territoires contigus soumis au même risque, propre à l'esprit du législateur
demeureraient. Cela passe alors par une modification de la loi littoral.
Pour élargir cette analyse à tous les risques environnementaux, internationaux, qu'ils
soient en zone montagne, rurale, ou urbaine, il convient ainsi de pouvoir réinventer, ou
toute simplement d'inventer, de nouvelles stratégies territoriales axées sur les risques
présents sur les territoires concernés, en lien avec les aménagements présents et à venir.
Cette nouvelle vision du territoire passe alors par une véritable coopération inter et intra
communautaire nouvelle, supposant alors formation des acteurs institutionnels locaux et
échange des savoirs-faire et être locaux.
Cela suppose aussi qu'on requalifie sur le plan international l'ensemble des ressources
naturelles. Reconnues sur le plan international, comme « patrimoine commun de
l'Humanité », toutes les ressources naturelles, au même titre que les ressources en eau
en 20101003 et 20131004, sont alors perçues comme étant susceptibles de subir des risques
irréparables. Or, l'absence du caractère rare des ressources naturelles, ainsi que celui du
caractère fragile de ces dernières réitèrent la discussion juridique portant sur
l'opportunité d'ouvrir la notion de patrimoine commun aux ressources naturelles,
perçues ici comme « remarquables » parce que rares et fragiles.
La gestion du gaz de schiste aux États-Unis et au Canada, reste l'exemple flagrant d'une
insécurité juridique actuelle réelle, basée sur l'absence d'un vrai débat juridique autour
de l'encadrement des pratiques à risques et notamment des tensions hydro-
morphologiques et sismiques générées par l'exploitation de cette nouvelle ressource.
L'exemple de la gestion internationale des risques nucléaires démontre aussi une limite
au principe de prévention, de solidarité et coopération.
Ces risques, récents et nouveaux, restent à part dans la typologie des risques
environnementaux. De part d'abord leur nature particulière, liée à la dangerosité de
leurs conséquences à la fois pour la Biodiversité et l'Homme. Mais également pour la
fragilité de son cadre juridique international et national. Les événements de Tchernobyl
en 1986 et plus récemment de Fukushima ont conduit l'ensemble des États à s'interroger
sur le principe de prévention, de solidarité et de coopération dans ce domaine.
1003 AGNU, Résolution 64/292 du 28 juillet 2010 relatif au droit fondamental à l'eau et à
l'assainissement
1004 AGNU, Résolution 24/18 du 27 septembre 2013 portant sur les droits de l'homme; AGNU,
Résolution A/C.3/68/ du 19 novembre 2013
409
Car au delà de la gestion des ressources naturelles, se pose la problématique en aval de
la gouvernance en matière de sûreté nucléaire internationale sur le plan technique et
juridique. La conférence internationale sur les aspects médicaux légaux d'un désastre
nucléaire et les droits de l'Homme, qui s'est déroulée à l'université de Waseda, au
Japon1005 a démontré l'existence d'un cadre juridique international fragile, une trop
grande interdépendance entre l'OMS et l'AIEA, un droit d'accès à l'information
nucléaire limité et opaque pour le grand public, et surtout un sentiment d'impuissance
face aux conséquences sur les générations futures. L'ensemble des structures nucléaires
première génération nécessite un renforcement de leur robustesse face aux événements
à caractère exceptionnel.
Les catastrophes naturelles, tel les submersions marines et les tremblements de terre
restent une problématique majeure dans des États tel que le Japon. La problématique
juridique repose alors sur la gestion anticipative des risques liés à la gestion de l'énergie
nucléaire sur un territoire donné. Cette problématique grâce à la catastrophe de
Fukushima a démontré qu'une nouvelle vision des risques doit voir le jour et que sa
gestion doit être transversale et anticipative à savoir qu'elle pouvait être en mesure de
dénoncer l'ensemble des données techniques propres au mode de fonctionnement de la
centrale, mais également fournir un cahier des charges des droits d'information au grand
public au titre des dispositions de la convention internationale d'Aarhus.
Cette gestion anticipative des risques demande alors une coopération entre la société
civile, vivant proche des sites à risques, l'équipe scientifique, les services d'urgence et
l'ensemble des élus présents.
Cette coopération se base notamment sur de la formation permanente au droit nucléaire,
des échanges sur les modes de gestion et d'alerte. La désinformation nuisant au bon
fonctionnement des sites, cette nouvelle vision d'une coopération itérative permet de
réguler la peur liée à l'exploitation des sites.
La catastrophe de Fukushima a également démontré la problématique liée au
financement des déplacements des populations sinistrées, aux fonds d'indemnisation et
garanties financières, à l'émergence de nouveaux types de dommages non reconnus
juridiquement tel que celui de la peur, ou encore de la perte de valeurs liés à la vie
rurale. Plus généralement, elle pose le problème de la reconnaissance d'un dommage
nucléaire à part entière pour la première fois et de la délicate question de savoir lequel
des droits fondamentaux, doit-on protéger en droit: est-ce ceux de l'Homme ou ceux de
la Nature ?
Ici, la pratique juridique japonaise a démontré depuis 2011 que le dommage écologique
n'a pas été reconnu après la catastrophe, non par déni, mais plutôt par réactivité face au
danger humain encouru. Les autorités japonaises et l'exploitant du site, Tepco, ont ainsi
géré la catastrophe en limitant la zone grise, définie par l'équipe de Mme Sigita, de
l'ENS de Lyon, comme « le territoire hors zone officiellement évacuée mais contaminée
ou suspectée de l'être »; et en mettant en œuvre des médiations gérées par un comité de
règlements des conflits composé de plus de deux cent avocats, dont la plupart
travaillaient pour l'exploitant Tepco.
Plus largement, cette catastrophe a démontré d'autres problématiques liées au
financement du démantèlement des centrales nucléaires sur le plan international, la
transition énergétique globale et transnationale, le retraitement des déchets sur le plan
1005 International symposium on legal medical aspects of nuclear disaster and human rights. Ocober 14-
15 2014, Waseda university. Japon
410
international et notamment leur enfouissement.
411
B. La reconnaissance jurisprudentielle internationale
Peut-on alors se demander si on ne va pas vers une consécration d'un droit spirituel en
droit international de l'environnement ? La question reste pour l'instant sans réponse
mais le droit international de l'environnement tend vers une consécration de droits
émanant du droit naturel.
La Cour Internationale de Justice a affirmé 1006 que « l'obligation pour tout État de ne
pas laisser utiliser son territoire aux fins d'actes contraires aux droits d'autres États ».
Cette obligation d'utilisation non dommageable du territoire découle du principe
d'égalité et réciprocité des droits souverains, dans les domaines des politiques locales
d'aménagement du territoire et celui de la souveraineté absolue sur les ressources
naturelles, sans préjudice du droit des tiers.
Ainsi, le fait générateur des dommages affectant des territoires très éloignés du lieu
d'origine des ses activités, repose sur l'obligation résultant du principe d'utilisation non-
dommageable mais présente un caractère relatif car on peut entraver l'initiative visant
412
des effets transfrontaliers1009.
Depuis 2004, la haute juridiction a également reconnu un droit à réparation pour les
populations1012, notamment en paragraphe 34, la « dépossession des terres affectant
l'alimentation, les références culturelles, les savoirs locaux...». Elle renchérit en
reconnaissant « un préjudice moral d'une nature particulière sur la reconnaissance de
pollutions génératrices de maladies spirituelles et psychiques des indiens mawana ».
Elle précise « l'existence juridique d'un dommage frustrant un projet donnant un sens à
la vie1013 », déjà reconnu en 19981014.
Depuis lors, si son président Mr Mickel Bernando Lopez reconnaissait déjà en 2000 que
« les cultures sont une pierre à la base de la pyramide dans l'universalité des droits de
l'homme », la Cour aurait reconnu l'existence d'un lien juridique entre la propriété et la
vie des autochtones1015.
1009 DUPUY Pierre Marie, La responsabilité internationale des Etats pour les activités d'origine
technologique et industrielle, Pedone, Paris, 1976, 190 pages, page 30 et ss
1010 CIDH, arrêt comunidad mayagna awas tingni vs nicaragua, 31 aout 2001
1011 CIDH, arrêt comunidad yakye axa vs paraguay, 17 juin 2005
1012 CIDH, arrêt masacre del plan de snachez vs guatemala, 29 avril 2004
1013 CIDH, arret comunidad mawana vs surname, 15 juin 2005
1014 CIDH, arrêt loayza tamayo, 27 novembre1998
1015 CIDH, arrêt comunidad indigena sawnoyamoxa vs paraguay, 29 mars 2006
1016 Suprem Court of Philippines, Juan Antonio Oposa et al., contre Honbl Fulgencio, july 30, 1993,
Judicial Review, Environmental Cases brought before the judiciary. Environmental Cases in the
Philippines, 1998
1017 RIOUFOL Véronique, Droits économiques et sociaux culturels, CEDIDELP, article du 1er janvier
2005
413
Oposa en précisant le droit à un environnement sain et équilibré et en faisant progresser
la protection de l'environnement, notamment en reconnaissant la notion de «gaspillage
dissipateur des ressources forestières du pays » en 19941018.
La Cour, indiquait Mme Rioufol, «a affirmé le rôle décisif du gouvernement local dans
la protection de l’environnement1019 . Elle a pu établir la validité de plusieurs
réglementations gouvernementales qui visent essentiellement à interdire la pêche au
cyanure. La Cour a ordonné aux instances législatives de la ville de Puerto Princesa et
de la Province de Palawan de faire preuve de la volonté politique nécessaire en
adoptant d’urgence la législation requise pour protéger et améliorer l’environnement
marin, et en prenant ainsi part à la tâche herculéenne d’arrêter la vague de destruction
écologique. Elle a exprimé l’espoir que d’autres services du gouvernement local
sortiraient ainsi de leur léthargie et adopteraient une attitude plus vigilante dans la
bataille contre la décimation du secteur de la pêche et des ressources aquatiques
philippines, qui sont l’héritage des générations futures».
Deux autres décisions1023 ont confirmé l’interprétation de cet article au titre d'un droit à
vivre dans un environnement non pollué. L'auteur indique à ce titre, que « dans le
42ème amendement de 1976, les articles 48(a) et 51(a) (g) mentionnent la
responsabilité du gouvernement central et des citoyens dans la protection et
l’amélioration de l’environnement, ainsi que dans la sauvegarde des forêts et des
1018 Suprem Court of Philippines, Ysmael v. Deputy Executive Secretary 190 SCRA 673, 684. july 31,
1994
1019 Suprem Court of Philippines, Tano, et al. v. Socrates, et al. 278 SCRA 154, 3 agost, 1997
1020 KRICHEWKY Damien, La régulation sociale et environnementale des entreprises en Inde, les
études du CERI, n°155, juin 2009
1021 Suprem Court of India, M.C Metha vs. Union of India, december 5 1987
1022 Suprem Court of India, Subhash Kumar contre l'Etat de Bihar, fébruary 4 1991
1023 Suprem Court of India, M.C. Mehta vs. Union of India, april 15, 1992 ; Suprem Court of India,
Virender Gaur vs. State of Haryana, july 6 1995
414
espèces sauvages ». La Cour a également reconnu la notion de développement
durable1024 comme « condition sine qua non pour le maintien d’un équilibre
symbiotique entre le droit au développement et le développement» et celle d’équité
inter-générationnelle pour statuer en faveur de la protection des ressources
forestières1025.
Elle énumère les outils et les moyens de réflexion qui conduisent le juge à se
positionner et conclut en indiquant que le « juge européen et le juge national utilisent
des outils juridiques différents, mais non antagonistes, afin de parvenir à une garantie
optimale du droit de l'environnement sain » et que « chaque système vise à protéger
l'individu en rétablissant un juste équilibre entre les intérêts publics et privés en
présence ».
1024 Suprem Court of India, N. D. Jayal vs. Union of India, july 25 2003
1025 Suprem Court of India, State of Himachal Pradesh vs. Ganesh Wood Products, octuber 21, 1996 ;
Suprem Court of India, Vellore Citizen Welfare Forum vs. Union of India, november 5, 1996
1026 MERINO Muriel, Protection de l'individu contre les nuisances environnementales, de la
jurisprudence de la cour européenne des droits de l'homme au système juridictionnel national de
protection, revue trimestrielle des droits de l'homme, n°65, 2006
415
2. Une reconnaissance jurisprudentielle limitée
Aussi, si l'on regardait la jurisprudence dégagée par la Cour Suprême des Philippines,
Mme Rioufol énonce la difficile conciliation entre protection environnementale et
réalité économique et internationale.
L'auteur indique alors que la Haute Cour des Philippines rejoint la vision de la Cour
Inter-américaine des Droits de l'Homme au sens où « les conceptions traditionnelles de
la propriété devraient accommoder de plus en plus une responsabilité de protection de
l’environnement.. » . Mais elle précise qu'il serait souhaitable que « les notions
conventionnelles de valeur incorporèrent le concept de coûts environnementaux. ...».
Enfin, l'auteur énonce que s'agissant de « conventions internationales, la Cour doit
trouver les moyens d’accorder une reconnaissance et de donner vie aux engagements
internationaux, même si, comme c’est souvent le cas, il n’existe aucune législation pour
les mettre en vigueur. ...».
D'autre part, chaque système juridictionnel se bat avec les moyens dont il dispose. Et
ces derniers restent pour la plupart, très disparates d'un État à un autre. Car ce n'est pas
tant la situation géopolitique d'un État qui met en avant une jurisprudence riche en
protection environnementale, mais plutôt la stratégie environnementale juridique qu'un
État veut bien se doter en droit de l'environnement et protection des ressources
naturelles.
Ainsi, les exemples indiens et philippins, dans le domaine des ressources naturelles en
eau, ont démontré une avancée notoire de reconnaissance des atteintes aux ressources
naturelles et leurs conséquences. Ainsi, l’accès à l’eau potable en Inde est passé « de 86
% en 1997 à 81 % en 2006, et la part des réservoirs naturels en état critique devrait
passer de 15 % à 60 % d’ici 2030 ou que « 24 % des 83 plus grandes villes indiennes
en 2004 présentaient une qualité d’air considérée comme dangereuse1027 ».
Cet antagonisme unique démontre que la sécurité juridique internationale reste fragile
dans ce domaine même si le système juridictionnel mondial s'est renforcé.
1027 KRICHEWKY Damien, la régulation sociale et environnementale des entreprises en Inde, les
études du CERI, n°155, juin 2009
416
Les nouveaux défis liés à la transition énergétique n'ont pas crée pour leur part une
véritable transition juridique environnementale car chaque État reste à la recherche de
sa propre transition et l'absence de dialogue avec la société civile demeure accompagné
d'une opacité des vrais enjeux énergétiques de demain. La jurisprudence internationale
dans ce domaine reste encore à ses balbutiements.
Enfin, il conviendra de rester prudent sur les litiges futurs issus de la violation du
Protocole de Nagoya, notamment de l'article trois précisant que « Le présent Protocole
s’applique aux ressources génétiques qui entrent dans le champ d’application de
l’article 15 de la Convention ainsi qu’aux avantages découlant de l’utilisation de ces
ressources. Le présent Protocole s’applique également aux connaissances
traditionnelles associées aux ressources génétiques qui entrent dans le champ
d’application de la Convention et aux avantages découlant de l’utilisation de ces
connaissances».
417
§2 Une reconnaissance juridique de nouveaux outils de gestion
Ces outils au départ peu nombreux se sont au cours des trente dernières années, étoffés
autour de l'expertise environnementale, au départ confiée aux scientifiques, puis se sont
ouverts à des outils contemporains comme le mécanisme de la compensation.
418
A. Le renforcement juridique de l'expertise environnementale
Maître Laurence Lanoy, avocate, indiquait en 2011, que « l'intervention du juge civil
dans les litiges liées à un passif environnemental est de plus en plus fréquente,
notamment en matière de sites et sols pollués. Il assure l'articulation entre les
obligations au titre des polices administratives et les rapports de droit privé...et les
interventions du juge civil comme de l'expert judiciaire se portent sur les domaines de
responsabilité délictuelle, contractuelle et les procédures collectives...1028 ».
Si l'on prend le cas européen, la Directive 96/82/CE du 9 décembre 1996 dite Séveso II,
relative à la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances
dangereuses, définit la notion de risque de « probabilité qu’un effet spécifique se
produise dans une période donnée ou dans des circonstances déterminées ». L'approche
juridique des risques naturels et technologique est donc hybride et ce paradigme
juridique conduit alors à l'absence d'une cohérence et de transparence dans les modes de
gestion anticipative des risques environnementaux.
Cette appréciation, pour le cas de la France, repose sur l'évaluation in concreto des
troubles de jouissance environnementaux et de leur réparation 1029, sur l'identification du
responsable1030, l'appréciation de la faute commise1031, l'appréciation des préjudices et du
1028 LANOY Laurence, Le rôle des experts judiciaires dans le renforcement du contentieux civil envi-
ronnemental, CNEJE, 15 novembre 2011
1029 CA Paris, 28 janvier 2009, Société coopérative de commercants, n°07/20526
1030 Cass civ 3ème, 17 novembre 2004, Société Dassault, n°03-14.038
1031 CA Paris, 23 janvier 2008, Société Sidec, n°05/0034
419
lien de causalité1032, l'estimation des mesures de réparation par équivalence1033. Mais
aussi sur le respect de l'obligation d'information au titre des dispositions
réglementaires1034.
Or, chaque État définit au niveau national, une politique de connaissance des risques, et
chaque institution locale définit à son tour sa propre politique de connaissance des
risques locaux. Cette politique est menée grâce à une approche pluridisciplinaire qui
implique un grand nombre d’acteurs, notamment des services techniques et des
établissements publics, agissant sous la tutelle du Ministère de l'environnement.
La connaissance des risques peut aussi passer par l'élaboration de cartes d'aléas, des
atlas, documents non opposables, sous maîtrise d'ouvrage communale. Cette politique
des risques s'appuie alors sur la cartographie des risques passés, l'analyse des risques
potentiels et à venir, toujours au vu de références centenaires déterminés. S'agissant de
la connaissance des risques technologiques, celle-ci reste plus aléatoire car elle repose
sur des aléas technologiques de défaillance matérielle ou humaine, impossibles à
déterminer à l'avance mais qui peuvent faire l'objet d'une politique de maintenance et de
gestion du personnel particulières.
420
cadre international existant1036, le cadre normatif international français 1037 s'est renforcé,
en créant une Agence Nucléaire Indépendante1038 mais que ce dernier reste peut-être
encore insuffisant concernant les règles de sûreté.
1036 Convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté de la gestion
des déchets radioactifs du 29 septembre 1997 entrée en vigueur le 13 novembre 2011 ; Convention sur
la sûreté nucléaire du 20 septembre 1994 entrée en vigueur le 8 novembre 1996; Convention du 26
septembre 1986 sur l'assistance en cas d'accident nucléaire ou de situation d'urgence radiologique
entrée en vigueur le 6 octobre 1986; Convention sur la notification rapide d'un accident nucléaire,
adoptée à Vienne le 26 septembre 1986, entrée en vigueur le8 juin 1989 ; Convention de Bruxelles du
31 janvier 1963 complémentaire à la convention de Paris du 29 juillet 1960 sur la responsabilité civile
dans le domaine de l'énergie nucléaire, amendée par le Protocole additionnel du 28 janvier 1964 et par
le Protocole du 16 novembre 1982, entrée en vigueur le 28 juin 1964 ; Convention relative à la
responsabilité civile dans le domaine du transport maritime de matières nucléaires (NUCLEAR 1971)
de Bruxelles le 17 décembre 1971, entrée en vigueur le 28 décembre 1972; Convention de Paris du 29
juillet 1960 sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire amendée le 28 janvier
1964 et le 16 novembre 1982, entrée en vigueur le 7 octobre 1988
1037 loi n°2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, dite
loi « TSN » ; Décret n°2007-1557 du 2 novembre 2007 relatif aux installations nucléaires de base et
au contrôle, en matière de sûreté nucléaire, du transport de substances radioactives ; Arrêté du 7
février 2012 fixant les règles générales relatives aux installations nucléaires de base ; Arrêté du 6 août
2014 portant homologation de la décision n° 2014-DC-0443 de l'Autorité de sûreté nucléaire du 15
juillet 2014 fixant les limites de rejets dans l'environnement des effluents liquides et gazeux des
installations nucléaires de base
1038 Directive n°2014/87/Euratom du 08/07/14 modifiant la directive 2009/71/Euratom établissant un
cadre communautaire pour la sûreté nucléaire des installations nucléaires
421
2. Une portée de la preuve de l'expertise environnementale élargie
Ainsi une culture d'indépendance des autorités nucléaires émerge alors que
paradoxalement, le savoir-faire immatériel des ingénieurs nucléaires internationaux de
la première génération est, lui, entrain de se perdre.
1039 PRIEUR Michel, Discours d'ouverture, in International symposium on legal medical aspects of
nuclear disaster and human rights, Waseda university, Japon, October 14-15, 2014
422
La troisième repose sur la nature même du dommage car un expert n'estime que ce pour
lequel il a été mandaté par décision judiciaire. Et le magistrat rend une ordonnance au
vu des conclusions des parties. Il serait donc judicieux de porter une attention
particulière sur la demande d'expertise, en incluant non simplement au vu des
circonstances actuelles, mais au vu des générations futures, l'évaluation des désordres
actuels, pouvant être liés à un vice caché ou à un dol 1040, et ceux à venir, ainsi qu'une
délimitation élargie du champ d'exploration ou d'investigation.
Ainsi les dommages futurs, comme des frais de dépollution futurs ou encore des
dommages liés à l'exécution des travaux de remise en état, pourraient être pris en
compte1041. Les indices conduisant à l'établissement des dommages seraient alors
étudiés de façon à déterminer s'il s'agirait de probabilités, de facteurs de certitudes ou
de véritables moyens de preuve, à la manière des techniciens de scènes d'infraction.
