«Rock Machine» : la pochette surprise de La Femme

Album «Rock Machine» de La Femme. © DR

Groupe à géométrie variable, La Femme livre chaque nouvel album comme une pochette surprise dans laquelle les styles musicaux explosent les frontières. Rock Machine ne fait pas exception. Entretien avec Sachat Got, cofondateur du groupe avec Marlon Magnée.

RFI Musique : Cet album de La Femme s’intitule Rock Machine. Est-ce que vous définissez votre style comme rock ?
Sachat Got : Cela dépend face à qui ! À quelqu’un qui écoute du rap, nous lui dirons que nous faisons du rock. À un fan de rock, on dirait plutôt que nous jouons de la cold wave ou de la surf music. À mon banquier, je dirais que je fais du rock à l’ancienne. Mais au passage en douane, on préfère dire qu’on fait de la pop. Se présenter comme un groupe de rock —ou de reggae— c’est s’exposer à plus de fouilles ! (rires)

C’est une étiquette réductrice étant donné votre éclectisme musical. D’où vient-il ?
Adolescents, Marlon et moi empruntions plein de disques différents à la médiathèque. Puis, on a écouté plein de choses sur Youtube. Aujourd’hui, l’époque est à ce mélange. Au collège, on était assez fermés musicalement, on écoutait notamment du rap, avec Eminem, NTM ou IAM. Au lycée, nous rejetions tout ce qui était connu. On était sectaires en écoutant du rock des années 60, les compilations Born Bad Records, puis de la cold-wave. Mais aussi de la chanson française des sixties comme Dutronc, Barbara ou Gainsbourg. Avant les années 90, on avait accès à moins de musiques, les gens étaient soit punk, soit ska, soit rockabilly… À Biarritz, où nous avons grandi, le surf a lancé une mode autour du rock californien, avec No FX ou Bad Religion. On ne se fixe plus aucune limite. Tout ce qui nous plaît, on l’intègre à notre musique, même une fanfare espagnole !

Sur chaque album, vous conviez différentes chanteuses…
Oui, nous avons toujours fait comme ça. Chaque voix possède sa spécificité, son timbre, comme un instrument de musique. Ce sont des connaissances ou des personnes rencontrées par hasard, parfois des filles qui ne sont pas chanteuses. Ce qui est amusant, c’est que certains pensent que c’est la même chanteuse, sans doute parce que nous leur demandons de s’exprimer de façon assez proche, un peu comme les chanteuses françaises des années 60.

Pourquoi un album totalement en anglais ?
C’est un choix. Chaque album a un thème. Après l’espagnol [l’album Teatro Lucido, NDLR] ou tropical [Paris-HawaïNDLR]. Ici, nous revenons à la new-wave ou à la cold-wave que Marlon et moi écoutions quand nous avions 16 ans. À nos débuts, on était vraiment mauvais en anglais et en espagnol. On chantait en français alors que c’était plutôt la mode de le faire en anglais. On a peut-être ouvert une voie.

Dans quels pays la Femme séduit le plus ?
Après la France, je dirais l’Espagne et le Mexique où il existe une vraie scène rock avec beaucoup de public. Mais aussi l’Allemagne, la Grande-Bretagne ou les États-Unis. Parfois, on se voyait un peu comme des ambassadeurs, surtout lorsque l’on chantait en français. D’autant qu’on accentuait un peu notre côté frenchy avec des pulls à rayures et des bérets ! Beaucoup de professionnels de la musique nous avaient déconseillé de chanter en français pour espérer faire une carrière à l’étranger. Pourtant, nous avons tourné dans une trentaine de pays. Même en chantant en anglais, on ne nous a jamais pris pour un groupe anglo-saxon, contrairement à Phoenix.

Vous considérez-vous comme un groupe indé ?
Pas spécialement… Ce mot d’indépendant est un peu galvaudé, je ne sais plus trop ce que cela veut dire. Lorsque nous avons signé un accord de licence avec Universal Music, tous les indés nous ont un peu craché dessus. Mais tout le monde est dépendant d’un système. Nous dépendons des labels et des distributeurs de musique, des réseaux sociaux, des plateformes de streaming… Mais nous sommes indépendants artistiquement dans le sens où personne ne nous a rien imposé dans nos créations. Nous avons toujours publié la musique que l’on voulait faire.

Vous avez créé votre label, les Disques Pointus…
Oui, nous l’avons créé en 2013 avec Marlon. Cela nous permet de produire toute notre musique, ensuite, nous avons des partenaires pour distribuer notre musique. Nous y avons publié un autre groupe, Bon Voyage Organisation. Puis nous avons créé chacun nos labels, Marlon avec Music & Craft, moi avec Rideau Records. Avec l’idée de publier la musique d’autres artistes.

La Femme Rock Machine (Disques Pointus/Idol) 2024
Site officiel / Facebook / Instagram / YouTube