1040 Cass, 3e civ., 8 juin 2006, n°04-19.069 ; CAA, SCI Erika, 25 mai 2011, n°09-16.677
1041 Cass civ 3ème, Société Sofi, 15 décembre 2010, n°09-70.538
1042 DALIGAND Liliane, syndrome post traumatique spécifique et préjudice d'angoisse, CERDACC
EA 3812, document RISEO 2011-3, consultable sur le site http://www.iso.org
1043 Cass, 2e civ., 18 septembre 2008, n°07-17.640
423
Une révision de l'ISO1044 a permis de faciliter les discussions entre professionnels des
risques, tous secteurs confondus. Ainsi, la nouvelle définition abandonne la vision
classique d'ingénierie, définissant le risque comme « la combinaison de probabilité
d’événement et de sa conséquence », pour rendre les risques aux objectifs de
l’organisation et le définir ainsi comme « l’effet de l’incertitude sur les objectifs ».
Si l'on ramène cette définition, sur le plan juridique, comment définir alors
juridiquement l'effet de l'incertitude et sur quels objectifs ?
Rapportée à la gestion des ressources naturelles, comment alors définir juridiquement la
nature et le champ d'application d'un risque acceptable et inacceptable a contrario.
Existe-t-il alors des risques environnementaux objectifs acceptables et inacceptables, ou
ces derniers seraient-ils purement subjectifs ?
Quelles en seraient la limite ? Existerait-il alors une culture juridique du risque ?
Olivier Clerc, professeur de droit à l'université de Corse, dénonce la notion de
« modernité réflexive », basée sur la notion de risque « acceptable ». David Melloni,
professeur de droit à l'université de Haute Alsace, définit le risque comme subjectif 1045
et l'entend comme la « rencontre entre un aléa et une vulnérabilité »qui dépendrait ainsi
d'un événement extérieur, imprévisible et irrésistible et de la rencontre des cultures
territoriales visant à gérer cet événement. Le risque ne serait donc pas une incertitude
mais une probabilité quantifiable juridiquement.
Or, pour un expert, un dommage environnemental peut être lié à un risque collectif, en
amont mais surtout en aval, et cette dernière notion n'est pas consacrée en droit. Même
si David Melloni reconnaît que la Doctrine a reconnu la notion de « droit des
catastrophes », à la demande du Professeur Lienhard, force est de constater qu'on ne
parle pas donc pas de «droit des risques collectifs». Et les modalités de réparation liées
à ces dernières reposent sur la reconnaissance administrative de ces catastrophes, puis le
mise en œuvre des assurances.
1044 Guide 73 :2009, Management du risque , consultable en ligne sur le site http://www.iso.org
1045 CLERC Olivier, La modernité réflexive, MELLONI David, qu'est qu'un risque collectif ?
CERDACC EA 3992, document RISEO 2010-1, consultable sur le site http://riseo.com
424
B. Le renforcement juridique de la médiation et de la compensation
environnementales
Les principes de leur pratique sont donc reconnus, mais leur domaine d'application reste
encore méconnu, surtout sur le plan environnemental.
Codifié en droit interne français depuis vingt ans 1047, cet outil juridique propose une
nouvelle vision culturelle du conflit et de la procédure judiciaire, un autre
« management des juridictions » comme l'indique Loïc Cadiet, enseignant et président
de l'association internationale du droit processuel.
Pour conduire une médiation vers la résolution du différend, le médiateur doit répondre
à une triple exigence déontologique d'impartialité, de neutralité et d'indépendance. Il
doit également posséder des qualités d'écoute particulières, socle d'une assise psychique
solide. De ses qualités dépendent la réussite de la procédure de médiation. Les socles de
valeurs des sociétés contemporaines ayant muté vers un individualisme sociétal, la
question liée à la perte de l'identité des valeurs communautaires s'est posée.
425
responsabilités. Aussi, cet outil réaffirmé pourrait, comme l'indique Jean-François Six,
propulsé le XXIème siècle comme celui du « temps des médiateurs 1048 ».Car ces
bâtisseurs de nouveaux rapports sociaux peuvent rendre les acteurs sociaux
responsables de leur destin.
Le seul frein reste lié à la vision du juge de la médiation environnementale qui peut y
voir une voie incertaine pour les parties, l'issue relevant des volontés communes des
parties et de la qualité du médiateur. Mais ce risque n'est pas constitutif d'une insécurité
juridique car l'outil contribue directement à la régulation judiciaire.
La complexité juridique actuelle repose alors sur la nature exacte des modes opératoires
d’évaluations qui sont à la base du principe de la compensation. Car il revient d’établir
un lien de causalité entre le dommage et les mesures compensatoires.
1048 SIX Jean-François et MUSSAUD Véronique, Le temps des médiateurs, éditions du Seuil, 2002
1049 MEDDTL, communiqué de presse du 10 aout 2010, consultable sur http://file:///C://Downloads
/dossier-de-presse-efficacite-energetique.pdf
1050 ONU, Objectifs du Millénaire pour le Développement, éditions 2015, consultable sur
http://www.undp. org /content/undp/fr/home/mdgoverview/mdg_goals/mdg8/
426
2. Une portée juridique transversale
La problématique juridique réside alors sur la pratique réelle auprès des acteurs
institutionnels. Qu'il s'agisse des services de l’État ou du corpus des magistrats, la
médiation environnementale reste encore une exception, non un principe. Or la pratique
reste liée à la connaissance de cet outil. Et la formation de la médiation auprès des
magistrats reste aléatoire car la force des habitudes reste un défi à dépasser. La présence
de médiateurs judiciaires auprès de cours d'appel, spécialisés en droit de
l'environnement, reste rare.
Or, l'approche inter-générationnelle des ressources naturelles mondiale repose sur une
gestion transversale, garante d'une meilleure gouvernance des territoires. L'évaluation
des vulnérabilités et des risques environnementaux peut se réaliser grâce à cette
approche. Cette dernière peut donc reposer sur la médiation environnementale, outil
adapté à la gestion anticipative et post réactive des risques environnementaux. Outil
juridique préventif comme curatif à la survenance du dit dommage, la médiation
environnementale allie droit positif et droit naturel car au delà du fait qu'elle doit être
perçue comme un lien reliant la Nature et l'Homme, elle a l'indéniable avantage de
permettre d'établir en amont comme en aval une gouvernance participative active, où
chaque acteur reprend sa place, dans le dialogue et dans les responsabilités.
Fathi Ben Mrad précise que « l’équité, la neutralité et la responsabilisation sont des
principes récurrents et incontournables pour circonscrire le champ de la médiation par
rapport aux autres modes de régulation 1052». L'auteur distingue la pratique de la
conciliation ou de l'arbitrage au sens où «il est courant d’entendre que la médiation se
distingue de la conciliation dans la mesure où cette médiation doit s’exercer en dehors
d’un espace de soumission à un pouvoir institutionnel. Cette absence de soumission est
l’une des conditions du respect des principes de neutralité et d’impartialité. Il est aussi
commun de différencier la médiation de l’arbitrage en soulignant l’absence de
responsabilisation des parties dans les accords puisque les fonctions de l’arbitre se
caractérisent par le pouvoir de trancher un différend. Les décisions dans les
procédures d’arbitrage émanent d’une tierce personne alors qu’en médiation, on a
l’habitude de dire qu’elle ne doit ni imposer son point de vue, ni défendre l’une des
parties, mais s’appuyer sur leur responsabilité individuelle et les considérer comme de
véritables acteurs pouvant trouver des solutions à leur conflit. Au contraire de
l’arbitrage, le principe d’équité serait respecté en médiation puisqu’il ne dérogerait
pas à la préservation du libre arbitre des parties, à la prise en compte de leurs attentes,
et au sentiment qu’elles considèrent que les règles de justice qui s’appliquent à elles
soient «justes».
L'auteur précise que «la logique de la raison juridique ne doit pas se substituer à la
1051 DELMAS GOYON Pierre, Le juge du 21ème siècle, Ministère de la justice, décembre 2013
1052 BEN MRAD Fathi, Négociations, 2006/1 , n°5, Editions De Boeck Supérieur, 2006, 100 pages
427
logique auto-productive de règles élaborées par les intéressés » car « la légitimité de
ces règles se fonde, non pas sur l’existence d’une normativité externe (loi ou
jurisprudence, par exemple), mais sur des processus résolutifs endogènes et
individualisés, permettant aux intéressés de s’accorder sur une partie, ou sur
l’ensemble des éléments qui les opposent ».
1053 BONAFE-SCHMITT Jean-Pierre, Évaluation des effets des processus de médiation, cahiers
informations sociales, 2012/2, n° 170, éditions CNAF, 2012
428
juridique international et transnational, peut servir de socle à la création d'une cellule
internationale d'« environmental ombusman », transposable au plan transnational Car
cet outil permet alors au magistrat quelque soit sa nationalité, d'être selon Mme
Armandet Sylvie, conseiller à la Cour d'Appel d'Aix en Provence, un « faiseur de paix »
comme « de remplir une de ses missions essentielles, à savoir rétablir, ou maintenir la
paix sociale1054 ».
L'article 58 dernier alinéa stipule que «Sauf justification d'un motif légitime tenant à
l'urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu'elle intéresse l'ordre public,
la requête ou la déclaration qui saisit la juridiction de première instance précise
également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du
litige. Elle est datée et signée»
L'article 127 indique que «S'il n'est pas justifié, lors de l'introduction de l'instance et
conformément aux dispositions des articles 56 et 58, des diligences entreprises en vue
de parvenir à une résolution amiable de leur litige, le juge peut proposer aux parties
une mesure de conciliation ou de médiation ».
Car même si un droit à nuire n'est pas reconnu, la compensation environnementale peut
être perçue comme tel, notamment lorsqu'on l'applique à la ressource naturelle de l'air et
qu'on analyse le principe établi par le protocole de Kyoto concernant les crédits-
carbone. Compense-t-on vraiment l'environnement ou ne serait-ce pas réellement un
outil technique et juridique légalisant les comportements à risque ? Les crédits-carbone
responsabilisent-ils les pollueurs ? La question juridique reste posée, notamment au
regard du cinquième rapport du GIEC de novembre 2014.
1054 ARMANDET Sylvie, Expérimentation de la médiation civile au TGI de Montpellier, Revue justice
actualités, n°12, décembre 2014, 150 pages, page 90
1055 Décret n° 2015-282 du 11 mars 2015 sur les modes alternatifs de résolutions des conflits, publié au
Journal Officiel du 14 mars 2015
429
problématique juridique repose dans ce domaine, sur le fait que ces mesures restent
pour l'instant, purement objectives et non subjectives.
430
Les réflexions entamées dans ce second chapitre permettent d'établir que le temps des
réformes reste lié à une volonté globale visant une autre approche juridique de la
gestion mondiale des ressources naturelles.
Au travers d'une politique internationale cohérente comme des avancées techniques au
service du droit international de l'environnement, et malgré les interactions existantes
sur l'avenir des espaces internationaux, les États tendent doucement vers une autre
approche juridique contemporaine de la gestion des ressources naturelles mondiales.
431
En conclusion de ce premier titre, force est de constater que même si une profonde
mutation juridique internationale s'organise autour d'une autre approche contemporaine
juridique de la gestion des ressources naturelles mondiales, raisonnée parce
qu'équilibrée et proportionnelle, le principe inter-générationnel et de transversalité des
ressources naturelles et sa portée restent liés à une triple volonté internationale,
juridique, politique et technique.
Pour que cette volonté internationale soit effective et durable, une orientation prudente
doit reposer sur une vision transversale des modes de gouvernance et de gestion actuels
des ressources naturelles.
432
TITRE II.
L'APPROCHE PRUDENTE A UN AUTRE RATTACHEMENT
DES RESSOURCES NATURELLES
433
434
Lorsqu’on évoque la gestion des ressources naturelles mondiales, on parle de gestion
intégrée, même durable mais pas de gestion raisonnée.
Rappelons à ce titre, en matière de gestion des ressources eau, que Régis Marchiaro
avait indiqué que le choix d'un mode de gestion mondiale engendrerait un état de «crise
globale1056» dés le XXIème siècle. Adapté plus généralement à l'ensemble des ressources
naturelles, il avait été précédemment précisé qu'on ne devait plus voir les ressources
naturelles comme de simples marchandises d'échange et de partage entre États, ni de
les considérer comme un « véritable facteur de production au même titre que le capital
ou le travail ».
Ainsi, le mode de gestion raisonnée proposé, au sens de gestion adaptée aux milieux
endémiques, proportionnelle, rationnelle et équilibrée, reposerait sur la notion juridique
de pater familias, une plus grande reconnaissance du droit coutumier local, des données
et outils contemporains et traditionnels.
Sa mise en place se traduirait par une gestion rationnelle des ressources naturelles dans
leur demande primaire, qui mélangerait en amont les droits et devoirs des acteurs
institutionnels et industriels. Ce nouveau type de gestion serait alors transversal.
Prudente pour ne pas heurter les États dans sa mise en œuvre, mais également pour
mieux en maîtriser les écarts éventuels.
Même si l'on peut convenir que cette gestion raisonnée permettrait à moyen terme une
maîtrise des coûts ainsi qu'une nouvelle organisation globale des droits et devoirs des
acteurs dans leur généralité.
435
Le cinquième rapport des perspectives du PNUE de 2012 pour l'environnement mondial
a évalué quatre-vingt-dix des plus importants objectifs environnementaux et a constaté
que seulement quatre ont fait l'objet d'évolutions majeures.
Les obstacles juridiques à la réalisation de ces objectifs reposent sur une dispersion des
responsabilités entre les innombrables institutions environnementales transnationales et
internationales. Cet éclatement conduit alors à une fragmentation de la gouvernance
environnementale et une insécurité juridique indirecte.
Pour concevoir une autre approche de la gestion des ressources naturelles mondiales et
de nouvelles formes de gouvernances, il est donc opportun de prendre en compte les
réalités juridiques actuelles et réfléchir à la problématique de l'option à choisir.
436
CHAPITRE I.
LE CARACTERE PRUDENT DE RATTACHEMENT A UNE
GESTION TRANSVERSALE DE TRANSITION
437
438
Lorsqu'on parle de prudence, il convient de souligner qu'on parle de prudence en terme
de cohérence juridique et donc de confiance en un système de règles et de valeurs
établis.
Cette consécration des valeurs reste donc à réinventer. Car comme précédemment
indiqué, Alexandre-Charles Kiss dénonce une réglementation multilatérale trop lourde,
des interactions juridiques nombreuses qui n'ont que de conséquence que de
complexifier le droit international de l'environnement. Le juriste s'interroge sur la
nature réelle des valeurs actuelles de la société contemporaine, et la confiance que cette
dernière leur accorde.
La réponse apportée reste liée aux notions de droits et devoirs de chaque acteur, à
l'échelle locale, nationale et internationale. Ces derniers restent encore à définir dans le
mode de gestion transversale de transition. C'est donc à ce titre, qu'il convient d'adopter
une autre attitude qu'on peut alors qualifier de prudente sur le plan juridique.
439
Pour prétendre un jour créer un état de droit environnemental et multidimensionnel, il
convient alors de trouver le juste milieu entre droit «de» l'environnement et droit «à»
l'environnement. Ce juste milieu ne peut être atteint qu'en réinventant une autre forme
de sécurité juridique, orientée sur une solidarité environnementale.
Les deux documents indiquent que « la surexploitation des ressources naturelles est
susceptible de relancer à l'échelle mondiale des tensions, inconnues jusqu'à présent à
ce degré, pour satisfaire les besoins en énergie, en eau, en nourriture et en matières
premières ».
La prudence juridique portant sur une transition juridique nouvelle et une répartition
nouvelle sont nécessaires.
440
Section I. Le caractère prudent portant sur une transition juridique nouvelle
La prudence doit d'abord porter sur le choix d'un cadre juridique de transition doux,
permettant de pouvoir à moyen terme tendre vers une sécurité juridique
environnementale globale.
Cette transition juridique vers une autre approche de la gestion des ressources naturelles
mondiales, transversale, doit donc être graduée. Mais cette dernière reste délicate car
elle est étroitement liée à la complexité juridique, comme précédemment indiqué.
La problématique actuelle réside donc dans la transition d'une approche globale des
dommages et des modes de prévention anticipatifs possibles.
Pourtant, aussi délicate soit-elle, il convient de retenir que cette transition reste
nécessaire.
441
§1. Une transition délicate liée à la complexité juridique
En se fondant sur une gestion raisonnée des ressources naturelles, au sens d'adaptée aux
milieux endémiques, d'équilibrée, rationnelle et proportionnelle, on peut mener
l'Homme vers un développement durable réel vis à vis de la réalité endémique du
territoire concerné. Cette autre approche contemporaine des ressources naturelles, inter-
générationnelle, est donc plus régulatrice dans les demandes et s'oppose alors à la
gestion actuelle, non régulée et optimale des ressources naturelles. En ce sens, elle
répond aux dispositions du Protocole de Nagoya du 29 octobre 2010, entré en vigueur
le 12 octobre 2014 car elle permet d'établir ou renforcer une meilleure sécurité juridique
en précisant les droits et obligations des fournisseurs et utilisateurs de ressources
naturelles et répond ainsi à la notion de «partage juste et équitable», en renforçant le
droit interne et coutumier existant des pays fournisseurs.
442
A. La délicate transition liée au caractère multidimensionnel des enjeux
Pour établir une gestion transversale de transition, il convient de reconnaître que les
enjeux environnementaux sont multidimensionnels car ils touchent à la fois la sphère
scientifique, sociale-économique et juridique.
Pour que cette cohérence environnementale soit établi, et que la confiance dans les
modes de gouvernance choisis soit alors retenue, il convient d'étudier et de retenir tous
les paramètres pouvant permettre son établissement.
Ainsi si l'on applique la gestion raisonnée aux sols et sous-sols mondiaux, les enjeux
transversaux à prendre en compte portent sur les domaines de la santé publique, de la
gestion de la ressource en eau, de la lutte contre l'érosion, ou encore ceux liés au calcul
des puits de carbone. Parce que transfrontalière par nature, ce mode de gestion doit
ainsi être transfrontalière par fonction, au travers notamment d'un renforcement des
outils juridiques. En ce sens elle répond ainsi aux dispositions de l'article 11 du
Protocole de Nagoya consacré à la coopération transfrontalière.
Or, la restauration internationale de l'humus des sols est une problématique majeure
pour l'ensemble des états. Les sols et sous-sols mondiaux sont devenus l'objet d'enjeux
internationaux, porteurs d'insécurité juridique par l'usage concurrentiel et l'absence ou
l'insuffisance de leur préservation, pourtant indispensable aux équilibres écologiques et
à la Biodiversité. Milieu complexe constitué au cours de phases géologiques très
longues, ces « peaux fragiles de la terre », tel que définies par le professeur Daniel
Nahon, respirent à l'échelle des millénaires grâce aux vers fouisseurs qui la travaillent et
l'aèrent sans relâche.
443
Il précise que « L'homme n'a besoin que de quelques années pour les détruire. Ainsi, il
faut dix mille ans pour former un mètre de sol. Ressource non renouvelable, les sols
sont artificialisés en France au rythme de deux cent hectares par jour, soit l'équivalent
d'un département tous les cinq ans. Longtemps, les experts l'ont considéré comme un
substrat non comme un écosystème. Or les sols s'auto-régulent grâce à leurs bactéries
et leurs champignons, qui organisent le transport des nutriments et maintiennent
l'équilibre entre carbone et azote. Les constituants du sol sont composés d'argile et de
minéraux hérités. L'argile provient d'une très lente dégradation des roches. Au fil des
temps, les feuillets d'argile, en forme de tétraèdres, se structurent en agrégats qui
livrent de nouveaux nutriments aux plantes. La croûte terrestre n'est autre qu'un
extraordinaire complexe organo-minéral, amalgame de micro-organismes et de
minéraux, au sein duquel les informations circulent, transmises par les champignons et
les bactéries. Plus de huit tonnes de poids de vie par hectares sur les 30 premiers
centimètres seraient présents1063 ».
Cet expert en structure des sols continue en disant que « les sols et sous sols sont
menacés par l'excès d'irrigation qui, comme en Australie tendrait à accélérer leur
salinisation et diminue le débit des fleuves, voire assèche des mers intérieures comme
la Mer d'Aral en Russie ». Il dénonce les monocultures réduisant la Biodiversité de
quarante pour-cent, ainsi que les pesticides qui l'a détruisent à hauteur de quatre-vingt
pour-cent. Le secteur de l'agriculture reste énergivore en consommant quatre fois
l'énergie de l'industrie et plus de quatre-vingt-trois pour-cent de l'eau douce. Or, il
énonce que malgré cette consommation énergivore accrue, les rendements tendent à
décroître. Il cite ainsi la Mexique qui a vu sa production de blé chuter de six pour-cent
et celle du maïs de quatre pour-cent en trente ans. La couverture des sols disparaît au
rythme de zéro trois à zéro cinq pour-cent par an sous l'effet de l'érosion. L'auteur
conclut en proposant de cesser de considérer les sols «comme des milieux chimiques et
de leur rendre leur statut de milieux vivants ».
Or, comme il n'est pas reconnu en droit le caractère fragile des ressources naturelles et
du milieu endémique dans lequel elles évoluent, la reconnaissance juridique des inter-
actions naturelles et chimiques, effet direct des prélèvements optimisés, n'est pas établi.
Les études d'impact trop générales ne portent que sur les mesures de compensation en
cas de destruction d'un milieu endémique, elles ne portent sur des mesures préventives
visant à mieux protéger les milieux dans lesquels sont prélevées les ressources
naturelles.
Par voie de conséquence, il n'est pas demandé de démontrer le lien de causalité direct,
réel et personnel entre l'absence de ces mesures préventives, le dommage réalisé et la
faute retenue. On ne retient le lien de causalité direct qu'entre l'absence des mesures de
compensation, le dommage réalisé et la faute retenue contre l'exploitant. Au delà de
l'aspect juridique purement technique, réside d'abord le fait de faire établir cette vérité à
l'ensemble de la communauté scientifique puis juridique. «Ce qui, en France plus que
dans les pays anglo-saxons, suppose un changement des mentalités », pour
l'anthropologue et économiste Jacques Weber. « Comme si les interactions du vivant
étaient inacceptables au pays de Descartes ».
1063 NAHON Daniel, L'épuisement de la terre, édition Odile Jacob, 2008, 240 pages
444
suffiront à nourrir l'Humanité de demain. Mais on doit aussi prendre en considération
comme phénomènes d'insécurité juridique l'érosion des sols, la diminution des substrats
organiques, la contamination, la salinisation, le tassement ainsi que l'imperméabilisation
des sols. Ces phénomènes d'interaction contribuent ainsi à l'augmentation des
inondations et glissements de terrain.
Or, pour poser les concepts d'une sécurité juridique internationale effective sur un socle
stable, encore faut-il remettre en question les modes de gestion des ressources naturelles
et des gouvernances environnementales, notamment la gestion d'exploration et
d'exploitation optimisée des ressources naturelles. Car la dégradation des sols coûte
près de quarante milliards d'euros par an aux États membres, selon le Bureau Européen
de l'Environnement (EEB)1064.
S'agissant des ressources en sol et sous-sols, Gilles Bœuf 1065 préconise de laisser des
terres en jachère au titre de réserve naturelle de sols et optimiser les rendements sur les
sols déjà occupés en réduisant la part de l'élevage bovin. Les sols et sous-sols,
ressources naturelles vivantes, pourraient alors être restaurés, en laissant le sol au repos
puis en le fortifiant. Ces réserves naturelles ont ainsi été crée à titre expérimental,
notamment en Inde1066, en Amérique du Nord et en Australie1067 et peuvent laisser penser
qu'on peut étendre l'expérience en milieu urbain, pour créer des espaces agraires
nouveaux autour des villes et ainsi rétablir une sécurité juridique fragilisée. D'autres
préconisent l'amendement des sols et sous-sols à savoir l'apport de nutriments issus de
composts ou de bio-déchets.
Ainsi, la mise en œuvre d'une gestion raisonnée des ressources naturelles mondiales
permettrait de répondre aux enjeux actuels et à venir et répondrait aux considérants 4 à
7 du Protocole de Nagoya :
« Reconnaissant que la sensibilisation du public à la valeur économique des
écosystèmes et de la diversité biologique, et le partage juste et équitable de cette valeur
économique avec les gardiens de la diversité biologique sont d’importantes mesures
d’incitation disponibles pour la conservation de la diversité biologique et l’utilisation
durable de ses éléments constitutifs »,
« Reconnaissant la contribution potentielle de l’accès et du partage des avantages à la
conservation et à l’utilisation durable de la diversité biologique, à l’éradication de la
pauvreté et à un environnement durable, contribuant ainsi à la réalisation des Objectifs
du millénaire pour le développement »
« Conscientes des liens qui existent entre l’accès aux ressources génétiques et le
partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation de ces ressources » ,
« Reconnaissant l’importance d’assurer la sécurité juridique en ce qui concerne
l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages
découlant de leur utilisation ».
Mais pour que cette gestion raisonnée des ressources naturelles soit effective, il faut
aussi comprendre la transversalité des enjeux financiers qu'elle nécessite.
1064 Metamorphosis revue, novembre 2014, n°73, 8 pages, European Environmental Bureau
1065 Gilles bœuf est le président du Muséum d'Histoire Naturelle de Paris
1066 plantations de théiers dans la province du Tamil Nadu, en Inde entre 2005 et 2010
1067 Création de réserves naturelles de sols entre 2008 et 2011
445
1. Des enjeux périphériques multiples
Comment alors juridiquement permettre une telle gestion notamment sans poser la
problématique de la notion de res communes de l'Humanité ? Comment déclencher une
réhabilitation internationale par exemple des sols et sous-sols mondiaux, au nom de
cette dernière sans porter atteinte au droit de la propriété ? Comment le financer? Pour y
répondre, plusieurs pistes peuvent être analysées.
Mais si les États européens semblent trouver des stratégies innovantes et juridiquement
opposables, la question reste posée dans le domaine de l'exploitation et l'exploitation de
zones territoriales mondiales, berceau de réserves de ressources naturelles dépourvues
ou insuffisamment protégées juridiquement. La problématique de l'usage traditionnel
avec les enjeux financiers en Amazonie, ou au cœur des forêts primitives comme la
Toundra ou celles d'Afrique, pose alors une problématique d'insécurité juridique
majeure. La problématique repose sur l'épuisement des ressources naturelles minières.
Ils énoncent que la notion de réserve de ressources naturelles «recouvre des notions
géologiques, techniques et économiques et qu'il faut distinguer 3 types de réserves : la
réserve en tant que telle, la réserve base et la réserve potentielle ». Aussi définissent-ils
la réserve de ressources naturelles comme une «ressource identifiée et explorée, que
l’on peut effectivement extraire, légalement et techniquement, au prix actuel», de la
réserve base qui reste une «réserve non encore exploitable économiquement, selon la
446
technique et le prix actuel » et de la réserve potentielle qui renferme des «ressources
identifiées mais non explorées, dont les quantités auraient été estimées ».
Les deux scientifiques classent les réserves en trois catégories dénommées les « 3P »
pour réserves « prouvées, probables et possibles». Les deux premières catégories sont
connues, la dernière serait une donnée inconnue.
L'ensemble du marché mondial des ressources naturelles fossiles mais également celui
des platinoïdes comme le platine, le palladium, le rhodium, le ruthénium, l'iridium, ou
l'osmium sont aujourd'hui sources d'insécurité juridique majeure et représentent un des
enjeux majeurs des prochaines décennies. Leur utilisation dans l'industrie du luxe
comme de la haute technologie est ainsi remis en question car l'offre étant restreinte, la
volatilité des prix ne pourra être contrôlée et ces enjeux financiers devraient être
analysés. Or cette analyse reste difficile aux vues des données actuelles.
447
B. La délicate transition liée au caractère complexe des discordances
Pour établir une gestion transversale de transition, il convient de reconnaître que les
enjeux environnementaux sont complexes car ils regroupent des points de discordance
scientifiques et juridiques.
Des discordances juridiques émergentes comme des discordances techniques latentes
sont à relever.
Les discordances juridiques existantes reposent d'abord sur des désaccords portant
notamment sur une définition juridique délicate et une qualification juridique
disparate1070. L'absence d'une définition commune universelle fragilise la sécurité
juridique mondiale. Par ailleurs, l'absence d'un code de droit international de
l'environnement renchérit cette fragilité internationale.
Ce traité, établi au nom des principes d'intérêt commun de l'Humanité pour les
générations futures, et d'une approche inter-générationnelle de la gestion des ressources
naturelles, raisonnée et transversale, doit alors être retranscris en droit interne, et adossé
aux constitutions des états.
Or, si la volonté demeure unanime sur le principe, la réalité juridique démontre que les
États contemporains n'arrivent pas à unifier encore leur discordances juridiques au nom
de l'intérêt général de l'Humanité. Parce que cette notion n'existe pas encore.
L'applicabilité du protocole de Kyoto en est la parfaite illustration. La gouvernance
environnementale internationale serait donc être le fruit d'une maturation juridique des
diverses gouvernances territoriales environnementales que composent les États
démocratiques et les autres États. Les inter-actions existantes entre les divers états et les
clivages politiques contemporains doivent être dépassées dans l'intérêt général de
l'Humanité.
1070 Cf introduction
1071 Saint Thomas d’Aquin, théologien et philosophe, 1224-1274
448
nemo tenetur), «Il n’est rien d’impossible à celui qui a bonne envie 1072 ».
« Aucun bonheur n'est possible dans l'ignorance1073» et «ne pas perdre patience, même
si cela semble impossible c’est déjà de la patience1074».
Or, le pragmatisme juridique repose sur le fait que les missions et l'organisation des
états divergent. C'est donc au travers de l'opportunité crée par cette nouvelle réflexion
que chaque état pourrait alors être en mesure de se donner comme mission principale de
préserver cette sécurité juridique environnementale mondiale à venir.
C'est donc à la fois une problématique juridique et politique car la volonté politique
reste au cœur de la démarche juridique future globale. Et cette mission principale doit
alors dépasser aussi les discordances techniques existantes.
449
2. Des discordances techniques latentes
Les États ont pour première mission d'assurer la sécurité juridique interne pour
contribuer à une sécurité juridique internationale. La multiplicité des acteurs
institutionnels depuis quarante ans a complexifié la coopération transnationale et
internationale, en noyant par un océan législatif les pratiques de bonne gouvernance.
Cette situation contribue à une confusion des responsabilités et des champs
d'intervention des divers acteurs institutionnels. Au point de se demander s'il existerait
alors une résilience des risques, une culture du risque comme de la crise dans le
domaine environnemental.
Si l'on prend le cas de la gestion des espèces faunistiques sauvages, cette dernière reste
soumise à un ensemble d'aléas fluctuants. Concernant l'espèce animale « Canis Lupus »,
dénomination latine des loups, sa présence et sa gestion restent liées pour chaque État, à
un passé symbolisé par les passions, comme les craintes. Or, pour établir une gestion
nouvelle des espèces faunistiques dites «à risques» comme les espèces sauvages et
particulièrement le loup, encore faut-il connaître suffisamment les risques réels
encourus sur son territoire par cette espèce et cette connaissance reste aléatoire et
fragile au vu des données techniques, mais également juridiques.
Le paradigme repose alors sur les imbroglios techniques et juridiques liés aux
complexités de la transposition des données nationales sur le plan local.
450
Ainsi, relatif au loup, deux conventions internationales viennent protéger cette espèce.
La première est la Convention de Berne1075, protégeant les espèces sauvage, faisant
figurer le loup à l’annexe II, article 6, comme «espèce strictement protégée». Mais
cette convention reste limitée sur le plan juridique et technique car elle ne définit pas la
notion juridique d'«espèce» et elle prévoit des dérogations à l'article 9, permettant la
destruction de cette espèce au gré des politiques d'évaluation des états, comme la
révision du classement de chaque espèce dans telle ou telle annexe par les états.
Cette directive est complétée depuis janvier 2007 d'un guide interprétatif sur la
protection stricte des espèces animales d’intérêt communautaire, qui indique la «mise
en œuvre de ces mesures dérogatoires à titre préventif». Le règlement d'application de
la CITES, annexe A s'applique aux espèces sauvages comme le loup ou l'ours.
Sur le plan transnational, le Conseil d’État et de la Cour administrative d’appel de
Marseille1076 ont précisé la portée des textes internationaux en indiquant que par
hiérarchie des normes juridiques, les textes assurant la protection du loup prévalent sur
toutes les dispositions contraires du droit interne. La situation se complexifie sur le plan
technique quand les dispositions sont transcrites sur le plan national.
1075 Convention de Berne du 19 septembre 1979, ratifiée par la France par la loi n°89-1004 du 31
décembre 1989 et mise en application par le décret n°90-756 du 22 août 1990, relative à la
conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe
1076 CAA, Marseille, Commune de Breil-sur-Roya, 19 décembre 1998 n° 97MA00640
451
s'ensuivirent1077 ont fixé la liste des mammifères protégés, y introduisant le loup. Si le
plan Loup du 20 mars 2000 demandait un amendement des articles L.2122 CGCT et
L.227-9 Code rural, concernant le droit de chasse, il faut attendre le décret n° 2001-451
du 25 mai 2001 complétant l'article R.227-5 du Code de l'environnement, complété par
le décret n°2003-768 du 1er août 2003 pour entendre la notion de « de bêtes fauves...».
L'abattage des loups est alors disproportionné par rapport à la destruction des troupeaux
et leur indemnisation et il est opportun de regarder les troupeaux envoyés à
l’équarrissage pour cause de maladie ou abattage par des chiens sauvages (environ
400.000 à 500.000 bêtes par an). Est ce à dire qu'attaquer juridiquement les arrêtés
préfectoraux autorisant ces tirs entrerait dans une gestion environnementale raisonnée
du loup et plus généralement de espèces faunistiques sauvages comme une stratégie
durable ?La question ne fait que creuser le fossé entre les associations de protection de
la Nature et l’État.
On peut comprendre cette démarche, seul moyen technique de faire pression sur un
mode de gestion critiquable mais cette discordance technique reste limitée. Car, entre
l’entrée en vigueur de ces arrêtés donnant un droit d’affût général et leur suspension,
l'abattage se réalise quand même. Ce droit d’affût généralisé peut même donner lieu à
des dépôts de plainte pour destruction d'espèce protégée en bande organisée.
Au travers de cet exemple peut-on alors entrevoir les objectifs nécessaires que l'on doit
poser pour établir une approche inter-générationnelle des ressources naturelles
mondiales, raisonnée et transversale.
1077 Arrêté interministériel du 10 octobre 1996, modifiant l’arrêté interministériel du 17 avril 1981;
arrêté interministériel du 19 mai 2000; circulaire du 19 juin 2000; arrêté ministériel du 23 avril 2007
452
§2. Une transition nécessaire vers de nouveaux objectifs juridiques
Les objectifs d'une gestion inter-générationnelle ne sont pas neutres car ils reposent sur
de nouveaux droits et devoirs des acteurs institutionnels et non institutionnels.
Tendre vers cette nouvelle approche demande à la fois des engagements politiques et
juridiques réels. Les territoires doivent être au cœur des projets sécuritaires mais la
force des habitudes reste un défi à soulever par des réformes juridiques nécessaires et
durables.
Des objectifs liés à au respect d'un équilibre endémique mondial passe par le
renforcement des responsabilités environnementales.
453
A. L'émergence du principe d'équilibre des milieux
Pour tendre vers un nouvel équilibre des milieux endémiques, il est nécessaire de
prendre en considération les effets juridiques liés à la non maîtrise foncière.
La recherche d'un nouvel équilibre des milieux passe nécessairement par une approche
contemporaine inter-générationnelle des ressources naturelles mondiales et une
nouvelle forme de la gouvernance foncière mondiale.
Cette approche du droit foncier se voudrait endogène, afin de pouvoir proposer une
gestion raisonnée, au sens d'adaptée aux milieux endémiques, d'équilibrée,
proportionnée, régulée et donc responsable des ressources naturelles.
Ce principe repose sur une nature juridique nouvelle et une portée juridique novatrice.
Ce type de gestion, appliquée dans une vision traditionnelle, est donc un outil visant la
maximisation du bien-être économique et social, où la mise en valeur des ressources
naturelles reste liée à une vision utilitaire, exogène de ces dernières et répondrait ainsi
aux priorités sociétales contemporaines.
« Il n'y a vraiment pas d'humanité sans culture de la terre; il n' y a pas de vie sans
bonne nourriture qu'elle produit pour les hommes et les femmes de tous les continents.
L'agriculture montre, par conséquent, son rôle central...1079 »
Cette autre approche est un outil de sécurité juridique global, car elle répond à une
attente sociale forte dans les pays fournisseurs de ressources naturelles, notamment
minières et alimentaires. Les priorités sociaux-culturelles liées aux ressources naturelles
doivent entrer dans le champ de gouvernance foncière pour prévenir les conflits liés aux
problèmes d'accessibilité aux ressources naturelles et aux terres par les communautés
locales.
Car dans l'ensemble des États émergents, fournisseurs de ressources naturelles, les liens
entre les droits au sol et aux ressources naturelles sont liés à ceux de communautés
locales et le droit coutumier local reste un des vecteurs de sécurité juridique. L'ignorer
devient alors un facteur d'instabilité juridique.
454
raisonnée des ressources naturelles permet un droit d'accès cohérent aux ressources
naturelles, qu'il soit d'exploration ou d'exploitation, assorti d'un droit d'aliéner pour
l’État au nom de cet intérêt général. Cette autre approche du droit foncier répondrait
aux dispositions des considérants 12 et 13 du Protocole de Nagoya du 29 octobre 2010
« Reconnaissant la nature spéciale de la diversité biologique agricole, ses traits
distinctifs et ses problèmes nécessitant des solutions particulières »
« Reconnaissant l’interdépendance de tous les pays en ce qui a trait aux ressources
génétiques pour l’alimentation et l’agriculture ainsi que leur nature et leur importance
particulières pour assurer la sécurité alimentaire à l’échelle mondiale et pour le
développement durable de l’agriculture dans le contexte de l’atténuation de la pauvreté
et des changements climatiques, et reconnaissant le rôle fondamental du Traité
international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture et
de la Commission des ressources génétiques pour l’alimentation et l’agriculture de la
FAO à cet égard»
Les prélèvements dans ce type de gestion, seraient liés à un cahier des charges prenant
en compte le principe d'intérêt commun de l'Humanité. Le droit souverain des États sur
leurs ressources naturelles coexisterait avec le principe de respect d'équilibre des
milieux, dans la gestion d'exploration et d'exploitation, au sens des dispositions du
Protocole de Nagoya du 29 octobre 2010.
La problématique porte alors sur le fait que l'ingérence environnementale légitimée par
le principe d'intérêt général de l'Humanité, soit générateur d'un droit direct nouveau sur
l'utilisation et l'accessibilité aux ressources naturelles. Soit ce droit devient
juridiquement opposable par transcription en droit interne, soit il s'intègre politiquement
au droit coutumier local et devient un principe culturel en tant de tel. La force des
habitudes a poussé les communautés locales à faire valoir par l'intermédiaire des
juridictions leurs droits à la maîtrise foncière environnementale, pour défendre leur
identité culturelle. Cette nouvelle forme de gouvernance peut alors les conduire vers
une nouvelle vision de leur droit, et sur une mise en valeur de leur devoir de gardien des
milieux. Elle peut également mettre en avant les droits et devoirs de la société civile en
général, notamment en réaffirmant la responsabilité de tous au nom de l'intérêt général
de l'Humanité.
Cette nouvelle approche passe donc par une autre approche de la maîtrise foncière
internationale, garante d'une sécurité juridique commune à tous les États, répondant aux
impératifs du Protocole de Nagoya. Car cette sécurité englobe les principes de
souveraineté alimentaire, énergétique et paysagère, propres à chaque État, émergent ou
non. Cette gouvernance se réaliserait ensuite au travers de moyens juridiques tel qu'un
droit de préemption environnemental international, inspiré du droit de préemption
français sur les espaces naturels sensibles. Ce droit s'exercerait à travers de
conservatoires internationaux et d'établissements publics fonciers directement gérés par
l'ONU.
455
2. Une portée juridique novatrice
Le nouvel équilibre endémique mondial repose alors sur une nouvelle forme de
gouvernance foncière environnementale. Sa portée présente une importance certaine vis
à vis des principes de précaution et de prévention mais également au vu des
responsabilités environnementales encourues.
Une meilleure maîtrise foncière permet en premier lieu, d'établir une véritable gestion
juridique des risques, reposant sur une gestion anticipative. Même s'il a été indiqué
précédemment que la notion juridique du risque n'était pas réellement codifiée et qu'elle
s'inspire d'une notion scientifique, la maîtrise foncière dans les domaines d'exploration
et d'exploitation des ressources naturelles est génératrice d'insécurité juridique.
La maîtrise foncière peut donc permettre la transition entre la gestion intégrée des
ressources naturelles vers une gestion raisonnée des ressources naturelles, au sens
d'équilibrée, adaptée, proportionnelle et régulée, et ainsi pourvoir à une meilleure
approche du principe de précaution et de prévention au travers d'une véritable et durable
gestion anticipative des risques. Elle rentre alors dans la vision autochtone mondiale
mais également spirituelle contemporaine car elle permet une « alliance 1080» entre la
Terre, mère nourricière, et l'Homme, son enfant.
456
international des énergies renouvelables sur des sols arables.
457
B. Le renforcement des responsabilités environnementales
Ce renforcement se fonde sur des fondements reposant sur des principes de sécurité
environnementale mais constate des limites dans la pratique environnementale actuelle.
Ces problématiques environnementales doivent être maîtrisées afin de limiter d'une part
l'émergence de nouveaux droits opposables, pour les communautés locales mais aussi
pour l'ensemble de la communauté internationale. D'autre part, pour limiter des conflits
environnementaux transfrontaliers et frontaliers majeurs latents, que certains
dénomment déjà la future « guerre verte1081 »mondiale.
458
renforcement des mécanismes visant à améliorer les modes de gouvernances
environnementales locales. Ainsi, la mutualisation des données, la coopération inter-
états sur les expériences et les échanges portant sur les approches diverses démontrent
une volonté réelle de tendre vers une nouvelle approche au nom du principe de
prévention.
Ainsi, le principe de prévention est employé pour renforcer à la fois les modes de
gouvernance de demain, et le mécanisme de la responsabilité environnementale. La
gestion anticipative des risques entre ainsi dans le champ d'application de cette
responsabilité renforcée, car elle permet aux divers acteurs de mieux rationaliser leur
action en prenant pleinement conscience des risques juridiques encourus.
L'appropriation illégitime des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles
autochtones serait alors dans ce contexte définitivement interdite et sanctionnée.
459
2. Des limites constatées dans la pratique environnementale actuelle
Le rapport du Club des Juristes de janvier 20121082 suggère la création d'un nouvel
article dans le code civile français énonçant que «Tout fait quelconque de l'homme, qui
cause à l'environnement un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le
réparer ». Cette réflexion peut s'adapter à l'échelle mondiale pour permettre d'alléger le
mécanisme de la mise en application de la responsabilité environnementale
internationale et la rendre ainsi plus rapide et donc plus efficace.
1082 LE CLUB DES JURISTES, Mieux réparer le dommage écologique, commision environnement,
éditions Club des juristes, janvier 2012, 70 pages
460
obligatoire, a été instaurée, pour les communes qui l'exerceront directement ou par le
biais de leur EPCI. Est-ce à dire que ces établissements n'avaient pas auparavant
d'obligation de moyen et de résultat ? Elle était jusqu'alors diffuse, la compétence restait
facultative et partagée entre les collectivités et les groupements rattachés, et ne
permettait pas de larges perspectives d'horizons. La compétence GEMAPI distingue
désormais le bloc communal, l'EPAGE (établissement public d'aménagement et de
gestion de l'eau) et l'EPTB (établissement public territorial de bassin) et le financement
de ces derniers est assuré par une taxe facultative plafonnée.
Ce projet permet aux collectivités de disposer d'un pouvoir de décision local prioritaire
pour la mise en œuvre d'un nouveau service public sous la forme d'un EPCI qui
applique la stratégie locale de prévention des inondations souhaité et décidé par les
acteurs locaux et financé par une taxe locale aux côtés des outils fiscaux traditionnels
comme le Fonds de Prévention des Risques Naturels Majeurs.
Or, ce décret ne parle plus de « digues » au sens strict mais au sens large en incluant
tous les ouvrages liés à la gestion des inondations. Des niveaux de protection sont
établis en fonction des études hydrauliques sur lesquelles reposent les études de danger
actuelles. La responsabilité du gestionnaire du système de protection, qu'il soit une
commune ou un EPCI, va alors reposer sur l'identification précise de ces zones, ses
délimitations, ainsi que sur les écoulements issus des inondations.
Quand on sait que la vitesse de l'écoulement est constitutif des plus gros dommages,
matériels ou psychiques, force est de constater que le gestionnaire des zones devra
répondre à la plus grande prudence. Par contre, les discordances techniques vont aussi
reposer sur un flou juridique concernant le déclenchement du mécanisme de la
responsabilité. Car le décret ne fixe pas les performances dites minimales pour les
ouvrages d'endiguement à savoir un seuil de vulnérabilité à raison du risque de
submersion, et ne prévoit pas non plus de mise à jour des ouvrages aux normes
minimales.
L'exemple de l'affaire Xynthia a révélé pour la France, non pas l'absence d'un cadre
juridique, mais plutôt, la présence de pratiques génératrice d'insécurité juridique. Or, le
cadre juridique permet de poser une protection et des limites mais ne peut à lui seul,
s'ériger comme un instrument unique. Il doit donc se nourrir d'avantage des données
461
extérieures et les retranscrire pour permettre l'émergence d'une gouvernance du risque
nouvelle, solidaire, efficace et réactive. Car les discordances techniques portent sur une
mauvaise connaissance du risque inondation par les acteurs institutionnels locaux. Il
s'agirait donc d'abord de reconnaître juridiquement la mémoire territoriale « risques
inondations », non véritablement intégrée aux documents d'urbanisme pour la rendre
opposable.
La nécessaire émergence d'une gouvernance du risque inondation est donc possible. Les
transferts de compétence entre la région et les collectivités territoriales sont prévus
désormais à l'article L.4251-3 du CGCT portant sur les compatibilités du schéma
régional d’aménagement et de développement durable du territoire, énonçant que ce
schéma devra être compatible avec « b) Les objectifs de qualité et de quantité des eaux
définis par les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux en
application de l’article L. 212-1 du code de l’environnement ;« c) Les objectifs et les
orientations fondamentales des plans de gestion des risques d’inondation prévus à
l’article L. 566-7 du code de l’environnement ; ».
Cette nouvelle gouvernance du risque inondation passe d'abord par une véritable
coopération inter et intra locale nouvelle, en s'inspirant de la gestion en secteur
nucléaire, entre la société civile, vivant proche des territoires à risques, les acteurs
institutionnels locaux (EPCI, équipe communale), les acteurs de la sécurité (sapeurs
pompiers, services d'ordre) et les formateurs (spécialistes, juristes, médiateurs).
462
grand public au titre des dispositions de la convention internationale d'Aarhus.
Cela supposerait aussi qu'on prenne en compte les dommages environnementaux liés
aux risques inondations en élargissant le caractère « remarquable » des paysages, et en
y intégrant les notions de « rares et fragiles » non encore reconnus sur le plan juridique.
les paysages étant partie intégrante d'un patrimoine local unique, appartenant à un
patrimoine commun de l'Humanité, non encore reconnu, au même titre que d'autres
ressources naturelles comme l'eau potable en 20101083 et 20131084, et donc susceptibles
de subir des risques irréparables. Cela supposerait enfin qu'on inclut dans ce nouveau
type de gestion des risques, les nouveaux types de dommages non reconnus
juridiquement pour l'instant tel que le dommage de la peur, ou le dommage du trouble
de jouissance à une vie saine, ou encore le dommage de la perte de valeurs liés à la vie
rurale. En l'espèce, elle répondrait aux exigences du principe de mise en sécurité des
biens, des personnes mais aussi celui des écosystèmes.
On voit qu'au travers de l'exemple du risque inondation, qui est un risque international,
une nouvelle répartition des rôles des acteurs mondiaux est donc nécessaire.
1083 AGNU, Résolution 64/292 du 28 juillet 2010 relatif au droit fondamental à l'eau et à
l'assainissement
1084 AGNU, Résolution 24/18 du 27 septembre 2013 portant sur les droits de l'homme ; AGNU,
Résolution A/C.3/68/ du 19 novembre 2013 portant sur les droits de l'homme
463
Section II. Le caractère prudent portant sur une répartition nouvelle
Cette symbiose entre les acteurs institutionnels, économiques et sociaux est au cœur de
l'approche inter-générationnelle des ressources naturelles mondiales. Elle serait le socle
de cette nouvelle forme de gouvernance environnementale tripartite.
Cette répartition nouvelle repose alors sur une proposition prudente d' une autre forme
de répartition organique et d'une autre répartition institutionnelle.
464
§1 Une proposition prudente d' une autre forme de répartition organique
Ces derniers représenteraient trois acteurs : les premiers étant les acteurs institutionnels,
les seconds les acteurs économiques, les troisièmes étant les acteurs sociaux.
Le premier point sert de socle de réflexion sur le rôle fondamental joué par l’État
régalien et les collectivités territoriales ou fédérations. Le second point repose sur
l'ensemble des acteurs du monde du travail, chefs d'entreprise, salariés ou professions
libérales, syndicats. Le troisième point permet la présence de la société civile dans son
entier.
Cette proposition prudente repose ainsi sur un défi juridique et technique d'une
reconnaissance de gestion circulaire tripartite.
465
A. Le défi juridique d'une reconnaissance de gestion circulaire tripartite
Les principes du croisement entre savoirs, pouvoirs et vouloir reposent sur ce que
Mireille Delmas-Marty nomme «la refondation des pouvoirs1085».
Car pour que les savoirs soient mieux diffusés, il est nécessaire de revoir la vision
traditionnelle des pouvoirs et du vouloir commun.
Rapporté au plan environnemental, ces principes reposent alors sur le croisement entre
les savoirs traditionnels et contemporains, des pouvoirs basés sur une gouvernance
verticale et horizontale, et un vouloir commun dont le socle juridique est l'intérêt
général de l'Humanité. Ils reposent donc sur une autre vision de la gouvernance
environnementale actuelle.
Cette refondation des pouvoirs ne peut se réaliser qu'en s'orientant vers une voie
nouvelle. Elle doit alors emprunter, tel une initiation, un chemin juridique novateur,
jalonné de quatre étapes. La première étape consiste à constater une absence de
croisement entre savoirs, pouvoirs et vouloir. La seconde repose sur l'acceptation de ce
constat et les problématiques qui en découlent. Une fois ces deux étapes passées, la
troisième permet de rechercher des solutions tendant à résoudre cette absence, pour
tendre vers la quatrième et dernière étape qu'on dénommera le nouvel «éveil
juridique ».
Pour promouvoir cette démarche dans son intégralité, il convient d'analyser la nature et
le champ d'application des deuxième et troisième étapes. En effet, une autre vision des
modes de gouvernance est nécessaire pour parvenir à cette démarche. Car il ne suffit
pas de prétendre le changement, encore faut-il le vouloir réellement. Aussi, l'ensemble
des États désireux de parvenir à une approche inter-générationnelle de la gestion des
ressources naturelles doivent mettre en exergue un autre mode de gouvernance
environnementale, reposant sur une souveraineté « partagée », au nom d'un intérêt
général commun, qu'on peut dénommer l'intérêt général de l'Humanité.
Cette souveraineté « partagée », dont le socle juridique n'existe pas encore, reposerait
sur la notion de territoire endémique. Les États frontaliers, souverains de leur propre
ressources naturelles et gestionnaires des ressources naturelles frontalières seraient
soumis à une obligation de moyen et de résultat reposant sur le devoir de gestion
responsable, équitable, adaptée et équilibrée. Cette obligation permettrait une
coopération technique et juridique, au nom des res communes de l'Humanité, pour leur
propre intérêt et ceux de l'Humanité. Elle ne remettrait pas en cause le principe de
souveraineté permanente.
Or, la réalité juridique et économique freine cette vision car l'étape de « l'éveil
juridique » ne peut pas être atteint sans prendre en compte les notions fondamentales de
1085 DELMAS- MARTY Mireille, La refondation des pouvoirs, éditions Seuil, 2007, 300 pages
466
territoire, frontières, mais également celles d'Humanité, de générations futures et
d'obligations au nom de l'intérêt général de l'Humanité. Si les notions juridiques de
territoires et frontières sont la base du droit international et sont établies en droit
interne, celles d'Humanité et de générations futures restent à établir et corollairement à
elles, celle de justice environnementale. Pour rendre cette gouvernance judiciaire plus
réaliste, Mireille Delmas-Marty propose la mise en avant d'une «communauté judiciaire
culturelle», où justices nationales et internationales inter-agiraient pour une réelle et
pérenne sécurité juridique. Il deviendrait alors nécessaire de créer un « lien
communautaire national » suffisamment fort pour inte-ragir vers un « lien
communautaire international ». Ce lien communautaire pourrait d'abord naître à travers
l'éducation environnementale familiale, scolaire et ensuite civique.
1086 REEVES Hubert, La stratégie environnementale du plaisir, consulté le 10 février 2015 sur le site
http:www.humaniteetdiversite.com
467
gouvernance environnementale tripartite reposant sur un mouvement circulaire.
le premier point par lequel passe cette gouvernance circulaire est le point « pouvoir »
représenté par l'état régalien et les collectivités territoriales ou fédérations. Pour tendre
vers cette souveraineté « partagée » des ressources naturelles, et permettre de créer ce
« lien intrinsèque », la proposition de la création d'un conseil des sages est suggérée. Ce
conseil, apolitique serait composé d'anciens professionnels issus de la société civile et
spécialistes des questions environnementales. Ils ne seraient pas issus des grandes
écoles ni du milieu politique.
Ce conseil siégerait sur le plan local auprès des conseils municipaux, régionaux et sur le
plan national auprès du conseil des ministres. Ses membres seraient mandatés pour une
durée de cinq ans, non renouvelable, et seraient nommés à partir d'une liste nationale.
Leur mandat serait honorifique mais leur avis serait opposable juridiquement. Le rôle
de ce conseil serait d'être une « sentinelle environnementale » auprès des pouvoirs, afin
de vérifier si le croisement entre les savoirs traditionnels et contemporains était établi et
si les pouvoirs publics et la volonté locale auraient la même vision des enjeux.
Le second point est le point « savoirs » composé de l'ensemble des acteurs du monde
du travail, actifs ou en retraite, qu'ils soient chefs d'entreprise, salariés ou professions
libérales, syndicats. Le conseil des sages, proposé, serait en contact étroit avec ce pôle
essentiel au développement économique durable national. Les données de la réalité
économique serait alors prise en compte dans la stratégie de souveraineté « partagée »
des ressources naturelles.
468
2. Des domaines portant sur le croisement entre savoirs, pouvoirs et vouloir
Ils restent donc liés à l'opposabilité internationale des accords internationaux. Ainsi, les
savoirs scientifiques, estimant que les écosystèmes sont la clé de voûte de l'équilibre
environnemental mondial, rejoindraient les savoirs juridiques, tentant de rendre
opposables les principes protecteurs de l'environnement. Si l'esprit pionnier de la
Convention sur la Diversité Biologique1087 reposait sur un engagement éthique des états
et donc sans portée juridique non contraignante, les protocoles de Carthagena1088 sur la
prévention des risques biotechnologiques, de Nagoya1089 ou APA et le protocole
additionnel de Nagoya–Kuala Lumpur1090 ont permis un croisement réel entre les
savoirs scientifiques et juridiques, les pouvoirs nationaux et internationaux et le vouloir
international.
Felipe Cadena Garcia énonce leur portée réellement contraignante 1091 à travers
notamment leur objectif d’assurer une protection juridique sur les mouvements
transfrontaliers d'organismes vivants modifiés. « Le Protocole additionnel établit un
cadre large de régulation des principaux aspects qui caractérisent un régime de
responsabilité et réparation. Il commence par définir le « dommage » comme un « effet
défavorable sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique », en
tenant compte des risques pour la santé humaine, dommage qui doit être
« mesurable ou autrement observable » et « significatif ». Selon le Protocole
additionnel, le caractère significatif du dommage est caractérisé par une modification
à long terme ou permanente, une ampleur des modifications qualitatives ou
quantitatives qui nuisent aux éléments constitutifs de la diversité biologique, une
réduction de la capacité qu’ont les éléments constitutifs de la diversité biologique de
fournir des biens et des services et une ampleur de tout effet défavorable sur la santé
humaine...l’élaboration du droit sur la responsabilité civile reste à la discrétion des
États parties, y compris la détermination du type de responsabilité. En effet, en
application de leur devoir d’adopter les mesures légales internes nécessaires pour
appliquer le Protocole additionnel, les États aborderont la « norme de responsabilité »,
c’est-à-dire s’il s’agit de responsabilité objective ou de responsabilité pour faute.
1087 Convention sur la Diversité Biologique du 5 juin 1992, entrée en vigueur le 29 décembre 1993
1088 Protocole de Carthagena sur la prévention des risques biotechnologiques du 29 janvier 2000, entré
en vigueur le 11 septembre 2003
1089 Protocole de Nagoya sur l'accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des
avantages découlant de leur utilisation à la Convention sur la diversité biologique du 29 octobre 2010,
entré en vigueur le 12 octobre 2014
1090 Protocole aditionnel de Nagoya sur la responsabilité et la réparation relatif au Protocole de
Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques, du 15 octobre 2010 à Nagoya, entré en
vigueur le 7 mai 2012
1091 CADENA GARCIA Felipe, Le Protocole additionnel de Nagoya –Kuala Lumpur sur la
responsabilité et la réparation : question de la responsabilité pour des dommages à la biodiversité,
Bulletin numéro 298, 18/03/2012, consulté le 11 février 2015 sur le site http://sentinelle-
droitinternational.fr/bulletins/a2012/ 2012 0318 bull_298/ bulletin_ sentinelle298 . Php # 165
469
actuel du droit international car le régime de responsabilité du Protocole additionnel
ferait coexister des normes de responsabilité objective, basée sur l’occurrence d’un
dommage et un lien de causalité avec l’organisme modifié, et des normes de
responsabilité basées sur le comportement de l’opérateur et sa possible faute dans la
commission d’un dommage».
L'auteur énonce les limites toutefois des effets des protocoles car « ces progrès du
Protocole additionnel n’impliquent toutefois pas une régulation de tous les aspects des
dommages et de la responsabilité. Ainsi, il ne prévoit pas de normes sur le régime de
preuves, ni sur le possible conflit de juridictions entre les parties à un différend, ni de
dispositions sur les possibles conflits vis-à-vis de l’exécution d’une décision adoptée à
l’étranger et à l’encontre d’une Partie au Protocole, ce qui renvoie à des règles
externes et au droit international privé en vigueur... ».
Il reconnaît notamment qu'il existe des interrogations sur les terra nullius. « En outre,
le Protocole additionnel établit qu’il s’applique au dommage survenu dans des zones
situées dans les limites de la juridiction nationale des Parties. Cependant, on pourrait
se demander quelles seraient les règles applicables aux dommages causés aux zones
situées au-delà de la juridiction des États, tels que la haute mer, l’outre-espace,
l’atmosphère et les zones polaires. Le Protocole additionnel paraît les exclure, malgré
l’importance que ces dommages représentent dans le futur, et cela continuerait de faire
l’objet de régimes particuliers et fait partie des développements que le droit
international devra considérer dans son avenir. »
Si le croisement entre savoirs, pouvoirs et vouloir repose sur un support juridique réel et
évolutif, il ne faut pas minimiser l'importance du défi technique d'une reconnaissance
de gestion circulaire tripartite.
470
B. Le défi technique d'une reconnaissance de gestion circulaire tripartite
Partant du principe que les ressources naturelles sont des res communes de l'Humanité,
fragiles et rares, la classification juridique internationale et transnationale de ces
dernières dans une catégorie de res communes publics, permettrait alors de répartir
juridiquement de nouvelles compétences aux états mais aussi à la société civile. Il ne
s'agit donc plus d'établir un dommage environnemental simplement local mais bien
général, générateur d'un effet à portée locale et internationale. Il en est de même pour la
responsabilité, cette dernière ne serait plus seulement verticale mais bel et bien
horizontale et verticale, donc transversale parce qu'adaptée globalement aux nouveaux
défis environnementaux.
Ce nouveau défi prend ainsi en compte sur le plan juridique, des données scientifiques
complexes et évolutives. Car l'adaptation des écosystèmes permet de tisser un lien entre
les bouleversements climatiques, la gestion des ressources naturelles et la préservation
de la Biodiversité mondiale. L'adaptation de la Nature aux bouleversements
biosphériques, dénommée par les experts scientifiques « adaptation fondée sur les
écosystèmes » entraîne une adaptation de la société civile toute entière à la gestion de
ses ressources naturelles. Ce nouveau type de dommage et de responsabilité repose sur
un caractère évolutif, mettant en exergue une vision communautaire, collective des
droits aux ressources naturelles.
Mais cette répartition nouvelle implique une meilleure coopération entre les États
471
s'agissant de la gestion des ressources naturelles. Cette coopération se veut d'abord
juridique pour créer un corpus commun reposant sur les mêmes notions de dommages
et de responsabilités. Il se veut ensuite financier pour poser le mécanisme de la
réparation du dommage écologique sur le calcul couts-avantages et donc à ce titre,
revoir le programme « Ecosystem-based Adaptation Flagship Programme » du PNUE,
aux zones où les écosystèmes sont les plus fragiles, comme la forêt amazonienne, ou
l'ensemble des forêts primaires ou encore les états émergents insulaires.
1092 Assises du Vivant, UNESCO, Paris, 9 et 10 février 2015, propositions de Humanité et Diversité, 11
pages, page 9
472
2. De nouvelles perspectives juridiques
Les répartitions sociaux-culturelles nouvelles portent d'abord sur une prise en compte
sociétale et juridique des enjeux des principes de sécurité juridique environnementale et
de continuité des milieux systémiques. Le principe de continuité des écosystèmes
repose sur la dynamique permanente et vitale des écosystèmes. La sécurité juridique
environnementale est fondée sur la dynamique permanente et vitale des êtres vivants,
et humains. Le Protocole de Nagoya du 29 octobre 2010 reconnaît un lien entre
« l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages
découlant de l’utilisation de ces ressources » mais pas directement le principe de
continuité. Il évoque « la nature spéciale de la diversité biologique agricole, ses traits
distinctifs et ses problèmes nécessitant des solutions particulières ».
L'Homme, être vivant de la Biodiversité, dans cette autre approche, devient l'acteur de
sa destinée. La reconnaissance du principe d''inter-action entre les enjeux liés aux
activités humaines et ceux liés à la fragilité des milieux dans lesquelles elles évoluent,
est alors un lien de causalité établi, entre le dommage subi et la responsabilité qui en
découle. Un lien intrinsèque est alors posé entre les deux notions, la première dépendant
de la seconde.
Elles portent aussi sur la transposition en droit interne du droit coutumier autochtone,
qui repose déjà sur le principe de continuité des écosystèmes. Il s'agit donc, au delà
d'une reconnaissance juridique de poser les bases d'un droit international de
l'environnement mêlant droit coutumier, droits romano-germanique et anglo-saxon,
avec de nouvelles positions sur les notions juridiques de patrimoine, de territoire,
propriété, dommage et responsabilité. En ce sens, cette autre approche entre dans le
champ d'application du Protocole de Nagoya du 29 octobre 2010, mais en intégrant
l'ensemble des ressources naturelles, pas simplement génétiques.
Ces nouvelles répartitions portent aussi sur les enjeux liés à la notion juridique et
sociale de génération future. Or, cette notion est apparue en 1946, à l'article 11 de la
constitution japonaise énonçant que « Le peuple n'est privé de l'exercice d'aucun des
droits fondamentaux de la personne humaine. Ces droits fondamentaux, qui lui sont
garantis par la présente Constitution, sont accordés au peuple de cette génération
comme à celui des générations à venir, au titre de droits éternels et inviolables 1093»
ainsi qu'à l'article 97 énonçant également que « Les droits fondamentaux de la personne
humaine, garantis par la présente Constitution au peuple du Japon, sont les fruits de la
lutte millénaire de l'homme pour sa libération ; ils ont survécu à de nombreuses et
épuisantes épreuves d'endurance, et sont conférés à la présente génération et à celles
473
qui la suivront, avec mission d'en garantir à jamais l'inviolabilité ».
Repris dans le rapport Brundland de 1987, la notion n'a pour autant pas été clairement
définie juridiquement en droit international comme transnational. Pour autant, si cette
notion repose sur l'avenir des êtres humains, peut-on alors rattacher juridiquement la
catégorie d'êtres humains, à celle d'espèce menacée?
Cette problématique entrerait alors dans le champ d'application d'un droit unifié du
Vivant, où droit de l'environnement et droits de l'Homme seraient intrinsèquement et
indissociablement liés.
474
§2 Une proposition prudente d'une autre répartition institutionnelle
Une proposition prudente est suggérée car elle repose sur une autre construction
institutionnelle.
Cette autre répartition institutionnelle repose ainsi sur la proposition d'une gestion
environnementale sécuritaire transversale et sur celle d'un cercle de gouvernance
environnemental.
475
A La proposition d'une gestion environnementale sécuritaire transversale
Mais il s'agit là d'un mode de gouvernance ascendant, du local vers le national puis vers
l'international. La mouvance se voudrait donc en verticalité inversée.
Le point de basculement est défini par les scientifiques comme « le seuil au delà duquel
une modification brutale de l'état écologique se produit 1094». Les changements
deviennent alors persistants et difficilement réversibles. Ce principe de réversibilité
entre dans le champ d'application du principe de continuité des écosystèmes. Or, la
dynamique des écosystèmes ne peut être anticipée avec précision quand le point de
basculement est atteint. Pour éviter ce point de basculement, il faut donc revoir le
positionnement juridique actuel et le faire évoluer vers la reconnaissance du principe de
la sécurité juridique environnementale globale.
Cette autre gestion, définie comme raisonnée, comme précédemment indiqué, s'axe
autour d'une stratégie environnementale véritablement responsable du risque, mieux
adaptée à la réalité des contraintes systémiques locales puis nationales, et basée sur le
principe d'une sécurité environnementale transversale, à savoir écosystémique,
sanitaire et territoriale.
1094 Extrait du 3ème rapport sur les perspectives de la CDB, 2010, 94 pages, page 72
476
l'environnement. Sa mise en place nécessite alors des outils très techniques comme la
médiation environnementale.
Mais ce fondement repose sur une condition technique: des pouvoirs publics aguerris
aux questions environnementales et aux enjeux environnementaux locaux et globaux.
Une refondation des pouvoirs au sens des volontés réelle des pouvoirs à concourir à
l'intérêt général de l'Humanité, est donc nécessaire à la bonne démarche de cette
nouvelle forme de gouvernance.
477
2. Un champ d'application orienté autour d'une gestion sécuritaire maximale
Le champ d'application de cette nouvelle gestion sécuritaire porte sur une autre vision
de l'exploration, l'exploitation des ressources naturelles.
Pour y parvenir, cette gestion technique sécuritaire doit se doubler alors d'une gestion
juridique sécuritaire, en renforçant les législations actuelles en amont, notamment celui
des études environnementales portant sur la fragilité des milieux endémiques, et le
renforcement des responsabilités des exploitants en aval. Il ne s'agit pas de conforter le
principe de compensation, en cas de dégradation mais au contraire de limiter ce
principe par une meilleure prise en cause du principe de prévention au travers d'une
gestion anticipative responsable des risques connus et inconnus.
Cette obligation sécuritaire serait un outil de gestion anticipative raisonnée parce que
responsable des risques. Le principe de prélèvement ponctuel à la source existerait déjà
dans le cadre de la gestion internationale des espèces faunistiques protégées, dans le
cadre des droits de chasse. Il serait alors proposé de l'élargir à l'ensemble des ressources
naturelles en le codifiant.
Cette gestion sécuritaire globale des milieux permet alors une approche inter-
générationnelle et concourt à une gestion raisonnée des ressources naturelles, au sens
d'équilibrée, proportionnée, adaptée et donc responsable. Elle peut s'appliquer à toutes
les ressources naturelles.
Si l'on prend l'exemple des sols arables et sous-sols, cette nouvelle gestion pourvoirait à
une sécurité alimentaire plus stable, et à un meilleur stockage du carbone dans les sols,
participant ainsi à la réduction des gaz à effet de serre. En agissant directement sur la
préservation et la qualité du humus, composant de sous-sol, les cultures seraient aussi
abondantes et respecteraient le cycle naturel des saisons et de régénérescence des sols.
Concernant les ressources naturelles faunistiques et floristiques marines, la gestion
sécuritaire halieutique reposerait alors sur un durcissement des règles de pêche, mais
également un renforcement des politiques de préservation des mangroves, des barrières
de corail et des écosystèmes marins côtiers pour permettre à ces derniers une plus
grande résilience face au phénomène d'acidité et à la montée des océans.
478
Cette gestion serait aussi bénéfique pour les ressources naturelles en eau douce car elle
permettrait aussi un meilleur contrôle de son utilisation et pourvoirait à sa préservation
pérenne.
Cette nouvelle approche renverse donc les modes de pensée actuels et renforce les
principe de pater familias, de dommage environnemental, de responsabilité personnelle
et collective. Elle propose aussi une véritable gouvernance sociétale entre les équipes
communales, les acteurs institutionnels comme l’État et ses administrations, et la
société civile, formés et informés aux risques pereins et continus des milieux
endémiques dans lesquels ils évoluent ensemble. Elle répond ainsi aux dispositions du
Protocole de Nagoya dans sa globalité.
Au delà du simple aspect environnemental, cette proposition sur le plan local et national
vient en complémentarité avec un autre mode de gouvernance, sphérique, dénommée
cercle de gouvernance environnemental mondial.
479
B. La proposition d'un cercle de gouvernance environnemental
Reprenant le mouvement circulaire des cycles de vie, cette proposition, déjà retenue au
VIème siècle par le juriste arabe Ibn Khaldun, qui parle de «cercle de gouvernance
perpétuel1095 », la proposition d'un cercle de gouvernance environnemental mondial
tourne autour d'une gouvernance circulaire tripartite, précédemment évoquée, et repose
sur un double conseil mondial au sein des Nations-Unies.
Les fondements d'une gestion circulaire sont déjà présents mais on ne les utilise pas
suffisamment. Au cœur de cette gestion, sont placées les ressources naturelles et plus
généralement la Biodiversité. Autour de ce noyau vital, tourne un mode de gouvernance
tripartite locale et nationale précédemment évoquée. Le mode de gouvernance mondiale
circulaire tourne autour de la première sphère de gouvernance précitée et passe elle-
même par trois points.
Elle commence sa boucle par le point « volonté », représentée par la société civile
internationale. Non pas celle d’après guerre, mais celle d'un troisième millénaire
multidimensionnelle parce que multiculturelle et raciale. L'internationalisation des
échanges a crée une mouvance mondiale inédite dans l'histoire de l'Humanité. La
société civile actuelle est donc issue de cette mouvance historique, avec ses déchirures
et ses cicatrices. La période d’après guerre a bouleversé les données géopolitiques
globales qui ont permis une mutation juridique transgénérationnelle. Une volonté
internationale au lendemain des crimes de guerre a contribué à l'émergence des Nations-
Unies et des instances judiciaires internationales.
Elle passe ensuite par le point « savoirs », représenté par le monde scientifique et
juridique mais également le monde autochtone. Comme précédemment indiqué, un
croisement entre savoirs traditionnels, codifiés oralement dans les droits coutumiers
locaux, et les savoir contemporains doit se mettre en place au nom de l'intérêt général
de l'Humanité. Il faut alors dépasser les clivages inter-communautaires pour tendre vers
une communauté ethno-juridico-scientifique nouvelle. Il englobe aussi le monde du
travail, dans sa vision internationale contemporaine, au vu des enjeux de la
mondialisation et ses revers.
Ce point « savoirs » permet alors une plus grande coopération, déjà existante en la
légitimant d'avantage, au nom du principe d'intérêt général de l'Humanité. Cette
démarche entrerait dans le champ d'application des passerelles et permettrait d'en
480
simplifier le fonctionnement.
Elle termine sa boucle par le point « pouvoirs » représenté par les États et leur
collectivités territoriales ou fédérales. L'idée précédemment évoquée de la création d'un
conseil des sages est proposée auprès des Nations-Unies, composé d'un panel entre
d'anciens professionnels internationaux scientifiques, juristes environnementalistes
issus de la société civile. Ce conseil serait le «gardien» de l'intérêt général de
l'Humanité, il serait le représentant mondial des conseils de sages locaux, régionaux,
nationaux. L’État dans sa forme régalienne, serait le représentant d'une démocratie
contemporaine revisitée, une gouvernance participative où la société civile s'exprimerait
autrement par le droit de participation et d'information.
Cette autre approche proposée peut, peut-être, permettre de dépasser les clivages et les
polémiques persistances sur les modes de gouvernance actuelles nationales. Car
l'exclusion actuelle des instances locales aux négociations environnementales
internationales, reposant sur le modèle onusien de la compétence exclusive des états,
accentue une nécessaire évolution de la décentralisation mondiale portant sur une plus
grande implication en amont des élus locaux dans les modalités d'élaboration des
politiques environnementale locales.
Cette démarche rentre alors dans une vision d'Humanité environnementale, au sens
d'une approche réflective de l'environnement et du droit qui s'y rattache. Elle rejoint les
dispositions des articles 21 et 28 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme.
Elle s'accompagne d'une démarche complémentaire visant à instaurer une gestion
sphérique mondiale puis nationale des ressources naturelles.
1096 Conférence des Parties à la CCNUCC, 18e session et Conférence des Parties, 8e session, COP18/
CMP8, Doha, Qatar, 26 Novembre au 8 Décembre 2012
481
2. Un champ de compétence reposant sur une gestion sphérique
Comme précédemment indiqué, un noyau vital représentant les ressources naturelles est
au centre d'une gestion environnementale circulaire, locale, nationale et mondiale, dont
chaque cercle de gouvernance passerait par trois points. Ce noyau central est donc le
cœur de chaque politique environnementale transnationale. Tel semblable au symbole
sphérique de la terre, il est alors le point de départ des politiques d'aménagement et du
développement économique raisonné de chaque territoire. Sa nature juridique repose
sur la qualification juridique de ressources naturelles fragiles et rares, du territoire
concerné ; sa fonction juridique sur un champ d'application endémique.
Ce mode de gestion proposé est donc à l'opposé des modes de gestions traditionnelles
actuels qui ne conservent que ce qui existe et ne préservent que ce qui est en danger.
Dans ce mode de gestion sphérique, le principe de dynamique des milieux endémiques
est pris en compte ainsi que le point de basculement des ressources. De ces principes
découle alors de nouvelles perspectives environnementales. Ne se posent plus alors les
problématiques relatives au devenir des ressources naturelles existantes et futures car
l'émergence de nouvelles ressources naturelles entrent directement dans le mode de
gestion sphérique.
482
Ce premier chapitre conclut sur le fait que les principes d’inter-générationnel et de
gestion transversale des ressources naturelles supposent qu'on s'accorde à s'attarder en
premier lieu, sur la volonté de reconnaître et de prendre en compte juridiquement les
changements liés à l'exploration et l'exploitation des ressources naturelles ; et en second
lieu, sur les diverses motivations individuelles et collectives visant à agir pour
augmenter la résilience des milieux endémiques et donc permettre une meilleure gestion
des ressources naturelles à la source.
483
484
CHAPITRE II.
LE CARACTERE PRUDENT DE RATTACHEMENT A UNE
GESTION TRANSVERSALE ENDEMIQUE
485
486
Le caractère prudent de rattachement à une gestion transversale endémique repose sur
la proposition pondérée d'entrevoir une autre forme de gouvernance environnementale
mondiale. Elle repose également sur le fait de replacer les êtres vivants dans leur
ensemble au centre des problématiques futures. Cette autre approche, transversale reste
précurseur sur le plan juridique, au sens où elle redéfinit le principe d’accès aux
ressources naturelles vitales, qu'elle reconnaît le patrimoine immatériel des territoires et
le droit coutumier autochtone. Enfin, elle met en avant des droits de l'Humanité au nom
d'une sécurité environnementale globale.
Cette autre approche dépasse ainsi le simple concept de résilience et pose alors les
jalons de nouvelles propositions visant à suggérer la naissance d'un nouvel organisme
mondial circulaire de régulation. Cette régulation serait fondée sur de nouveaux aspects
à travers notamment la reconnaissance des notions d'intérêt général et de res communes
de l'Humanité.
487
Section I. Le caractère prudent lié à la notion de préservation de l'Humanité
Comme précédemment indiqué, la proposition d'un conseil des sages, siégeant au local,
auprès de toutes les communes, au régional auprès de toutes les collectivités, au
national auprès du conseil des ministres et à l'international auprès des Nations-Unies,
peut répondre aux critères d'une autre forme de gouvernance, circulaire.
Cette autre approche repose alors sur l'application d'une gestion nouvelle rattachée à des
principes à portée universelle et orientée autour d'une refondation juridique et technique
488
§1. Une gestion rattachée à des principes à portée universelle
Pour faire avancer les acteurs institutionnels et non institutionnels vers une autre
approche de la gestion mondiale des ressources naturelles, il convient de proposer une
autre forme de gestion cohérente et sécurisante, répondant alors aux critères de
confiance précédemment énoncés, raisonnée parce que proportionnée, équilibrée et
adaptées aux contraintes endémiques, endogènes et exogènes des milieux.
Or les deux principes proposées ne sont pas au préalable des principes juridiques, car il
s'agit de suggérer la reconnaissance du principe d'exploration et d'exploitation des
ressources naturelles au nom d'un intérêt général de l'Humanité et celle du principe de
res communes de l'Humanité.
La réflexion d'une gestion double reposant sur l'intérêt général et les res communes de
l'Humanité est alors posée.
489
A. La réflexion d'une gestion reposant sur l'intérêt général de l'Humanité
Ce dernier propose des pistes pour tendre à une meilleure coopération inter-états et
intra-états ainsi qu'une reconnaissance du principe d'inter-dépendance des espèces et du
rôle central de la Biodiversité mondiale.
Il ne parle pas directement d'intérêt général de l'Humanité mais fait appel à l'intérêt de
« tous », synonyme.
Pour autant, il énonce des propositions techniques insuffisantes car il ne met pas en
avant la préservation des ressources naturelles et de la Biodiversité comme une priorité
internationale et nationale.
Or, si une régulation doit être menée, elle doit porter sur des remises en questions
juridiques sécuritaires. Cette régulation proposée, se fondant sur le principe d'intérêt
général de l'Humanité pourrait mettre en avant cette priorité et expliciter juridiquement
le contenu de ce principe pour le rendre effectif.
Une nature juridique fondée sur un droit humaniste environnemental et une fonction
juridique orientée sur ce dernier sont alors nécessaires.
490
1. Une nature juridique fondée sur un droit commun environnemental
Quand Mireille Delmas -Marty énonce que « L'humanité reste en grande partie à
inventer et le droit pourrait ouvrit la voie », elle précise que la notion juridique
d'humanité est au départ une notion éthique, rattachée au droit naturel mais elle présente
l'avantage de créer une «rupture juridique nouvelle en pouvant apprendre à penser le
multiple 1098».
Elle aurait ensuite, une portée internationale nouvelle sur les relations internationales
car il permettrait de mettre en avant les rapports coopératifs nouveaux entre les états. Il
répondrait alors à une nouvelle vision des relations internationales, reposant sur une
souveraineté environnementale des états.
Ce droit commun pourrait alors mettre en exergue une autre forme de gouvernance
mondiale, reposant sur une souveraineté « partagée », précédemment évoquée. Ce
partage ne porterait pas sur la remise en cause de la souveraineté permanente mais sur
une souveraineté partagée entre les États frontaliers des mêmes ressources.
«La légitimité du pouvoir repose sur la raison, les citoyens n'acceptent de se soumettre
aux décisions des gouvernants que parce qu'ils les jugent conformes à l'intérêt de tous
1098 DELMAS-MARTY Mireille, Vers un droit commun de l'humanité, éditions Gallimard, 2005, 90
pages
491
et de chacun1099 »
1099 WEBER Max, Le savant et le politique, éditions UGE, 1963, 180 pages, pages 102 et suivantes
492
2. Une fonction juridique orientée sur un devoir commun environnemental
Quand Mireille Delmas-Marty indique que « la loi ne doit plus être vue seulement
comme un moyen de pression mais l'heure est venue de dépasser l'opposition entre le
droit naturel et le droit positif », elle l'envisage s'agissant des droits communs de
l'Humanité en matière pénale.
Le contenu de ce devoir nouveau, plus humaniste s'orienterait autour d'un triple critère
éthique, juridique et technique.
Ce devoir commun reposerait d'abord sur une notion juridique communautaire de
l'appartenance à un territoire donné, mixant alors le droit positif international et le droit
naturel. Le principe d’intérêt général de l'Humanité mettrait en avant l'obligation de
moyens et de résultat pesant sur les États, précédemment évoqué, gestionnaires pater
familias d'un patrimoine naturel local et frontalier, rare et fragile.
Au delà d'un simple mandat politique, est alors posée dans cette perspective, la
proposition d'un contrat de mandat environnemental, fondé sur des obligations de
moyens et de résultat, et reposant sur la notion de « pater familias » déjà évoqué. Ce
nouveau contrat, qui sera étudié ultérieurement, renouerait avec l'esprit pionnier de la
Convention sur la Diversité Biologique en revisitant notamment « la conservation de la
biodiversité, l'utilisation durable de ses éléments et le partage juste et équitable des
avantages découlant de l'exploitation de ressources génétiques ».
493
La mise en œuvre d'une responsabilité civile, administrative et pénale, internationale
communautaire nouvelle, renforçant la responsabilité environnementale actuelle,
pèserait à la fois sur l'ensemble des États et collectivités territoriales porteurs des
politiques environnementales locales et sur les exploitants, antérieurement à la
survenance du dommage environnemental.
Ce devoir nouveau met l'ensemble des États politiquement sur un plan égalitaire,
pouvant s'apparenter aux dispositions de l'article 2 de la Déclaration universelle des
Droits de l'Homme qui énonce que «Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de
toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune,
notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou
de toute autre opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de
toute autre situation. 2. De plus, il ne sera fait aucune distinction fondée sur le statut
politique, juridique ou international du pays ou du territoire dont une personne est
ressortissante, que ce pays ou territoire soit indépendant, sous tutelle, non autonome ou
soumis à une limitation quelconque de souveraineté»
494
B. La réflexion d'une gestion reposant sur les res communes de l'Humanité
Une définition juridique réinventée et une portée juridique non exhaustive sont alors
posées.
495
Sur le plan de la codification, il s'agit ici de déterminer si on établit une nouvelle
qualification juridique dans la catégorie des res en reconnaissant un caractère universel,
fragile et rare à certaines ressources naturelles. Ou si l'on crée une catégorie juridique
nouvelle intitulée « ressources naturelles » en droit interne. Les deux possibilités restent
sur le plan juridique possibles pour l'ensemble des législations internes. La
problématique reposerait alors sur l'unité internationale de la décision.
Cette notion nouvelle proposée permettrait enfin un autre rapport aux ressources
naturelles mondiales, en permettant la mise en place d'une autre gestion, raisonnée
parce qu'équilibrée, transversale et respectueuse du principe de continuité des milieux
endémiques. Cette dernière ne serait plus sectorisée et reposerait sur un même objectif
international commun, de gérer autrement pour mieux vivre et transmettre aux
générations futures.
Ici, au travers de cette notion juridique nouvelle, repose alors une autre vision de
l'économie mondiale actuelle, où le caractère particulier des milieux endémiques et plus
largement des ressources naturelles mondiales est pris en compte et reste la priorité
première d'un mode de développement économique nouveau. En ce sens, la proposition
répondrait aux dispositions du Protocole de Nagoya du 29 octobre 2010
« Reconnaissant qu’une solution novatrice est nécessaire relativement au partage juste
et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques et des
connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques dans des situations
transfrontalières ou pour lesquelles il n’est pas possible d’accorder ou d’obtenir le
consentement préalable donné en connaissance de cause »
« Reconnaissant l’importance des ressources génétiques pour la sécurité alimentaire,
la santé publique, la conservation de la diversité biologique, et l’atténuation des
changements climatiques et l’adaptation à ceux-ci »
496
2. Une portée juridique non exhaustive
Cette reconnaissance peut en second lieu permettre de jeter les bases d'une pratique
environnementale mondiale. Il devient alors nécessaire de conférer à cette notion le
caractère imprescriptible, l'intérêt visant un pluralisme juridique environnemental
nouveau, une logique universelle du « we » au lieu du « I ».
Cette autre logique proposée ici passe inéluctablement par une étape essentielle
d'apprentissage au partage humble des savoirs. La portée de cette reconnaissance
permettrait ainsi de tendre vers un équilibre institutionnel mondial en privilégiant
l'harmonisation des règles à l'unification internationale.
En reposant sur la valorisation prudente des potentiels fournis par les écosystèmes, cette
nouvelle approche du Vivant peut permettre de mieux protéger le caractère dynamique
permanent des ressources naturelles et les milieux endémiques dans lesquels elles se
trouvent. En ce sens, cette nouvelle approche entre les dispositions du Protocole de
Nagoya du 29 octobre 2010.
497
§2. Une gestion orientée autour d'une refondation juridique et technique
S'agissant des fonctions supranationales, ces dernières reposent, pour reprendre le terme
de Mireille Delmas-Marty, sur une « refondation » du contrat de mandat
environnemental mondial et du rôle des acteurs territoriaux.
498
A. Les conditions de fond et de forme nécessaires
Elle renchérit en précisant «..Au vu des fragmentations induites par les différences entre
les niveaux d'organisations (national, régional et mondial), l'argument n'est guère
convaincant ».
Elle cite à ce titre Pascal Lamy qui énonçait que « l'absence de gouvernance globale
repose plus particulièrement sur l'absence de fonction gouvernementale qui
s'incarne 1101».
Pour établir cette cohérence, il faut refonder la légitimité actuelle donnée par les États
aux organisations internationales en contrat de mandat environnemental mondial, et
l'accompagner d'un nouveau rôle pour l'ensemble des acteurs territoriaux.
1100 DELMAS-MARTY Mireille, La refondation des pouvoirs, éditions seuil, 2007, 296 pages, page 22
1101 DELMAS-MARTY Mireille, LAMY Pascal et PELLET Alain, Les voies d'un ordre mondial, le
débat, éditions gallimard, 2006, 280 pages
499
1. Une refondation juridique du contrat de mandat environnemental
Le but et les principes originaires établis dans le chapitre I, article 1 de la Charte des
Nations-Unies du 26 juin 1945 demeurent «1.Maintenir la paix et la sécurité
internationales … ; 2. Développer entre les nations des relations amicales fondées sur
le respect du principe de l'égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-
mêmes, et prendre toutes autres mesures propres à consolider la paix du monde; 3.
Réaliser la coopération internationale en résolvant les problèmes internationaux
d'ordre économique, social, intellectuel ou humanitaire, en développant et en
encourageant le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous,
sans distinctions de race, de sexe, de langue ou de religion; 4.Être un centre où
s'harmonisent les efforts des nations vers ces fins communes ».
Pour « gouverner les violences1102 », quel qu’elles soient, il devient alors nécessaire de
moderniser les rapports entre les états et leur population. La légitimité passe alors par la
reconnaissance d'un contrat de mandat environnemental entre les instances politiques
d'un territoire et la population dans sa globalité, s'y rattachant.
Dépassant le clivage de « juste cause » ou « cause juste », les conflits liés aux
problématiques d'accessibilité aux ressources naturelles sont au cœur des intérêts
communs territoriaux à défendre pour établir une paix durable au sein même des
territoires, et en périphérie.
La légitimité telle que proposée dans ce cercle de gouvernance repose sur la notion de
1102 LE BRAS CHOPARD Armelle, Gouverner les violences, éditions l'Harmattan, 2015, 246 pages,
page 244
500
population globale, incluant les populations urbaines, rurales, comme autochtones.
Car certains auteurs comme Michel Callon, Pierre Lascoumes ou Yannick Barthe
s'accordent à penser que « La représentation n'est pas un pis-aller, un ersatz de
démocratie directe. Elle est la pierre angulaire de la démocratie, […]. Tous ceux qui
ont insisté sur le rôle constitutif de la coupure entre le représenté et son représentant
ont mille fois raison 1103 ».
1103 CALLON Michel, LASCOUMES Pierre et BARTHE Yannick, Agir dans un monde incertain, essai
sur la démocratie technique, éditions du Seuil, 2001, 358 pages, page 161
501
2. Une refondation juridique du rôle des acteurs
En devenant les gardiens d'une stabilité juridique interne environnementale par le biais
de ce contrat de mandat, les États deviennent des résistants contre la déshumanisation
et la précarité environnementale mondiale. Ils pourvoient à une meilleure stabilité
juridique internationale, au travers d'un mode opératoire de développement économique
basé sur une gestion raisonnée des ressources naturelles.
En étant détenteur du rôle de gestionnaire « pater familias », les États peuvent alors
assortir tous les contrats environnementaux nationaux, portant sur la gestion des
ressources naturelles locales, d'un moratoire environnemental reposant sur le principe
de la dynamique des milieux endémiques, la rareté et la fragilité de leur ressources
naturelles et ainsi permettre l'application d'une véritable politique d'anticipation des
risques pour les populations locales et périphériques. En ce sens, cette refondation entre
dans les dispositions des articles 11, 14, 19 et 20 du Protocole de Nagoya du 29 octobre
2010, portant sur la coopération transfrontalière, les conditions d'échange, les clauses et
codes de conduite.
1104 DELMAS-MARTY Mireille, Résister, responsabiliser, anticiper, éditions du Seuil, 2013, 195 pages
502
B. Le champ d'application nouveau
Ramenée au plan national, la régulation proposée porte sur une autre forme de
gouvernance environnementale.
Cette dernière porte à la fois sur une autre vision des fonctions politiques et techniques
nationales. Car en l'absence d'une gouvernance mondiale environnementale reconnue,
un partenariat mondial s'est crée entre les diverses institutions internationales.
Car le besoin d'une meilleure sécurité juridique sur environnementale est plus que
jamais omniprésent. A ce titre, il convient de renforcer le principe 7 de la Déclaration de
Rio énonçant les responsabilités communes mais différenciées: «Les États doivent
coopérer dans un esprit de partenariat mondial en vue de conserver, de protéger et de
rétablir la santé et l'intégrité de l'écosystème terrestre. Étant donné la diversité des
rôles joués dans la dégradation de l'environnement mondial, les États ont des
responsabilités communes mais différenciées. Les pays développés admettent la
responsabilité qui leur incombe dans l'effort international en faveur du développement
durable, compte tenu des pressions que leurs sociétés exercent sur l'environnement
mondial et les techniques et ressources financières dont ils disposent»
Aussi, cette régulation demande une autre vision de la gestion actuelle. Et ce champ
d'application nouveau passe notamment par la mise en œuvre d'une gestion
environnementale nouvelle des pouvoirs et technique.
503
1. Une gestion environnementale des pouvoirs nouvelle
Le lien entre l'identité culturelle et la gestion des ressources naturelles a été qualifié et
confirmé en 20121107. La notion de propriété « commune » des ressources naturelles a
été reconnue par la Cour qui a retenu le droit à ne pas être déplacé, le droit à un recours
effectif pour la protection de l'environnement, l'obligation de garantie d'assistance
humanitaire de l’État et le retour à la sécurité pour le droit à la liberté de circulation et
de résidence.
1105 CERAP, Le rôle du juge et de la société civile dans la gouvernance environnementale, colloque du
26 mars 2015
1106 CIDH, Comunidad Xakmok Kasek c. Paraguay, 24 de agosto 2010
1107 CIDH, Comunidad Kichwa Sarayaky c. Equador, 27 de junio 2012
1108 CIDH, Comunidad afrodescendientes desplazadas de la cuenca del río Cacarica c. Colombia, 20 de
noviembre 2013
1109 CIDH, Comunidad Kuna de Mandungandi y Embera de Bayano y sus miembros c. Panama, 14
octobre 2014
504
mettant ainsi en avant la responsabilité de l’État à son manquement d'obligation
d'assistance et de devoir de sécurité juridique1110.
Or ce mode de gestion et le mode de gouvernance qui s'y rattache, ne peut peut-être pas
s'exporter partout, comme en Europe et notamment en France. Car les perceptions
sociologiques et juridiques de l'environnement ne sont pas les mêmes pour les
populations andines et françaises.
La loi portant sur la transition énergétique pour la croissance verte 1111, adoptée par
l'Assemblée Nationale en première lecture le 14 octobre 2014, repose sur la rénovation
des bâtis, le développement des transports propres, la lutte contre les gaspillages et la
promotion de l'économie circulaire, le développement des énergies renouvelables, le
renforcement de la sûreté nucléaire et l’information des citoyens, la simplification et la
clarification des procédures, et le pouvoir d'agir ensemble pour les citoyens, entreprises,
territoires et à l’État, le financement de la transition énergétique
Ses objectifs originaires étaient de «définir des objectifs communs pour réussir la
transition énergétique, renforcer l’indépendance énergétique de la France et lutter
contre le changement climatique. Il faut réduire nos émissions de gaz à effet de serre de
40 % entre 1990 et 2030 et diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre entre
1990 et 2050 (facteur 4). La trajectoire sera précisée dans les budgets carbone;
réduire notre consommation énergétique finale de 50 % en 2050 par rapport à la
référence 2012 en visant un objectif intermédiaire de 20% en 2030; réduire notre
consommation énergétique primaire d’énergies fossiles de 30 % en 2030 par rapport à
la référence 2012; porter la part des énergies renouvelables à 23 % de la
consommation finale brute d’énergie en 2020 et à 32 % de la consommation finale
brute d’énergie en 2030; porter la part du nucléaire dans la production d’électricité à
50 % à l’horizon 2025; créer un objectif de performance énergétique de l’ensemble du
parc de logements à 2050; lutter contre la précarité énergétique; affirmer un droit à
l’accès de tous à l’énergie sans coût excessif au regard des ressources des ménages1112».
La loi prévoit ainsi soixante quatorze mesures pour faire de la France le pays de
«l’excellence environnementale ».
La feuille de route 2015, adoptée en Conseil des ministres le 4 février 2015, portait
notamment sur les transports et la mobilité, et les liens entre santé et environnement.
1110 IACHR, People of Quishque-Tapayrihua c. Pérou, rapport n°62/14 petition 1216-03 report on
admissibility OEA/Ser.L/V/II.151, document n°27, 24 July 2014
1111 Loi n°2015-992 du 17 aout 2015, JORF n°0189 du 18 aout 2015
1112 Voir le site http://www.gouvernement.fr/action/la-transition-energetique-pour-la-croissance-verte
consulté le 15 avril 2015
505
Or le Sénat a modifié, en première lecture, le 3 mars 2015, le projet de loi. Certains 1113 y
ont vu une « montée en puissance du nucléaire » : « Le texte signe le retour de l'atome,
principale entorse au projet de loi de la ministre de l'écologie, Ségolène Royal, et au
texte issu des travaux de l'Assemblée nationale. Celui-ci actait deux promesses de
François Hollande : réduire de 75 % à 50 %, d'ici à 2025, la part de l'électricité
d'origine nucléaire, et plafonner le parc électronucléaire à sa puissance actuelle de
63,2 gigawatts (GW)....L'objectif de 50 % de nucléaire dans le mix électrique a été
conservé par les sénateurs, mais l'échéance de 2025 n'y figure plus. Quant au
plafonnement de la puissance du parc, son principe est lui aussi maintenu, mais à un
niveau porté à 64,85 GW, afin de permettre la mise en service, prévue en 2017, du
réacteur pressurisé européen (EPR) de Flamanville (Manche), sans devoir fermer
aucun des 58 réacteurs actuels. Le Sénat prévoit donc, en réalité, une montée en
puissance du nucléaire. Et rien n'indique que la centrale alsacienne de Fessenheim, la
doyenne française, victime d'incidents à répétition, sera fermée fin 2016, comme
François Hollande s'y est engagé...[...]Le Sénat a également supprimé l'objectif d'une
diminution de la consommation énergétique totale de 20 % en 2030. Il maintient par
contre l'objectif d'une baisse des émissions de gaz à effet de serre de 40 % en 2030 et
leur division par quatre en 2050...»
Ainsi, les deux exemples démontrent que la gestion environnementale des pouvoirs
reste liée à l'importance accordée aux cultures territoriales et à la place des acteurs
1113 PARIS Gilles, Le Sénat adopte une loi de transition énergétique renucléarisée, Le Monde, 3 mars
2015,http://www.lemonde.fr/planete/article/2015/03/03/le-senat-adopte-une-loi-de-transition-
energetique-renuclearisee_4586720_3244.html,consulté le 15 mars 2015
1114 Voir le site http://www.senat.fr/espace_presse/actualites/201406/engager_la_france_dans_la_transi
tion_energetique.html consulté le 15 avril 2015
506
politiques et de la société civile. Concernant la France, si on s'en tient strictement aux
termes du Ministère de l'écologie et du Sénat, pour parvenir à «l'excellence
environnementale », ne sont retenues, pour l’État et ses collectivités territoriales,
acteurs politiques, que les expressions de «sobriété, d'efficacité, développement» sur les
plans communautaire et international. Les termes de « respect des milieux
endémiques », «responsabilités », « obligations de sécurité », « coopération »,
n'apparaissent que très discrètement corollairement aux notions d'action partagée avec
la société civile.
Est-ce à dire que la France entre dans la mutualisation des données pour créer une
gestion et un mode de gouvernance environnementale uniquement sobre et efficace?
Est-ce cette définition qu'on peut donner à « l'excellence environnementale » ? La
culture de l'anticipation par territoire est-elle incluse dans cette définition, notamment
sur les divergences autour de la question nucléaire?
Car pour parvenir à cette « excellence », les dispositions nouvelles visant la prise en
compte des nouveaux indicateurs de richesse dans la définition des politiques
publiques1115 repose sur un article unique énonçant que « Le Gouvernement remet
annuellement au Parlement, le premier mardi d'octobre, un rapport présentant
l'évolution, sur les années passées, de nouveaux indicateurs de richesse, tels que des
indicateurs d'inégalités, de qualité de vie et de développement durable, ainsi qu'une
évaluation qualitative ou quantitative de l'impact des principales réformes engagées
l'année précédente et l'année en cours et de celles envisagées pour l'année suivante,
notamment dans le cadre des lois de finances, au regard de ces indicateurs et de
l'évolution du produit intérieur brut. Ce rapport peut faire l'objet d'un débat devant le
Parlement.. ».
1115 Loi n°2015-411 du 13 avril 2015 relative à ,la prise en compte des nouveaux indicateurs de richesse
dans la définition des politiques publiques, JORF n°0087 du 14 avril 2015
1116 Cf note n°1113
507
2. Une gestion environnementale technique nouvelle
Afin de mieux maîtriser les jeux de pouvoirs, une gestion environnementale technique
nouvelle doit reposer sur un socle juridique double, prenant en compte l'éducation
politique et la formation technique. Cette gestion raisonnée des ressources naturelles
s'accompagne dans la pratique par la mise en place d'une coopération technique entre
les acteurs politiques et les agents techniques.
Cette coopération repose alors sur la mise en place d'une équipe formée à la
connaissance du territoire et des milieux endémiques et à la gestion anticipative des
risques.
Sur le plan juridique, la transition vers ce nouveau type de gestion technique pourrait
reposer sur une loi d'orientation et de programme. Cette loi serait adossée à la
constitution et reposerait sur les principes précédemment énoncés.
Le second article délimiterait le champ d'application des actions à mener au nom d'une
coopération transversale.
Le troisième article reposerait sur l'organisation interne de cette équipe soit directement
intégrée dans les conseils municipaux, soit indirectement par la création d'une
commission interne dans le conseil des sages précédemment proposé.
Le quatrième article porterait sur le calendaire des formations communes à tous les
membres actifs et aux actions à mener par des exercices pratiques sur le territoire.
Cette nouvelle forme de gestion environnementale technique permet d'une part une
coopération réelle et effective entre les agents techniques, acteurs politiques, dans les
actions à mener et les exercices pratiques sur le territoire à mener auprès de la
population civile.
D'autre part, elle apporte une cohérence durable dans les décisions municipales
environnementales, par une meilleure maîtrise de la technicité juridique, qu'il s'agisse
de politique d'aménagement de territoire ou de développement économique et
d'anticipation des risques.
Ainsi si l'on reprend les exemples antérieurs, notamment celui de la France, si l'on
souhaite parvenir à partir de 2016 à « l'excellence environnementale » pour les années à
venir, une culture environnementale globale anticipative des risques s'impose. Or, les
acteurs politiques s'interrogent sur l'absence d'une coopération territoriale actuel avec la
réforme territoriale amorcée depuis 2012 et les formations techniques à recevoir. La
métropole de Lyon, réunie le 25 février 2015, à l'occasion d'un colloque à l'attention des
508
élus1117, est partie en résistance pour proposer à ses élus d'inventer une politique
d'anticipation basée sur la résilience et le rapprochement des services techniques avec
les services de sécurité civile et les forces de l'ordre.
Cette suggestion de gestion environnementale technique peut s'adapter à tous les États,
décentralisés, déconcentrés ou fédérés. Et l'aide apportée aux États émergents
pourvoirait à la sécurité juridique environnementale mondiale.
1117 IRMA, Les élus face à la crise sur le territoire de la Métropole de Lyon, il faut développer une
culture de l’anticipation, 18 mars 2015, http://www.irma-grenoble.com/01actualite/ 01articles_
afficher. php?id_actualite=639 , consulté le 16 avril 2015
509
Section II. Le caractère prudent lié à la notion de préservation du Vivant
L’Humanité du XXIème siècle, redessinée par les guerres mondiales, tend vers une
humanité « arc-en-ciel » où la diversité humaine côtoie celles du monde animal et
végétal. Les études endémiques des milieux terrestres, comme des milieux lunaires et
spatio-temporels des cinquante dernières années ont démontré des possibilités de vivre
dans le futur, dans d'autres milieux endémiques.
Ainsi, l'origine des espèces vivantes est, selon la théorie darwiniste, un processus
génétique évolutionniste et circulaire, où les espèces obéissent à la sélection naturelle.
Une certitude scientifique demeure: quelque soit le milieu dans lequel un être vivant se
développe, ce dernier est lié dés sa naissance aux autres êtres vivants et ne peut se
développer seul.
Cette autre approche endémique doit donc être la base d'une notion de préservation de
toutes les espèces vivantes, et plus généralement du Vivant. Elle reposerait sur le
caractère fondamental, nécessaire, interdépendant et éphémère des ressources naturelles
et s'appuierait sur le renforcement d'un fond mondial de données et celui des
responsabilités juridiques actuelles.
510
§1. Une gestion prudente fondée sur une démarche juridique transversale
1118 PNUD, Rapport sur le développement humain 2014 Pérenniser le progrès humain : réduire les
vulnérabilités et renforcer la résilience 2014, http://hdr.undp.org/sites/default/files/hdr14-report-fr.pdf,
consulté le 30 mars 2015
511
A. La démarche d'une reconnaissance juridique du caractère fondamental et
nécessaire des espèces vivantes
Les ressources biologiques sont définies comme « les ressources génétiques, les
organismes ou éléments de ceux-ci, les populations ou tout autre élément biotique des
écosystèmes ayant une utilisation ou une valeur effective ou potentielle pour
l'humanité ». Le Protocole de Nagoya du 29 octobre 2010 parle de ressources
génétiques qu'il définit comme étant des « plantes, animaux, bactéries ou d'autres
organismes » mais il ne donne pas de précision complémentaire.
« L'approche écosystémique est une stratégie pour la gestion intégrée des terres, des
eaux et des ressources vivantes, qui favorise la conservation et l'utilisation durable
d'une manière équitable. L'application de l'approche écosystémique aidera à assurer
l'équilibre entre les trois objectifs de la Convention. Cette approche repose sur
l'application de méthodes scientifiques appropriées aux divers niveaux de
l'organisation biologique, qui incluent les processus, les fonctions et les interactions
essentiels entre les organismes et leur environnement. Elle reconnaît que les êtres
humains, avec leur diversité culturelle, font partie intégrante des écosystèmes...[..] 1119»
512
1. Une reconnaissance recherchée du caractère fondamental des espèces
Le principe reposant sur l'utilisation du vivant pour évaluer l'état global d'un
écosystème que les ingénieurs dénomment bioindication écologique ou biosurveillance
existe déjà notamment dans le domaine de la surveillance des milieux aquatiques
terrestres. La biosurveillance vient en complément d'une étude portant sur l'état
physico-chimique des milieux en question. Ensuite vient la phase de restauration des
milieux dégradés. Or l'obligation pesant sur les gestionnaires des milieux reste une
obligation de résultat non de moyens. La difficulté actuelle réside donc dans la mise en
responsabilité et la recherche de l'acteur du dommage car les outils d'analyse portant
notamment sur l'anlayse de la qualité des milieux restent insuffisants. Des tests
biologiques pouvant calculer la retombée chimique globale seraient élaborés.
Par ailleurs, cette reconnaissance peut permettre en second lieu une meilleure prise en
compte du principe de continuité des systèmes, à l'échelle non pas du temps
géomorphologique mais contemporain. Ainsi, le développement durable futur reposerait
sur cette notion de respect des rythmes de continuité des milieux, au nom du caractère
unique car fondamentalement régulateur des espèces endémiques. L'interaction entre les
actions menées par l'Homme et celles des autres espèces vivantes serait alors en
symbiose.
513
principe de dynamique, déséquilibré par le fait de l'Homme.
514
2. Une reconnaissance suggérée du caractère nécessaire des espèces
Car en découle une naturelle et durable sobriété environnementale pour le territoire, lui-
même perçu comme un hôte d'un écosystème nécessaire à l'espèce vivante humaine.
L'expansion harmonieuse de cette dernière passe ainsi par la reconnaissance juridique
de cette nécessaire et intrinsèque interaction endémique.
D'autre part, cette reconnaissance peut permettre d'infléchir pour une résilience globale
et un développement bio-économique nouveau, à la portée de tous les États, et de tendre
vers une nouvelle vision de la richesse intérieure brute. Car cette complémentarité
nécessaire permettrait alors de concevoir un capital vivant, dans sa globalité, dont la
nature juridique porterait sur la notion de patrimoine commun de l'Humanité.
Perçu comme un capital unique productif à long terme, le caractère nécessaire des
espèces endémiques contribuerait à la naissance d'un PIB environnemental participant
directement à l'épanouissement de l'espèce humaine, au travers de son développement
économique et ainsi concourir à augmenter le PIB traditionnel de chaque État. Cette
autre dynamique économique, proposée, peut permettre de recalculer la richesse
mondiale non pas sur un PIB mais sur les deux PIB proposés.
La perte de la Biodiversité mondiale n'est alors plus perçue, non au plan strictement
mondial, mais bel et bien au plan local, et plus précisément individuel car chaque
espèce vivante humaine, vivante sur un territoire donné, peut alors reconnaître cette
nécessaire interdépendance dans ses choix et modes de vie, et l'y assimiler, l'intégrer.
Cette connexion endémique partirait sur une nouvelle répartition juridique des
responsabilités, en mettant en avant la notion de patrimoine commun et serait circulaire,
et transversale, dans sa diffusion douce et transmissible aux générations futures.
515
développement durable, dans sa symbolique de renaissance, tel un phénix, en posant le
principe que tout espèce vivante est nécessaire à la vie d'une autre espèce vivante et
qu'elle détient la capacité de créer et se régénérer d'elle-même.
516
B. La démarche d'une reconnaissance juridique du caractère interdépendant et
éphémère des espèces vivantes
La recherche d'une meilleure gestion des ressources naturelles est devenue avec le
temps, comme pour les instances judiciaires, un « but légitime1120 », au nom d'un intérêt
général de l'Humanité.
Parce que la perte de la Biodiversité mettrait en danger la survie des hommes, cette
quête pour un droit à l'environnement au sens d'un droit à une qualité de vie, reconnue
depuis 2003 par la CEDH1121 se retrouverait alors face à une évidence endémique : les
espèces vivantes seraient interdépendantes et éphémères.
1120 MARGUENAUD Jean-Pierre, Inventaire raisonnée des arrêts de la Cour européenne des droits de
l'homme relatifs à l'environnement, Revue Européenne de Droit de l'Environnement, 1998, 1 page 13
1121 CEDH, 8 juillet 2003, Hatton and Others v. the United Kingdom, n°COU-157043
517
1. Une reconnaissance demandée du caractère inter dépendant des espèces
Les pressions anthropiques crées par le fait de l'Homme, dans le cadre de l'exploitation
des ressources naturelles, poussent alors au déséquilibre des milieux et la perte de la
biodiversité, mettant alors tous les hommes en situation de danger environnemental,
générateur d'effets en cascade ou par ricochet, que le monde scientifique dénomme
« l'effet domino », aussi dénommé « papillon ».
Tel une boucle, plus les pressions seraient fortes, plus les effets seraient décuplés et
diffus. Et les pressions exercés sur un territoire donné, se retrouveraient dans un autre
milieu.
Cette reconnaissance peut aussi permettre de concevoir l'espèce humaine, non comme
un parasite mais comme une espèce vivante interdépendante des autres. L'approche
capacitaire proposée permet alors une meilleure prise en compte de ce phénomène et
établirait une responsabilité individuelle et commune.
518
limiter juridiquement sa propre responsabilité.
Car en limitant les pressions anthropiques, elle agirait alors en « pater familias », pour
l'intérêt général de l'Humanité et œuvrerait à concilier développement économique et
devoir de mémoire collective pour les générations futures. Cette approche capacitaire
de résilience est alors un des moyens pour tendre vers un développement bio-
économique durable et établir un ordre du Vivant dans sa globalité.
1123 MATHEVET Raphaël, La solidarité écologique, ce lien qui nous oblige, éditions Actes sud, 2012
150 pages
519
2. Une reconnaissance proposée du caractère éphémère des espèces
Le caractère éphémère des espèces endémiques est lié au principe de dynamique des
milieux. Ce phénomène naturel survient à l'échelle du temps géomorphologique et est
en lien avec les changements bio-climatiques. Cette capacité de résilience est à la base
du cycle du Vivant, qui croît et décroît dans une impermanence pérenne.
Si Daisaku Ikeda1124 indique que «... la terre est un super-organisme et le cosmos, avec
ses mouvements rythmiques incessants est l’organisme suprême, qui donne vie à tout ce
qu’il renferme grâce à ses fusions harmonieuses infinies... », toute pression anthropique
du fait de l'Homme accélère ce phénomène et serait alors générateur de dommage
environnemental irréversible aux autres espèces vivantes. Les conséquences portent
alors sur un déséquilibre global du principe de dynamique des milieux en déstabilisant
les caractères fondamentaux et nécessaires des espèces comme celui d'interdépendance.
Ce grand déséquilibre serait alors générateur d'insécurité juridique internationale en
court terme.
Pour que cet état de pleine conscience soit effectif, il est nécessaire de codifier ce
caractère éphémère des espèces endémiques en droit interne, pour réajuster les
politiques locales d'aménagement au vu des évolutions endémiques des territoires. Cette
reconnaissance implique alors une approche capacitaire globale reposant sur cette
mouvance circulaire pérenne, proposant à l'espèce humaine, une régénérescence
permanente de son mode de fonctionnement individuel et collectif, au même titre que
les autres espèces vivantes.
1124 IKEDA Daisaku, Pour l'épanouissement d'une culture de paix, éditions l’Harmattan 2014, 170
pages
520
Cela implique à la fois une connaissance des milieux territoriaux pour les acteurs
institutionnels et techniques et plus largement une capacité d'humilité sociétale
nouvelle.
521
§2 Une gestion prudente fondée sur un renforcement juridique transversal
Ce rééquilibrage juridique place alors les hommes sur le même axe que
l'environnement. Si le rapport d'équité environnementale reste fragile, tenter de tendre
vers lui énonce une évolution à la fois juridique et sociétale. Les stratégies nationales de
développement durables, illustrent ainsi cette évolution, en comportant des volets
climatiques, sanitaires, et revoient les ressources naturelles sous l'angle de raréfaction et
du risque.
SI l'on prend l'exemple français, a été adopté le 4 février 2015, en conseil des ministres
la Stratégie nationale de transition écologique vers un développement durable 2015-
2020. Ce nouveau plan quinquennal, complétant les stratégies environnementales
existantes, prend en compte cette approche capacitaire et reconnaît particulièrement le
caractère rare des ressources naturelles dans son volet consacré à ces dernières et
l'ensemble des actions à mener sont précisées dans le projet de loi portant sur la
transition énergétique ainsi que du projet de loi-cadre sur la Biodiversité.
Pour autant, ces stratégies doivent s'intégrer dans une approche environnementale
globale reposant sur la double nécessité de créer un fonds mondial de données du
Vivant, consacré comme res communes, et de renforcer juridiquement la protection
mondiale de ces derniers.
522
A. La réflexion autour d'un renforcement juridique des données
L'accessibilité aux ressources naturelles mondiales pose une dualité juridique car elle
porte à la fois sur les droits opposables des populations vivant à proximité des
ressources dites vitales, comme sur les droits d'étude et de recherche des gènes les
composant.
Le renforcement juridique des données fournies par un fond mondial de données, déjà
existant à travers les diverses plateformes territoriales, concourt ainsi à celui de la
sécurité juridique mondiale environnementale.
Ceci faisant référence aux principes de droit international public, issu de la règle de
droit romain « sic utere iure tuo ut alterum non laedas » signifiant « ne pas blesser
l'autre, de sorte que vous pouvez utiliser le droit de ».
Ce fond ne doit pas être perçu comme un simple catalogue institutionnel des données
endémiques internationales, mais comme un véritable référentiel socio-endémique
juridiquement protégé par un ensemble de clauses copyleft.
Il doit alors permettre de revoir les effets juridiques des brevets et de modifier les
dispositions de l'article 15 de la Convention sur la Diversité Biologique. En ce sens, ce
renforcement entrerait dans le cadre de l'article 14 du Protocole de Nagoya portant sur
un centre d'échange mais ce dernier ne porte que sur l’accès et le partage des avantages.
Des fondements juridiques basés sur le principe de sécurité et une extension juridique
fondée sur le caractère nécessaire sont alors demandés.
523
1. Des fondements juridiques basés sur le principe de sécurité
Les premiers, déjà évoqués, ont démontré cette nécessité. Les seconds sont liés à la
gestion des ressources naturelles génétiques et aux effets monopolistiques des brevets
d'innovation s'y rapportant. La création d'un fond mondial des données peut alors
permettre de mieux encadrer le droit des brevets, à l'origine d'inquiétudes scientifiques
fondées.
L'auteur indique ainsi que les brevets retenus pour l'utilisation du vivant, sont une idée
développée dés 1985 par l'Association Internationale de la Protection de la Propriété
Intellectuelle et retenue par l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle et
l'Organisation de Coopération et de Développement des États.
L'auteur rattache le droit des brevet international à une « référence essentielle pour la
protection juridique des inventions technologiques et contribuerait à produire de la
richesse....car il confère un mécanisme d'incitation à l'investissement et reste un outil
économique pour lutter contre les contrefaçons, et ouvre le champs de la
connaissance...[...]...».
Pierre-Benoît Joly1129, dénonce un danger réel lié aux « grands consortiums qui
bloquent les innovations ». Le titulaire d'un brevet sur le vivant détient « un certificat
d'obtention végétal (COV), ...[...] résultat combiné de l'action de la nature et de
l'homme ». A ce titre, il peut « interdire la commercialisation de la variété génétique
protégée alors que la ressource génétique contenue dans la variété, objet du brevet,
serait en libre accès », ce qui est à la base des dérives actuelles au travers de gestion
1126 GAUMONT-PRAT Hélène, La souplesse du brevet face aux effets du monopole, pages 12 à 23, in
La bioéquité, bataille autour du partage du vivant, collection frontières, éditions Autrement, 2009, 176
pages
1127 BELLIVIER Florence et NOIVILLE Christine, La bioéquité, bataille autour du partage du vivant,
collection frontières, éditions Autrement, 2009, 176 pages
1128 Déclaration de Marrakech du 15 avril 1994
1129 JOLY Pierre-Benoit, L'accés à l'âge du capitalisme informationnel, pages 24 à 37, in La bioéquité,
bataille autour du partage du vivant, collection frontières, éditions Autrement, 2009, 176 pages
524
déraisonnée des ressources naturelles génétiques.
L'auteur préconise donc de considérer les ressources naturelles génétiques comme des
res communes pour « limiter les tensions liées à l'application des brevets ». Il précise
que la notion de res communes ne remet pas en cause « les droits de propriété mas
serait une limite institutionnelle construite sur un intérêt commun mondial ».
A ce titre, il suggère la présence d'une veille permanente sur les brevets délivrés car
selon lui, « le vivant est un laboratoire de biens communs » et « la gouvernance des
biens communs se transforme ...elle n'est plus seulement le fait d'individus, isolés et
visionnaires ou de communautés d'individus unis par des échanges de savoirs et des
liens de réciprocité, mais elle implique aussi... les grandes agences publiques de
recherche, des fondations...et des états... ».
1130 CASSIER Maurice, Petite histoire du domaine public dans la recherche en science de la vie, pages
42 à 53, in La bioéquité, bataille autour du partage du vivant, collection frontières, éditions
Autrement, 2009, 176 pages
1131 Cf Partie II, titre I, chapitre I, section II §1 et 2
525
2. Une extension juridique fondée sur le caractère nécessaire
Cette dernière peut s'orienter alors vers un nouveau contrat de brevet, reposant sur une
autre définition juridique des ressources naturelles mondiales, et porterait en pratique
sur une nouvelle licence assortie de clauses nouvelles.
Aux côtés de cette licence d'office, assortie de cette clause copyleft, serait aussi proposé
un véritable contrat de bio-prospection. Le copyleft ou dans sa traduction littérale,
gauche d'auteur, permettrait de rendre toute étude en libre accès, sous forme d'un
logiciel libre et d'en exiger les mêmes critères pour les versions modifiées ou
étendues1133.
Ainsi ce nouveau type de contrat de brevet, pourrait générer alors, selon les termes de
Todd-L Capson-et Marianne Guérin McManus1134, une « bio-équité non marchande ».
Ces deux auteurs suggèrent alors de redéfinir le principe du partage et des avantages qui
en découlent, tel que défini dans la Convention sur la Diversité Biologique, notamment
au vu du pillage génétique actuel dans les états-sources. Ils reconnaissent en tant que
scientifiques que « la bio-prospection est nécessaire à l'évolution médicale mais doit
être repensée avec les états-sources ».
Alors, cette bio équité redessine, comme précédemment évoqué1135, « les frontières de
1132 AIGRAIN Philippe, Innovation partagée et biens communs en biologie, pages 55 à 67, in La
bioéquité, bataille autour du partage du vivant, collection frontières, éditions Autrement, 2009, 176
pages
1133 http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#WhatIsCopyleft
1134 CAPSON Todd-L, GUERIN MCMANUS Marianne, Les contrats de bioprospection, pour une
bioéquité non marchande, pages 93 à 113, in La bioéquité, bataille autour du partage du vivant,
collection Frontières, éditions autrement, 2009, 176 pages
1135 Cf Partie I, titre I, chapitre I, section I §2, A, 1 et Partie II, titre I, chapitre II, section II, §1
526
la propriété » selon Benjamin Coriat1136. L'auteur s'interroge notamment sur la question
de savoir «comment concilier l'exclusivité des droits conférés à l'inventeur et à la
nature nécessairement coopérative de l'entreprise qui conduit à l'innovation ».
Car le problème, selon lui, porte alors sur le principe du « partage avant la bio
prospection et sa définition»,et plus précisément sur « la notion d'exclusivité des droits
et des avantages conférés par l'invention ».
L'auteur ne parle pas d'intérêt général comme son confrère Maurice Cassier, mais
suggère de repenser juridiquement les res communes, de la rattacher aux ressources
naturelles génétiques, et de revoir le champ d'application des brevets en limitant les
droits d'exclusivité s'y rattachant.
1136 CORIAT Benjamin, Quand la bioéquité redessine les frontière de la propriété , page 155 à 159, in
La bioéquité, bataille autour du partage du vivant, collection Frontières, éditions Autrement, 2009,
176 pages
527
B. La réflexion autour de l'extension juridique des moyens de protection
L'extension juridique des moyens de protections reposent alors sur l'élargissement des
principes de précaution environnemental et de responsabilité environnementale. Cet
élargissement repositionne alors le rôle du juge international et interne au cœur de cette
mouvance.
528
1. Une extension du principe de précaution environnementale
Mais surtout, cela permet une meilleure reconnaissance juridique des politiques
d'anticipation des risques dans le domaine des activités dangereuses en établissant la
notion de priorité environnementale, devoir primordial de sécurité et de prévention
efficace et coordonné, face aux droits à la vie. Le droit à la vie peut s'appliquer à l'ordre
du Vivant, dans sa globalité, non purement sur l'espèce humaine.
Ainsi, sur le plan européen, cela répond aux dispositions de l'article 8 de la CEDH et
sur le plan mondial, à celles du chapitre I, article 1 de la Charte des Nations-Unies du
26 juin 1945, énonçant les notions de maintien de la paix et de sécurité internationale, la
coopération internationale, le respect des droits de l'Homme, l'harmonisation des
nations vers ces fins communes.
Toute la subtilité judiciaire repose alors sur le nouveau rôle du juge, saisi de
l'appréciation à donner aux mesures d'ingérence éco-juridiques, équitables, prises au
nom de cette gestion environnementale sécuritaire. La recherche de ce « juste
équilibre » reste du ressort du juge international et interne, chargé de l'apprécier. Cela
peut porter à titre d'exemple, sur les mesures visant la sécurité des hommes, le droit à
une information claire et exhaustive1140, vérifiable1141, pertinente et appropriée1142, et sur
la protection transversale de l'environnement1143. L'évolution dynamique de la
jurisprudence environnementale internationale actuelle démontre une prise de
conscience judiciaire environnementale et rend alors ce renforcement souhaité possible.
529
2. Une extension du principe de responsabilité environnementale
Enfin, peut être envisagé grâce à ce principe élargi, la création d'un nouveau type
d'infraction environnementale internationale, autour de la notion d'usage abusif d'un res
communes de l'Humanité. Cette nouvelle infraction pénale met en exergue
transversalement le principe de mise en danger de l'Humanité et peut alors donner une
dimension internationale environnementale à la notion de crime contre l'Humanité,
retenue par Michel Prieur. Car la notion d'Humanité n'est plus simplement rattachée à
l'espèce humaine, mais à l'ensemble de toutes les espèces vivantes.
530
Ce second chapitre démontre que la prudence juridique liée à une gestion transversale
endémique des ressources naturelles peut permettre de poser de nouvelles notions
juridiques que sont l'intérêt général de l'Humanité, le contrat de mandat
environnemental et de rattacher les ressources naturelles mondiales à celle de res
communes de l'Humanité.
Ces propositions infléchissent humblement de tendre vers une autre vision des
territoires au sens endémique. Les suggestions relative à une nouvelle organisation
mondiale circulaire de régulation et la reconnaissance d'un nouvel ordre mondial du
Vivant reposent sur la recherche d'une meilleur équilibre sociétal.
531
En conclusion de ce titre II, La volonté internationale affichée depuis les incidents de
Fukushima en 2011, permet de penser qu'une profonde mutation s'opère au plan
international sur les objectifs environnementaux de ce nouveau siècle. Proposer
d'instaurer une autre approche de la gestion des ressources naturelles mondiales, inter-
générationnelle, raisonnée basée sur le principe de pater familias peut permettre de
tendre vers un juste équilibre entre impératifs sociaux-économiques et enjeux
endémiques.
Cette triple volonté internationale, juridique, politique et technique peut alors permettre
de dessiner pour les générations futures un autre avenir répondant à ce fragile équilibre
planétaire de tous les enjeux. Elle peut s'apparenter à un devoir de résistance
environnementale inédit.
Le droit international et ses acteurs ne peut à lui seul établir cet équilibre, il ne peut y
parvenir qu'avec le concours d'une société civile inter-générationnelle et d'acteurs
institutionnels dotés d'une conscience environnementale.
532
533
534
CONCLUSION GENERALE
535
536
Alexandre-Charles Kiss indiquait qu'un défi était posé sur le fait de savoir si le droit
international assure ou pas réellement la protection de l'environnement et des ressources
naturelles1145.
Pour autant, ce mélange novateur et quelque peu audacieux peut être comparé à un
fertilisant du droit international de l'environnement, au sens où il a permis un regard
croisé commun des juristes et des scientifiques sur une même identification des enjeux
et des risques s'y rattachant.
Il ne s'agissait pas de créer une sorte de nouveau Codex environnemental mais plutôt de
porter une autre appréciation de la situation environnementale mondiale, sous l'angle
juridique de la gestion des ressources naturelles mondiales.
537
L'absence ou l'insuffisance d'équité environnementale a permis de poser la question de
savoir si la société civile mondiale serait prête à basculer vers une autre approche
juridique de la gestion des ressources naturelles mondiales, en revoyant les rôles et le
champ de responsabilités de chacun.
L'objet et la nature de nouveaux droits ont donc été proposé aux vu d'une approche
transversale englobant les aspects scientifiques et sociaux-économiques. La prise en
compte de l'évolution de la réglementation internationale a ainsi permis d'analyser les
nouvelles typologies de risques environnementaux sous l'angle de la sécurité juridique
mondiale, qui reste dans la pratique juridique actuelle, éparse et disparate, d'un territoire
à un autre.
Cette gestion raisonnée a été définie comme étant «une gestion visant à équilibrer
durablement la pérennisation des ressources naturelles par une volonté commune et
solidaire de leur utilisation équitable véritable». Son champ d'application reposerait sur
les notions juridiques de pater familias, et de mandat, en posant un cadre réglementaire
nouveau basé sur le prélèvement « utile, indispensable et nécessaire » des ressources
naturelles, au sein d'un territoire environnemental.
Cet enjeu reste pour certains «vital1149 » et commence à être juridiquement reconnu en
droit interne par certains pays comme la France1150.
1149 Cf note n° 46
1150 Cf note n°47
538
nouveaux modes de résilience des états et de la société internationale.
Et ce nouveau mode de gestion proposée pourrait alors répondre à l'urgence énoncée
dans le rapport 2014 du Programme des Nations-Unies pour le Développement,
« Pérenniser le progrès humain : réduire les vulnérabilités et renforcer la résilience »,
lancé le 24 juillet 2014 au Japon1151, et serait alors un outil efficace de mise en œuvre
pratique du droit international de l'environnement.
Si la survie de l'espèce humaine est par sa nature, intrinsèquement liée à celle de toutes
les autres espèces vivantes, détruire la Biodiversité mondiale pourrait anéantir à moyen
terme l'espèce humaine. L'inverse, pour les biologistes, ne serait pas établie, la
Biodiversité pouvant survivre sans la présence humaine. L'état de dépendance
environnementale pour l'Homme est ainsi établi sur le plan scientifique mais pas encore
sur le plan juridique.
Le nouveau défi du XXIème siècle reste donc celui de tendre vers une sécurité juridique
environnementale mondiale durable. Cette dernière ne peut passer que par la
reconnaissance juridique de nouveaux concepts comme notamment le principe d'inter-
dépendance entre toutes les espèces vivantes.
Cette nouvelle approche juridique sécuritaire pourra alors permettre un juste équilibre
entre les défis économiques souhaités et la réalité endémique mondiale.
Or, la pratique démontre les difficultés juridiques de mise en œuvre en droit interne du
droit international de l'environnement. Ces difficultés demeurent dans la mise en
pratique des instruments mis à la disposition des États.
Une culture environnementale globale du risque ne peut exister car chaque territoire
environnemental est différent et doit avoir sa propre culture des risques présents sur son
territoire.
La gestion anticipative des risques en droit interne doit donc être renforcée au titre
539
d'action juridique préventive, garante d'une meilleure et pérenne sécurité juridique.
Il est donc nécessaire de pouvoir distinguer en droit interne comme en droit
international les divers modes de gestion préventive des risques environnementaux et
les voies de résolution amiable ou pas des litiges environnementaux qui peuvent en
découler.
Car cette nouvelle approche repose notamment sur une notion de territoire
environnemental, plus large que celle de souverainement territoriale adoptée par la
Convention internationale de Rio et la Convention sur la Diversité Biologique. Cette
spécificité demeure ainsi liée à l'objet même du droit de l'environnement.
1152 PRIEUR Michel, La mise en oeuvre nationale du droit international de l'environnement dans les
pays francophones, éditions PULIM, 2003, 579 pages
1153 Cf note n°12
1154 5ème rapport du GIEC, 1er volume, Changement climatique 2013 : les éléments scientifiques, 27
septembre 2013; 2ème volume Changements climatiques 2014 : impacts, adaptation et vulnérabilité,
31 mars 2014, 3ème volume, changement climatique 2014: l'atténuation du changement climatique,
14 avril 2014
540
développement:
«Ce Groupe, coordonné par le Département des affaires économiques et sociales du
Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies, a été créé en réponse au vœu de
l’Assemblée générale que soient effectuées des évaluations périodiques des progrès
vers la réalisation de ces objectifs.
Aussi, l'ensemble des propositions suggérées dans cette thèse entre dans le champ
d'application du présent rapport et peut contribuer modestement à cette démarche de
résilience suggérée par ce dernier. La résilience proposée, qui passe par une résistance
environnementale nouvelle, peut se réaliser au travers du cercle de gouvernance
suggéré et la mise en place du mode de gestion raisonnée proposé tout au long de cette
thèse.
L’après 2015 étant marqué par des négociations du PNUD pour réajuster les objectifs
du Millénaire en matière de développement durable, l'objectif principal est de participer
à la pérennité des acquis découlant des premières politiques de gestion anticipative des
risques afin de les renforcer. Car l'état capacitaire des États et plus largement de la
société internationale face aux risques environnementaux reste étroitement lié au
renforcement des gestions anticipatives des risques qui s'y rattachent.
1155 Extrait du rapport 2014 ONU, objectifs du Millénaire pour l'environnement, 59 pages, pages 4 et 5
1156 Cf notes 18 et 1139
541
d’un premier accord international visant à stabiliser la température planétaire au
dessous de 2 degrés Celsius (2°C).
La France a joué à ce titre le rôle de « facilitateur auprès de toutes les parties prenantes
de la négociation, pour rapprocher les points de vue et permettre l’adoption d’un
accord par consensus1157 », entrant en vigueur à compter du 1er janvier 2020.
Le second est d'ordre juridique car elle pouvait correspondre à une approche juridique
transversale des risques environnementaux par les quatre ministères des risques de
vulnérabilité environnementale et leurs conséquences.
Aucun pôle n'a été consacré à la société civile, aux populations autochtones, et la
dichotomie diplomatique n'a pas employé les termes de gestion et de gouvernance
environnementale.
La seconde est financière car cette conférence a fait l'objet d'une loi de finances, aux
fins de recentrer l'ensemble es dépenses occasionnés. Or, cette conférence visait
principalement la maîtrise es GES et par voie de conséquence une sobriété énergétique
mondiale ? On peut se demander si il a été réfléchi l'idée d'une sobriété financière pour
les contribuables, afin de permettre à la France, organisateur de cet événement, de
pouvoir atteindre « l'excellence environnementale », souhaité par le Président de la
République Français.
La dernière est juridique car force est de constater que l'accord du 12 décembre 2015,
constitué de vingt-neuf articles, n'a pas établi le principe d'un comité de contrôle du
542
respect des dispositions ou de mécanismes de sanctions pécuniaires ou juridiques, à la
différence du Protocole de Kyoto.
Il convient simplement de rappeler que ce dernier n'a été ratifié par des états pourtant
fervents défenseurs de l'environnement comme les États-Unis et le Canada, seulement
en 2011 pour échapper à des sanctions.
Pour autant, l'accord du 12 décembre 2015 revêt la forme d'un protocole additionnel à
la Convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques. Cet accord est
donc juridiquement un traité international. Laurent Neyret, professeur de droit à
l'Université de Versailles, précise «qu'on est bien dans du “droit dur”, des actes
obligatoires, et non pas du “droit mou”, comme les résolutions ou les déclarations».
Il reste donc exécutoire de bonne foi, au titre de la Convention de Vienne sur le droit
des traités de 1969. Mais son entrée en vigueur reste soumise à sa ratification à partir du
22 avril 2016 par un minima de cinquante cinq états représentant « au moins 55 % des
émissions mondiales».
La ratification de ce dernier par la France devra au préalable passée par une loi adoptée
par le Parlement en droit interne et par une décision de l’Union européenne en droit
européen. La ratification par les États-Unis, au vu de la situation actuelle du Congrès
américain, ne pourra passée que par un décret présidentiel dénommé «Executive
agreement».
Enfin, il est précisé par le juriste français que l'accord de Paris comporte des obligations
juridiques de résultats, qui sont décrites dans le texte sous la mention « shall » qui
signifie «doit », et de moyens, retranscrites sous la mention « should » signifiant
«devrait».
Même si tous s'accordent enfin à penser que la protection internationale des ressources
naturelles mondiales reste un défi en droit international de l'environnement, nécessitant
une vision plus globale, transversale, un long chemin reste encore à parcourir car l'enjeu
reste essentiel.
543
entre États souverains. C'est donc de l'impulsion des acteurs gouvernementaux et
intergouvernementaux, sujet de droit international disposant donc de droits et
d'obligations, que dépendent les négociations environnementales ».
Ainsi, si l'on veut s'enquérir d'une approche transversale de la gestion des ressources
naturelles, il est nécessaire de renforcer les instruments de droit international de
l'environnement en droit interne, en simplifiant notamment leur dispositifs applicables
afin de permettre d'établir une véritable gouvernance environnementale mondiale,
participative et itérative.
Huit ans après, l'on peut donc conclure humblement en énonçant que l'un des grands
défis du droit international de l'environnement reste d'établir un nouveau mode de
gouvernance, à savoir celui d'une gouvernance environnementale, génératrice de droit.
Maurice Kamto, professeur agrégé de droit public à l'université de Yaoundé 1160, ne
parlait pas de gouvernance environnementale mais de démocratie participative dédiée à
l'environnement et que cette dernière était primordiale car « productrice de droit ».
Selon lui, «le droit de l'environnement en particulier y est à la fois ancien et jeune.
Ancien dans la mesure où il est présent déjà dans les sociétés traditionnelles pré-
coloniales, puis à l'époque coloniale. Jeune dans la mesure où il n'a connu vraiment
son essor qu'après les indépendances africaines des années soixante, l'interpellation de
la Conférence de Stockholm de 1972, et surtout la prise de conscience profonde et
généralisée suscitée par la Conférence des Nations unies pour l'Environnement et le
développement (CNUED - Sommet de Rio) de 1992[...] ».
Le projet de rapport portant sur les enjeux stratégiques des terres rares et des matières
premières stratégiques de Mme Bataille et Mr Hetzel qui a été adopté par L'Office
parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPESCT) le 18
mai 20161161, reprend cette nécessité d'avoir une autre approche par une stratégie du
risque «globale et internationale » portant sur les prélèvements effectués dans des
territoires qualifiés de « terres rares » afin d'endiguer les futures problématiques liées à
la pénurie.
Si Jean Moulin a dit que « L'idéal n'est pas une chose qui se consomme mais qui
s'entretient et se transmet comme un flambeau », le XXIème siècle est le siècle de
nouveaux défis, où la société civile internationale se doit au nom de la sécurité juridique
trouver un juste équilibre entre ses besoins et la réalité endémique.
Gageons que cette réflexion est en marche même si nous sommes conscient du chemin
restant à parcourir.
1160 KAMTO Maurice, Droit de l'environnement en Afrique, édition Edicef, collection universités
francophones, 1996, 415 pages, page 27
1161 BATAILLE Delphine et HETZEL Patrick, les enjeux stratégiques des terres rares et des matières
premières stratégiques, rapport du Sénat n° 617 du 19 mai 2016, 185 pages
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Cons. constit., Mme Monique P, déc. n° 2010-101 QPC du 11 février 2011
Cons. constit.,Société Schuepbach energy Llc, déc.n°2013-346 QPC du 11 octobre 2013
566
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CIDH, Comunidad yakye axa vs paraguay, 17 de junio de 2005
CIDH, Masacre del plan de sanchez vs guatemala, 29 de abril de 2004
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Jurisprudences autraliennes
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568
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569
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570
571
572
INDEX
573
574
A
Ambivalence juridique.............................24, 25, 29,30, 82, 114, 165, 213, 266, 271,
322, 378, 413, 422, 484, 489, 495
Approche juridique nouvelle....................18, 301, 311, 322, 343, 350, 355, 480
Approche transversale..............................18, 28, 31, 180, 195, 357, 387, 390, 479, 483,
485
B
Bien commun...........................................31, 69, 319, 468
C
Culture environnementale .......................221
Criminalité environnementale..................288
Cycles de vie............................................53, 202, 211,
D
Droit commun de l'Humanité...................22, 301
Dommages-intérêts..................................51, 287
E
Effet papillon............................................81, 107, 56,87, 88,113, 246, 461
Expertise environnementale..................... 369, 372, 373, 379
Exploitation optimale............................... 58, 76, 150, 153, 247
G
Générations futures..................................61, 262, 335, 373, 418, 434, 474
Gestion anticipative..................................31,108, 347, 348, 355, 356, 360, 369, 395,
401, 411, 427, 451, 472, 480,482,
Gestion/ gouvernance intégrée.................21, 210, 384, 401
Gestion équilibrée et durable...................20, 339
Gestion optimale......................................45, 54, 105, 106, 109, 227, 249, 251, 324,
348, 350, 351, 401
Gestion raisonnée.....................................16, 22, 38, 40, 61, 76, 85, 101, 137, 138, 270,
271, 299, 301, 303, 312, 313, 332, 344, 345, 349, 350, 382, 384, 388, 389, 390, 391,
393, 397, 399, 401, 421, 423, 432, 451, 458, 479
Gestion valorisante...................................16, 36, 340
Gouvernance environnementale...............20, 25, 26, 27, 35, 39, 42, 82, 159, 211, 214,
244, 258, 261, 280, 281, 282, 290, 292, 297, 300, 306, 315, 316, 319, 333, 337, 341,
344, 345, 351, 352, 361, 384, 387, 393, 404, 407, 410, 411, 422, 434, 437, 440, 446,
450, 460, 485
I
Intérêt général/commun de l'Humanité.... 34, 50, 60, 77, 81, 82, 83, 87, 88, 99, 105,
117, 120, 122, 123, 126, 128, 129, 130, 131, 145, 146, 224, 227, 298, 337, 393, 399,
410, 418, 421, 422, 425, 426, 432, 433, 434, 435, 436, 439, 441, 444, 447, 451, 461,
462, 463, 470, 473, 474, 479
575
Intra-générationnel et inter-générationnel 16, 22, 40, 43, 52, 56, 61, 77, 81, 87, 90, 100,
104, 108, 111, 123, 142, 148, 154, 162, 164, 165, 169, 173, 174, 187, 195, 197, 200,
202, 207, 216, 217, 219, 221, 227, 230, 244, 247, 249, 256, 258, 263, 267, 268, 272,
273, 275, 279, 280 , 281, 282, 284, 285, 287, 290, 293, 297, 301, 302, 305, 306, 312,
321, 322, 324, 328, 330, 331, 333, 335, 337, 341, 344, 345, 377, 386, 388, 389, 397,
399, 409, 410, 412, 423, 428, 430, 435, 437, 439, 440, 453, 467, 475, 477, 479, 480,
481
L
Lien indivisible........................................ 22, 27, 186
M
Management du risque............................. 368
Médiation environnementale.................... 375, 378, 395, 472
Mémorandum........................................... 16
Milieu endémique.................................... 218, 279, 323, 340, 350, 353, 376, 399, 424,
428, 438, 447, 465, 470, 481
P
Patrimoine commun de l'Humanité.......... 36, 54, 56, 57, 60, 61, 88, 111, 359, 408, 456,
458
Préjudice écologique................................237
R
Résilience.................................................18, 25, 428, 452, 458, 462, 463, 465, 479, 480,
482
Res nullius................................................35, 93, 115, 116, 131
Res communes.........................................52, 53, 55, 56, 58, 60, 61, 66, 68, 69, 74, 75,
78, 79, 86, 113, 116, 117, 123, 125, 130, 148, 149, 164, 256, 301, 326, 391, 411, 416,
430, 432, 437, 439, 447, 450, 454, 465, 468, 469, 470, 471, 472, 473, 474
Risque environnemental...........................44, 46
S
Sécurité juridique.....................................16, 28, 37, 50, 81, 155, 263, 266, 271, 277,
278, 280, 285, 286, 287, 289, 332, 341, 362, 366, 387, 390, 393, 394, 395, 418, 421,
422, 427, 446, 452, 458, 466, 469, 471, 479, 480
Solidarité environnementale....................19, 277, 296, 322, 323
Stratégie environnementale......................206, 270, 306, 325, 349, 366, 421
T
Territoire endémique/environnemental.... 24, 34, 292, 322
Tragédie des communs............................. 64, 66
V
Valorisation..............................................20, 29, 41
Vulnérabilité.............................................16,102,106, 108, 312, 319, 395, 405, 406,
480, 482
576
577
578
TABLE DES MATIERES
579
580
INTRODUCTION.................................................................................................... 21
581
§2 Une notion insuffisamment rattachée à l'exercice d'un droit à préservation 128
A. Le caractère complexe d'un droit à préserver.................................................. 129
1. Des fondements d'une nature juridique nouvelle........................................... 130
2. Une portée d'une fonction juridique novatrice.............................................. 132
B. L'identification juridique complexe des enjeux environnementaux futurs. . . 134
1. Une problématique liée à l'identification juridique des risques.................... 135
2. Une problématique liée à l'identification des sujets de droits victimes......... 138
TITRE II: L'APPROCHE LIMITÉE AU CADRE JURIDIQUE DES RESSOURCES NATURELLES ........ 199
582
2. Une volonté juridique territoriale d'institutions financières locales............. 223
§2 Un cadre juridique régional émergent ............................................................. 226
A. L'émergence progressive d'une régionalisation institutionnelle..................... 226
1. Des fondements juridiques novateurs............................................................ 226
2. Des champs d'application contemporains...................................................... 229
B. L'émergence volontaire d'une indépendance institutionnelle nouvelle.......... 232
1. Un principe d'indépendance institutionnelle.................................................. 232
2. Des modalités de création d'organismes non gouvernementaux................... 234
Section II La nécessaire requalification des fonctions et outils de gestion ......... 236
§1 Une requalification liée à la disparité juridique des fonctions........................ 237
A. La dualité établie de fonctions normatives environnementales...................... 238
1. Des fonctions normatives génératrices de sécurité juridique........................ 239
2. Des fonctions régulatrices créatrices de coopération juridique.................... 241
B. La dualité incertaine de fonctions réglementaires environnementales........... 243
1. Un principe de régulation environnementale dérogatoire............................. 243
2. Un champ d'application gradué..................................................................... 245
§2 Une requalification liée à l' insécurité juridique des outils ............................ 247
A. La profusion progressive des outils institutionnels.......................................... 248
1. Des outils institutionnels inadaptés à la pratique environnementale............ 249
2. Des outils institutionnels générateurs d'insécurité juridique......................... 251
B. La profusion rapide des outils techniques......................................................... 253
1. Une profusion désordonnée des outils de gestion.......................................... 253
2. Une profusion diffuse des outils administratifs et scientifiques..................... 255
583
1. Un caractère inadapté des politiques environnementales territoriales........ 298
2. Un caractère inadapté des usages des ressources naturelles locales........... 301
B. Les modes de gestion locales insuffisants.......................................................... 302
1. Une insuffisance juridique liée aux modes de gestion utilisés....................... 302
2. Une insuffisance juridique liée aux acteurs territoriaux............................... 305
TITRE I: L' APPROCHE NOUVELLE A UN AUTRE RATTACHEMENT DES RESSOURCES NATURELLES 315
Chapitre II. La portée nouvelle de rattachement des ressources naturelles ...... 379
Section I. Le temps des réformes juridiques.......................................................... 383
§1 Des conditions propices aux réformes juridiques ........................................... 384
A. L'émergence d'un contexte juridique international favorable....................... 385
1. Des conditions juridiques nouvelles liées au contexte géopolitique.............. 385
2. Des urgences juridiques liées à l'insécurité environnementale..................... 386
B. L'engagement environnemental des acteurs politiques mondiaux................ 388
584
1. Un engagement rattaché au mode de gestion des ressources naturelles....... 389
2. Un engagement rattaché au contexte juridique environnemental mondial. . . 391
§2 Des conditions propices à de nouveaux fondements et objectifs juridiques. 393
A. La dualité de fondements juridiques................................................................. 394
1. Des fondements éthiques contemporains ...................................................... 394
2. Des fondements techniques contemporains .................................................. 397
B. La dualité d'objectifs juridiques........................................................................ 399
1. Un objectif lié à limiter l'incertitude ............................................................. 399
2. Un objectif visant à éviter les dommages....................................................... 402
Section II. Le temps des engagements juridiques ................................................ 404
§1 Une reconnaissance juridique des nouveaux enjeux environnementaux....... 405
A. La transposition en droit interne des principes fondateurs............................ 406
1. Une adaptabilité juridique en cours.............................................................. 406
2. Une portée juridique nouvelle........................................................................ 409
B. La reconnaissance jurisprudentielle internationale......................................... 412
1. Une reconnaissance jurisprudentielle nouvelle............................................. 412
2. Une reconnaissance jurisprudentielle limitée................................................ 416
§2 Une reconnaissance juridique de nouveaux outils de gestion ....................... 418
A. Le renforcement juridique de l'expertise environnementale.......................... 419
1. Des conditions de recours à l'expertise environnementale renforcées........... 419
2. Une portée de la preuve de l'expertise environnementale élargie................. 422
B. Le renforcement juridique de la médiation et de la compensation
environnementales.................................................................................................... 425
1. Une reconnaissance juridique nouvelle......................................................... 425
2. Une portée juridique transversale................................................................. 427
TITRE II: L' APPROCHE PRUDENTE A UN AUTRE RATTACHEMENT DES RESSOURCES NATURELLES433
585
1. De nouveaux champs d'application juridiques.............................................. 471
2. De nouvelles perspectives juridiques............................................................. 473
§2 Une proposition prudente d'une autre répartition institutionnelle................ 475
A La proposition d'une gestion environnementale sécuritaire transversale...... 476
1. Un socle juridique basé sur le principe de sécurité environnementale......... 476
2. Un champs d'application orienté autour d'une gestion sécuritaire maximale478
B. La proposition d'un cercle de gouvernance environnementale mondial........ 480
1. Des fondements reposant sur une gestion circulaire...................................... 480
2. Un champ de compétence reposant sur une gestion sphérique....................... 482
Chapitre II. Le caractère prudent lié à une gestion transversale endémique..... 485
Section I. Le caractère prudent lié à la notion de préservation de l'Humanité.. 488
§1. Une gestion rattachée à des principes à portée universelle ........................... 489
A. La réflexion d'une gestion reposant sur l'intérêt général de l'Humanité ...... 490
1. Une nature juridique fondée sur un droit commun environnemental .......... 491
2. Une fonction juridique orientée sur un devoir commun environnemental.... 493
B. La réflexion d'une gestion reposant sur les biens communs de l'Humanité. . 495
1. Une définition juridique réinventée............................................................... 495
2. Une portée juridique non exhaustive............................................................. 497
§2. Une gestion orientée autour d'une refondation juridique et technique........ 498
A. Les conditions de fond et de forme nécessaires............................................... 499
1. Une refondation juridique du contrat de mandat environnemental .............. 500
2. Une refondation juridique du rôle des acteurs.............................................. 502
B. Le champ d'application nouveau...................................................................... 503
1. Une gestion environnementale des pouvoirs nouvelle................................... 504
2. Une gestion environnementale technique nouvelle........................................ 508
Section II. Le caractère prudent lié à la notion de préservation du Vivant........ 510
§1. Une gestion prudente fondée sur une démarche juridique endémique......... 511
A. La démarche d'une reconnaissance juridique du caractère fondamental
et nécessaire es espèces vivantes.............................................................................. 512
1. Une reconnaissance recherchée du caractère fondamental des espèces....... 513
2. Une reconnaissance suggérée du caractère nécessaire des espèces.............. 515
B. La démarche d'une reconnaissance juridique du caractère interdépendant et
éphémère des espèces vivantes................................................................................ 517
1. Une reconnaissance demandée du caractère inter dépendant des espèces. . 518
2. Une reconnaissance proposée du caractère éphémère des espèces............... 520
§2 Une gestion prudente fondée sur un renforcement juridique transversal..... 522
A. La réflexion autour d'un renforcement juridique mondial des données ....... 523
1. Des fondements juridiques basés sur le principe de sécurité ....................... 524
2. Une extension juridique fondée sur le caractère nécessaire.......................... 526
B. La réflexion autour de l'extension juridique des moyens de protection ........ 528
1. Une extension du principe de précaution environnemental........................... 529
2. Une extension du principe de responsabilité environnementale.................... 530
586
587
588
The conquest of space since the fifteenth century allowed the recognition of the
principle of sovereignty of States over their natural resources. The XXI century is
facing the depletion of global fossil natural resources and the pursuit of new. Tensions
around the world present management of natural resources posed the finding of a weak
legal regulation, and the idea of adopting other governance based on a new mode of
management. The other approach, intergenerational would be based on a reasoned
management in the sense of rational, balanced and adapted endemic systems. But this
shift puts the issue of the management of global natural resources at the heart of inter-
generational priorities. The XXI century then allows to reflect on the legal recognition
of the principle of interdependence between Man and Nature. But this legal thinking is
a contrario of public policies and traditional management methods. Europe has initiated
an effective response. France followed by the adoption of the charter of the
environment, the laws say Grenelle I and II, the Law on energy transition. Some
Andean States have included this principle in their constitutions. The contemporary
legal approach to the management of global natural resources and returns to other
modes of governance and to notions of endemic areas of common public interest.
Global environmental legal issues while based on new proactive security policies,
strengthening existing ties of cooperation to face the multiplicity of sources of authority
and power.
589
La conquête des espaces depuis le XVème siècle a permis la reconnaissance du principe
de souveraineté des États sur leurs ressources naturelles. Le XXI ème siècle doit faire face
à l'épuisement progressif des ressources naturelles fossiles mondiales et à la quête de
nouvelles. Les tensions autour de la gestion actuelle mondiale des ressources naturelles
ont posé le constat d'une régulation juridique fragile, et l'idée d'adopter d'autres
gouvernances reposant sur un mode de gestion nouveau. Cette autre approche, inter-
générationnelle serait basée sur une gestion raisonnée au sens de rationnelle, équilibrée
et adaptée des systèmes endémiques. Or, ce basculement place la question de la gestion
des ressources naturelles mondiales au cœur des priorités inter-générationnelles. Le
XXIème siècle permet alors de réfléchir à la reconnaissance juridique du principe
d'interdépendance entre l'Homme et la Nature. Mais cette réflexion juridique vient a
contrario des politiques publiques et modes de gestion traditionnels. L'Europe a amorcé
une réactivité effective. La France a suivi par l'adoption de la charte de
l’environnement, les lois dites Grenelle I et II, la loi sur la transition énergétique.
Certains États Andins ont inscrit ce principe dans leur constitution. L'approche juridique
contemporaine de la gestion des ressources naturelles mondiales renvoit ainsi à d'autres
modes de gouvernance et à des notions de territoires endémiques et d'intérêt général
commun. Les enjeux juridiques environnementaux mondiaux reposent alors sur de
nouvelles politiques sécuritaires anticipatives, renforçant les liens de coopération
existants face à la multiplicité des sources d’autorité et de pouvoir.
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